Les Figures et les Images dans l’Ancien Testament

Auteur : Par un groupe de pères et de mères de familles | Ouvrage : Histoire Sainte illustrée .

Temps de lec­ture : 10 minutes

V

C’est le soir. Jean vient de ren­trer du col­lège. Il a jeté sa ser­viette bour­rée de livres sur la table du jar­din et s’as­sied sur l’herbe, un peu fati­gué de cette cha­leur d’O­rient qui com­mence à deve­nir intense et à laquelle il n’est plus habi­tué. Pas un souffle d’air. Les fleurs sont pen­chées comme si, pour elles aus­si, le soleil d’é­té eût été trop lourd.

Par la fenêtre lar­ge­ment ouverte une voix dit :

— C’est toi, Jean ?

— Oui, maman.

— On étouffe ici ; je des­cends au jar­din. Attends-moi. Il fait tel­le­ment chaud, que ton père m’a deman­dé de retar­der le dîner.

Jean, secouant sa tor­peur, court au-devant de sa mère pour appor­ter le fau­teuil de paille et la boîte à ouvrage.

Elle sou­rit à ce grand gar­çon un peu amai­gri par le tra­vail du der­nier tri­mestre, mais dont le regard demeure si joyeux et si clair.

— Au fond, il ne fait pas plus frais ici qu’à la mai­son. J’i­ma­gine que chez Gene­viève nous aurions plus d’air.

— Essayons… J’emporte tout le bataclan.

Chez Gene­viève, mère et enfants se sont éga­le­ment ins­tal­lés à l’ombre sous un grand syco­more, avec l’illu­sion d’y trou­ver un peu de fraî­cheur. Jean et sa mère les y rejoignent, bien­tôt sui­vis de Colette, qui les cher­chait vai­ne­ment à la maison.

— Que lisez-vous de beau ? demande Jean aux deux petits, qui ont sur leurs genoux un immense livre d’i­mages grand ouvert.

— On regar­dait Caïn et Abel.

— Déci­dé­ment, vous êtes enra­gés d’. J’é­tais beau­coup moins exci­té à votre âge…

— De fait, dit Gene­viève, je ne sais pas com­ment Colette s’y est prise, mais ils rêvent de ce qu’elle leur raconte. Quelle sera ta pro­chaine leçon, made­moi­selle le professeur ?

— Nous appren­drons l’his­toire d’Abraham.

Maman, qui vient de comp­ter labo­rieu­se­ment une longue aiguille de mailles, lève les yeux vers Colette.

— As-tu pen­sé, avant, à expli­quer à tes élèves qu’au fur et à mesure qu’ils appren­dront l’, ils y trou­ve­ront des figures ?

Nicole lève le nez et cligne des yeux en marmottant :

— Des figures ?… Tout le monde a une figure.

— Évi­dem­ment, mais écoute un peu. As-tu vu des sta­tues à l’église ?

— Bien sûr : la Sainte Vierge, Saint Joseph, et je ne sais com­bien d’autres.

— Pour­quoi sont-elles là ?

— Pour repré­sen­ter les saints, comme ça on y pense…

— Tout juste. Eh bien ! dans l’His­toire Sainte, il y a eu non pas des sta­tues de pierre, mais des per­sonnes vivantes qui ont figu­ré, repré­sen­té d’a­vance Notre-Sei­gneur et la Sainte Vierge.

— Tu sais, Nicole, affirme Pierre d’un ton pro­tec­teur, c’est pas malin à com­prendre, M. le curé nous racon­tait ça quand nous avions cinq ans.

Maman semble dou­ter un peu de la science de son benjamin.

Adam et Ève - Punition et Promess

— Es-tu si sûr de n’a­voir rien oublié ? Te sou­viens-tu que non seule­ment les per­son­nages, mais les choses sont par­fois des figures, dans l’His­toire Sainte ? Les sacri­fices, par exemple, n’ont été offerts que pour nous annon­cer le seul sacri­fice qui compte devant Dieu : celui de Notre-Sei­gneur sur la Croix. L’his­toire d’I­saac, celle de Joseph, l’A­gneau pas­cal, la Pâque, la Manne, tout ce que vous allez apprendre, n’a d’autre but que de pré­pa­rer le peuple de Dieu à la venue de Notre-Sei­gneur, d’en annon­cer les cir­cons­tances, de faire com­prendre d’a­vance les détails de sa mis­sion par­mi nous. Voi­là les figures dont je veux parler.

Et puis, il y a aus­si les promesses.

— Ça, c’est facile, déclare Nicole. La pre­mière pro­messe, c’est celle du Bon Dieu à Adam et Ève. Elle n’é­tait pas drôle, car elle signi­fiait : « Je vous pro­mets que vous serez rude­ment punis. »

— Oui, mais l’an­nonce était double. Dieu disait aux hommes : « Vous subi­rez une puni­tion ter­rible, » mais aus­si : « Un Sau­veur vien­dra vous rache­ter et vous ouvrir le ciel. »

Bien d’autres pro­messes vont se succéder.

Vous avez appris celle faite à Noé, lui assu­rant qu’il n’y aurait plus de déluge.

Et puis la pro­messe à Abra­ham, si impor­tante, dont Colette vous parlera.

— Pour­quoi était-elle importante ?

— Parce que Dieu don­nait aux hommes la cer­ti­tude qu’Il se réser­vait un peuple, par­mi lequel naî­trait un jour le Sau­veur du monde.

Bru­no n’a pas l’air de s’a­mu­ser beau­coup, et maman s’en aperçoit.

Figures et images dans l'Ancien Testament
Nicole dit avec un accent poseur et détaché…

— Tout cela est bien sérieux pour un petit homme comme toi, mon ché­ri, et pour­tant il faut encore que j’a­joute un mot au sujet du lan­gage par­ti­cu­lier que nous ren­con­trons dans l’An­cien Testament.

N’a­vez-vous pas remar­qué quelle peine prennent vos pro­fes­seurs, en classe, pour vous expli­quer les leçons dif­fi­ciles avec des mots simples, dont vous puis­siez bien sai­sir le sens.

— Pas Mlle Louise, déclare Nicole, en tour­nant sur un pied comme une toupie.

Maman la sai­sit au passage.

— Arrête, Nicole, tu nous donnes le ver­tige. En quoi Mlle Louise manque-t-elle de clarté ?

Nicole arron­dit le bras, prend une atti­tude impayable et dit avec un accent poseur et détaché :

— Mes enfants,… la gram­maire… vous sau­rez que… vos pauvres cer­velles… inca­pables… la beau­té… la splen­deur… le style… c’est l’homme !

Les gar­çons et Colette se tordent de rire ; maman a beau­coup de peine à ne pas en faire autant.

— Voyons, Nicole, tu exa­gères ; en tous les cas, je ne veux pas que tu te moques d’un pro­fes­seur, même s’il a des tra­vers. Nous en avons tous et les enfants de votre âge en sont pétris.

Mais, ceci dit, la bonne Mlle Louise, avec ses expli­ca­tions qui manquent de sim­pli­ci­té, nous fait jus­te­ment mieux com­prendre ce que je veux vous dire.

Moïse reçoit les Tables de la Loi

Dans l’His­toire Sainte, Dieu se montre déjà comme un Père d’une admi­rable bon­té. Il ne dédaigne pas de par­ler direc­te­ment aux hommes. Vous ver­rez com­ment Abra­ham et Moïse ont osé le sup­plier et la manière dont le Bon Dieu leur a répondu.

Par ces hommes choi­sis, par l’in­ter­mé­diaire des patriarches, des juges, des pro­phètes, Dieu parle à tout son peuple et l’instruit.

Il ins­pire les uns et les autres, il leur souffle en quelque sorte ce qu’ils doivent écrire ou dire, et cela en un lan­gage qui convient au peuple auquel Il s’a­dresse. Un lan­gage fami­lier, simple, plein d’i­mages, de des­crip­tions, d’en­sei­gne­ments faciles à saisir.

N’ou­blions pas que le Bon Dieu nous a don­né une âme et un corps, Il sait donc que, pour com­prendre les choses invi­sibles, nous avons besoin de nous ins­truire au moyen des choses visibles que nous voyons, tou­chons, entendons.

Alors, par bon­té pour notre igno­rance, Il se sert d’i­mages, afin de nous aider à com­prendre ce qu’Il veut nous ensei­gner. Dans l’, c’est-à-dire dans tout l’en­semble des livres ins­pi­rés de Dieu, on vous cite­ra des expres­sions comme celle-ci : la main de Dieu. Il est clair que Dieu, pur esprit, n’a pas de main, mais cette manière de par­ler nous fait pen­ser à sa puis­sance, à son action.

On dit encore : les yeux, le regard de Dieu. Qu’est-ce que cela signifie ?

Pierre et Nicole répondent ensemble :

— Qu’Il voit tout, qu’Il sait tout.

— C’est cela même. Et la colère de Dieu ? Est-ce que cela veut dire qu’Il se fâche ?

— Non, dit Pierre sérieu­se­ment, mais qu’Il est juste et punit ter­ri­ble­ment quand il le faut.

— Voi­là qui est com­pris. J’a­joute encore, mes petits, que les livres saints ont été écrits en ce pays d’O­rient, pour des Orien­taux, dont la manière de par­ler est très imagée.

— Certes oui, dit Ber­nard. On s’en rend tel­le­ment compte quand on com­mence à apprendre l’a­rabe, même actuellement !

— Alors, on devine cette bon­té de Dieu, qui a tenu à rendre les choses les plus saintes com­pré­hen­sibles pour le peuple auquel on les enseignait.

On s’i­ma­gine les Hébreux qui vivaient sous leurs tentes, lisant dans leurs livres saints des mots comme ceux-ci : — Il est dit de Dieu : « — Il a posé sa tente dans le soleil. » Est-ce que cette image ne fait pas ins­tan­ta­né­ment son­ger à la puis­sance de Celui qui se joue des mondes qu’Il a créés ?

Un ins­tant de silence,… les aînés réflé­chissent, les petits cherchent à comprendre.

Colette se tourne vers sa mère :

— Oh ! maman, il y en a tant de ces expres­sions déli­cieuses ! Quand je les ren­contre dans mon mis­sel, pen­dant les offices, je les trouve tou­jours de plus en plus belles. Vous sou­ve­nez-vous, par exemple, de celle-ci : « Votre misé­ri­corde, ô mon Dieu, est comme la nuée du matin, et comme la rosée qui passe aux pre­miers rayons du soleil. »

On croit sen­tir la fraî­cheur du prin­temps effleu­rer l’âme.

— Tu as rai­son, les images des Livres Saints sont incom­pa­rables, et l’É­glise a choi­si par­mi les plus belles pour ses offices.

— Pour­quoi dites-vous des Livres Saints, tante ? Com­ment un livre peut-il être saint ?

Bible et Livres Saints

— Ce n’est pas le livre lui-même qui est saint, ma petite Nicole, mais ce qu’il contient.

Je vous l’ai déjà dit : Dieu a ins­pi­ré à des hommes choi­sis par Lui ce qu’ils devaient ensei­gner aux autres hommes. Moïse a écrit la Genèse ; de saints per­son­nages, des pro­phètes ont écrit les autres livres conte­nus dans ce qu’on appelle l’An­cien Tes­ta­ment, ce qui, pour vous, est plus sim­ple­ment appe­lé l’His­toire Sainte.

Jean, qui sait son grec, se tourne vers sa mère :

— On pour­rait peut-être dire aux petits qu’en hébreu et en grec Tes­ta­ment veut dire pacte, . Ancien et s’ex­pliquent ain­si : His­toire de l’Al­liance que le Bon Dieu a bien vou­lu faire avec son peuple.

— Bien, Jean. Après la venue de Notre-Sei­gneur, sa mort et sa résur­rec­tion, saint Mat­thieu, saint Marc, saint Luc et saint Jean ont écrit les Évan­giles. Les Apôtres ont rédi­gé les Épîtres et les Actes des Apôtres. Saint Jean a écrit l’A­po­ca­lypse. Ces divers livres forment le Nou­veau Tes­ta­ment et tout l’en­semble de ces ouvrages s’ap­pelle l’É­cri­ture Sainte.

— Oh ! tante, dit Nicole avec un gros sou­pir, c’est trop dif­fi­cile ! On appren­dra ça un autre jour,… voulez-vous ?

Et, comme le sou­rire de Tante veut dire « oui », Nicole sai­sit Bru­no par la main, et l’en­traîne à toute allure à la pour­suite du chat de Maria­nick, qui gam­bade dans le jardin. 


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