Le Père — Nous avons parlé de tous les objets qu’on pose sur l’autel et qui font comprendre qu’il est la table d’un sacrifice : la croix encadrée de cierges et le calice avec la patène. Il nous reste à parler d’un dernier objet très important qui a sa place sur l’autel. Jacques, c’est un objet qui intéresse particulièrement le servant de messe…
Jacques — Le missel, qu’il faut transporter au bon moment, et qui est rudement lourd !
Le Père — Mais oui. On pourrait se demander pourquoi il faut un livre pour célébrer un sacrifice en forme de repas ?
Françoise — C’est vrai. On nous dit toujours que ce n’est pas poli d’apporter un livre ou un journal à table.
Le Père — Parce que, à table, on ne doit pas manger sans s’occuper des autres, comme un égoïste, mais il faut participer à la conversation…
Jacques — A condition de ne pas parler la bouche pleine.
Le Père — Évidemment. Le livre placé sur l’autel permet précisément la conversation avec Dieu. Comment appelle-t-on, d’un seul mot, la conversation avec Dieu ?
Françoise — La prière. Mais on peut parler avec Dieu sans paroles, sans livre, rien qu’avec son cœur.
Les prières de la messe. Le Canon
Le Père — C’est juste. Mais quand on est réuni, quand on doit prier ensemble, il faut bien que la prière se fasse avec des paroles fixées d’avance. Il y a beaucoup de prières dans le missel. Savez-vous pourquoi ?
Jacques — Parce que nous faisons à la messe ce que Jésus a fait à la Cène. Et Jésus a beaucoup prié à la Cène, avant et après.
Le Père — Eh oui ! Avec ses Apôtres, il a même chanté des psaumes en se rendant au jardin des Oliviers. Le prêtre se sert du missel pour dire des prières qui ressemblent à celles de Jésus. Ce sont surtout la Préface et le Canon — une longue prière qui se dit à chaque messe presque sans changement. (« Canon » signifie dans ce cas ce qui est réglé, fixé.)
Les prières du Canon se trouvent au milieu du missel. Pour les lire, le prêtre met le missel en biais et tout près de lui afin de les suivre des yeux, sans s’éloigner du calice et de l’hostie qui demeurent toujours au centre de l’autel.
Françoise — Alors, si le Canon se trouve au milieu du missel, qu’est-ce qu’il y a au commencement et à la fin ?
Le Propre
Le Père — Les prières qui changent et qu’on appelle le propre. Au début il y a le propre du temps qui sert surtout le dimanche.
Jacques — Les dimanches d’Avent et de Carême où la chasuble est violette…
Le Père — En signe de pénitence.
Jacques — Noël, Pâques et les dimanches qui suivent, où la chasuble est blanche…
Le Père — En signe de joie, de lumière et de victoire.
Françoise — Et tous les dimanches d’été, comme maintenant, où la chasuble est verte…
Le Père — En signe d’espérance, comme les champs qui verdissent avant la moisson.
Et après le Canon, on trouve dans le missel le propre des saints, qui sert surtout en semaine, selon le jour du mois où l’on fête tel ou tel saint…
Françoise — Par exemple saint François, le 4 octobre, et sainte Françoise, le 9 mars. Et leur messe se dit en blanc…
Le Père — Parce qu’ils sont glorieux dans le ciel, comme le Christ ressuscité.
Jacques — Mon patron, on le fête le 25 juillet, et un autre saint Jacques (le petit), le 11 mai. Tous les deux se fêtent en rouge…
Le Père — Qui est la couleur du feu et du sang, du Saint-Esprit, des Apôtres et des martyrs.
Les trois oraisons
Dans le propre, il y a surtout trois oraisons qui changent. La première s’appelle la collecte ou oraison sur l’assemblée (« collecte » signifie rassemblement). Elle demande à Dieu les grâces qui sont en rapport avec la fête du jour. Le prêtre la dit après le premier Dominus vobiscum adressé à haute voix au peuple, qui doit se tenir debout, comme chaque fois que le prêtre le salue ou prie solennellement en son nom.
Françoise — A quoi est-ce qu’on voit que le prêtre prie en notre nom ?
Le Père — A ce qu’il commence la prière par Oremus : prions, à la première personne du pluriel, ce qui montre qu’il ne prie pas tout seul, mais avec tous les fidèles.
La deuxième oraison variable, qu’on trouve dans le propre, est la secrète qu’on appelle aussi oraison sur les offrandes. Elle parle surtout de l’offrande du pain et du vin, et de l’offrande de nos cœurs qui doit l’accompagner. Elle se dit à voix basse, mais les fidèles sont invités à s’y unir par l’Orate, fratres, qui précède, et par la conclusion Per omnia saecula saeculorum, qui se dit aussi à haute voix, avant la Préface.
Jacques — Et la troisième oraison ?
Le Père — C’est la postcommunion, ce qui signifie oraison après la communion. Le prêtre la dit sur le côté de l’autel comme il a dit la collecte, parce que ces deux oraisons se font avant et après le sacrifice, pour lequel le prêtre est au milieu de l’autel. C’est pour la postcommunion que tu rapportes le missel à droite, après que le prêtre a donné la communion, a lavé, essuyé et rangé le calice dont il n’a plus besoin. Dans cette prière après la communion, le prêtre prie justement pour que nous continuions à vivre en bons chrétiens après la messe, pendant toute la journée, et même pendant toute notre vie, jusqu’à ce que nous allions au ciel, où il n’y aura plus ni messe ni communion.
Jacques — Ce sera triste.
Le Père —Mais non, gros bêta ; il n’y aura plus de communion parce qu’on n’en aura plus besoin : on sera uni à Dieu éternellement, ce sera une communion et une action de grâce éternelles !
Les lectures
Mais le missel n’est pas seulement un recueil de prières. C’est aussi un livre de lectures, dont les principales sont l’épître et l’évangile.
Jacques — Ah ! oui, mais ça c’est avant la messe.
Le Père — Comment donc ?
Françoise — Puisque ça s’appelle l’avant-messe !
Jacques — D’ailleurs, si on les rate parce qu’on est en retard, ça n’a pas d’importance. Pourvu qu’on arrive à l’offertoire, ça suffit.
Le Père — Hélas, c’est ce que s’imaginent trop de chrétiens ! Il est vrai que, si l’on arrive en retard une fois ou l’autre, sans l’avoir fait exprès, il suffit d’arriver à l’offertoire. Mais en réalité, les lectures font vraiment partie de la messe. Revenons à la Cène.
Jacques — Encore !
Le Père — Mais oui. La meilleure manière de comprendre la messe, c’est toujours de la rattacher à la Cène. A la Cène, donc, Jésus nous a donné l’ordre : « Faites ceci en mémoire de moi. »
Jacques — Qu’est-ce que cela signifie : en mémoire ?
Françoise — Pour vous souvenir de moi. A la Cène Jésus sait qu’il va quitter ses Apôtres, qu’il va mourir. Il ne veut pas qu’on l’oublie.
Le Père — Soit. Mais si l’on se contentait de consacrer le pain et le vin, même en accompagnant cela de belles prières, est-ce que cela nous permettrait de nous souvenir suffisamment de Jésus ? Or, c’est dans l’Évangile que nous trouvons le récit de la vie de Jésus, et aussi ses enseignements.
En mémoire de moi
Et tout cet enseignement de Jésus a été expliqué, approfondi par les Apôtres, dont nous lisons la prédication — une prédication par lettres — dans l’épître, d’un mot qui veut dire lettre, justement.
Vous voyez comment, pour célébrer l’eucharistie, pour refaire la Cène vraiment « en mémoire de Jésus », nous avons besoin de relire l’Évangile, et même tout le Nouveau Testament… et même l’Ancien Testament.
La messe c’est une offrande, un sacrifice, un repas. Tout cela s’adresse à Dieu et s’accompagne donc de prière. Et pour que la prière soit vraiment une conversation avec Dieu, il faut que nous écoutions Dieu qui nous parle dans les lectures de la messe. C’est alors seulement que nous faisons vraiment mémoire de Jésus-Christ.
Jacques — Moi, je croyais que la messe c’était la mémoire de la passion.
Le Père — Lis donc cette prière si importante que nous avons déjà citée, car elle expose en quelques mots tout le sens de la messe. Le prêtre vient de consacrer, il a répété l’ordre de Jésus : « Faites ceci en mémoire de moi » et il enchaîne, en s’adressant au Père :
Jacques, lisant — « C’est pourquoi, faisant mémoire de la bienheureuse passion de votre fils bien-aimé Jésus-Christ, de sa résurrection d’entre les morts et de sa glorieuse ascension au ciel, nous vous offrons cette hostie pure… »
Le Père — La messe, c’est une offrande, un sacrifice qui a lieu aujourd’hui, avec un pain nouveau, un pain quotidien. Mais en même temps, c’est un mémorial : elle fait mémoire de tout ce que Dieu a fait pour nous par son Fils Jésus-Christ. C’est pourquoi la messe ne peut pas se séparer de l’Évangile et de toute la Bible.
Françoise — Alors… j’essaierai de ne plus arriver en retard.
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