Catégorie : <span>Maldan, Juliette</span>

Auteur : Maldan, Juliette | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 16 minutes
Jean Bosco apprend le catéchisme sur les genoux de Maman Marguerite

DON BOSCO

C’est au petit hameau de « Bec­chi », près de , que naquit, le 16 août 1815, Jean Bos­co qui devait être le grand bien­fai­teur des enfants aban­don­nés. Il fut bap­ti­sé dès le len­de­main de sa nais­sance. Ses parents, pauvres ouvriers, étaient d’ex­cel­lents chré­tiens. Le père, Fran­çois Bos­co, tra­vaillait de toute la force de ses bras pour nour­rir sa famille. Il pos­sé­dait une mai­son­nette et quelques bouts de champs. C’é­tait assez pour vivre heu­reux avec sa femme, Mar­gue­rite, pieuse et labo­rieuse comme lui, et ses trois petits garçons. 

Ce bon­heur ne dura guère. Jean attei­gnait à peine ses deux ans quand son père mou­rut brus­que­ment. La dou­leur de Mar­gue­rite Bos­co fut extrême. Char­gée de sa belle-mère infirme et de ses trois petits, elle par­vint à force de tra­vail, de cou­rage, de peine, à assu­rer le pain de la famille. 

Cette simple pay­sanne s’oc­cu­pait admi­ra­ble­ment de ses enfants ; non seule­ment de leur corps, mais sur­tout de leur âme. Son plus grand désir était de faire de ses fils de bons chré­tiens. Elle les éle­vait dans la pen­sée de Dieu et ne man­quait pas une occa­sion de leur rap­pe­ler sa sainte pré­sence. « Dieu nous voit, Mes petits », disait-elle. « Dieu nous voit. Moi, je puis être absente, lui est tou­jours là. » 

Chaque matin, age­nouillée avec ses enfants devant le Cru­ci­fix, elle deman­dait à Dieu le pain quotidien. 

Au soir des rudes jour­nées d’é­té, en se repo­sant au seuil de la mai­son, elle mon­trait à ses fils les mon­tagnes loin­taines, illu­mi­nées par le soleil cou­chant. « Que de mer­veilles Dieu a faites pour nous, mes enfants ! » Et quand les étoiles s’al­lu­maient dans le ciel assom­bri : « Tous ces astres mer­veilleux, c’est Dieu qui les a mis là. Si le fir­ma­ment est si beau, que sera-ce du Paradis ? » 

La grêle venait-elle rava­ger l’humble vigne des Bos­co : « Cour­bons la tête, mes enfants. Le bon Dieu nous les avait don­nées, ces belles grappes, le bon Dieu nous les reprend. Il est le Maître. Pour nous, c’est une épreuve ; pour les méchants, c’est une punition ». 

L’hi­ver, quand la pluie gla­cée bat­tait les vitres et que la famille se ser­rait autour de la che­mi­née où flam­bait une grosse bûche : « Mes petits, comme nous devons aimer le bon Dieu qui nous four­nit le néces­saire ! Il est vrai­ment notre Père, notre Père qui est aux cieux ». 

Elle ne ces­sait de recom­man­der à ses enfants la dévo­tion à Marie, en qui elle met­tait une confiance sans bornes. 

Mar­gue­rite Bos­co pou­vait réci­ter par cœur son caté­chisme, l’His­toire sainte, la vie de Notre-Sei­gneur, et, tout en s’oc­cu­pant à son ménage, elle cher­chait à ensei­gner ce qu’elle savait à ses fils. 

Pour eux, ce qu’elle crai­gnait comme la peste, c’é­taient les mau­vais compagnons. 

Jamais ses enfants ne s’é­loi­gnaient de la mai­son sans sa permission. 

« Maman, maman, pou­vons-nous aller jouer avec un tel qui nous appelle ? 

— Oui, mes petits. » 

Ils cou­raient alors tout joyeux. Si c’é­tait « non », l’i­dée ne leur venait même pas de désobéir. 

Mar­gue­rite ne gâtait pas ses enfants, ne pas­sait aucun caprice, et quand elle don­nait un ordre, elle vou­lait être obéie. Jean aimait si ten­dre­ment sa chère maman que la crainte de la pei­ner suf­fi­sait à le rendre sage. 

Elle tenait aus­si à faire de ses fils des tra­vailleurs. Il fal­lait se lever de bonne heure et s’oc­cu­per selon ses forces. Très jeune, Jean sut cou­per du bois, pui­ser de l’eau, éplu­cher les légumes, balayer la chambre. 

Le jeu­di, avant de por­ter au mar­ché son beurre et ses œufs, la maman dis­tri­buait une tâche à ses gar­çons. Au retour, si elle jugeait le tra­vail bien fait, elle tirait de son panier un mor­ceau de brioche pour chacun. 

On était pauvre chez les Bos­co, et pour­tant les mal­heu­reux qui frap­paient à la porte trou­vaient tou­jours un bon accueil et une assiette de soupe chaude. Jean apprit ain­si la cha­ri­té. Son cœur, du reste, était excellent et très sensible. 

Ce petit gar­çon à la démarche vive, à la tête ronde et fri­sée, par­lait peu et obser­vait beau­coup. Son ima­gi­na­tion ne res­tait jamais en repos. Intel­li­gent et sérieux, ardent et volon­taire, on pou­vait se deman­der pour quelle tâche Dieu le douait si remarquablement.

Songe de Don Bosco : Les loups changés en agneaux
Auteur : Maldan, Juliette | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 13 minutes


~~~~~~~~~

Gorde naît et gran­dit à Césa­rée de Cap­pa­doce. Il entre dans l’ar­mée où il fait rapi­de­ment son che­min. De haute taille, de non moins haute valeur mili­taire, il acquiert une grande répu­ta­tion par­mi les troupes. 

Le voi­ci donc bien par­ti pour la gloire, quand Dio­clé­tien ouvre sa per­sé­cu­tion contre les chré­tiens. Leurs mai­sons sont pillées, les fidèles cherchent refuge dans les déserts et les forêts. Ceux qui sont pris sont jetés en prison. 

Pour Gorde, il ne peut être ques­tion de se cacher : il est à son poste. Mais com­ment res­ter sous les ordres de celui qui per­sé­cute ses frères ? Mal­gré son goût pour la vie mili­taire, mal­gré le brillant ave­nir qui s’ouvre devant lui, il démis­sionne : « Je pré­fère, dit-il, vivre au désert avec les bêtes fauves, qu’a­vec ces ido­lâtres. »

Sa démis­sion accep­tée, il quitte l’ar­mée, non sans regret et, comme tant d’autres, s’en­fonce dans le désert. Son inten­tion est de s’y for­ti­fier dans la prière et la péni­tence puis de reve­nir ensuite défendre les chré­tiens et mou­rir avec eux s’il le faut.

Saint Gorde Soldat et martyr
« Je viens te repro­cher ta cruau­té envers les chrétiens… »

Quand il se sent assez « fort de la force de Dieu », il sort de sa cachette et revient à la ville. Il a choi­si pour cela un jour où la popu­la­tion se rue vers le cirque pour une course de chars. 

Très calme, Gorde s’a­vance au milieu de l’a­rène. « Je m’ap­pelle Gor­dius, déclare-t-il très haut. J’ai quit­té l’ar­mée depuis que l’Em­pe­reur est deve­nu per­sé­cu­teur et enne­mi du vrai Dieu. » Et, s’a­dres­sant au Gou­ver­neur : « Je viens te repro­cher ta cruau­té envers les chré­tiens. J’ai choi­si le moment de ces fêtes pour pro­tes­ter à la face du monde contre l’in­jus­tice et la barbarie. » 

Stu­peur, puis tol­lé géné­ral. Fureur du Gou­ver­neur : « Bour­reaux ! des fouets, des che­va­lets, des haches, des croix, des fauves ! Un homme aus­si exé­crable mérite plu­sieurs fois la mort !

— Oui, réplique Gorde ; on me fera tort si on ne me donne pas plu­sieurs fois la mort. » Et il entonne un psaume.

Les bour­reaux s’ap­prêtent et comme ils tardent : « Qu’at­ten­dez-vous ? leur demande le . N’en­viez-vous pas mon bon­heur et ma récompense ? 

— Voyons, quelle folie ! coupe le Gou­ver­neur, volon­tai­re­ment radou­ci. Plus sûres que les récom­penses que tu espères, tu as sous la main les hon­neurs des Césars. Rentre dans l’ar­mée, adore nos dieux ; c’est pour toi la gloire immédiate. 

— Quoi ! pro­teste Gorde, tu penses que ces misé­rables gran­deurs d’i­ci bas : grades, cita­tions, déco­ra­tions, peuvent me déta­cher du ciel ? Voi­là ce qui serait folie ! Rien sur la terre, rien, entends-tu ? ne pour­rait me dédom­ma­ger de la perte de Dieu. » 

Fou de colère, le juge tire son épée et ordonne de pas­ser à l’exécution. 

Gorde est aus­si­tôt conduit au sup­plice, au milieu d’une foule déli­rante. Les païens voci­fèrent ; les membres de sa famille, encore païens, le sup­plient d’a­voir pitié d’eux et de lui. Qu’il ne renonce pas au chris­tia­nisme puis­qu’il y tient, mais qu’il fasse sem­blant.

« Jamais ! ce serait déloyal. Je tiens ma langue de la bon­té de Dieu et je l’emploierais à men­tir, à le renier devant les hommes ? J’aime mieux mou­rir mille fois ! Mon dra­peau, c’est la croix. Un sol­dat tra­hi­rait son dra­peau par crainte de la mort ? Allons-donc ! »

Ce disant, Gorde trace sur sa poi­trine le signe de la croix et, d’un pas alerte, suit les bour­reaux. Il rayonne de joie, il est gai comme au matin d’une pro­mo­tion. Ne va-t-il pas être pro­mu au rang de témoin du Christ ? Ne va-t-il pas prendre place dans la glo­rieuse armée des martyrs ?

Saint Gorde, obte­nez-nous des cœurs vaillants, des âmes vaillantes ! Ne sommes-nous pas aus­si, par notre confir­ma­tion, sol­dats du Christ ?

Romain
~~~~~~

Pour un romain, voi­ci un sol­dat bien nom­mé. Il assiste à l’in­ter­ro­ga­toire du diacre Laurent et les réponses de celui-ci lui font une très grande impres­sion. C’est bien autre chose quand il constate le cou­rage du diacre au milieu des sup­plices ; et c’est enfin le comble, lorsque Laurent se trou­vant demi-mort sous les coups de fouets — fouets armés de pointes de fer — Romain voit un ange essuyer le visage du , étan­cher le sang de ses plaies. Le sol­dat païen en est tout inter­dit. La grâce passe, la lumière se fait ; Romain y cor­res­pond. Il s’ap­proche de Laurent, lui dit ce qu’il voit, lui demande ses prières.

Auteur : Maldan, Juliette | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 14 minutes

Le 30 avril 1651, tout était à la joie dans l’une des plus belles demeures de Reims : l’hô­tel de la Cloche. On fêtait la nais­sance du pre­mier enfant de Louis de La Salle, magis­trat fort riche et consi­dé­ré, et de sa femme, Nicole Moët de Brouillet. 

Le même jour, l’en­fant por­té à l’é­glise y rece­vait, avec le saint bap­tême, le nom de Jean-Baptiste. 

Tan­dis que M. de La Salle remer­ciait Dieu de lui don­ner un fils, Mme de La Salle consa­crait l’en­fant à la Sainte Vierge et la sup­pliait de l’ai­der à l’é­le­ver saintement. 

Le petit Jean-Bap­tiste gran­dit donc, enve­lop­pé de ten­dresse, de soins extrêmes et de bons exemples. Sa mère lui apprit ses prières, le condui­sait très sou­vent à l’é­glise où il se tenait sage et atten­tif aux cérémonies. 

La mai­son de famille s’emplissait de vie ; à la suite de Jean-Bap­tiste, de nom­breux frères et sœurs vinrent la peu­pler, car le bon Dieu accor­da 10 enfants à Mme de La Salle. 

Jean-Bap­tiste pre­nait volon­tiers sa part du mou­ve­ment et de là gaie­té du logis. C’é­tait un enfant char­mant, intel­li­gent, doux, aimable et aimé de tous.

La grand-mère de Jean-Baptiste de La Salle lisant des vies de saints à l'enfant.
« Bonne Maman, lisez-moi-la Vie des Saints ! »

Mais déjà on sen­tait que les choses du bon Dieu l’at­ti­raient plus que tout le reste. 

Sou­vent, on don­nait des fêtes à l’hô­tel de la Cloche. La paren­té se réunis­sait autour d’une longue table bien gar­nie et bien ser­vie. Un soir où il y avait grande récep­tion, le petit Jean-Bap­tiste sem­blait triste au milieu de la brillante socié­té. Sans bruit, comme une sou­ris, il se glis­sa hors des salons, grim­pa jus­qu’à la chambre de sa grand-mère : « S’il vous plaît, bonne maman, sup­plia-t-il, lisez-moi la Vie des Saints ! » La grand-mère prit un gros livre qu’elle posa sur ses genoux, et, len­te­ment, com­men­ça les belles his­toires que son petit-fils écou­tait avi­de­ment. Les récits l’in­té­res­saient beau­coup plus que la musique et les gâteaux du salon ! 

Ce que Jean-Bap­tiste sou­hai­tait aus­si ardem­ment, c’é­tait de deve­nir enfant de chœur. Quelle joie, le jour où sa mère le condui­sit chez le curé de la paroisse, le priant d’accepter son petit gar­çon comme ser­vant de messe ! Dès lors, Jean-Bap­tiste mit le plus grand empres­se­ment à se rendre à l’é­glise chaque matin. Ceux qui le voyaient prier, grave et recueilli au pied de l’au­tel, pen­saient : « Cet enfant doit voir le bon Dieu, il n’est pas comme les autres ! » 

En effet, Dieu regar­dait Jean-Bap­tiste avec amour et lui fai­sait com­prendre au fond du cœur qu’il l’ap­pe­lait à son ser­vice… Vers l’âge de 12 ans, après avoir bien prié la Très Sainte Vierge de l’ai­der, timi­de­ment, res­pec­tueu­se­ment, il fit part à ses parents de son grand désir d’être prêtre, et leur deman­da la per­mis­sion de suivre sa vocation. 

Sa mère si pieuse joi­gnit les mains en disant : « Mer­ci mon Dieu. » Pour M. de La Salle, qui comp­tait sur son fils aîné pour lui suc­cé­der dans sa charge, le sacri­fice fut plus grand, mais il s’in­cli­na : « Mon enfant, dit-il, vous êtes à Dieu avant d’être à moi, deve­nez un bon prêtre ! » 

Auteur : Maldan, Juliette | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 19 minutes

La famille

Celui qui devait être le grand Pie X naquit dans la pau­vre­té, le 2 juin 1835, au vil­lage de Riese, en . Joseph, « Bep­pi », comme on le nom­mait fami­liè­re­ment, était l’aî­né de neuf enfants. 

Son père, Jean-Bap­tiste Sar­to, pos­sé­dait une humble mai­son et deux petits champs. Agent com­mu­nal, il balayait la mai­rie, fai­sait les courses, ce pour quoi il rece­vait chaque jour, 0 fr. 50. Maigre salaire pour nour­rir tant de monde ! La mère de famille, Mar­gue­rite Sar­to, essayait de son côté de gagner quelque chose. Avant son mariage, elle était cou­tu­rière. Une fois le ménage ran­gé, les petits habillés, la soupe au feu, elle repre­nait son aiguille et cou­sait pour les voisines. 

Tous ceux qui connais­saient Mar­gue­rite admi­raient ses ver­tus, son cou­rage, sa foi. C’é­tait un foyer modèle que celui des Sar­to. Chaque soir, après la jour­née de tra­vail, le père expli­quait le caté­chisme à ses enfants et réci­tait tout haut la prière. 

Éle­vé par des parents si chré­tiens, le petit Joseph ne pou­vait man­quer d’ai­mer le bon Dieu, l’é­glise, les offices, Tout petit avec une grande joie, il enfi­la une sou­tane d’en­fant de chœur et com­men­ça de balan­cer l’en­cen­soir ou de ser­vir la messe. Son recueille­ment frap­pait l’as­sis­tance. Dès 11 ans, il fut char­gé, durant les céré­mo­nies, de gui­der ses com­pa­gnons qui l’ad­mi­raient et lui obéis­saient comme à un chef. À l’é­cole, Joseph Sar­to rem­por­tait tous les prix. Pen­dant les récréa­tions, ses cama­rades le sui­vaient volon­tiers, car gai, déci­dé, il avait tou­jours des jeux amu­sants à proposer. 

À quelque dis­tance du vil­lage, au milieu des champs de maïs, des vignes et des mûriers, s’é­le­vait une église dédiée à la Vierge de l’As­somp­tion. Bien sou­vent, au temps où Joseph était enfant de chœur, cou­rant et chan­tant, il entraî­nait la troupe des gar­çons vers ce pèle­ri­nage. Devant le sanc­tuaire, les enfants réci­taient pieu­se­ment une prière à Marie, puis ren­traient en jouant à tra­vers la campagne. 

Joseph Sar­to fit à 11 ans, une pre­mière très fer­vente. Ce jour-là au fond de son cœur, il se don­na tout entier à Dieu et lui pro­mit de ne vivre que pour le ser­vir. Il ne dit rien à sa mère de cette réso­lu­tion. Mais elle, qui connais­sait l’âme de son enfant, le devi­na et l’in­ter­ro­gea dou­ce­ment. Joseph avoua qu’il vou­lait être prêtre.

Mar­gue­rite, fière et heu­reuse, remer­cia Dieu de cette grande grâce. Le père, en appre­nant la voca­tion de Joseph, son­gea tris­te­ment que, ses forces dimi­nuant, le tra­vail de son aîné eût été bien néces­saire à la famille… Mais, imi­tant la foi de sa femme, il don­na géné­reu­se­ment son consentement. 

Le bon Curé de Riese se réjouit et déci­da que son petit parois­sien irait suivre les cours au col­lège de Cas­tel­fran­co. Sept kilo­mètres sépa­raient Riese de Cas­tel­fran­co. Joseph devait fran­chir che­min à pieds, deux fois par jour. Tra­jet dur en hiver, et plus encore l’é­té, sous le soleil qui brûle la campagne. 

Joseph Sarto, enfant, va à l'école pour devenir Prêtre
Il enle­vait ses souliers…

De plus, le brave enfant savait ce qu’il en coû­tait à ses parents pour le chaus­ser. Afin de leur épar­gner une dépense, à peine sor­ti de Riese, il enle­vait ses sou­liers et les por­tait sur son dos avec le petit sac où la maman pla­çait le pain du déjeuner. 

Plus tard, son frère Ange­lo l’ac­com­pa­gnait à Cas­tel­fran­co. Le père ayant réus­si à faire l’a­chat d’un pauvre petit âne et d’une vieille char­rette, les deux enfants rou­laient fiè­re­ment dans cet équipage. 

Joseph tra­vaillait avec une grande ardeur. Vif, prompt à s’emporter, il devait lut­ter contre sa nature pour acqué­rir la dou­ceur, par la suite si remar­quable en lui. 

Ses notes le clas­saient tou­jours le pre­mier. Mais ce, n’é­tait là qu’une pré­pa­ra­tion. Il fal­lait pou­voir entrer au Sémi­naire. Grosse dif­fi­cul­té ! La famille Sar­to était sans res­sources. Le Curé de Riese en man­quait éga­le­ment, mais il mul­ti­pliait les démarches pour obte­nir une bourse gra­tuite à son cher Joseph. Celui-ci atten­dait, le cœur ser­ré par l’an­goisse. Si ardent était son désir d’être prêtre ! 

Enfin, la réponse vint. « À genoux, Bep­pi », s’é­crie le Curé, « remer­cie Dieu qui a sûre­ment quelque des­sein sur toi : bien­tôt, tu entre­ras au Sémi­naire, et comme moi, toi aus­si tu seras prêtre ! » 

Les gens de Riese qui savaient la gêne des Sar­to, quê­tèrent dis­crè­te­ment entre amis pour ache­ter les livres et les vête­ments néces­saires au futur abbé.

Le séminaire

Au mois de novembre 1850, Joseph Sar­to par­tit donc pour le grand Sémi­naire de Padoue. 

À la fin de l’an­née, il était à la tête de son cours et ses pro­fes­seurs pla­çaient en lui de grands espoirs. 

Peu après son entrée au Sémi­naire, Joseph eut le grand cha­grin de perdre son père. 

Mar­gue­rite Sar­to, res­tée veuve avec sept enfants encore à sa charge, reprit cou­ra­geu­se­ment son métier de cou­tu­rière. Aidée de ses filles, elle réus­sit à gagner le pain de la famille. 

Durant les vacances, Joseph reve­nait à la mai­son. Depuis qu’il avait revê­tu la sou­tane, sa mère, par res­pect, défen­dait à ses autres enfants de tutoyer leur aîné. Le Sémi­na­riste édi­fiait tout le vil­lage. Levé à cinq heures, il priait lon­gue­ment à l’é­glise. Tout le jour il étu­diait. Après le repas du soir, on allait en com­mun dire à l’é­glise le cha­pe­let. Puis, avant le repos de la nuit, la famille s’a­ge­nouillait une fois encore devant le cru­ci­fix du foyer. Dans cette mai­son bénie, l’exa­men de conscience sui­vait la prière, cha­cun avouait ses torts et deman­dait par­don à celui qu’il avait pu offenser. 

Aus­si, mal­gré la pau­vre­té, les pri­va­tions, la paix régnait-elle dans les cœurs. 

Un soir où Mar­gue­rite Sar­to, épui­sée, avouait tout bas à son aîné : « Bep­pi, que la vie est difficile » 

— « Elle est faite pour cela », répon­dit dou­ce­ment le jeune abbé », si elle était facile, maman, où serait notre mérite ? » 

À mesure que Joseph appro­chait du sacer­doce, sa mère priait avec une plus ardente fer­veur deman­dant à Dieu que son fils soit un saint prêtre ! 

Le 18 sep­tembre 1858, Mar­gue­rite Sar­to, trem­blante de bon­heur, assis­tait à l’or­di­na­tion de son fils, et le len­de­main, elle le voyait mon­ter à l’au­tel, pour la pre­mière fois et célé­brer la sainte messe. 

Des larmes de joie et de recon­nais­sance cou­laient de ses yeux. Son enfant, entou­ré de tant d’a­mour, de sacri­fices et de prières, enfin, il était prêtre pour toujours !

Au service des âmes

À peine ordon­né prêtre, Joseph Sar­to fut nom­mé vicaire au bourg de Tom­bo­lo. Il se fit vite aimer des âmes qu’il vou­lait rame­ner à Dieu par ses ensei­gne­ments et son dévoue­ment. Il prê­chait avec un zèle infa­ti­gable et cher­chait sans cesse à pla­cer un conseil, une bonne parole. Pour cela il se mêlait fami­liè­re­ment aux hommes et aux jeunes gens, réus­sis­sant à mettre la paix dans leurs que­relles et sur­tout à les cor­ri­ger de leur vilaine habi­tude de jurer. 

Auteur : Maldan, Juliette | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 16 minutes

Enfance de

11 y a bien long­temps, dans un petit vil­lage des Hautes-Alpes nom­mé Saint-Etienne d’A­van­çon, vivait une famille d’humbles cultivateurs. 

Guillaume Ren­cu­rel et sa femme Cathe­rine habi­taient une chau­mière très pauvre et très petite : une chambre basse au-des­sus d’une écu­rie voû­tée, une cave, et c’é­tait tout. Une vigne et quelques petits champs sur les pentes raides des mon­tagnes, com­plé­taient leur domaine. À force de tra­vail et de peine, ces terres four­nis­saient la nour­ri­ture néces­saire pour eux et leurs enfants. 

Ces ouvriers si pauvres des biens de ce monde, pos­sé­daient pour­tant un tré­sor que beau­coup de mal­heu­reux ont per­du de nos jours une foi vive qui leur fai­sait espé­rer, après leur dure exis­tence, le royaume du ciel que Jésus leur ache­ta de son sang. 

Guillaume et Cathe­rine éle­vaient déjà une petite fille quand Dieu leur en envoya une seconde qui naquit en l’an­née 1647, le 29 sep­tembre, fête de l’ar­change saint Michel. 

Très vite, on por­ta cette petite à l’é­glise pour le saint bap­tême, et on lui don­na le nom de Benoîte qui veut dire bénie. C’é­tait un nom bien trou­vé pour l’en­fant que la sainte Vierge devait tant aimer. 

Benoîte s’é­le­vait faci­le­ment et se mon­trait douce et gentille. 

Son édu­ca­tion se fai­sait sur les genoux de sa maman et elle était simple : « Sois bien sage, ma petite, répé­tait Cathe­rine, prie bien le bon Dieu ! »

Elle lui apprit le Pater, l’Ave, le Cre­do. C’é­tait tout ce qu’elle savait elle-même. Avec cela l’en­fant pou­vait réci­ter le chapelet. 

Benoîte n’a­vait que 7 ans quand son père mou­rut. Cathe­rine res­tait veuve avec trois enfants, dans une pau­vre­té proche de la misère. Benoîte com­pre­nait ses peines et essayait de les conso­ler tout comme si elle avait été plus grande. Voyait-elle sa maman trop triste, elle s’ap­pro­chait dou­ce­ment : « Ne vous déso­lez pas, disait-elle, Dieu et sa sainte Mère nous assisteront. » 

La détresse de la famille ne per­mit pas d’en­voyer Benoîte à l’é­cole. Elle ne sut jamais ni lire, ni écrire. Mais elle sui­vait très régu­liè­re­ment les caté­chismes, écou­tait avec grande atten­tion ce que disait M. le Curé. Son inté­rêt redou­blait quand on par­lait de la sainte Vierge. Elle écou­tait avi­de­ment ce qu’on expli­quait de sa beau­té céleste, de sa ten­dresse mater­nelle. Il lui sem­blait qu’elle aurait été si heu­reuse de la voir ! — « Mais, ajou­tait-elle hum­ble­ment, com­ment la Mère de Dieu se mon­tre­rait-elle à une pauvre pécheresse ? »

À 7 ans, Benoîte devait déjà se rendre utile et tra­vailler. Elle gar­dait le petit trou­peau de la famille par­mi les hautes mon­tagnes qui entourent son vil­lage. Tout le jour, expo­sée au soleil, au vent, à la pluie, elle cou­rait après ses mou­tons et veillait sur eux. Au moins, le soir, avait-elle la joie de se retrou­ver près de sa mère et de ses sœurs. Ensemble elles se chauf­faient tout en cau­sant autour de l’âtre où cui­sait la soupe, et Benoîte se dédom­ma­geait de sa longue soli­tude du jour. 

Mais la misère se fai­sait de plus en plus sen­tir dans la chau­mière de Cathe­rine. Plu­sieurs années de mau­vaises récoltes ame­nèrent la disette dans le pays. Il fal­lut se rési­gner à mettre Benoîte en ser­vice. Ce fut un gros sacri­fice pour la pauvre petite qui n’a­vait que 12 ans. Obéis­sante et rési­gnée, elle ne mur­mu­ra pas contre cette dure déci­sion. Elle ne deman­da qu’une chose à sa mère : c’é­tait de lui ache­ter un cha­pe­let. Avec cet unique tré­sor dans sa poche, Benoîte quit­ta cou­ra­geu­se­ment sa mai­son, sa chère maman, ses sœurs, pour aller gar­der le trou­peau d’un étran­ger. Son pre­mier maître était bon et appré­ciait les qua­li­tés de sa petite ber­gère. Mais elle n’é­tait pas depuis un an à son ser­vice, qu’il mou­rut. Sa veuve res­tée avec six enfants et peu de res­sources, ne pou­vait qu’a­vec peine leur pro­cu­rer le pain néces­saire. Elle aimait mieux se pri­ver et pri­ver ses enfants que de dimi­nuer le mor­ceau de Benoîte. Celle-ci rece­vait sans mot dire sa part de la miche, mais son cœur déli­cat ne pou­vait voir souf­frir les enfants de la mai­son. Dès que sa maî­tresse s’é­loi­gnait, elle dis­tri­buait son pain aux petits qui l’en­tou­raient. Puis, elle par­tait avec son trou­peau, et si la faim deve­nait trop criante, elle tirait son cha­pe­let de sa poche et le réci­tait pour reprendre courage. 

Benoîte par­tage son pain avec des enfants.

Benoîte ne se conten­tait pas de se pri­ver de pain pour les enfants de sa maî­tresse, elle en don­nait encore aux pauvres affa­més qu’elle ren­con­trait dans la montagne. 

Ce n’é­tait pas seule­ment son pain qu’elle don­nait, mais aus­si sa com­pas­sion et sa prière à toutes les misères qu’elle trou­vait sur son che­min et qu’elle n’a­vait pas d’autre moyen de soulager. 

Un jour, elle apprend qu’une femme gra­ve­ment malade a per­du la parole avant l’ar­ri­vée du prêtre. Déso­lée de ce mal­heur, Benoîte appelle ses com­pagnes : « Venez, dit-elle, allons dire le rosaire pour cette malade. » Et voi­là tous les enfants réci­tant le cha­pe­let avec un entrain qu’a­nime la fer­veur de Benoîte. La prière n’est pas ter­mi­née que la malade retrouve la parole. Ses pre­miers mots sont pour remer­cier la troupe des enfants qui l’en­tourent. Benoîte par­lait du bon Dieu, du para­dis, de l’en­fer, avec une foi qui tou­chait ceux qui l’écoutaient. 

Un de ses maîtres, Jean Rol­land, était un homme violent et empor­té. La petite ber­gère lui repro­cha dou­ce­ment ses colères, lui rap­pe­la ses devoirs de telle façon que cet homme n’o­sa jamais se fâcher contre cette petite fille. Bien plus, ému par ses paroles, il finit par ren­trer en lui-même et se convertir. 

Benoîte, au milieu des champs, était expo­sée à bien des dan­gers. Mais elle avait le mal en hor­reur et veillait sans cesse sur la pure­té de son âme qu’elle vou­lait lim­pide comme l’eau des sources. Elle vivait sous le regard de Dieu et sous sa protection. 

Aus­si, chas­sait-elle les moindres ten­ta­tions de mal faire. Un été, un petit ber­ger qui marau­dait dans les ver­gers, vou­lut par­ta­ger avec Benoîte les fruits qu’il avait cueillis. Mais elle refu­sa éner­gi­que­ment et ne gar­da plus ses mou­tons avec ce petit garçon. 

Plu­sieurs fois la sainte Vierge la défen­dit d’une façon mer­veilleuse contre de graves périls. 

La grande force de Benoîte, c’é­tait la prière, le recours à la sainte Vierge, sur­tout. Elle priait très sou­vent, soit dans l’é­glise de son vil­lage, soit au pied des croix qui se dressent dans les champs.

« Benoîte aime bien à prier », disaient ses maîtres. Sa prière favo­rite était le cha­pe­let. Nous allons voir com­ment la sainte Vierge répon­dit à l’a­mour si fidèle de sa petite bergère.

La Sainte Vierge et Benoîte

Benoîte atteint 17 ans. Au prin­temps de 1664, par un clair matin de mai, elle conduit gaî­ment ses mou­tons à tra­vers la fraîche ver­dure des mon­tagnes, si belles en cette sai­son. Les mou­tons se hâtent comme pous­sés par une invi­sible main. Au fond du val­lon vers lequel ils courent, une roche se dresse au bord d’un tor­rent. Une grotte se creuse dans la roche. Benoîte a l’ha­bi­tude de venir y réci­ter son chapelet. 

À peine arri­vée en face de la grotte, la ber­gère toute sai­sie aper­çoit une Dame d’une beau­té mer­veilleuse, tenant par la main un ravis­sant petit enfant. Une grâce céleste enve­loppe cette Dame, de ses yeux sortent comme des rayons de lumière. Ses vête­ments exhalent un par­fum si suave que l’on croi­rait le val­lon tout entier rem­plir de fleurs. 

Benoîte, émer­veillée, contemple la belle Dame… Pour­tant il ne lui vient pas à l’i­dée qu’elle puisse être la sainte Vierge.

Elle essaie de lui par­ler, l’in­ter­roge naï­ve­ment, mais l’ap­pa­ri­tion sou­rit sans mot dire.