Sortant de l’usine où elle a travaillé tout le jour, une femme aux traits amaigris s’engage dans l’étroit chemin qui mène hors de la ville jusqu’à une « grotte de Lourdes ». Voilà huit jours qu’elle fait ce trajet. L’inquiétude et la peine courbent ses épaules lasses. Au logis, son mari est couché depuis six mois, souffrant cruellement. De son travail à elle dépend l’existence de tous. Mais la malheureuse, épuisée de surmenage et de privations, voit venir l’heure où la misère fera suite à la gêne au foyer désolé.
À peu de distance se dresse le rocher où rayonne la blanche statue de la Sainte Vierge. Celle qui monte vers ce but s’arrête dans le sentier, indécise, l’âme angoissée.
— Qu’est-ce que je fais !… Moi, protestante, venir la prier ! Qu’est-ce que j’espère ! De quel droit réclamer sa pitié ?…
Mais une voix s’élève au fond de l’âme troublée, une voix qui rassure et invite à l’espoir « Ton mari et tes enfants sont catholiques et c’est pour eux que tu viens. » « Et puis, murmure la pauvre femme, j’ai fait ce que je devais : j’ai respecté les croyances du père, j’ai veillé à ce que les petits connaissent et pratiquent leurs devoirs… »