MAINTENANT, je vais vous dire ce qui s’est passé le jour de la fête Notre-Dame des Anges, ce qui s’est passé dans les rues parsemées de bleuets, de marguerites et de fougères.
La procession était déjà très belle, mais si l’on avait pu voir, comme les anges, ce qui se passait dans le cœur des petites filles de la procession, on aurait vu quelque chose de plus beau encore.
D’abord, il faisait un grand soleil.
Tous ceux qui ont vu, au moins 7 ou 8 fois, revenir les belles fêtes de l’année, savent que les saisons suivent le calendrier. Les choses se passent un peu comme dans le livre des « Cinq cents recettes de cuisine » : pour une belle fête de Noël, prenez une église de village, des sapins, saupoudrez-les de neige et de givre … Une Toussaint bien réussie veut une petite pluie grise. La fête de Notre-Dame des Anges, elle, doit être servie chaud. Thérèse l’avait définie autrefois : « C’est quand le Bon Dieu se promène sous le soleil, et moi je lui jette des fleurs. » En effet, à Notre-Dame des Anges le Bon Dieu aime tellement se promener qu’à l’Assomption il fait comme si c’était la Fête-Dieu ! Donc, il y avait, ce jour-là, beaucoup de soleil.
Le petit village dont je vous parle est posé au croisement de deux routes. Comme, à chaque bout, un reposoir a été dressé, le chemin du Saint Sacrement forme une croix, un grand signe de croix à travers les fermes et les maisons.
Cela commence, la veille au soir, par des échafaudages de tonneaux, de caisses, de poutres. On ne croirait jamais qu’il en sortira quelque chose de bien.
On a saccagé les parterres.
Les fers à friser du village sont mobilisés : des têtes bouclées, c’est encore ce qu’on a trouvé de mieux pour représenter des anges.
Sur le coup de 3 heures et demie, la procession débouche sur la place.
Car elle sort, à Notre-Dame des Anges, la procession.
Dans certains pays, les gens sont si méchants, si méchants, qu’ils empêchent le Bon Dieu de sortir une malheureuse fois par an. Alors, comme un pauvre oiseau en cage, il fait seulement le tour de sa prison.
Dans mon petit village, il sort, avec les bannières et la fanfare municipale au pas cadencé, qui lance au ciel le tonnerre de sa musique et l’éclat de ses cuivres bien astiqués.
MES chers amis, qui avez lu jusqu’ici le livre des bons anges, je vous laisse deviner combien toutes ces choses durent bouillonner dans l’imagination de petites filles comme Thérèse et Colette. Elles y songeaient encore, après la prière du soir — pendant laquelle on n’oublia point l’invocation à l’ange gardien — et elles les remuaient toujours lorsqu’elles s’endormirent doucement.
Oh ! je voudrais dérouler devant vous le film de Pathé-Baby qui passa, durant la nuit, sous les paupières closes de Colette. Tout ce que nous venons d’entendre était mélangé de la façon la plus amusante.
Thérèse et Colette étaient des anges avec des robes à reflets, qui jouaient une partie endiablée de « chat-perché ». Leurs pieds effleuraient à peine le sol, et elles rebondissaient dans un bruit de grelots, si haut, si haut, qu’elles virent dans la rivière qui coule là-bas, entre les peupliers, un poupon qui avait la figure de Mimi, et qui riait dans son berceau. Le berceau flottait dans la rivière, au milieu du cresson, mais on n’avait pas peur : une grande demoiselle qui ressemblait à Mlle Gaby marchait sur la rivière, sans s’enfoncer, car elle avait des ailes, et elle veillait sur le berceau flottant.
Tout à coup, Black — le Black de l’eau de vaisselle — en moins de temps qu’il n’en faut pour le raconter, ramenait le petit bateau sur la berge. Et là, Mimi cueillait des fleurs rouges et blanches qui s’envolaient en devenant des têtes ailées d’anges joufflus chantant comme des alouettes.
Ce fut un beau rêve et je ne suis pas sûr que les bons anges — les vrais bons anges des petites filles — n’y furent pour rien.
Hélas ! les beaux rêves finissent comme les bulles de savon qu’on lance en l’air en soufflant dans un fétu : l’arc-en-ciel s’y mire joliment, et puis, pouf ! plus rien. Il faut recommencer une nouvelle bulle.
Heureusement, lorsqu’arrive la fête paroissiale, Thérèse et Colette ont un moyen pour continuer, pendant la journée, les beaux rêves de la nuit : c’est tante Bonne, qui vient chaque année passer quelques jours chez ses nièces, au milieu du mois d’août. Si bien qu’on ne l’imagine plus sans tartes aux prunes, chevaux de bois et procession. Vous ne connaissez pas tante Bonne ? Comment vous expliquer tante Bonne si vous ne la connaissez pas ?
Sachez, du moins, que dans le cœur de Thérèse, Colette et Mimi, tante Bonne se confond avec maman, une maman qui ne gronde jamais. Elle a toujours eu des bandeaux de beaux cheveux blancs, et elle tricote, depuis toujours, des maillots pour les petits pauvres. C’est tante Bonne enfin Papa, maman, les amis de la maison disent : « Bonjour tante Bonne ! » On ne peut pas l’appeler autrement, puisque tante Bonne est son nom, et son nom est bien trouvé : jamais elle n’a fait de peine à quelqu’un. Elle défend toujours les petits enfants : « Il ne savait pas que c’était mal… Il ne l’a pas fait exprès… Il ne recommencera pas… » Et tout finit par un bonbon. « C’est déplorable, » dit papa. Mais, que voulez-vous ? on l’appelle tante Bonne, c’est tout dire.
Tante Bonne n’a pas seulement les poches remplies de bonbons, elle les a aussi toutes pleines d’histoires.
Ah ! les histoires de tante Bonne. Elle les invente à mesure, là, devant vous. C’est vraiment captivant de les voir se fabriquer comme on voit avancer le tricot du petit bas ou du chandail. Mais, tandis que le tricot, c’est toujours la même chose, dans les histoires, seuls les commencements sont pareils. « Il était une fois… », après on ne sait jamais ce qui va arriver.
— Tante Bonne, racontez-nous une belle histoire d’ange gardien.
Tante Bonne devait en connaître des histoires sur les bons anges, car elle était un peu de leur famille.
Tante Bonne toussota, rajusta ses lunettes, les deux petites filles escaladèrent un fauteuil d’osier et se casèrent entre les deux bras qui s’écartèrent un peu en se plaignant. L’histoire pouvait commencer. L’histoire commença.
Il était une fois un ange dans le paradis.
D’abord, il faut savoir que ceci n’est pas un conte de fées. Les contes de fées sont très beaux, et il est certain que plusieurs sont arrivés, mais ce que je vais vous dire est la pure vérité.
Il y avait une fois un ange dans le paradis. C’était un ange qui n’avait jamais rien fait, rien fait que d’être de la fête du ciel. (C’est surtout au ciel que l’année est en fête pour les enfants du Bon Dieu). Il y en a comme cela des grappes, des essaims, des bataillons entiers. Dieu seul en a fait le compte et lui seul peut se débrouiller dans cette foule d’anges.
Ce n’est pas qu’il s’ennuyait, cet ange, mais il avait été bien content tout de même lorsque Dieu, l’ayant fait s’approcher, lui dit : « Il me faut un ange gardien pour un petit garçon qu’on attend dans une maison dont je te donnerai l’adresse, et j’ai pensé à toi. »
Le petit ange brilla d’un plus vif éclat, d’abord parce qu’il s’était approché du Bon Dieu, et puis parce qu’il venait de recevoir un ordre et qu’une joie nouvelle le remplissait. Les anges sont comme cela : plus le Bon Dieu les commande, plus ils sont heureux.
Si nous savions être bien obéissants, nous ferions comme les anges, ajouta tante Bonne. Au lieu d’être grognons, lambins, « cabochards », si nous faisions tout de suite ce qu’on nous commande, d’abord ça irait bien mieux, et ensuite nous serions toujours contents au-dedans. Mais je continue l’histoire.
L’ange qui allait être envoyé était donc très heureux. Il en avait vu d’autres, comme lui, revenir quelquefois très vite, quelquefois après beaucoup de longues années, accompagnés d’une âme blanche comme neige, et c’était une grande fête au ciel.
MONSIEUR le Curé arrivait, en effet, par la petite porte qui donne sur le jardin du presbytère. Il portait un grand panier rempli de roses en papier qu’il fallait entrelacer pour en faire des guirlandes — une rouge, une blanche, une rouge, une blanche.
En un clin d’œil, la bande du « chat-perché » fut rassemblée : ce n’est pas tous les jours qu’on a la chance de tresser des guirlandes de roses en papier.
— Claire voudrait savoir, dit Mlle Gaby, si l’Enfant Jésus avait son ange gardien ; le catéchisme n’en parle pas.
— Ni l’Évangile non plus, répondit M. le Curé.
— Naturellement, l’Enfant Jésus avait un ange gardien, dit Madeleine.
Madeleine a beau tenir la première place du catéchisme, M. le Curé ne croit point qu’elle soit incapable de se tromper.
— Doucement, doucement. Que fait notre ange gardien ?
Madeleine répond d’une seule haleine, comme on dévide une leçon de catéchisme :
— Notre ange gardien nous défend, nous guide, nous conseille et prie pour nous dans les dangers.
— Bien répondu. Ne voyez-vous pas qu’il y a là des choses dont l’Enfant Jésus pouvait se passer ? Est-ce qu’il avait besoin d’être guidé et conseillé ? Non, puisqu’il savait tout. Est-ce qu’il avait besoin qu’on prie pour lui ? Non plus, puisqu’il était le Bon Dieu…
— Alors, l’Enfant Jésus n’a pas eu d’ange gardien, dit Madeleine, attristée et déçue.
Visiblement, le cercle des petites filles trouvait que c’était bien dommage.
— Attendez ! attendez ! vous allez toujours trop vite. Admettons que l’ange gardien de l’Enfant Jésus n’était pas un ange gardien comme les autres. Il n’avait pas à envoyer de bonnes inspirations, puisque tout ce qui sortait de Jésus était bon. Je ne sais pas, après tout, s’il devait porter ses mérites devant Dieu, puisque Jésus était Dieu.
— Un seul n’aurait pas suffi, il en aurait fallu une équipe, dit Claire.
— Notre-Seigneur a parlé des anges qu’on verrait, dans le ciel ouvert, monter et descendre au-dessus de sa tête. Si, lorsqu’il était petit, un ange, le plus beau des anges du paradis, a été mis à son service, plus tard il en a eu plusieurs, et c’est lui qui les commandait.
— Il était le gardien des anges gardiens, fit Madeleine.
— Et de tous les autres anges. Il l’a dit : Je n’aurais qu’à faire un petit signe et plus de douze légions d’anges, c’est-à-dire douze régiments d’anges, se précipiteraient sur les méchants.
Madeleine, Colette, Claire, toutes leurs compagnes virent, dans un éclair, le régiment de chasseurs à cheval qui avait cantonné dans le village, l’automne dernier. Douze régiments de chasseurs à cheval !
— En tout cas, poursuivit Monsieur le Curé, dans l’histoire de Jésus, il est bien souvent question d’anges qui s’occupent de lui, à commencer par les anges qui ont chanté dans la nuit de Noël : Gloria in excelsis Deo.
Lorsque Hérode voulut tuer le petit Jésus (en ce temps-là, les anges gardiens des Saints Innocents arrivèrent très nombreux au paradis avec des âmes toutes blanches), un ange avertit saint Joseph et la Sainte Vierge qu’il fallait partir tout de suite en Égypte. « L’ange du Seigneur, » dit l’Évangile. C’est un travail d’ange gardien que fait cet ange-là. Plus tard, après le jeûne de quarante jours au désert…
— Quarante jours ! dit Colette, à mi-voix, sur un ton d’effroi.
— …nous savons encore que « les anges le servaient ».
Et l’Ange de l’Agonie, cet Ange du Jardin des Oliviers dont on ne dit pas le nom, n’est-ce pas encore un des bons anges de Jésus ?
MOI, dit Claire, la petite infirme, je suis toujours « perchée ».
Elle dit cela avec un sourire, mais il y avait beaucoup de tristesse au fond de ce sourire.
Mlle Gaby, qui venait de pousser la voiture un peu plus loin, car le soleil avait tourné, s’assit auprès de Claire pour la distraire.
— Mademoiselle, je pense souvent à l’ange gardien, dit la pauvre Claire, car j’en ai besoin bien souvent. Je voudrais savoir si tout le monde a son ange gardien (elle songeait aux négrillons de l’Exposition Coloniale qu’elle avait vus sur les affiches car elle n’avait pu faire, vous le pensez bien, ce grand voyage de Paris — et dont on lui avait dit qu’ils n’étaient pas baptisés).
— Pourquoi pas ? Le Bon Dieu aime tous ceux qui ont une âme, puisque Jésus a versé son sang pour tout le monde. Aussi, l’ange gardien suit le baptême des petits enfants, pas seulement en revenant de l’église, lorsqu’on jette des sous et des dragées aux gamins, mais encore à l’aller.
— Et quand ils seront grands ? interroge aussitôt l’infirme visiblement anxieuse de savoir si un jour ne viendrait pas où son bon ange l’abandonnerait. On parle toujours des anges gardiens des petits enfants, jamais des anges gardiens des grandes personnes.
— Rassure-toi, Claire. Tu n’as qu’à bien faire attention, et tu sentiras toujours ton bon ange auprès de toi. Les grandes personnes s’occupent de beaucoup trop de choses et n’ont plus le temps de penser au Bon Dieu. Elles croient que leur bon ange les oublie, mais c’est elles, bien plutôt, qui oublient leur bon ange. La preuve, c’est qu’elles le retrouvent, lorsqu’elles ont un peu plus de temps, au moment de la mort. La Sainte Écriture cite même des cas où les anges, — les anges gardiens, bien entendu — se sont occupés de l’enterrement des grands Saints. Ce qui est certain, c’est que Monsieur le Curé, chaque fois qu’il conduit quelqu’un au cimetière, met la tombe sous la garde de l’ange du défunt.
— C’est pour cela qu’il est si tranquille, le cimetière, et qu’il y fait si bon, dit l’infirme. Alors, c’est fini ? l’ange n’a plus rien à faire ?
— Il n’a plus rien à faire si cette âme tombe en enfer. Là, les bons anges n’entrent pas, parce que s’ils entraient, ce ne serait plus l’enfer. Mais ils accompagnent leurs protégés au Purgatoire, et ils sont bien contents lorsque, sans tache aucune, absolument pareils à eux, ils les présentent enfin à Dieu.
Quelquefois, ils font le service des âmes, directement de la terre au ciel. C’est le cas des petits enfants que le Bon Dieu rappelle à lui.
Il y eut un silence. Claire songeait au petit frère qui était parti si vite, un matin de printemps où les cerisiers étaient en fleurs. Elle pensa : on pleure beaucoup, et pourtant, il n’y a pas que du chagrin dans ces larmes. Mais elle ne sut pas le dire. Les petites filles comme Claire pensent à une foule de choses qu’elles ne savent pas dire.
Mlle Gaby, qui, elle, sait très bien raconter et qui a dû voir beaucoup de pays, expliqua ce qui se passe en Espagne.
L’ARRIVÉE de Thérèse, sœur aînée de Colette, conduisant par la main son petit frère qu’on appelle Mimi, accorda tout le monde.
Thérèse a 12 ans. Mimi a 4 ans.
Thérèse est une grande fille qui sait comment il faut faire pour recevoir une dame en visite, lorsque maman n’a pas fini de recueillir les œufs dans le poulailler. Elle fait entrer, prie gentiment de s’asseoir, alimente la conversation (parfois, elle l’alimente beaucoup trop), ce qui fait dire : « Elle est avancée pour son âge ».
Michel — Mimi, si vous voulez — est un gros garçon avec des genoux éternellement sales et de beaux yeux noirs. Au goût des pompes liturgiques il joint le culte de l’automobile. Depuis le passage de Monseigneur en tournée de confirmation, il a décidé d’être ensemble évêque et chauffeur. Pour l’instant, c’est à peu près tout ce qu’on peut en dire. Il est encore petit.
Il est admis, le jeudi, à la section des filles du patronage.
Il arrive à petits pas, son nez rose tout humide encore d’avoir été débarbouillé.
Quand on vit grande Thérèse marcher, comme une maman, auprès du tout petit Mimi, le soulever pour lui faire descendre les trois marches, il n’y eut qu’un cri dans le groupe des fillettes : « Voilà l’ange gardien ! Voilà l’ange gardien ! »
— Et Mimi, dit Colette, sera le petit garçon de l’ange gardien.
Au fait, personne n’y avait songé. Des anges gardiens, on en trouve plus qu’on en veut, mais il faut bien qu’ils gardent quelque chose, ces anges, et qui voudrait se laisser garder et renoncer à être un ange ?
Toute la bande est debout, on entoure Mimi, on lui fait fête, on l’acclame.
Mimi ne comprend pas, mais il est visiblement heureux qu’on s’occupe tellement de lui, et il s’associe à l’enthousiasme général.
Hélas ! ce fut autre chose quand il fallut répéter.
— Tu vois, Mimi, Thérèse fera comme ça (Thérèse met sa main gauche sur l’épaule de Mimi et montre le ciel de l’index de la main droite) et toi, tu feras comme ça (on joint les menottes de Mimi) et tu marcheras bien sagement.
Mimi, joindre les mains et marcher sagement !
Le voilà, d’un seul coup, assis sur le gazon. L’ange gardien doit le cajoler pour le faire consentir à se remettre debout.
L’ange gardien
— Il faut être un bon petit garçon, dit Mlle Gaby, autrement le bon ange va pleurer.
Le bon ange se cache la figure et fait semblant de pleurer.
Mimi, qui aime bien son bon ange, se remet en marche, mais il oublie vite que les bons anges pleurent lorsque les petits garçons désobéissent, et il s’arrête.
Mlle Gaby lui fait un petit sermon.
— J’aime autant ne pas être un ange gardien, se dit plus d’une petite fille.
Enfin, le groupe de l’ange gardien se remet en route.
Pourquoi faut-il qu’un papillon, un beau papillon noir et feu, voltige tout près ? Le petit garçon de l’ange gardien court après le papillon. Tant pis pour le petit garçon, il marche dans les orties et se pique les mollets. Il pleure et il faut que son bon ange le console : « Voilà ce qui arrive aux désobéissants qui courent après les papillons ».
Les piqûres d’orties, les larmes, les paroles de l’ange gardien, font leur effet et le tour de la cour s’accomplit sans autre incident. Et même, sur un mot du bon ange, Mimi va cueillir un bouton d’or qui avait poussé contre le mur et l’offre gentiment à l’infirme qui sourit dans sa voiture.
— C’est tout à fait cela, dit Mlle Gaby. L’ange gardien conduit l’enfant dont il est chargé, il l’empêche de se faire piquer par toutes les méchantes choses qui poussent de tous côtés sur la terre et quand on lui désobéit on se fait mal. Le bon ange, qui est bon, comme son nom l’indique, nous console et il est content lorsqu’on fait un petit plaisir aux autres,comme Mimi qui vient de donner une fleur à Claire.
L’ange gardien consolateur
Bravo pour Mimi et son bon ange !
— Bravo ! bravo ! acclament les petites filles.
— Et nous, qu’est-ce qu’on fera, à la procession ? disent les autres.
— Vous, vous suivrez le groupe de l’ange gardien.
— N’importe comment ? demande Françoise.
— Comme à la sortie de la grand’messe, alors, ajoute Jeannette.
— Pas du tout, répond Mlle Gaby. Les anges ne sont pas mélangés, il n’y a jamais désordre chez les anges. Il y en a qui sont en tête, et d’autres après.
— Je veux être en avant, dit Yvette.
— Mademoiselle Yvette, dit Mlle Gaby, sachez que chez les anges ceux qui sont après ne veulent jamais la place de ceux qui sont avant. Ils sont très contents d’être là, parce que ce n’est pas la paresse qui les y a mis, mais le Bon Dieu. Tout le monde ne peut pas être premier. Ceux qui sont premiers aiment beaucoup ceux qui viennent ensuite et sont toujours gentils pour eux. Les plus beaux anges aident toujours les autres.
— Combien y a‑t-il de places, Mademoiselle ? demande la petite fille à robe écossaise. (Celle-là n’aime pas beaucoup l’effort et aime autant être aidée par les autres).
— Bon, dit Mlle Gaby, je vois que tu veux faire le dernier chœur, c’est entendu. (Puis s’adressant à toutes) 3 rangées de 3 chœurs d’anges, 3 fois 3…
— 9, chantonnent les enfants.
— 9 chœurs d’anges. Chacun a un nom que je vais vous dire. Ce nom sera inscrit en lettres de papier doré, sur une écharpe. Vous marcherez donc sur 3 rangs de 3. Au premier rang viennent d’abord les Séraphins et les Chérubins.
Les Séraphins sont les premiers anges de la Cour céleste.