La captivité d’Égypte. Moïse. Les dix plaies.

Auteur : Par un groupe de pères et de mères de familles | Ouvrage : Histoire Sainte illustrée .

Temps de lec­ture : 12 minutes

XI

— Quand finit ta per­mis­sion, Bernard ?

— Dans quatre jours, mon oncle.

— Que dirais-tu d’une ran­don­née en  ? Il faut que j’aille au Caire. Nous sommes abso­lu­ment sûrs de l’oi­seau désor­mais, et j’ai une envie rouge d’emmener Colette et Jean, qui a deux jours de congé cette semaine. Pour plus de sûre­té, je t’au­rais sous la main… Qu’en penses-tu ?

— Que ça m’enchante.

— Alors nous décol­le­rons demain matin de très bonne heure.

— Enten­du, mon oncle, et merci.

.… .… .… .… .… .… .… .…

Colette, enthou­sias­mée d’être du voyage, s’ins­talle la pre­mière dans l’Oi­seau-Bleu, lequel est un avion der­nier modèle, extrê­me­ment confortable.

Les deux petits assistent au départ, conster­nés. On ne les emmène pas. Nicole pleure, le nez dans un mou­choir trop petit. Les larmes coulent des deux côtés…

— Si Jacques était libre, explique Ber­nard, il serait venu à ma place et vous eût pris avec lui ; mais c’est trop grave d’emmener deux gosses comme vous sans leur papa. Arran­gez-vous pour obte­nir qu’il soit du pro­chain départ.

Là-des­sus, Ber­nard et Jean sautent à leur tour dans la car­lingue et, quelques minutes plus tard, les ailes bleues montent vers le ciel, toutes brillantes de la splen­dide lumière du matin.

— Papa, crie Colette, ne volez pas trop haut. J’ai tel­le­ment pro­mis aux petits de tout regar­der pour leur racon­ter ensuite.

— Au retour, mon­sieur le pro­fes­seur. Pour l’al­ler, nous allons piquer direc­te­ment sur le Caire, en sur­vo­lant la mer. En reve­nant, je te le pro­mets, nous sui­vrons et tra­ver­se­rons la mer Rouge.

— Oh ! mon oncle, réclame Ber­nard, si nous pou­vions faire escale quelques heures à Saint-Jean d’Acre ? Il y a là de tels sou­ve­nirs des Croisés !

— Impos­sible, mon gar­çon, nous n’a­vons pas le temps. Je veux bien sur­vo­ler len­te­ment la ville, c’est tout ce que je puis vous accorder.

L’at­mo­sphère est déli­cieuse. Pas de vent, pas de nuages. L’a­vion file comme une hiron­delle. Un peu plus tard au milieu d’in­nom­brables pal­miers, des mos­quées et des ruines se dessinent.

— Voi­là ! voi­là Saint-Jean d’Acre ! crie Bernard.

Jean et Colette se penchent légè­re­ment pour voir. Hélas ! impos­sible de dis­tin­guer quoi que ce soit. Quel dom­mage ! Ce doit être tel­le­ment pre­nant ces ves­tiges des Croi­sades, ces ruines des vieilles for­ti­fi­ca­tions et ces restes des somp­tueuses demeures de ceux qui, jadis, ont fui jusque-là, pour échap­per aux Turcs !

Ber­nard se résigne, mais en revanche quelle vue d’en­semble ! Saint-Jean d’Acre s’a­vance en pro­mon­toire. Juste en face, le mont Car­mel, et, dans l’anse, la mer, d’une teinte intra­dui­sible. L’eau est tel­le­ment lumi­neuse et pour­tant si pro­fonde, que Colette émer­veillée s’écrie :

— On dirait que les vagues sont faites en ailes de papillons, vous savez ces papillons des Indes qui sont brillants comme du cris­tal et pour­tant bleus, et pour­tant verts… Oh ! que c’est joli !

Mais déjà l’a­vion quitte la côte. Bien­tôt, c’est la pleine mer. L’oi­seau, tout bleu lui-même, vole entre le bleu du ciel et le bleu de l’eau… Per­sonne ne parle, cha­cun est comme gri­sé par cette féerie…

Puis les heures coulent et c’est l’É­gypte,… le del­ta, qui rap­pelle les plaines de Camargue ou de Beauce, sauf qu’i­ci ou là, entre les canaux, de grandes colonnes effon­drées gisent à terre, pro­ve­nant de quelque monu­ment loin­tain, dont les restes dorment là…

La des­cente et l’at­ter­ris­sage se font sans encombre sur le ter­rain d’a­via­tion du Caire. Repas joyeux dans l’un des res­tau­rants extra­mo­dernes, au bord du Nil.

Puis, comme le chef de famille s’en va très vite à ses affaires, Colette demande :

— Où nous retrou­ve­rons-nous, papa ?

— Ici même, ce soir, pour dîner.

La jeu­nesse a donc toute liber­té de flâ­ner à tra­vers la ville, mais avec quelle joie elle revient, quelques heures plus tard, vers la ter­rasse ombrée, au bord de l’eau, car la cha­leur est intense.

Le fleuve immense coule, lent et mou, por­tant une quan­ti­té de bateaux vil­las, véri­tables mai­sons de plai­sance, où viennent cher­cher un peu de fraî­cheur les habi­tants du Caire.

Jean, obser­va­teur et réflé­chi, fait remarquer :

— Quelle drôle de ville ! Des vil­las sur l’eau, des construc­tions anciennes comme des siècles,… des églises et des mos­quées ; des bâti­ments d’un moderne inouï et le vieux quar­tier qui est aus­si sale que mer­veilleux au point de vue artis­tique ; quant au nou­veau, on se croi­rait aus­si bien en France ou en Angleterre…

Colette, les yeux loin­tains, sou­rit à sa pensée :

— Si Moïse reve­nait main­te­nant, que dirait-il ?

— Il ne recon­naî­trait pas grand’­chose en tous cas !…

Colette, tou­jours rêveuse :

— Évi­dem­ment. Est-ce que tu t’ha­bi­tues, toi, Jean, à consta­ter que nous vivons actuel­le­ment là où ont vécu des per­son­nages qui nous semblent vieux comme le monde.

Regarde un peu la carte qui est ici pen­due au mur, pour les tou­ristes, je pense ? Vois-tu, contre le del­ta du Nil, l’emplacement de ce que fut jadis la terre de Ges­sen ? Donc, à quelque cent kilo­mètres de nous à peine, Joseph, maître de l’É­gypte, avait ins­tal­lé son père et ses frères.

Ber­nard s’ap­proche. Sa grande taille domine celle de Jean. Il regarde par-des­sus l’é­paule de son cousin.

— Et là, tiens ! Ram­sès, la ville royale que les Hébreux, réduits à l’es­cla­vage, bâtirent en briques. Avant de se ser­vir des briques, ils avaient dû les fabriquer.

Jean hausse un peu les épaules :

— Pour­quoi se sont-ils lais­sé domi­ner ain­si par les Égyptiens ?

— Que veux-tu, c’é­taient des étran­gers. On les appe­lait Hébreux : « Ceux qui viennent d’au delà. » Les Égyp­tiens les voyaient se mul­ti­plier avec crainte. C’est l’é­ter­nelle his­toire, il y eut riva­li­té ; le plus fort déci­da de réduire le plus faible, et comme, mal­gré son escla­vage, le peuple hébreu se mul­ti­pliait, Ram­sès II crut en finir en fai­sant jeter dans le Nil tous les gar­çons qui venaient de naître.

— C’est abo­mi­nable ! déclare Colette. Seule­ment Ram­sès avait comp­té sans le Bon Dieu. Que je serais contente d’a­voir ici Nicole et Bru­no, et de leur faire contem­pler le Nil,… et de leur dire com­ment fut sau­vé le petit Moïse. Car je vois très bien la scène quelque part, sur les bords du fleuve. Le tout petit, expo­sé dans une cor­beille par­mi les roseaux. La fille du Pha­raon, entou­rée de ses ser­vantes, qui vient se bai­gner !… elle aper­çoit la cor­beille, elle a bon cœur et sauve le bébé. Comme par hasard une jeune fille est là, qui s’offre à trou­ver une nour­rice pour l’en­fant, et cette jeune fille qui s’est dis­si­mu­lée dans les roseaux, le cœur bat­tant, et qu’on prend pour une étran­gère, c’est la sœur de Moïse.

Tu ne trouves pas ça joli, Bernard ?

— Si, bien sûr. Mais j’aime autre­ment mieux pen­ser que Moïse gran­dit, avec, au cœur, le désir fou de déli­vrer son peuple.

— Avant qu’il y par­vienne, il en ver­ra de rudes, affirme Jean. Regarde donc encore la carte. Il lui a fal­lu des jambes solides, si c’est à pied qu’il a tra­ver­sé le désert, pour se réfu­gier à la fin chez Jethro, vois-tu, là, dans cette terre de Madian.

Colette fixe la carte :

— C’est vrai. Ne le racon­tez pas aux petits… Mais je ne pen­sais plus du tout à cette fuite, pour une bonne rai­son, c’est que j’ai com­plè­te­ment oublié ce qui la motiva.

— Le pro­fes­seur « sèche », gouaille gaie­ment Ber­nard ; mais nous, « les cancres, » nous allons te remettre sur la voie.

Voyons, tu ne sais plus que, pour avoir éner­gi­que­ment défen­du un Hébreu, frap­pé par un Égyp­tien, Moïse fut condam­né à mort ?

Moïse apporté sur les bords du fleuve
Colette dit : — J’i­ma­gine le petit Moïse appor­té ici, sur les bords du fleuve.

On tuait les Hébreux, on détrui­sait leur peuple, Moïse les défend, il est cou­pable, évi­dem­ment ! Ces his­toires-là me mettent en rage, tu entends, en rage ! Je crois que, dans mon cer­cueil, elles me feront encore bondir !

— Mais non, mon vieux, dit Jean posé­ment. Pour une bonne rai­son, quand ton corps sera dans le cer­cueil, ton âme, j’es­père, sera en para­dis. Et alors tu oublie­ras l’in­jus­tice des hommes pour jouir de la jus­tice de Dieu.

— Et puis, dit Colette ardem­ment, même en ce monde, on la sent par­fois pas­ser, cette jus­tice de Dieu.

Moïse entend Dieu dans le buisson ardentJean, de son air réflé­chi, reprend :

— Moïse en a bien su quelque chose le jour où, sur la mon­tagne d’Ho­reb, Dieu lui par­la dans le feu du buis­son ardent pour lui ordon­ner d’al­ler déli­vrer son peuple… et en termes nets « Va ! Je t’en­voie près du Pha­raon pour faire sor­tir mon peuple d’É­gypte. » Tu n’as tout de même pas oublié cela, Colette ?

— Non, je puis même te dire la suite :

Moïse revint en Égypte por­ter au Pha­raon le mes­sage de Dieu. Mais, au lieu d’o­béir, le roi aggra­va la ser­vi­tude des Hébreux, et c’est alors que Dieu frap­pa l’É­gypte de ses .

— À nous trois, plai­sante Ber­nard, je pense que nous allons être capables de dési­gner les dix plaies en ques­tion. Je suis sûr de la pre­mière : Les eaux du Nil furent comme chan­gées en sang… Et même de la seconde : Des gre­nouilles sor­tirent du fleuve et des marais, pour enva­hir les mai­sons des Égyptiens.

— Com­ment, en face de pareils fléaux, le Pha­raon n’a-t-il pas lais­sé par­tir les Hébreux ?

— Allons donc ! Tu me fais rire ! Pen­dant le sinistre, il disait : Par­tez ! Et puis, le fléau pas­sé, il regret­tait ses mil­liers d’es­claves qui tra­vaillaient à force,… et alors, eh bien ! il les gar­dait. C’est simpliste.

— Mais, reprend Jean sérieu­se­ment, il avait à faire à plus fort que lui. Il semble bien que de sem­blables châ­ti­ments aient été miraculeux ?

Ber­nard répond sur le même ton :

— Oui, dans la manière dont Dieu les a sus­ci­tés. Il paraît que ces sortes de nuées de sau­te­relles, par exemple, et autres phé­no­mènes étranges ne sont pas incon­nus dans ces régions. Il est donc pos­sible que Dieu se soit ser­vi de causes natu­relles pour punir les Égyp­tiens,… mais ce qui n’est pas natu­rel, c’est que ces fléaux étaient annon­cés d’a­vance au Pha­raon, qu’ils arri­vaient au jour pré­dit, qu’ils dépas­saient tout ce qu’on avait jamais vu et sur­tout qu’ils attei­gnaient les Égyp­tiens, alors que les Hébreux n’en souf­fraient pas. Il y a donc là, évi­dem­ment, inter­ven­tion mira­cu­leuse de la Providence.

— Très juste. Mais diable ! ces fameuses plaies, il y en a encore huit. Allons-nous être capables de les retrou­ver dans nos mémoires ?

— Oh ! dit gaie­ment Colette, cette fois je vous tiens !

Sep­tième plaie d’É­gypte – Les ténèbres

« Les mou­che­rons tour­men­tèrent les hommes.

« Puis des mouches insup­por­tables suc­cé­dèrent aux moucherons.

« La peste enle­va presque tous les animaux.

« Les hommes furent ron­gés de ter­ribles ulcères.

« La grêle dévas­ta les moissons.

« Les sau­te­relles rava­gèrent la campagne.

« Les ténèbres enva­hirent l’É­gypte pen­dant trois jours, tan­dis qu’un vent brû­lant embra­sait l’atmosphère.

« Enfin, un ange, envoyé de Dieu, fit périr tous les pre­miers-nés des Égyptiens.

— Bra­vo !

— Bra­vo pour qui ? dit une voix toute proche.

Colette lève la tête :

— Ah ! c’est vous, papa, vous m’a­vez fait presque peur. Nous ne vous atten­dions pas si tôt.

— Si tôt ! mais, mes enfants, vous n’a­vez pas regar­dé vos montres. Il est 21. heures, ni plus ni moins.

La jeu­nesse dit ensemble :

— Ce n’est pas possible !

— Par­fai­te­ment pos­sible. Je com­prends qu’on rêve au bord du Nil, mais je veux sur­tout que vous rêviez dans vos lits.

Nous allons prendre quelque chose, et puis rega­gner l’hô­tel, où j’ai rete­nu vos chambres, car à l’au­rore il nous fau­dra nous envo­ler de nouveau.

Coloriage de l'Ancien Testament - extermination des premiers-nés des Egyptiens


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