Le petit ami de Jeanne d’Arc

| Ouvrage : La semaine de Suzette .

Temps de lec­ture : 5 minutes
Le 16 mars 2020, c'est l'exact centenaire de la canonisation de . Voici un petit hommage à notre grande sainte nationale !

Lorsque Jeanne d’Arc[1] était encore à Dom­ré­my, elle avait pour voi­sins de pauvres gens dont le fils unique était infirme. Petit Pierre avait sept ou huit ans de moins que Jeanne.

Le pauvre enfant était bos­su et ne mar­chait qu’a­vec des béquilles ; ne pou­vant se mêler aux jeux des autres gar­çons, il était rebu­té et sou­vent raillé par eux.

Sa vie eût donc été fort triste sans Jeanne qui l’a­vait pris en affec­tion ; elle le cares­sait, le conso­lait, l’emmenait gar­der les bêtes avec elle dans les champs ; et lui contait des histoires.

Petit Pierre ado­rait Jeanne. Quand celle-ci lui apprit qu’elle avait une mis­sion à rem­plir, qu’elle allait par­tir pour la bataille contre les Anglais, il pen­sa mou­rir de chagrin.

Jeanne le conso­la de son mieux. « Quand le roi sera sacré à , dit-elle, je revien­drai ! — Oh ! s’é­cria Petit Pierre, les yeux brillants, j’i­rai à Reims te chercher ! »

Jeanne par­tit armée en guerre, sur un des­trier, se retour­nant pour faire des signes d’a­dieu au petit infirme qui lui envoya des bai­sers tant qu’il put la voir.

Bien­tôt on apprit que Jeanne avait rejoint le Dau­phin, déli­vré Orléans, bat­tu par­tout les Anglais, et que main­te­nant elle mar­chait sur Reims avec le roi, afin de l’y faire sacrer.

Le père de Jeanne d’Arc réso­lut d’al­ler aus­si à Reims pour voir sa fille ; les deux sœurs de l’hé­roïne devaient l’ac­com­pa­gner ain­si que plu­sieurs amis. Petit Pierre sup­plia tel­le­ment qu’on consen­tit à l’emmener.

Mal­gré son infir­mi­té il ne se plai­gnit pas une fois de la fatigue. La petite troupe arri­va à Reims le jour même du . Une foule immense encom­brait les rues. Petit Pierre et ses amis se ran­gèrent contre un mur.

Bien­tôt le cor­tège appa­rut : d’a­bord des musi­ciens, puis des hérauts d’armes, des sol­dats, des pages, des sei­gneurs, des prêtres et enfin Jeanne d’Arc, mon­tée sur son che­val de bataille, et tenant son éten­dard à la main.

En la revoyant, Petit Pierre ne put conte­nir son émo­tion. Il cria : « Jean­nette ! Jean­nette ! » et s’é­lan­ça en avant, les bras ten­dus ; mais n’é­tant plus sou­te­nu par ses béquilles, il rou­la sous les pieds des chevaux.

Un grand tumulte se fit, on arrê­ta l’es­corte, on rele­va l’en­fant. Hélas il était frap­pé à mort. Il rou­vrit cepen­dant les yeux et eut la joie de voir Jeanne pen­chée sur qui le sou­le­vait dans ses bras.

« Je suis venu te cher­cher, Jean­nette, bal­bu­tia-t-il, tu vas venir avec moi, n’est-ce pas ? » Et en sou­riant, il refer­ma les yeux. C’est ain­si que mou­rut heu­reux le petit ami de Jeanne d’Arc.

La semaine de Suzette, mai 19015.

  1. [1] Cette bande des­si­née est parue dans la Semaine de Suzette en 1915 ; aus­si Jeanne d’Arc n’é­tait pas encore cano­ni­sée. C’est pour­quoi le scé­na­riste ne la nomme pas « sainte Jeanne d’Arc », mais seule­ment « Jeanne d’Arc ».

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