Le 16 mars 2020, c'est l'exact centenaire de la canonisation de sainte Jeanne d'Arc. Voici un petit hommage à notre grande sainte nationale !
Lorsque Jeanne d’Arc[1] était encore à Domrémy, elle avait pour voisins de pauvres gens dont le fils unique était infirme. Petit Pierre avait sept ou huit ans de moins que Jeanne.
Le pauvre enfant était bossu et ne marchait qu’avec des béquilles ; ne pouvant se mêler aux jeux des autres garçons, il était rebuté et souvent raillé par eux.
Sa vie eût donc été fort triste sans Jeanne qui l’avait pris en affection ; elle le caressait, le consolait, l’emmenait garder les bêtes avec elle dans les champs ; et lui contait des histoires.
Petit Pierre adorait Jeanne. Quand celle-ci lui apprit qu’elle avait une mission à remplir, qu’elle allait partir pour la bataille contre les Anglais, il pensa mourir de chagrin.
Jeanne le consola de son mieux. « Quand le roi sera sacré à Reims, dit-elle, je reviendrai ! — Oh ! s’écria Petit Pierre, les yeux brillants, j’irai à Reims te chercher ! »
[1] Cette bande dessinée est parue dans la Semaine de Suzette en 1915 ; aussi Jeanne d’Arc n’était pas encore canonisée. C’est pourquoi le scénariste ne la nomme pas « sainte Jeanne d’Arc », mais seulement « Jeanne d’Arc ».↩
Temps de lecture :16minutesSur l’eau claire de l’Oise, à cris joyeux, quatre vaillants garçons ont poussé un canot. C’est l’automne : le vent frais qui balaie les nuages dans le ciel d’un bleu pâle fait frissonner la surface de la rivière et voltiger les feuilles rousses des grands bois de l’Ile de France. « Holà, ensemble ! Allez, mes compagnons ! » Et les rameurs de frapper en cadence, et le léger esquif de filer au courant.
Ces garçons qui ont tous quatre environ douze ans, à les voir ne croirait-on point de petits paysans ? Comme les fils des fermiers du temps, ils portent chausses de grosse toile, courte robe par dessus et un surcot de drap bourru, le tout passablement sali d’avoir péché les grenouilles dans les vases de la rivière. Pourtant, à les regarder mieux, on observe sur leurs traits une distinction naturelle, une finesse de bonne éducation ; et particulièrement le plus grand, le plus mince, magnifique enfant aux longs cheveux blonds bouclés, aux yeux doux, au profil délicat, à qui ses camarades paraissent obéir sans hésiter. Ne vous y trompez pas. Ce garçonnet n’est autre que Monseigneur Louis, fils aîné de France, qui, dans quelques vingt ou trente ans sans doute, sera roi.
Quelques vingt ou trente ans… Non, la Providence en a autrement décidé. Que sont ces cavaliers ? Ils suivent la rivière en hélant le canot des garçons. Tout pris par leur jeu, ceux-ci, d’abord, n’entendent même pas. « Un, deux ! un, deux ! » Et les rames continuent à battre vigoureusement les eaux paisibles. Enfin ces cris attirent leur attention. « Arrêtez ! On nous appelle ! »
Quand ils abordent, le peloton des cavaliers les attend. D’un coup d’œil, Monseigneur Louis reconnaît le Connétable, le Grand Écuyer, le Chapelain du Palais et de hauts officiers. Qu’y a‑t-il ? Ce n’est point pour abréger leur innocente promenade qu’on a envoyé vers lui tous ces puissants seigneurs. Et tous ont l’air grave, la face soucieuse et inquiète. D’instinct,avant même que le Connétable ait parlé, l’enfant a deviné la douloureuse nouvelle. Il pense à son père, le roi Louis VIII, qui se bat quelque part dans le sud du royaume et a déjà si bravement taillé en pièces l’Anglais. A la guerre, sait-on qui peut être indemne ? « Monseigneur mon père ?» interroge-t-il. Rapide, il a repris sa cotte demi-longue de drap fin, serrée d’une cordelière de soie et d’or, son manteau écarlate doublé de petit-gris qu’il avait posé à terre avant de sauter dans la barque. Rien qu’à la façon dont ces hommes s’inclinent devant lui, il a compris : non pas au combat, mais d’une maladie étrange, d’une fièvre inconnue, —et certains diront peut-être du poison,— le roi Louis VIII est mort en
Jeanne, la « Sainte de la patrie », naquit en la fête de l’Épiphanie de l’année 1412, au petit village de Domremy, en Lorraine.
Son père, Jacques d’Arc, sa mère Isabelle Romée, étaient de simples paysans, laborieux et bons chrétiens.
« J’ai appris de ma mère, mon Pater, mon Ave Maria, et mon Credo », disait Jeanne plus tard. « Tout ce que je crois, je l’ai appris de ma mère. »
Jeannette, comme on l’appelait au village, semblait attirée vers le bon Dieu. Elle assistait avec bonheur aux catéchismes de M. le Curé, aux instructions et aux cérémonies.
La petite maison où Jeanne vint au monde et grandit, existe encore, toute proche de l’église.
L’enfant profitait de ce voisinage pour courir à l’église dès que la besogne lui laissait un instant.
Sa foi vive lui montrait Nôtre-Seigneur toujours présent dans le tabernacle. Agenouillée sur le pavé, devant l’autel, elle priait avec une ferveur extrême.
Que de fois les habitants de Domremy la surprirent ainsi, les mains jointes, tout absorbée par sa conversation avec le bon Dieu !
Elle assistait avec un profond recueillement aux messes célébrées par le curé de la paroisse.
A la tombée du jour, la cloche appelait les paroissiens pour la prière. Jeannette s’empressait de courir à l’église. Parfois cependant, son travail la retenait au loin. Dès que le vent lui apportait le son de l’Angélus, elle s’agenouillait dans les champs pour prier. Elle aimait entendre les cloches qui sont la voix de l’église. Or, il paraît qu’au moment de la première Communion de Jeannette, le sonneur oubliait parfois son office. L’enfant le suppliait d’être plus exact, et elle lui promettait en récompense les écheveaux de laine blanche qui venaient de ses brebis.
Dès l’âge de raison, Jeannette se confessait souvent, tant elle désirait purifier son âme des moindres taches.
Après sa première communion, elle se confessa plus fréquemment encore pour se préparer au grand bonheur de recevoir Jésus dans son cœur.
Tous ceux qui connaissaient Jeannette remarquaient combien tendrement elle aimait la Sainte Vierge.
Dans l’église du village, on la trouvait souvent agenouillée devant la statue de Marie. Elle y allumait des « chandelles » comme elle disait, ou bien elle arrangeait en bouquets les plus jolies fleurs de son jardin.
Quand venait le mois de mai, chaque samedi, Jeannette toute joyeuse s’en allait en pèlerinage avec ses amies vers les chapelles des environs dédiées à la sainte Vierge : Notre-Dame de Bermont, ou l’ermitage Sainte-Marie, situé sur une colline qui domine la vallée de la Meuse.
En cheminant à travers l’herbe fraîche des prés, les enfants cueillaient des fleurs qu’elles déposaient aux pieds de la Vierge et de l’Enfant Jésus.
Simple, franche, douce, joyeuse, Jeanne se faisait aimer de tout le monde. « Elle n’avait pas sa pareille dans la paroisse, disait le curé, jamais je n’en vis une meilleure. »
Les habitants convenaient que c’était la vérité. Ils admiraient le courage de la jeune fille au travail. Tout le long du jour, elle aidait sa mère dans les soins du ménage, accompagnait son père et ses frères aux champs, gardant le troupeau dans les prairies qui entouraient le village.
Le soir, à la veillée, Jeannette se mettait à filer et à coudre. Elle le faisait avec tant d’adresse que plus tard, elle put dire fièrement : « Pour coudre et filer, je ne crains pas femme de Rouen ! »