Retour du peuple Juif à Jérusalem. Guerre sainte des Machabées. La domination romaine.

Auteur : Par un groupe de pères et de mères de familles | Ouvrage : Histoire Sainte illustrée .

Temps de lec­ture : 12 minutes

XXIV

Après la ran­don­née de Baby­lone, qu’il fait donc bon, en vacances, au logis.

Ber­nard jouit de sa fin de per­mis­sion comme un vrai col­lé­gien. Il vient d’en­trer à la cui­sine et, sans plus de façon, empoigne par les épaules Marianick.

— Qu’est-ce qui te prend ?

— Je t’emmène, là, dehors, un ins­tant. J’ai quelque chose à te faire voir. Il y en a juste pour deux minutes.

Riant et mau­gréant à la fois, Maria­nick se laisse entraîner.

Dans la prai­rie l’a­vion repose.

— Je ne veux pas aller voir ton oiseau de mal­heur. C’est des inven­tions du diable !

— Maria­nick, la calom­nie est un péché. Je veux que tu regardes, au moins une fois, cet oiseau que tu détestes sans savoir pourquoi.

— Sans savoir pour­quoi ? Il a peut-être pas cas­sé la jambe de Colette ?

— Ça, c’est un acci­dent. Les car­rioles qui vont au par­don de Sainte-Anne ont aus­si des accidents…

Maria­nick n’a­vait pas pré­vu cette réponse ; elle avance, un peu ennuyée, vers l’a­vion, qui a l’air bien tran­quille, et même un peu pataud, là, sur la prairie.

— Voyons, reprend Ber­nard, pour­quoi ce pauvre oiseau a‑t-il le don de te mettre à l’envers ?

Regarde les sièges. Tiens, je vais t’ai­der, entre dans la car­lingue et assieds-toi.

— M’as­seoir là-dedans ! Jamais de la vie ! Y a s’ment pas ou mettre un pou­pon, tant que c’est petit.

— Maria­nick, voi­là main­te­nant que tu vas faire un men­songe. Assieds-toi, tu verras.

Et sans trop savoir com­ment, Maria­nick se trouve très confor­ta­ble­ment ins­tal­lée dans un excellent fau­teuil de cuir.

— Tu ne diras plus qu’on y est mal. Appuie-toi bien. C’est ça . Vois comme je suis bien aus­si, mon manche à balai res­semble tout bon­ne­ment au volant d’une auto.

Si Maria­nick pou­vait voir le sou­rire de Ber­nard ! Mais vrai­ment, on est bien, les cuirs sont jolis, et elle s’a­muse presque à tout regar­der, quand il lui semble éprou­ver un léger mouvement.

Marianick en avion jusquà Jérusalem
Ber­nard, entends-tu ? Bernard !!!

— Ber­nard, qu’est-ce que tu fais ?

— Rien du tout, je déplace un peu l’oi­seau ; il roule sur ses roues comme une
voi­ture. Je vais le ran­ger là, à côté, bien à l’ombre.

Mais, ô hor­reur, le nez de l’a­vion se redresse et la prai­rie semble tout d’un coup s’é­loi­gner. Maria­nick, cram­pon­née des deux mains aux bras du fau­teuil, hurle :

— Ber­nard, tu es un vrai démon ! Sainte Vierge Marie ! des­cends tout de suite ! Ah ! bonne sainte Anne ! Si c’est pas hon­teux, à ton âge, de trom­per les gens… Non, mais v’là les nuages qu’approchent !

Ber­nard, entends-tu ? Bernard !!!

La bouche aux oreilles à force de rire, Ber­nard, tout dou­ce­ment, fait deux fois le tour de la prai­rie, à hau­teur moyenne, et plus dou­ce­ment encore atterrit.

Alors il se retourne :

— Là, tu vois, je remets l’oi­seau à l’ombre comme je te l’ai pro­mis, et nous allons bien gen­ti­ment ren­trer tour­ner tes sauces.

Maria­nick est muette de fureur, et Ber­nard s’at­tend à tout, s’a­vouant que, quoi qu’il arrive, il ne l’au­ra pas volé.

Qui le croi­rait ? Le soir, fai­sant ses confi­dences à maman, Maria­nick déclare presque tout bas :

— Faut pas le dire à cet enra­gé de Ber­nard, y serait trop content, mais c’est tout de même pas bête et ben joli de cou­rir comme ça, à tra­vers le ciel. Si c’é­tait mon­sieur, qu’est un homme res­pec­table, qui m’emmenait, en véri­té je crois ben que je m’en irais jus­qu’à Paris…

Et Maria­nick est prise au mot. Non pas pour voler jus­qu’à Paris, mais pour faire le pèle­ri­nage de .

Papa est obli­gé d’y pas­ser quinze jours. Jacques et sa femme n’y sont jamais allé. L’oc­ca­sion est ten­tante, sur­tout par la voie des airs, et l’on s’en­vole en deux avions…

Yamil, depuis quelques semaines, est si sage que maman a cru pou­voir l’emmener. La joie le rend muet, il coule vers Maria­nick des yeux pour­tant encore malins, rêvant inté­rieu­re­ment de voir pas­ser sur son vieux visage quelque reflet de frayeur, mais Maria­nick est Bre­tonne… Du moment qu’elle est là, c’est qu’elle l’a bien vou­lu et pas un ins­tant elle ne céde­ra à la peur, pas plus que ses aïeux, à la barre de leur barque de pêche, les jours de gros temps.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Jéru­sa­lem !… On débarque le soir et l’on s’ins­talle à la Casa Nova.

Au matin, tan­dis que maman pro­longe ses dévo­tions à la cha­pelle, Gene­viève et son mari vont au Saint-Sépulcre, et Colette, Ber­nard et les plus jeunes montent len­te­ment vers l’es­pla­nade du Temple. Les enfants butent sur les ter­ribles pavés ronds des petites ruelles et res­pirent, non sans dégoût, l’o­deur de fri­ture et de bananes trop mûres qui s’ex­hale des échoppes au long des rues.

Zorobabel montre les plans du Temple de Jérusalem à CyrusAus­si quelle joie d’at­teindre l’esplanade !

— Si nous res­tions un peu ici à l’ombre de ce pan de:mur et de ces quelques cyprès ?

— Je ne demande pas mieux, répond Colette. C’est tel­le­ment beau !

— Et puis, si tu expli­quais, réclame Nicole insatiable.

— Ce sera peut-être la der­nière fois ; nous tou­chons à la fin de notre His­toire Sainte et nous n’a­vons qu’à regar­der tous ces gens qui vont et viennent autour de nous pour nous ima­gi­ner les Juifs au retour de leur captivité.

De Baby­lone ici, quel voyage !

Pierre regarde sa sœur :

— Et, comme tou­jours, à pied ! ou sur leurs ânes et leurs cha­meaux ! Ce qu’ils devaient âtre fatigués.

— Mais si heu­reux ! Un des­cen­dant de David, Zoro­ba­bel, avait gui­dé leur marche vers le pays de leurs aïeux, et main­te­nant, ici même, ils recons­trui­saient le Temple de Dieu. Ce n’é­tait plus celui de Salo­mon, évi­dem­ment, mais il était encore bien beau ; et puis Jésus, un jour, devait y entrer.

Jean mur­mure :

— Quel dom­mage qu’il n’en reste rien !

— Si, reprend Ber­nard, qui consulte sérieu­se­ment son guide. À côté de nous, ces quelques colonnes en sont pro­ba­ble­ment, et, au-des­sous, ces assises lui appar­tiennent certainement.

— Main­te­nant, dit Colette, pre­nons l’es­ca­lier. Don­nez-nous la main, les petits ; mon­tons jus­qu’aux rem­parts. Tu te sou­viens, Ber­nard, la vue y est immense et magnifique.

— Oui, mais atten­tion ! Abrite les petits der­rière les cré­neaux, car le vent est ter­rible. Gare à ton cha­peau, Nicole ! S’il est empor­té jus­qu’en Gali­lée, nous n’i­rons pas cou­rir après.

Nicole, prise de peur, empoigne son cha­peau des deux mains en disant :

— Jus­qu’en Gali­lée,… où c’est ?

Ber­nard s’ap­proche de l’ou­ver­ture entre deux créneaux :

— Je vais te sou­le­ver un peu. N’aie pas peur. Je te tiens. Viens, Pierre, regarde aus­si. Devant nous, cette col­line, c’est le mont des Oli­viers, et très au nord, au delà, la Sama­rie et, plus loin encore, la Gali­lée. Et puis, tour­nons-nous vers le sud. Tout autour de Jéru­sa­lem, jus­qu’aux limites de l’ho­ri­zon, c’est la Judée, d’où les Juifs tirent leur nom.

— Com­pre­nez bien, pré­cise Colette, nous avons ici, sous nos yeux, ce pays que les Juifs réoc­cu­pèrent à leur retour de cap­ti­vi­té. Ils subirent très vite la domi­na­tion des rois de Perse qui s’é­taient empa­rés de l’As­sy­rie, et même Alexandre le Grand vint à Jéru­sa­lem, mais en roi pacifique.

Éléazar subit les supplices pour garder sa foisupplices pour garder sa foiJean, silen­cieux à son habi­tude, ne peut s’empêcher d’ajouter :

— C’est ter­rible, tout de même, ce que les Juifs en ont vu ! Dire qu’a­près le par­tage de l’empire d’A­lexandre, cette pauvre petite Judée devint tri­bu­taire de l’É­gypte pen­dant près de cent ans, et puis c’est Antio­chus le Grand, roi de Syrie, qui s’en empare à son tour et les Juifs n’ont même plus de royaume pro­pre­ment dit.

Colette réflé­chit :

— Il me semble que c’est alors qu’ils se dis­persent de plus en plus et forment la majeure par­tie de la popu­la­tion, non seule­ment de la Judée, mais de cette Sama­rie et de cette Gali­lée, qui sont situées là-bas, au nord, devant nous.

Jean répond sérieusement :

— C’est vrai, mais cette dis­per­sion ne les met pas à l’a­bri de la per­sé­cu­tion affreuse que déchaîne contre eux cet autre roi de Syrie, Antio­chus Épi­phane. Tu te sou­viens ? Jéru­sa­lem sac­ca­gée, le Temple pillé,… des mil­liers de Juifs mas­sa­crés ou ven­dus comme esclaves. Peut-être n’ont-ils jamais tant souf­fert, mais, cette fois du moins, avec un rude courage.

Ber­nard, regarde donc un peu ton bou­quin. Il fau­drait racon­ter aux petits cette der­nière époque de manière à ce qu’ils s’en souviennent.

— Non, pas besoin de livre. C’est l’é­poque héroïque du Peuple de Dieu.

Nicole, le nez au vent :

— L’é­poque héroïque ?

— Oui, celle où on a du cran. Écoute un peu.

Un vieillard, Éléa­zar, a subi tous les sup­plices plu­tôt que de renon­cer à sa foi. Sept enfants d’une même famille se sont lais­sé jeter, pieds et mains cou­pés, langue arra­chée, dans une chau­dière, et cela sous les yeux de leur mère, qui les encou­ra­geait l’un après l’autre à regar­der le Ciel, où ils allaient entrer. Son der­nier enfant, si jeune qu’on eût pu craindre qu’il man­quât de cou­rage, mou­rut en répé­tant quelque chose comme ceci : « Je n’o­béi­rai pas à l’ordre d’An­tio­chus, mais j’o­béi­rai à la loi de Moïse, qui est la loi de Dieu. » Après ses sept enfants, la mère fut éga­le­ment martyrisée.

Lire la bible en ligne : Le triomphe de Judas MaccabéeNicole est fré­mis­sante et Bru­no écoute en dévi­sa­geant l’o­ra­teur. Ber­nard, lui, s’emballe :

— Je vous ai dit que c’é­tait l’é­poque héroïque.

Un prêtre de Jéru­sa­lem, Matha­thias, s’en­fuit d’a­bord dans la mon­tagne avec ses cinq fils. De là, il appelle les Juifs à défendre avec lui leur reli­gion et leur patrie. C’est une guerre sainte… comme plus tard les Croi­sades, la Mis­sion de Jeanne d’Arc…

L’un des fils de Matha­thias, Judas, sur­nom­mé Macha­bée, — ce qui veut dire mar­teau — à cause de sa bra­voure, réunit six cent mille hommes et, à leur tête, bous­cule l’en­ne­mi, rem­porte vic­toire sur vic­toire, rentre à Jéru­sa­lem, puri­fie le Temple qui avait été sac­ca­gé et y réta­blit le culte.

— Hour­rah ! fait Pierre, en jetant en l’air son béret.

— Cette fois, c’est fini ! déclare Nicole satis­faite. Les Juifs vont être tranquilles…

— Non, pas encore ! Judas Macha­bée essaye de faire alliance avec Rome, mais il est tué dans une bataille. Son frère Jona­thas délivre de nou­veau la Judée et la gou­verne aus­si sage­ment que les juges d’au­tre­fois ; mais il est atti­ré dans un guet-apens et mas­sa­cré. Après lui, sept autres princes de la même famille se suc­cèdent ; l’un d’eux, Jean Hir­can, repousse le roi de Syrie, conquiert la Sama­rie, refait en quelque sorte le royaume de Salo­mon ; mais Rome guettait.

Nicole a un sou­pir de lassitude :

— Ça ne fini­ra jamais ! Rome ! Qu’est-ce que c’é­tait encore que Rome ?

récits de la Bible : La Palestine fut annexée à l'Empire romain.
La Pales­tine fut annexée à l’Em­pire .

— La capi­tale d’un empire immense. Les géné­raux de cet empire pro­fi­tèrent des divi­sions qui déchi­raient le Peuple de Dieu.

Un jour l’un d’eux, Pom­pée, s’empara de Jéru­sa­lem et annexa la Pales­tine à l’Em­pire romain. Un prince usur­pa­teur, Hérode, par­vint à obte­nir de Rome le titre de roi pour une par­tie de la Pales­tine. Il fit mas­sa­crer tous les Juifs qui le gênaient. C’é­tait un prince ambi­tieux et cruel.

— Mais, dit Pierre, pris tout à coup d’une idée subite, nous y sommes !

— Que veux-tu dire ?

— Mais, Colette, que l’His­toire Sainte est finie ! Cet Hérode, c’est celui qui ver­ra naître Notre-Seigneur.

— Par­fai­te­ment ! Seule­ment nous en repar­le­rons ailleurs. J’ai une idée… Inutile de me la deman­der, je ne la confie­rai qu’à maman.


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