Étiquette : <span>Animaux</span>

Auteur : Lemaître, Jules | Ouvrage : Autres textes .

Temps de lec­ture : 9 minutes

La vieille Sépho­ra habi­tait le vil­lage de Bethléem.

Aux alentours de BethléhemElle vivait d’un trou­peau de chèvres et d’un petit champ plan­té de figuiers.

Jeune, elle avait été ser­vante chez un prêtre, en sorte qu’elle était plus ins­truite des choses reli­gieuses que ne le sont d’or­di­naire les per­sonnes de sa condition.

Reve­nue au vil­lage, mariée, plu­sieurs fois mère, elle avait per­du son mari et ses enfants. Et alors, tout en res­tant secou­rable aux hommes selon ses moyens, le meilleur de sa ten­dresse s’é­tait repor­té sur les bêtes. Elle appri­voi­sait des oiseaux et des sou­ris ; elle recueillait les chiens aban­don­nés et les chats en détresse ; et sa petite mai­son était pleine de tous ces humbles amis.

Elle ché­ris­sait les , non seule­ment parce qu’ils sont inno­cents, parce qu’ils donnent leur cœur à qui les aime et parce que leur bonne foi est incom­pa­rable, mais encore parce qu’un grand besoin de jus­tice était en elle.

Elle ne com­pre­nait pas que ceux-là souffrent qui ne peuvent être méchants ni vio­ler une règle qu’ils ne connaissent pas.

Elle s’ex­pli­quait tant bien que mal les souf­frances des hommes. Ins­truite par le prêtre, elle ne croyait pas que tout finit dans la paix dor­mante du schéol, ni que le Mes­sie, quand il vien­drait, dût sim­ple­ment éta­blir la domi­na­tion ter­restre d’Is­raël. Le « royaume de Dieu », ce serait le règne de la jus­tice par delà la tombe. Il appa­raî­trait clai­re­ment, dans ce monde incon­nu, que la dou­leur méri­tée fut une expia­tion. Et quant à la dou­leur immé­ri­tée et sté­rile (comme celle des petits enfants ou de cer­tains mal­heu­reux qui n’ont que médio­cre­ment péché), elle ne sem­ble­rait plus qu’un mau­vais rêve, et serait com­pen­sée par une somme au moins égale de félicités.

Les animaux à Noël - légendeMais les bêtes qui souffrent ? Mais celles qui meurent len­te­ment de mala­dies cruelles, — comme les hommes, — en vous regar­dant de leurs bons yeux ? Mais les chiens dont la ten­dresse est mécon­nue, ou ceux qui perdent le maître à qui ils s’é­taient don­nés, et qui se consument de l’a­voir per­du ? Mais les che­vaux, dont les jour­nées si longues ne sont qu’un effort hale­tant, une las­si­tude sai­gnante sous les coups, et dont le repos même est si morne dans l’obs­cu­ri­té des écu­ries étroites ? Mais les fauves cap­tifs que l’en­nui ronge entre les bar­reaux des cages ? Mais tous ces pauvres ani­maux dont la vie n’est qu’une dou­leur sans espoir et qui n’ont même pas une voix pour faire com­prendre ce qu’ils endurent ou pour se sou­la­ger en malé­dic­tions ? A quoi sert leur souf­france, à ceux-là ? Qu’est-ce qu’ils expient ? Ou quelle com­pen­sa­tion peuvent-ils attendre ?…

Sépho­ra était une vieille femme bien simple ; mais, parce qu’elle était ingé­nu­ment affa­mée de jus­tice, elle agi­tait sou­vent ces ques­tions dans son cœur ; et la pen­sée du mal inex­pli­qué obs­cur­cis­sait pour elle la beau­té du jour et les cou­leurs exquises des col­lines de Judée.

| Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 20 minutes

Au Para­dis ter­restre, Adam et Ève ne se nour­ris­saient que de fruits et de légumes. Ils n’a­vaient donc pas à tuer les qui, de ce fait, ne les crai­gnaient pas et qui vivaient tous en par­faite intel­li­gence avec nos pre­miers parents ; cette inti­mi­té était, pour Adam et Ève, un charme de plus. Le péché ori­gi­nel a détruit cet ordre par­fait que Dieu avait éta­bli. Les bêtes sont deve­nues crain­tives, féroces par­fois, non par méchan­ce­té mais par ins­tinct de conser­va­tion. Elles se méfient de l’homme, et, avouons-le, elles ont le plus sou­vent raison.

Le bon Dieu per­met aux saints, très sou­vent, de revivre l’âge d’or du Para­dis ter­restre, dans leurs rela­tions avec les ani­maux. C’est ain­si que, dans la vie d’un très grand nombre de saints, nous voyons ces der­niers expo­sés à des bêtes féroces, affa­mées à des­sein, et les ani­maux féroces, au lieu de dévo­rer la proie qui leur est expo­sée, venir se cou­cher aux pieds des mar­tyrs et, loin de leur faire aucun mal, leur lécher les mains et les pieds.

Il faut apprendre aux enfants à res­pec­ter toute créa­ture de Dieu. En cha­cune, même les plus petites, appa­raît un reflet de la puis­sance, de la sagesse et de la misé­ri­cor­dieuse bon­té de Dieu, qu’ils apprennent à ne jamais leur faire aucun mal, à moins qu’ils n’y soient obli­gés par la néces­si­té ou le besoin de se défendre. Il faut bien tuer des bêtes, pour nour­rir les hommes ; Dieu le veut ain­si. Mais il ne per­met pas qu’on les mar­ty­rise. Les enfants, inno­cents, ont géné­ra­le­ment de la sym­pa­thie pour les ani­maux et c’est réci­proque. J’ai sou­vent vu un , de l’es­pèce des chiens-loups, féroce pour les mal­fai­teurs, pro­té­ger avec vigi­lance et presque ten­dresse, le ber­ceau d’un nou­veau-né, et cou­rir après des enfants de sa taille, affo­lés, les pauvres, pour leur lécher affec­tueu­se­ment la figure, puis se mêler à leurs jeux, attra­per les balles au vol, retrou­ver des objets, ou même des enfants, cachés dans les bois. Il faut encou­ra­ger l’af­fec­tion des enfants pour les ani­maux, les enfants qui sont bons pour les bêtes ont toutes chances, en gran­dis­sant, d’être bons pour les gens. Et le contraire a lieu ; on raconte que Néron, enfant, s’a­mu­sait à arra­cher les ailes des mouches. Il devint plus tard le tyran que l’on sait.

Dieu, dans sa bon­té, fait béné­fi­cier les saints d’une par­tie des pri­vi­lèges de l’âge d’or du Para­dis ter­restre qui explique com­ment les ani­maux obéis­saient à la voix de beau­coup d’entre les saints.

Histoire pour les enfants de Saint Roch et son chien - coloriage

et son chien

Roch naquit au XIIIe siècle de parents riches. A la mort de ceux-ci il ven­dit tous ses biens et en don­na le prix aux pauvres. Puis il se ren­dit à Rome. Che­min fai­sant, la peste régnant dans une ville du Nord de l’I­ta­lie, il s’y arrête, se fait admettre comme infir­mier à l’hô­pi­tal de cette ville et y lave les plaies des pes­ti­fé­rés, les gué­ris­sant tous en tra­çant sur eux un simple signe de croix. Arri­vé à Rome où la peste régnait éga­le­ment, il y par­cou­rut la ville et ses envi­rons, y fai­sant preuve du même dévoue­ment et y opé­rant les mêmes miracles. Il visite ensuite suc­ces­si­ve­ment les contrées d’I­ta­lie atteintes par la peste. Mais en se réveillant un matin il est sai­si d’une fièvre ardente. Il se sent atteint lui-même par la peste et on le mène à l’hô­pi­tal l’in­ten­si­té de sa dou­leur lui fait pous­ser des cris mal­gré lui. Pour ne point incom­mo­der ses com­pa­gnons, il se traîne jus­qu’à la porte de l’hô­pi­tal. Les pas­sants, crai­gnant de contrac­ter le ter­rible mal, le pressent de ren­trer. Alors, pour n’in­quié­ter et n’in­com­mo­der per­sonne, il se traîne péni­ble­ment hors de la ville où une cabane lui sert d’a­sile. « O Dieu de misé­ri­corde, s’é­crie-t-il, je vous remer­cie de me faire souf­frir pour vous, mais ne m’a­ban­don­nez pas. »