Temps de lecture : 2 minutesJésus continue ses miracles. Comme il était dans une maison, prêchant l’Évangile, des gens arrivèrent portant un pauvre paralytique. Mais la foule était si grande, qu’ils ne purent entrer. Montant alors sur le toit plat de la maison, ils y firent une ouverture et, par là, descendirent le malade. Touché…
Étiquette : <span>Absolution</span>
Extrême-onction
Il y avait du soleil plein le ciel, des chants d’oiseaux plein le verger. Et Jean-Paul chantait aussi sa joie de vivre en cueillant à plein panier les cerises rutilantes du beau cerisier…
Soudain, un craquement, un double cri : Jean-Paul tombait du cerisier sur la terre dure, et sa mère accourait, épouvantée.
Ce fut aussitôt un grand affairement : brancard, coups de téléphone, médecin… Et le terrible diagnostic, courant de bouche en bouche : « Il est perdu… il ne lui reste plus qu’une heure à vivre… »
Pâle sur son lit, souffrant atrocement, Jean-Paul sent bien lui aussi que sa vie s’en va. Alors il appelle sa maman :
— Je vais mourir, dit-il doucement, mais il ne faudra pas pleurer : je vais au ciel.
Puis il ajoute :
— Les copains du « caté » vont sûrement venir avec Monsieur le Curé. Dis, tu les laisseras entrer ?
Les parents de Jean-Paul ne sont pas « gens à curé », comme ils disent. Mais refuseraient-ils une dernière joie à leur enfant ?
Jean-Paul, lui, attend. Car au catéchisme, le jour où ils ont ensemble découvert que la mort est une merveilleuse procession de la terre au ciel, ils s’étaient promis d’être tous avec le prêtre autour du premier qui partirait…
* * *
« Toc-toc !… »
C’est un rappel d’espérance dans la maison brutalement éprouvée. Les gens qui ne savent pas, pleurent et frissonnent parce que la mort est là. Mais les cinq gars à la porte de Jean-Paul savent, eux, qu’ils apportent joie et paix : pour venir, ils ont mis leurs beaux habits, comme pour une fête, une fête grave, bien sûr, et douloureuse à leur cœur ému mais tout de même la fête de tout le ciel qui va venir au-devant de Jean-Paul, et ses amis seront là, comme pour une noce.
D’abord, le prêtre est entré seul, pour donner la dernière absolution.
Les forces de Jean-Paul s’écoulent très vite. Sous le pardon de Dieu, il a fermé les yeux. Il les rouvre seulement pour remercier d’un regard ses camarades qui entrent.
Pénitence
« Tes références, garçon ? »
Pour la dixième fois, Paul se heurte à cette demande. Pour la dixième fois, il répond sourdement :
« Je n’en ai pas.
— Quoi ! Tu n’as jamais travaillé, à ton âge ? Quel âge au fait ?
— Vingt ans.
— Et tu n’as pas honte d’être resté à fainéanter jusqu’à ce jour ?
— …
— Ah ! Ah ! Je vois ce que c’est ! Tu as déjà travaillé ! Mais tu n’as pas de références ! Tu n’es qu’un vaurien…
— …
— Allons ouste, je n’ai pas de temps à perdre avec toi. »
Dur et glacé, l’employeur lui claque au nez le portillon du guichet d’embauche. Et pour la dixième fois aussi, Paul se retrouve dans la rue, sous une petite pluie fine et froide qui détrempe tout et laisse des mares sur les pavés glissants.
« Tu n’as pas honte ? »
Les mots du guichetier le poursuivent, le martèlent, l’accablent. Sa grande taille se courbe un peu plus. On dirait un vieillard, ce garçon de vingt ans !
Honte ? Ah ! s’il savait !
Mais ne sait-il pas ce guichetier ? Ne savent-ils pas tous ces gens qui le frôlent, serrés dans un imperméable ou ratatinés sous un parapluie ? La « chose » doit apparaître sur son front rouge et dans sa démarche qui hésite, et même dans ce brutal sursaut qui le redresse comme pour défier le jugement du monde. La pluie le cingle, et la dureté du monde.
Sa bravade ne dure qu’un instant ; ses épaules retombent, lasses de porter sa honte. Et pourtant, il faut la traîner encore. Il le sait bien, il n’est qu’un vaurien. L’autre le lui a jeté au visage comme une gifle, et il n’a pu lui crier : « Tu mens ».
Dixième commandement[1]
Brr… qu’il fait froid ! M’est avis qu’il va neiger ! »
Sur sa porte, grand-père Naudé scrute le ciel de son regard profond. Chaque soir, il vient ainsi lire dans la couleur et la marche des nuages le temps qu’il fera le lendemain. Il est si savant qu’il connaît toutes les lignes du ciel et, sou-vent, il arrive qu’à la veille d’une fête ou d’un mariage les villageois viennent pour le consulter.
« Père Naudé, f’ra t’y beau demain ? »
Et le grand-père Naudé sème de la joie ou de l’ennui par l’annonce d’une belle journée ou par celle d’une pluie tenace. Ce soir-là, il rentre frileusement chez lui auprès du poêle ronronnant de la cuisine où ses petits-enfants Bernard et Pierre s’amusent à cœur joie.
« Petits, soyez contents ; il y aura ben d’la neige demain ! Mieux vaut ça : Noël aux tisons, Pâques au balcon.
— Tant mieux, grand-père, tant mieux », s’écrient les deux petits dont les yeux brillent déjà de joie à la pensée de s’en aller glisser en traîneau sur les pentes neigeuses des collines de Jussy.
* * *
Cette nuit-là, en effet, il neigea.
Peu à peu, le toit penchant de la maison se couvrit d’une mousseuse couverture blanche qui s’épaissit d’heure en heure. Encapuchonné comme un moine, le vieux clocher égrena les heures d’un ton assourdi, et les sapins méditatifs de la forêt se recueillirent dans un silence complet.
Il neigea ainsi jusqu’au matin.
Quel beau réveil firent Bernard et Pierre en voyant d’innombrables papillons blancs voltiger devant leur fenêtre, et comme ils furent vite habillés ! Toute la matinée, ils guettèrent anxieusement l’éclaircie qui permettrait d’aller voir l’état des pistes ; enfin, vers dix heures, le soleil succéda à la chute des flocons blancs et fit resplendir la terre d’innombrables scintillements de cristaux de neige. Là-haut, à l’ombre des bois, elle durcissait sous l’âpre bise du nord.
- [1] Dixième commandement : Bien d’autrui ne convoiteras pour l’avoir malhonnêtement.↩
Chapitre VII
Par un beau matin froid mais clair, la roulotte tant espérée est parvenue sur la place du village.
André, sans cesse aux aguets, a couru prévenir ses grands amis, et, aussitôt après déjeuner, la troupe, sous l’égide du cousin Bernard, arrive au grand complet.
Les garçons constatent, ô bonheur ! que la roulotte, pauvre mais propre, possède un vieux moteur et se précipitent pour en vérifier la marque.
Pendant cette inspection, Bernadette, suivie des petites filles, frappe à la porte close.
Un minois passablement ébouriffé paraît instantanément, et les yeux, craintifs d’abord, s’éclairent en reconnaissant la jeune fille.
— Bonjour, mon petit Nono, dit Bernadette en caressant affectueusement les cheveux frisés. Est-ce que maman est là ?
Relevant sa frimousse, Nono, sans répondre, fait signe que oui, puis il prend sans façon la main de la jeune fille et la fait entrer.
Annie et Colette hésitent sur le seuil, mais une femme bien maigre, sous d’humbles vêtements noirs, les traits ravagés par la souffrance, dit d’une voix chantante :
— Entrez, mes petites demoiselles.
Puis, tournant vers Bernadette ses grands yeux noirs soudain pleins de larmes, elle ajoute regardant les deux petites :
— Et moi… je n’en ai plus !
Nono a pris un air farouche pour lutter contre ses propres larmes. Colette et Annie ont le cœur serré, et il faut toute la douceur de Bernadette, tout l’entrain des garçons, qui viennent à la rescousse, pour adoucir le premier contact.
Mais, quand on se quitte, c’est avec des au revoir affectueux et de bonnes poignées de mains.
Jean a passé son bras sous celui de sa grande sœur.
— Dis, Bernadette, comment va-t-on s’arranger pour bien préparer ce petit Nono ?
— Il est déjà convenu avec maman que nous lui ferons comprendre à fond son catéchisme. Vous, la jeunesse, débrouillez-vous. Étudiez votre affaire ; à vous de lui expliquer la liturgie du baptême et de la