Ce qu’ils désiraient le jour de la première communion

Auteur : Diethelm, P. Walther | Ouvrage : Le plus beau cadeau .

Temps de lec­ture : 9 minutes

Ils s’ap­pe­laient Robi… et Bobi… Les noms se res­sem­blaient et les deux gar­çons aus­si. Ils étaient jumeaux. À l’é­cole, ils se trou­vaient l’un à côté de l’autre, et c’est à peine si on pou­vait les dis­tin­guer. Cepen­dant, si on les connais­sait bien, on savait que Bobi avait une touffe de che­veux qui se dres­sait un peu plus har­die. Avec le temps on consta­tait qu’il était quel­que­fois un peu plus tran­quille que son frère. Quel­que­fois ! car en géné­ral, ils étaient tout aus­si taquins et étaient très unis dans la joie comme dans la peine, sur­tout s’il s’a­gis­sait de jouer un bon tour et de rece­voir la puni­tion méritée.

Catéchisme, préparation à la première communion des enfantsEn ce moment, ils se pré­pa­raient à leur . C’é­tait une vraie joie de les voir se don­ner tant de peine. Tous deux vou­laient être prêts pour le grand jour, ils étaient, comme le sont en géné­ral les gar­çons, au dehors, gais et exu­bé­rants, mais, leur cœur était, au dedans, un sanc­tuaire qu’ils embel­lis­saient fidèlement.

Je ne vous par­le­rai pas de ce zèle pour l’ins­tant. Rap­pe­lons sim­ple­ment que, dans la semaine avant la pre­mière com­mu­nion, M. le curé avait don­né à tous les enfants le conseil de bien pro­fi­ter des pre­miers ins­tants après la com­mu­nion. Il leur avait dit : « Ce moment, où pour la pre­mière fois, Jésus est pré­sent dans votre cœur, est le plus riche de grâces de toute votre vie. Confiez bien au divin Maître votre plus grand désir. »

Cette remarque avait frap­pé Bobi et Robi. Ils ren­trèrent à la mai­son tout silen­cieux après cette leçon de catéchisme.

Ils réflé­chis­saient. Cha­cun s’in­ter­ro­geait pour connaître son plus grand désir, mais ils arri­vèrent à la mai­son sans l’a­voir trou­vé. Le plus impor­tant désir, qu’est-ce que cela pou­vait bien être ? Les jumeaux s’as­sirent sur la bar­rière toute proche et se mirent à dis­cu­ter. Des secrets, ils n’en avaient jamais eus l’un pour l’autre.

Peu à peu, l’i­dée vint à Bobi que sûre­ment sa voca­tion était la ques­tion la plus impor­tante pour lui en ce moment. Depuis long­temps, il dési­rait deve­nir prêtre. Dire la messe, prê­cher, remettre les péchés dans la confes­sion, pour sûr, ce serait beau ! Voi­là de quoi il vou­lait par­ler à Jésus au moment de sa pre­mière com­mu­nion ! Et il vou­lait lui deman­der de l’ai­der. « Qu’en penses-tu ? » deman­da-t-il à son frère. Robi fit signe que oui. Ain­si, l’af­faire était réglée pour Bobi.

Mais Robi ? Pour lui cela sem­blait plus dif­fi­cile, car il pen­sait à tout autre chose pour plus tard. Il vou­lait deve­nir ce qu’é­tait son père : un habile menui­sier. Celui-ci pos­sé­dait un grand ate­lier, où chaque jour cinq ouvriers rabo­taient, sciaient ; où les machines bour­don­naient du matin au soir. Pou­vait-on par­ler de cela à Jésus, le jour de sa pre­mière communion ?

Après de longues dis­cus­sions, les deux gar­çons trou­vèrent enfin la plus impor­tante demande que Robi ferait à Jésus. Il lui deman­de­rait de mou­rir en état de . Alors il irait sûre­ment au ciel, et serait sau­vé pour toute l’éternité.

Cette réso­lu­tion prise, le grave entre­tien était ter­mi­né. Les deux enfants sau­tèrent de la bar­rière et se diri­gèrent en sif­flant joyeu­se­ment vers la mai­son paternelle.

2 garçons qui font leur première communionLe dimanche de la pre­mière com­mu­nion arri­va enfin. C’é­tait un radieux jour de prin­temps, le ciel était sans nuage. L’âme des enfants était aus­si tout enso­leillée, quand Jésus, dans la blanche hos­tie, vint dans leur cœur. Pas le moindre bruit par­mi les petits. Ils étaient age­nouillés dans les bancs, le visage dans leurs petites mains. Ils remer­ciaient, se réjouis­saient, aimaient Jésus et lui expri­maient leur grand désir. Aucun ne remuait. Si, pour­tant, là, près des jumeaux. Il y avait eu un petit mou­ve­ment et un chu­cho­te­ment. Puis tout rede­vint tran­quille. Qu’est-ce qui s’é­tait pas­sé ? Au milieu de ses prières Robi avait pous­sé Bobi et lui avait dit tout bas : « Toi, dis-le lui aussi ! »

Bobi avait com­pris tout de suite ce que Robi vou­lait dire. Il avait fait un petit signe de tête et conti­nué la demande de son frère : « Bon Jésus, exau­cez aus­si la demande de mon frère ! Bon Jésus, exau­cez aus­si le désir de Robi. Faites qu’il meure dans votre grâce et que nous allions tous deux au ciel. »

Des années pas­sèrent. Un jour Bobi reçut un autre nom. C’est que Jésus avait exau­cé sa prière du jour de la pre­mière com­mu­nion. II devint prêtre et entra dans un couvent. Là, comme c’est l’u­sage, on lui don­na un nou­veau nom : il s’ap­pe­la Père François.

Et Robi ? Que devint-il ? Ah, quelle aven­ture ! Com­bien son frère avait déjà prié pour lui ! Chaque fois qu’il était à l’au­tel et qu’il tenait Jésus dans ses mains, il lui sem­blait que quel­qu’un le pous­sait et lui deman­dait : « Toi, dis-le lui aus­si ! » Et chaque jour, il le disait au Bon Pas­teur et le priait de prendre soin de son cher frère, et de le rame­ner. Car Robi était deve­nu une bre­bis éga­rée. Il ne vou­lait plus prier, ni rien savoir de l’é­glise. Quand son frère lui fai­sait des remon­trances, il n’a­vait qu’un sou­rire moqueur. Il deve­nait même par­fois rude et injurieux.

Com­ment Robi avait-il pu chan­ger ain­si ? Après avoir ter­mi­né ses classes, il avait fait son tour du monde. Il avait vu beau­coup de choses, mais il avait désap­pris la pié­té. Au ser­vice mili­taire, il était deve­nu avia­teur, ce qui le ren­dait encore plus fier. Quand il volait avec sa machine, il s’i­ma­gi­nait que le ciel et la terre lui appar­te­naient, et qu’il pou­vait se pas­ser de Dieu. Mais le Bon Dieu ne l’a­vait pas oublié. Il n’a­vait pas oublié la prière du pre­mier com­mu­niant et elle allait être exau­cée. Voi­ci comment :

Un lun­di matin, le Père Fran­çois, c’est-à-dire son frère Bobi, ren­trait à la mai­son, venant d’un petit vil­lage où il s’é­tait ren­du le dimanche pour y exer­cer son saint minis­tère. II y avait une bonne heure de marche jus­qu’à la pro­chaine sta­tion. Il allait son che­min, tout pen­sif, quand tout-à-coup, un vrom­bis­se­ment se fit entendre les airs. À une grande hau­teur, un avion pla­nait. Fier comme un aigle, il décri­vait ses cercles. Puis — un éclat, une panne — l’a­vion ren­ver­sé tom­ba comme un éclair. On n’eut pas le temps de le suivre dans sa chute. Un fra­cas — et non loin du Père Fran­çois effrayé, l’a­vion s’é­tait enfon­cé dans la terre. Un ter­rible venait d’arriver.

accident d-avion - Histoire à raconter aux momesAus­si vite qu’il le pou­vait, le Père Fran­çois se diri­gea vers l’a­vion fra­cas­sé. De tous côtés, les gens étaient accou­rus. Ils avaient déjà déga­gé le bles­sé des décombres ; ils l’a­vaient éten­du sur le pré. II était là, sans connais­sance, per­dant son sang abon­dam­ment, le visage tout meur­tri. Le pauvre n’a­vait plus long­temps à vivre.

En se pen­chant sur lui, le Père Fran­çois fut sai­si d’une grande émo­tion. Celui qui était devant lui, c’é­tait son frère ; son frère pour qui il avait tant prié. Et il était mou­rant ! Pitié, mon Dieu !

Les gens qui entou­raient le bles­sé ne s’é­ton­naient pas que le prêtre s’a­ge­nouillât près de lui. N’est-ce pas son devoir sacré de conso­ler les mou­rants et de les pré­pa­rer à pas­ser dans l’é­ter­ni­té ? Mais tous étaient sur­pris de l’en­tendre appe­ler le bles­sé par son nom : « Robi… Robi… ! » Il lui joi­gnit les mains qui tom­baient sans force, et com­men­ça à réci­ter de petites prières. « Cœur Sacré de Jésus, j’ai confiance en vous ! » Dix, vingt, trente fois, le Père Fran­çois répé­ta cette prière. Il y ren­fer­mait toutes celles qu’il avait déjà faites pour son frère. Jésus, n’exau­ce­rait-il pas la prière du pre­mier com­mu­niant ? Son frère, devrait-il mou­rir sans un acte de contri­tion, sans rece­voir l’ ? Non ! Cela ne pou­vait être !

Dernière absolution à un mourant - Récit pour le catéchismeTout à coup, le mou­rant ouvrit les yeux. Eton­né, il regar­da les gens qui l’en­tou­raient, et son regard tom­ba sur le prêtre. Alors, ses yeux s’é­clai­rèrent un peu : il avait recon­nu son frère. Le Père Fran­çois pro­fi­ta de ce moment et se remit à prier. O miracle ! les lèvres de Robi répé­taient len­te­ment : « J’ai — confiance — en — vous ! » Le Père Fran­çois tra­ça un grand signe de croix sur son frère mou­rant. C’é­tait l’ab­so­lu­tion pour tous les péchés de sa vie.

Le pauvre Robi n’eut plus à souf­frir long­temps. Dieu le déli­vra de ses dou­leurs. Le Père Fran­çois se tenait à genoux à côté de son Robert, priant pour lui. Il pleu­rait la mort de son frère, mais en même temps, il remer­ciait le bon Dieu. Jésus avait exau­cé la prière faite par Robi au jour de sa pre­mière com­mu­nion et lui, Bobi, avait eu la conso­la­tion d’être l’ins­tru­ment de la misé­ri­corde auprès de ce frère tant aimé.

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