La Révolution française venait d’éclater. Partout les églises étaient profanées, les prêtres dénoncés, traqués comme des bêtes fauves, souvent fusillés sur le bord des chemins. Les fidèles eux-mêmes voyaient leurs maisons envahies par des bandes de forcenés qui menaçaient de les égorger s’ils ne dénonçaient pas les prêtres qu’ils connaissaient.
C’est à Florence, dans une riche famille bourgeoise que naquit en 1515 saint Philippe Néri. Dès son plus jeune âge, il pratiqua les vertus chrétiennes. Sa ferveur, son humilité, sa douceur et son affabilité le firent aimer de tous et on l’appelait communément « Le bon Philippe ».
Un des plus savants hommes de son siècle
Il reçut une éducation soignée, et à dix-huit ans, après de sérieuses études, on l’envoya chez un de ses oncles, un très riche marchand qui voulait le faire hériter de tous ses biens, qui étaient considérables. Mais, au bout de deux ans, il quitta son oncle se sentant appelé par une vie de perfection toute dirigée vers Jésus-Christ. Il alla à Rome sans argent et sans but bien précis. Un gentilhomme florentin le prit chez lui pour élever ses deux fils, car il avait discerné ses bonnes manières et ses précieuses vertus. Il n’accepta qu’une modeste chambre dans laquelle il vécut très pauvrement. Le jeune homme consacra ses loisirs à l’étude de la philosophie et de la théologie. C’était un esprit très cultivé, aussi ses compagnons d’étude recherchaient son amitié avec empressement, mais il restait toujours réservé, craignant de perdre un temps précieux qu’il voulait employer à la prière et à la méditation, aussi ne leur accordait-il que ce que la charité et son devoir lui commandaient. Il compléta ses connaissances par l’approfondissement des Saintes Écritures, des Pères de l’Église et du droit canon. L’étendue de son érudition était telle que ses contemporains le prenaient pour l’un des plus savants hommes de son siècle.
Il s’élevait dans le chemin de la sainteté, mais ce ne fut pas sans combat car le démon l’assaillait par de violentes tentations d’impureté, parfois même il lui apparaissait menaçant sous des formes horribles ce qui loin d’abattre son courage ne fit qu’augmenter son ardeur. La mortification des sens qu’il pratiquait était absolue et s’étendait jusqu’aux plus petites choses, il répétait souvent : Il est nécessaire de se mortifier dans les choses mêmes qui ne paraissent que bagatelles, car par là on s’accoutume à vaincre dans les grands combats.
1870. Les Allemands entrent en Alsace-Lorraine ; le canon tonne, les maisons flambent, les gens s’enfuient…
Parmi les fuyards se trouve M. de Moret. Il quitte Strasbourg en hâte, emmenant les enfants de sa fille. Ce sont deux orphelins : Charles de Foucauld, âgé de douze ans, et Marie, de trois ans plus jeune. Ils passent en Suisse, et, la guerre finie, se fixent à Nancy.
Faisons connaissance avec Charles. C’est un enfant bien doué, mais difficile. Son cher grand-père ne sait rien lui refuser, et Charles en profite ; il se montre emporté, violent, paresseux, tout en restant bon garçon à ses heures.
De mauvaises lectures viendront plus tard empoisonner son esprit et son cœur… plus de prières, plus de sacrements, et bientôt plus de foi.
Du lycée de Nancy, il passe à l’École de la rue des Postes, pour préparer Saint-Cyr.
Le voilà à Paris. Il voudrait s’amuser, mais le travail est là ; un futur officier ne saurait être un ignorant… Le travail, le travail… mais le travail l’ennuie ; il fait tout ce qu’il peut pour se faire renvoyer et il y réussit.
Son grand-père, mécontent, exige qu’il reprenne ses études à Nancy, et ce grand paresseux, grâce à sa belle intelligence, a la chance d’être reçu à l’examen et d’entrer à Saint-Cyr.
Voici maintenant Charles à Saumur, puis à Pont-à-Mousson sur la frontière de l’Est. Partout il laisse la réputation d’un bon camarade très généreux, mais aussi, d’un gourmand, d’un paresseux et d’un mauvais sujet.
Il pense plus à se composer des dîners fins qu’à gagner des galons.
Parfois, il se fait porter malade, pour être exempté du service et rester plus longtemps au lit.
Enfin, il ne croit pas en Dieu et se moque de la religion. Il est loin d’être un saint.
Aussi est-il fort mécontent lorsqu’il apprend que le 4e Hussards part pour l’Algérie. Il lui faut dire adieu aux fêtes et aux plaisirs ; il n’en a pas le courage, et à peine rendu en Afrique, sur un grave reproche de ses chefs, il se fait mettre en non-activité et rentre en France.
Nous sommes cependant sur terre pour autre chose que pour nous amuser !
Geneviève, sa quenouille tenue nonchalamment, laissait errer son regard par delà la grande plaine de Champagne qui s’étendait au pied du château. Dieu, que c’était donc ennuyeux de filer ainsi tout le jour tandis que les armées livraient bataille à l’ennemi ! Un gros soupir, lourd de tous ses désirs, s’exhala des lèvres de Geneviève.
« Ah ! si je connaissais Jeanne, j’irais la trouver et lui demanderais de me prendre avec elle. »
Cette réflexion, prononcée à voix haute, attira sur la fillette, presque une jeune fille déjà, les regards de dame Eloïse, sa mère, qui, en face d’elle, était occupée à une broderie d’autel.
« Que feriez-vous à guerroyer avec les gens d’armes ? Vous ne savez pas monter à cheval et le premier boulet vous ferait pousser de tels cris d’effroi que vous ne sauriez rester dans la bataille. »
D’un geste orgueilleux, Geneviève a relevé la tête :
« Pourquoi alors Jeanne y reste-t-elle ?
— Jeanne, mon enfant, fut mandée par Dieu pour délivrer le royaume.
— Eh bien ! pourquoi ne le serais-je pas aussi ? »
Pourquoi pas moi ? Voilà ce qui revenait sans cesse à l’esprit de Geneviève ; et s’obstinant dans son rêve orgueilleux, elle formait des projets insensés, n’écoutant pas les sages conseils que dame Eloïse, alignant ses points de broderie, lui prodiguait.
* * *
Dans la ville pavoisée, il y a grande animation : d’immenses tapis recouvrent les dalles de la cathédrale, les portes sont tendues de velours écarlate, chacun s’affaire, pavoisant sa demeure pour faire digne accueil au Roi et à Jeanne, car
C’était au temps de la Grande Révolution, au pays d’Anjou. La guillotine était installée en permanence à Angers où l’on poursuivait de tous côtés les prêtres qui n’avaient pas voulu quitter le pays. Tel était le cas d’un saint curé de village du nom de Noël. Son dévouement à toute épreuve lui valait d’ailleurs l’admiration des fidèles et c’était à qui lui préparerait la cachette la plus sûre. A la métairie de la Comouillère, l’abbé Noël se sentait particulièrement chez lui, car on l’y entourait de la plus affectueuse vénération. René Landry, le fils aîné de la famille, avait 12 ans. Il aimait de tout son cœur l’abbé qui le prenait souvent sur ses genoux et il n’était jamais plus heureux que lorsqu’il pouvait lui rendre service.
Intrépide agent de liaison, il le rejoignait au fond des bois, lui portant des livres ou du linge. Il avait aussi le secret de lui dénicher des cachettes introuvables afin de permettre au courageux confesseur de célébrer la Sainte Messe.
Depuis près de trois ans toutefois celui-ci n’avait pu trouver la possibilité de faire faire la Première Communion aux enfants de sa paroisse. Ayant établi son quartier général dans une ferme perdue au milieu des bois, il entreprit d’y préparer une vingtaine d’entre eux, dont le jeune René. On imagine ce que fut cette préparation et les leçons données tantôt dans un champ de genêts tantôt sous une hutte de charbonnier ! Enfin