Il y a sur terre un milliard sept cent vingt-six millions d’hommes.
Sur ce nombre, un milliard quarante-trois millions ne sont pas encore chrétiens.
Sur les six cent quatre-vingt-trois millions de chrétiens, les catholiques sont trois cent cinq millions.
Donc, dans l’ensemble du monde, sur cent hommes vivants, il n’y en a pas plus de dix-sept ou dix-huit qui aient été baptisés catholiques.
En Afrique, sur cent hommes vivants, la proportion des catholiques est de deux, plus trois dixièmes.
En Asie, sur cent hommes vivants, la proportion des catholiques est de un, plus six dixièmes.
Ces chiffres montrent quel immense champ de travail s’offre encore à l’Église ; ces chiffres font comprendre tout ce qu’il y a de pressant, tout ce qu’il y a d’impérieux dans les accents du pape Pie XI, lorsqu’il demande que tous les évêques, que tous les prêtres, que tous les catholiques, hommes et femmes, prêtent aux missionnaires le genre d’aide qu’ils peuvent, chacun dans sa sphère, leur apporter.
Les tout jeunes aussi, ceux à qui ce livre s’adresse, peuvent beaucoup pour les missions. Ils peuvent les servir par leur prière, cette prière des cœurs purs, que Dieu accueille volontiers.
Ils peuvent les servir par leurs générosités, en s’inscrivant à l’Œuvre de la Propagation de la Foi, qui assure au Pape les ressources nécessaires pour l’entretien des missions sur la surface de la terre ; à l’Œuvre de la Sainte-Enfance, qui sauve de la mort, en pays païens, les enfants abandonnés, et qui fait d’eux des chrétiens ; à l’Œuvre de Saint-Pierre Apôtre, qui fonde des séminaires pour la formation des clergés jaunes ou des clergés noirs ; à l’Œuvre des Écoles d’Orient, qui, partout sur les rives de la Méditerranée orientale, entretient des écoles catholiques au milieu des populations chrétiennes encore séparées de Rome ; à l’Œuvre Apostolique, qui fournit aux Missionnaires les objets liturgiques et pourvoit à leurs autres besoins.
Ils peuvent s’offrir à des congrégations missionnaires pour être au loin les parrains de quelque petit Chinois ou de quelque négrillon, et pour faire, en tout ou en partie, les frais de son instruction.
Et qu’ils ne disent pas : « A quoi bon En face de ce milliard d’hommes, qui sont à moissonner, que peuvent quelques milliers de missionnaires ? » Tenir un tel propos serait méconnaître les leçons les plus récentes de l’histoire. Il y a soixante ans, qui donc aurait osé prévoir l’actuelle prospérité de cette chrétienté de l’Ouganda, qui, — vous vous en souvenez, — fut tout de suite féconde, même en martyrs ? Il y a cent ans, un héroïque prêtre français, M. de Solages, s’en allait tout seul à Madagascar ; il mourait de fièvre et de faim, séquestré dans une case par un cruel et rusé fonctionnaire qui voulait l’empêcher d’arriver à la capitale ; il succombait, sans avoir conquis une seule âme… Aujourd’hui, dans cette grande île, il y a quatre cent cinquante mille catholiques, et l’on évalue à environ quatre cent mille les Malgaches qui se préparent au baptême. Au début du siècle, Rome n’avait pas de fidèles chez les Esquimaux : aujourd’hui ce peuple déshérité, qu’on disait dégradé, compte de solides noyaux de chrétiens, dont quelques-uns ont fait jusqu’à quatre cents kilomètres pour avoir la copie du Notre Père. Il y a soixante ans, un admirable apôtre venu d’Italie, le futur cardinal Massaia, apportait le Christ aux Gallas : il prêchait, vaccinait, baptisait ; là-bas, aujourd’hui, les Capucins font de nombreuses conquêtes. Et c’est, aussi, au cours des cinquante dernières années, que vers l’autre pôle, le pôle sud, les Salésiens de dom Bosco, sous la conduite du cardinal Cagliero, — un autre Italien, — ont fait une audacieuse pointe, qui les a menés jusqu’à la Terre de Feu, où s’élève, dans la bourgade d’Oshuaja, le sanctuaire le plus méridional de tout l’univers.
Les apôtres de toutes nations sont en marche ; ils ne veulent, pour le royaume du Christ, d’autres frontières que celles du monde habité.
« Qu’ils sont beaux, les pieds de ces hommes ! » disaient déjà les Saints Livres et redisait plus tard Fénelon. Chaque année, au Séminaire des Missions Étrangères, ceux qui vont partir se placent debout devant l’autel, et tous leurs confrères, d’abord, puis tous les assistants, viennent « baiser à genoux, écrivait un jour Louis Veuillot, ces pieds heureux qui porteront au loin la bonne nouvelle et la paix du Seigneur. »
Je vous laisse sous l’impression d’une telle scène, qui périodiquement atteste qu’il y a toujours, dans l’Église, des heures de Pentecôte, au cours desquelles souffle l’Esprit de Dieu, comme jadis au Cénacle.
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