Catégorie : <span>Par un groupe de pères et de mères de familles</span>

Auteur : Par un groupe de pères et de mères de familles | Ouvrage : À la découverte de la liturgie avec Bernard et Colette .

Temps de lec­ture : 19 minutes

Chapitre VI

Toute la mai­son sut bien­tôt quelles étaient ces idées mer­veilleuses, splen­dides, car Colette, les che­veux au vent, expli­quait à haute et intel­li­gible voix :
 — Je parie que tu n’as pen­sé à rien, Ber­nard, ni les autres non plus : que vous avez cru qu’on allait bap­ti­ser Nono, comme sa petite sœur, , comme dit maman…

— Qu’est-ce qui te prend ? riposte Ber­nard légè­re­ment ahu­ri… mais jamais de la vie ! Nono rece­vra le à l’é­glise, en grande pompe.

— Et vous savez tous, bien enten­du, conti­nue Colette de son petit air moqueur, ce que signi­fient toutes les céré­mo­nies dont M. le curé accom­pa­gne­ra le baptême ?…

Silence gêné.

Mais Ber­nard se res­sai­sit vite.

— Et toi, tu es au cou­rant, sans doute ?

— Pas du tout, seule­ment je l’a­voue, voi­là, et je vou­lais vous le faire avouer, ce qui n’est pas si facile ! Alors, si vous n’êtes pas plus au cou­rant que moi, soyons sérieux.
Tu seras , Ber­nard, et moi . Il s’a­git de com­prendre pour de bon ce que nous allons faire. Je pro­pose une répé­ti­tion géné­rale à l’é­glise, sous les ordres de M. le curé.

— Après tout, petite peste, tu n’as pas tout à fait tort, mais alors, pré­viens ma tante, pre­nons nos sabots, et en route.

Aus­si­tôt dit, aus­si­tôt fait.

Les gar­çons filent comme des flèches, car la route est cou­verte de ver­glas. Ils glissent, adroits et souples, sur le sol gelé.

Annie et Colette, plus calmes, se tiennent par le bras, esquissent quelques courtes glis­sades et, fina­le­ment, règlent leur allure pour ne pas tomber.

C’est à la porte même de l’é­glise qu’on trouve M. le curé, très occu­pé des pré­pa­ra­tifs de la crèche.

— Oh ! que vous tom­bez bien, mes enfants ! Vous allez piquer mes sapins, construire la grotte en papier rocher, etc…, etc. Que veniez-vous faire ?

— Apprendre com­ment on bap­tise, mon­sieur le curé.

— En voi­là une idée ! C’est toi, Ber­nard, qui as ces vel­léi­tés de séminariste ?

— Non, mon­sieur le curé, c’est moi.

— Toi !… Colette ?…

— Oui, oui, oui, ponc­tue Colette, et je vais vous expli­quer pour­quoi, mon­sieur le curé, et vous direz : Elle a rai­son, cette petite !

— Pas pos­sible ? Voyons un peu ces explications.

Il faut croire qu’elles sont convain­cantes, car le vieux prêtre accorde tout ce qu’on veut et pénètre avec la jeu­nesse sous le porche de l’église.

Après une courte et fer­vente ado­ra­tion, M. le curé appelle Pierrot.

Les enfants vont s'informer sur le baptême auprès de monsieur le curé

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Temps de lec­ture : 9 minutes

Chapitre V

Quel triste mois de décembre !

Un fin brouillard a tout revê­tu d’un man­teau humide et sombre. On n’y voit pas à cin­quante mètres. A la mai­son, les murs eux-mêmes sont humides, et Pier­rot déclare avec dégoût que la rampe de l’es­ca­lier lui « colle aux mains », ce qui lui évite de s’en servir.

Mais que les récréa­tions sont longues ! Il faut une patience à maman, comme à Maria­nick, pour sup­por­ter les ques­tions, les sou­pirs, les lamen­ta­tions ou, ce qui est pire, les inven­tions de Pierre !

Pour le moment, il s’est glis­sé dans le coffre à bois et se met en devoir d’en rabattre le cou­vercle, avec des ruses de sau­vage, non sans lais­ser un petit pas­sage d’air frais, quand, si enfoui qu’il soit, il croit entendre à la grille un vague coup de son­nette ; oubliant toute pru­dence, Pier­rot bon­dit hors du coffre, comme un diable hors d’une boîte, au risque de faire éva­nouir Maria­nick, et s’en­gouffre dans le jar­din par la porte de la cuisine.

Avant que la vieille Bre­tonne ait retrou­vé la parole, Pier­rot rentre triom­phant, une dépêche à la main.

— Qu’est-ce que c’est encore que cette affaire là ? s’ex­clame la cui­si­nière. Pour­vu que ta pauvre maman n’en ait pas d’en­nui ! Donne-moi ça, que je lui porte ; tu lui tour­ne­ras les sangs avec tes manières impossibles !

Pier­rot sur les talons, car il brûle de savoir le conte­nu de ce mys­té­rieux papier bleu, Maria­nick porte la dépêche au bureau, où maman l’ouvre avec une cer­taine émo­tion. Mais son visage s’é­claire d’un joyeux sou­rire, la dépêche contient ceci : « Hour­rah ! Col­lège licen­cié, arri­ve­rons ce soir, affec­tueu­se­ment. Cou­sin Bernard. »

Ce que peut être cette fin de jour­née, cha­cun le devine. Pier­rot a essayé tous les matelas,

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Chapitre IV

Cette fois, il neige. Les flo­cons tombent ser­rés, gelés, et bien­tôt couvrent tout. Ils craquent sous les pieds de Colette, qui quitte l’é­cole en hâte pour cou­rir au pres­by­tère, où, ce jour-là, le père Pierre doit venir la cher­cher. Quand elle entre, tout essouf­flée, dans la cui­sine, elle y trouve mon­sieur le curé qui récite son et André étu­diant ses leçons.

Dans l’âtre, quelques humbles mor­ceaux de bois se consument. Le vieux prêtre les rap­proche en hâte.

— Viens te chauf­fer, ma petite fille. Tu as une demi-heure d’a­vance sur le père Pierre et j’en conçois du sou­ci. Il est allé pour un mar­ché, au hameau des Grands-Chênes ; il m’a pré­ve­nu qu’il serait en retard, et par cette neige, je n’aime guère à pen­ser que tu seras au grand noir à cou­rir par là sur les routes.

Colette a un rire léger, qui fuse sous son grand capuchon.

— On trot­te­ra ferme, et le père Pierre me racon­te­ra des légendes du temps des loups, quand les landes au bord de l’é­tang étaient des forêts sau­vages… Je suis folle de ses vieilles his­toires ! Il les raconte avec une voix lente, en bran­lant sa lan­terne dont les verres sont rouges, et qui pro­jettent sur la route des lueurs fan­tas­tiques. Ce soir, sur la neige, ce sera délicieux.

— En atten­dant, regarde ce que Bri­gitte t’apporte.

— Oh ! Bri­gitte, ma vieille Bri­gitte, que vous êtes bonne ! Du lait chaud et des châ­taignes ! Je ne pour­rai dîner ce soir à la mai­son. Mais, en atten­dant, ce que ça va être exquis !

* * *

Et Colette épluche les châ­taignes avec une joie d’en­fant, pour les faire tom­ber une à une dans le bol de lait fumant. Mais son esprit n’en court pas moins au hasard de ses pen­sées, et voi­là qu’elle dit brusquement :
 — Vous savez, Mon­sieur le curé, vous m’a­vez lais­sée en panne l’autre soir, après l’é­qui­pée des garçons.

— Com­ment cela ?

— Mais oui ! vous êtes par­ti, sans m’a­voir expli­qué quelles sont les prières qui com­posent l’.

— Tiens, c’est vrai. Rien de plus simple que de com­plé­ter à l’ins­tant. Tu t’es cer­tai­ne­ment ren­du compte, en sui­vant les offices, que les psaumes y tiennent une grande place. As-tu remar­qué com­bien on sent pas­ser, à tra­vers ces psaumes, tous les sen­ti­ments de repen­tir, de louange, d’a­mour de Dieu ?

— Je ne suis pas sûre d’y avoir fait grande atten­tion. Je sais pour­tant par cœur 

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Chapitre III

Jeu­di ! Jour de congé !

Voi­là qui met­trait en liesse l’hu­meur non­cha­lante de Pier­rot, s’il ne contem­plait, le nez col­lé à la fenêtre, les feuilles mortes qui tourbillonnent.

À les voir dan­ser, voler, retom­ber, sous les rafales du vent du nord, Pier­rot devient mélan­co­lique. Il monologue :
 — Par ce froid de canard, maman me per­met­tra-t-elle d’al­ler jus­qu’au vil­lage ? C’est assom­mant de n’a­voir plus ici ni frère ni cou­sin. Colette est bonne fille, mais ce n’est jamais qu’une fille et ça ne peut pas valoir la moi­tié d’un garçon.

Cette consta­ta­tion eût sans doute plon­gé petit Pierre dans un monde de pen­sées toutes plus déso­lantes les unes que les autres, quand un magis­tral coup de son­nette lui fait pous­ser un hour­rah « for­mi­dable », selon le lan­gage de son temps.

Adieu le vent du nord, les feuilles mortes et l’in­suf­fi­sance des filles ! Voi­ci paraître, à la grille du jar­din, M. le curé avec le petit André. Du coup, la vie est belle, et Pier­rot se sent l’en­fant le plus heu­reux du monde.

Maman, en revanche, est fort inquiète de l’im­pru­dence de son vieil ami :
 — Oh ! mon­sieur le curé, quelle folie ! Com­ment êtes-vous venu par un temps pareil ?

— Bah ! j’en ai vu bien d’autres, et je ne m’en porte pas plus mal. Et puis, c’est jeu­di ; André a de bonnes notes ; je pense que celles de Pier­rot sont bonnes aus­si : il faut récom­pen­ser ces enfants-là.

Hum ! Pier­rot se sent tout à coup rede­ve­nir malheureux.

— Regar­dez cette tête, mon­sieur le curé, et dites-moi si vous croyez que ce jeune homme a de bonnes notes ?

Le vieux prêtre passe la main en sou­riant sur les che­veux frais coupés :
 — Tu n’as pour­tant plus tes boucles de bébé, mon bon­homme, et il fau­drait son­ger à tra­vailler, comme un grand. Que dira papa quand il revien­dra pour Noël ?

Papa ! La pen­sée du reproche pater­nel met une larme contrite au coin des yeux de Pier­rot, et son vieil ami s’en contente.

— Va, si maman per­met, emmène André ramas­ser du bois mort au bord du petit bois. Cou­vrez-vous bien, et rap­por­tez-m’en deux gros fagots pour mes pauvres.

Un coup d’œil à maman pour voir si elle approuve, et puis les deux petits s’en­volent, tout trace de sou­ci de nou­veau disparue.

— Cette paresse de Pier­rot m’in­quiète, mon­sieur le curé, je vous assure, dit maman en repre­nant son tricot.

— Il a du cœur et c’est un bon petit. Il faut seule­ment sti­mu­ler sa volon­té. Le bon Dieu vous y aide­ra. Voyez Yvon : il était bien un peu « flemme » aus­si jadis, comme ils disent.

— Tiens, au fait, c’est vrai ! Je l’a­vais bien oublié. Il s’est tel­le­ment trans­for­mé ! À pro­pos d’Y­von, mon­sieur le curé, Colette m’a témoi­gné le désir de s’as­so­cier davan­tage à la voca­tion de son cou­sin par une étude, abré­gée évi­dem­ment, mais pour­tant sérieuse, de la . Nous avons com­men­cé un peu ces soirs der­niers. Colette met l’en­train que vous devi­nez, mais Pier­rot nous a fait une tête impos­sible, à laquelle d’ailleurs j’ai sem­blé ne prê­ter aucune atten­tion. Mon bon­homme en a pro­fi­té pour se dra­per dans une atti­tude d’in­dif­fé­rence, et puis il s’est lais­sé prendre au jeu, il m’a ques­tion­né. Fina­le­ment, je le sens déjà inté­res­sé. Reste à savoir si cela dure­ra, car évi­dem­ment c’est un peu aus­tère pour son âge.

— Pas tant que cela. Vous ver­rez qu’il y pren­dra goût, sur­tout quand vous lui aurez annon­cé que, s’il bataille avec sa paresse, nous le pré­pa­re­rons à sa pre­mière com­mu­nion, de manière à ce qu’il la fasse le jour où Yvon dira sa pre­mière ici.
En atten­dant, si vous appe­liez Colette, je répon­drais à ses ques­tions, tan­dis que notre pauvre pares­seux court les bois.

Dix minutes après, Colette avait repris sa place sur le petit tabou­ret et la leçon bat­tait son plein.

— Mon­sieur le curé, maman m’a dit que la langue de l’É­glise était le . Pour­quoi ?

Chants liturgiques au lutrin par un choriste de la Maîtrise
C’est le qui donne à la langue litur­gique sa forme la plus expressive.

— Parce que 

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Chapitre II

Non, petit Pierre ne per­dra rien pour attendre. Il s’en doute bien et il est aux aguets. Ce petit homme est par­ti­san du moindre effort. Il n’i­gnore pas que maman ne varie jamais dans ses déci­sions et qu’il fau­dra, bon gré mal gré, écou­ter un jour ou l’autre les expli­ca­tions pro­mises à sa sœur ; aus­si tend-il l’o­reille pour sur­prendre sa ren­trée. Quand il entend les petits sabots cla­quer, il trouve un pré­texte pour quit­ter le bureau où il vient de ter­mi­ner ses pro­blèmes et va offrir ses ser­vices à Marianick.

— Qu’est-ce qui te prend ? dit, soup­çon­neuse, la bonne vieille Bre­tonne. Pour­quoi viens-tu m’en­com­brer une demi-heure avant le dîner ? La cui­sine n’est pas si grande et tu vas te trou­ver en tra­vers de tout ce que j’ai à faire. C’est ta maman qui t’envoie ?

Pier­rot est pares­seux, mais il ne ment jamais.

— Non, c’est moi qui viens tout seul, pour t’aider.

— M’ai­der ! Bonne sainte Anne ! Tu veux dire me faire enra­ger ! C’est l’heure pour toi d’être au bureau ; vas‑y.

Maria­nick ne plai­sante pas quand elle parle sur ce ton, et Pier­rot réflé­chit avec peine que la cui­sine et le bureau sont les deux seules pièces chauf­fées pour le moment ; alors ?…

L’o­reille basse, il regarde le coin du feu, près duquel Colette a repris place, sur le petit tabou­ret qu’elle affec­tionne particulièrement.

Maman ne semble pas s’a­per­ce­voir de la mine décon­fite de son benjamin :
 — Nous allons faire un peu de , Colette, comme je te l’ai pro­mis hier. Mais les débuts, je t’en pré­viens, te sem­ble­ront beau­coup plus dif­fi­ciles que tu ne l’a­vais pensé.
Tu es cou­ra­geuse. Mets‑y toute ton atten­tion et, à mesure que nous avan­ce­rons, tu ver­ras à quel point tu seras inté­res­sée. Je vais com­men­cer par te poser une ques­tion à laquelle tu ne t’at­tends cer­tai­ne­ment pas. Te sou­viens-tu de notre audience au Vatican ?

— Certes, oui. Mais quel rap­port cette audience peut-elle avoir avec la liturgie ?

— N’as-tu pas vu com­ment nous nous sommes sou­mis, tous, à l’é­ti­quette, aux marques de res­pect, de véné­ra­tion, indis­pen­sables, quand nous avons été reçus par le Saint-Père ? Réflé­chis un peu. Pour­quoi tant de cérémonies ?

Colette hésite, puis répond :
 — Je crois, maman, que vous vou­lez me faire remar­quer qu’on ne peut par par­ler au Pape, aux rois, aux grands de ce monde sans se sou­mettre à cer­taines règles de poli­tesse particulières.

Pier­rot, qui s’est dis­si­mu­lé sous la table, doit écou­ter sans en avoir l’air, car il raille tout à coup :
 — Tiens, belle trou­vaille ! Penses-tu qu’on les approche le cha­peau sur la tête ?

Colette hausse les épaules. Mais maman continue :
 — Et puis, en par­cou­rant ton his­toire, n’as-tu pas remar­qué qu’on entoure sou­vent de signes sym­bo­liques ceux qu’on veut hono­rer ? Ain­si on offre au Pape les clefs de saint Pierre. Qu’est-ce que cela signifie ?

— Qu’il a le pou­voir d’ou­vrir et de fer­mer les portes du Ciel.

— Exac­te­ment. Com­ment tous les sym­boles, ces clefs sont une image. Nous ne voyons pas le pou­voir du Pape, mais nous voyons les clefs, qui y font penser.
Jésus nous indique le chemin du ciel par sa liturgieMain­te­nant, ajou­tons sim­ple­ment que, s’il est une éti­quette à obser­ver devant les grands de ce monde, com­ment ne pas gar­der devant Dieu une tenue plus res­pec­tueuse encore, en nous sou­met­tant aux règles que l’É­glise nous impose pour cela ; de plus, il est une manière sym­bo­lique d’ex­pri­mer ain­si à Dieu nos prières et notre ado­ra­tions, et cela, vois-tu, c’est de la litur­gie.

— Comme c’est clair !

— Oui, mais ce n’est pas complet.