Temps de lecture : 2 minutesMadeleine était une pécheresse. Poursuivie par les remords, elle aperçoit Jésus qui passe et qui la regarde. N’en pouvant plus, elle entre chez le Pharisien où le Sauveur dînait, et, sans rien dire, se jette à ses pieds, pleure, et essuie les pieds du Maître de ses beaux cheveux dénoués.…
Étiquette : <span>Misericorde</span>
Après avoir été, à Montmartre, le curé du Moulin-Rouge, je suis devenu, à Saint-François-de-Sales, le curé de l’Hospitalité de Nuit.
C’est là, dans cette maison, née du cœur des catholiques, que chaque soir, lentement, tristement, pas à pas, arrivent les vaincus de la vie, pour trouver un matelas, du pain, et un peu d’oubli…
C’est pourquoi, après les quatorze retraites paroissiales, j’ai voulu que les « clochards » de chez moi aient, eux aussi, leur retraite à eux, où ils entendraient le langage qu’ils comprennent, et des paroles qui leur feraient du bien.
Ce sera mon dernier coup de canon.
J’ai précisément, dans mon clergé, un brave prêtre savoisien qui a beaucoup voyagé en Terre Sainte, et qui avec son cœur et une barbe magnifique, est tout à fait l’homme de la situation.
Le directeur de l’Hospitalité semble un peu inquiet, car, avec les événements, il y a pas mal de « fortes têtes », ce soir-là, dans la maison.
Mon vicaire le rassure.
— Tout ira bien… Je vais leur prêcher la Passion.
— La Passion… ? Vous n’y pensez pas !…
— Mais oui… la Passion…
Et il pousse la porte.
Vision unique d’humanité.

Je voudrais que tous les provinciaux, qui rêvent des grandes villes, puissent voir ici un des envers du décor.
Grande salle rectangulaire. Relents d’habits miteux, de sueur, de tabac — et quel tabac ! — de vinasse et d’alcool…
Là, sur des bancs très bas, sont assis des centaines d’hommes de tout âge, de toute profession, de toute langue….
Ex omni natione quae sub cælo est…
Tignasses mal peignées… barbes hirsutes, vêtements en lambeaux… Tout cela plus ou moins habité…
Le premier que j’aperçois, c’est mon ancien gardien du chantier de Sainte-Odile… brave homme dont j’ai dû me séparer, parce qu’il ne gardait rien du tout.
L’un montre ses semelles percées et il dit sentencieusement : « Je marche sur mes tiges !… » mais une bouteille de « rouge » sort, à moitié, de sa poche.
NOUS emprunterons à un livre du grand écrivain catholique Louis Veuillot l’émouvant récit qu’on va lire :
Il y avait dans les Pyrénées un savant et digne médecin qu’on appelait le docteur Fabas. Un jour, il vit arriver (aux Eaux-Bonnes, je crois), un homme qui portait à la jambe une plaie faite par un coup de feu. La blessure, déjà ancienne, avait un caractère particulier : il s’y formait des vers. Le médecin essaya de faire disparaitre au moins ces vers. Aucun moyen ne réussit. Le malade lui dit un jour :

« Docteur, restons-en là, ne cherchez plus ; je mourrai avec cette horrible incommodité.
— En effet, répondit le médecin, il y a là quelque chose d’extraordinaire. Je n’ai jamais rien vu de tel, quoique je sois vieux et que beaucoup de cas surprenants m’aient passé par les mains. Où donc avez-vous reçu cette blessure ?
— En Espagne, comme je vous l’ai dit souvent ; mais je ne vous ai point appris pourquoi je ne guérirai pas. Je veux que vous le sachiez enfin.
J’avais vingt ans, poursuivit-il d’une voix hésitante, et nous étions en 93, lorsque je fus forcé de rejoindre un corps d’armée que la Convention envoyait en Espagne. Nous partîmes trois de notre bourgade : Thomas, François et moi. Nous avions les idées de ce temps-là. Nous étions incrédules, ou plutôt impies, comme trois petits drôles qui se piquent de suivre la mode.
La route s’était faite gaiement. Nous allions arriver, lorsque traversant un village des montagnes, nous vîmes une statue de la Vierge, si vénérée que malgré la Révolution et les révolutionnaires, elle était restée sans mutilation, sur son piédestal, au portail de l’église.
L’un de nous eut la malheureuse idée d’insulter cette image, pour braver la superstition des paysans.
Le Père Middlelon, au catéchisme, avait parlé avec douceur et insistance de la miséricorde de Dieu. 1l avait tout d’abord dit quelques mots sur la nécessité de la contrition puis il avait posé des questions aux élèves afin de s’assure qu’ils avaient bien compris sa pensée.
« Harry Quip, commença-t-il, répondez-moi. Supposez mon ami, que vous êtes un grand pécheur : depuis que vous avez l’âge de raison, vous avez commis péché mortel sur péché mortel. Toutes vos fautes souillent encore votre âme, toutes vos confessions ont été mauvaises, et vous apprenez subitement que vous allez mourir, ici même, dans cette classe. Faut-il désespérer ?
— Non, Père, répondit Harry. Je demanderais à la Saint Vierge, notre Mère bénie, de m’obtenir la grâce de faire un bon acte de contrition, et je me confesserais, m’abandonnant dans les bras de la miséricorde de Dieu.

— Mais voici, Carmody, continua le professeur, vous n’avez jamais fait une seule bonne action, et d’un autre côté, vous avez sur la conscience tous les péchés que tous les enfants du monde ont commis. Que feriez-vous dans ce cas, si l’on vous disait qu’il faut mourir de suite ?
— Je me confierais dans les mérites infinis du Précieux Sang.
— Joseph, voici un cas plus grave : votre conscience est salie de tous les péchés dont j’ai parlé, et vous êtes seul, sans compagnons, livré à vos faibles forces, au milieu de, l’océan ; aucun prêtre près de vous pour vous absoudre, aucun ami pour prier pour vous. Que faire ?
Joseph répondit avec une élévation suggérée sans le vouloir par les paroles mêmes de son professeur :
— J’essaierais avec la grâce de Dieu de faire un acte de contrition parfaite ; alors, je m’enfoncerais dans les vagues comme dans les bras de Dieu : Dieu est partout !
— Voilà une belle réponse. Mais, Reynolds, supposez que Dieu, en punition de tous vos péchés, vous afflige d’une hideuse maladie. Supposez alors que vos amis s’éloignent de vous avec horreur, que vos relations vous rejettent parmi les bêtes ; supposez que vous êtes mourant de dénuement et de faim, et, au moment de votre mort, vous demandez un prêtre pour entendre votre confession, mais celui-ci, épouvanté par votre état repoussant, s’enfuit au loin, criant que Dieu vous a déjà damné ! Seriez-vous désespéré
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Conte chrétien
Ce soir-là, lorsque Jésus passa parmi les élus, tout heureux de saluer leur Sauveur, il semblait quelque peu préoccupé ; il répondait aux saluts avec son sourire radieux, mais demeurait pensif, car il avait aperçu, au milieu des bienheureux, quelques personnes — et même un bon nombre — qui le frappaient par leur comportement. Ils paraissaient complexés, on aurait dit qu’ils désiraient passer inaperçus, et leur regard était inquiet, presque fuyant, ce qui est contraire à l’ambiance de confiance qui règne au Paradis.
De toute manière, après deux ou trois jours, grâce à la grande fraternité qui existe dans la Maison du Père, ils changeaient complètement, se sentaient à leur aise, à l’unisson avec les autres, avec la même joie et la grande paix qui se reflétaient sur leur visage. Comment expliquer ce phénomène ? Y aurait-il une négligence de Saint Pierre ? Son âge avancé, la routine, et en particulier sa grande confiance a peut-être permis que son contrôle se relâche. Il était donc nécessaire d’exiger du Portier du Ciel une meilleure vigilance.
Avec la rapidité de l’éclair, le Seigneur alla voir saint Pierre, qui était tranquillement assis dans son fauteuil, à côté de la porte. Jésus, lui adressa ces paroles, presque de reproche :
« Mon bon Saint Pierre, je ne mets pas en doute ta bonne volonté et ta conscience professionnelle, mais il me semble qu’avec le temps, bien qu’au Paradis mille ans sont comme un jour, ta vigilance a pu s’affaiblir ; et que, profitant d’un instant d’inattention lorsque tu révises le Livre de Vie, « on te fait passer du lard pour du cochon », comme on dit à Marseille »
Réagissant avec sa spontanéité habituelle, et cependant avec un très grand respect, Pierre répondit :
« Pardon Seigneur, mais je ne comprends pas ; cela est impossible, car je passe ma vie à la porte du Ciel, comme une sentinelle, toujours en éveil, et malgré mon âge avancé, rien n’échappe à mon regard de pêcheur. Croyez-moi, mon bon Seigneur, je ne suis pas coupable, car je suis, à mon poste, inexorable, et personne n’arrive à Bon Port, sans son requis passeport. Mais, oh ! Divin Seigneur, si vous pensez que je ne suis pas apte à ce poste de haute confiance, je remets entre vos mains ma démission ».
Il est vrai qu’à une certaine occasion, il ne s’était pas montré très courageux, mais pourquoi le rappeler ?… C’est bien connu, cependant, à la fin de sa vie, il a voulu être crucifié la tête en bas, montrant un héroïsme qui compensa mille fois sa lâcheté.