Étiquette : <span>6 janvier</span>

Auteur : Ségur, Comtesse de | Ouvrage : Évangile d’une grand’mère .

Temps de lec­ture : 5 minutes

Peu de temps après, on vint dire au Roi Hérode, qui régnait à Jéru­sa­lem, que des Rois Mages qui arri­vaient de très loin vou­laient le voir et qu’ils deman­daient : « Où est le Roi des Juifs qui vient de naître, car nous avons vu son étoile en Orient et nous venons à Jéru­sa­lem pour l’adorer ? »

Hérode fut très effrayé de ce qu’on lui disait, parce qu’il crai­gnait qu’un Roi plus puis­sant que lui ne vînt lui enle­ver son Royaume. Et toute la ville de Jéru­sa­lem eut peur aus­si. Hérode fit venir les Rois Mages, leur par­la, les ques­tion­na, et il sut que le Roi dont par­laient les Mages était le Christ, le Fils de Dieu que les Juifs atten­daient d’après les livres des Pro­phètes. Alors Hérode fit venir les savants, Princes des prêtres et doc­teurs du peuple, et il leur deman­da où le Christ devait naître.

Ils lui répon­dirent : « À Beth­léem, ville de Juda. »

Psautier de Saint Louis - Les rois mages devant Hérode

Hérode emme­na les Mages chez lui, leur fit beau­coup de ques­tions sur l’étoile qu’ils avaient vue. Ils lui racon­tèrent que des Anges leur étaient appa­rus, qu’ils leur avaient annon­cé la nais­sance du Roi des Juifs, le Christ, le Mes­sie pro­mis, le Fils de Dieu, et leur avait ordon­né d’aller l’adorer ; qu’ils allaient se mettre en route sans savoir où ils devaient aller, mais qu’au moment de par­tir, une étoile, plus grosse et plus brillante que toutes les étoiles du ciel, se mon­tra à eux et se mit à avan­cer devant eux ; elle s’arrêtait quand ils s’arrêtaient et avan­çait quand ils mar­chaient ; cette étoile avait dis­pa­ru quand ils étaient entrés à Jéru­sa­lem, et c’est pour­quoi ils avaient deman­dé à voir le Roi des Juifs que leur avaient dési­gné les Anges.

Hérode les remer­cia, leur dit d’aller à Beth­léem, car c’était là que devait naître le Mes­sie, le Christ, pour sau­ver tous les hommes, en les déli­vrant du démon.

« Allez, leur dit le Roi Hérode, infor­mez-vous à Beth­léem de cet enfant, et quand vous l’aurez trou­vé, reve­nez me le faire savoir, pour que moi aus­si j’aille l’adorer. »

Les Rois Mages le lui pro­mirent et se remirent en route ; aus­si­tôt, leur étoile repa­rut, ce qui leur cau­sa une grande joie ; et l’étoile mar­cha devant eux, jusqu’à ce qu’étant arri­vée à la grotte où était l’Enfant et Marie sa mère, elle s’arrêta.

Auteur : Michelet, Marcel | Ouvrage : Autres textes .

Temps de lec­ture : 9 minutes

On dit que bien men­teurs sont les chas­seurs. Ils sont poètes à leur façon, ces grands che­va­liers de la nature, et je crois plu­tôt qu’ils ne mentent point, mais qu’il leur arrive par­fois d’exa­gé­rer la véri­té. Oyez cependant.

Sou­vent, ces soirs d’hi­ver, quand seul, on se sent si bien chez soi, près d’un bon feu qui flam­boie, le vieux curé du vil­lage, Deferr, avait l’au­baine de rece­voir la visite noc­turne de maître chas­seur Ros­soz. Ce n’é­tait ni un scru­pu­leux, ni un athée notoire que notre chas­seur. De temps à autre, le Bon Dieu devait pour­tant se conten­ter d’une bonne inten­tion en guise de sanc­ti­fi­ca­tion du dimanche. Cepen­dant, maître Ros­soz n’ou­bliait pas son vieux curé Deferr et les soi­rées d’hi­ver, quand la lune n’é­tait pas pro­pice pour l’af­fût de fin limier gou­pil, il s’en allait vers le pres­by­tère. Non pas qu’il allât se confes­ser, car notre chas­seur ne sen­tait le besoin, et pour son corps et pour son âme, de se les­si­ver qu’une fois l’an. Une vraie belle âme au demeu­rant, mais dans la plus noire des enve­loppes. En ce soir de jan­vier, maître chas­seur Ros­soz se hâte pour­tant vers la cure et si l’on dit que se hâter n’é­tait pas son fort, on pou­vait devi­ner quelque grave aventure.

Histoire de chasseur à l'EpiphanieLe calme du pres­by­tère n’a­vait pas même été trou­blé par ce visi­teur inso­lite, car maître chas­seur Ros­soz, d’un pas glis­sé et tou­jours pru­dent, avait fran­chi les sombres cou­loirs et voi­ci qu’il entrait dans la chambre de son vieux curé assis près du four­neau en pierre « ollaire ». M. Deferr n’est pas sor­ti de sa prière, il a hoché la tête pour saluer et ses mains pieu­se­ment fer­mées comme ses yeux, par­cou­raient régu­liè­re­ment les gros grains bruns d’un cha­pe­let fran­cis­cain. Le curé n’a rien dit à son homme, puis­qu’il par­lait à son Dieu.

Ros­soz s’est assis dans le grand fau­teuil de cuir réser­vé aux visites. Il n’a rien dit, lui non plus ; mais ses yeux brillaient d’une étrange his­toire et ses mains tan­nées allaient ner­veu­se­ment des poches de son lamen­table pale­tot de chasse à sa pipe noire et ron­gée, puis remon­taient la figure par
devant jus­qu’à ses che­veux, pour recom­men­cer cent fois le même manège. Per­sonne ne disait rien et le jeu des mains recom­men­çait chaque fois plus rapide et l’é­trange his­toire brû­lait tou­jours plus dans ses yeux. Le cuir brû­lait sur le fau­teuil. La douce cha­leur du four­neau brû­lait et la prière silen­cieuse du vieux curé brû­lait. Des mains de feu tiraient l’un après l’autre les grains rou­gis du cha­pe­let fran­cis­cain, pareils à des char­bons ardents. Sa solide tête de chas­seur de cha­mois, elle, elle lui sem­blait s’é­car­te­ler comme un tronc dans les flammes. Voi­là main­te­nant que toute la chambre brû­lait, du feu par­tout, par­tout du feu qui tour­nait, qui tour­nait avec lui et lui avec le feu.

Le cha­pe­let du curé a sou­le­vé une brise de fraî­cheur en rou­lant par terre et Ros­soz s’est jeté aux pieds de son vieil ami Deferr, puis il a dit : « Mon Père, par­don­nez-moi, parce que j’ai péché… parce que j’ai péché… parce que j’ai péché… parce que j’ai… » Les mains du prêtre se posèrent, telle la rosée du matin fraî­chis­sant une fleur, sur les mains brû­lantes du chas­seur prosterné.

Alors Ros­soz a pu conti­nuer sa confes­sion. « Parce que j’ai, pour­suit-il, parce que j’ai tué un cha­mois, aujourd’­hui, près de la cha­pelle de S. Chris­tophe. » Le curé n’y com­pre­nait plus rien. Ros­soz, lui, le grand bra­con­nier de la val­lée, se confes­ser d’a­voir des­cen­du un cha­mois ! Jamais ça ne lui était arrivé.

Auteur : Mistral, Frédéric | Ouvrage : Mémoires et souvenirs .

Temps de lec­ture : 7 minutes

À la rencontre des Rois. – La crèche.

– C’est demain la fête des Rois Si vous vou­lez les voir arri­ver, allez vite à leur ren­contre, enfants, et por­tez-leur quelques présents.

Voi­là, de notre temps, ce que disaient les mères, la veille du jour des Rois.

Les enfants à la rencontre des rois mages en Provence

Et en avant toute la mar­maille, les enfants du vil­lage ; nous par­tions enthou­siastes à la ren­contre des rois Mages, qui venaient à Maillane, avec leurs pages, leurs cha­meaux et toute leur suite, pour ado­rer l’En­fant Jésus.

– Où allez-vous, enfants ?

– Nous allons au-devant des Rois !

Et ain­si , tous ensemble, mioches ébou­rif­fés et petites blon­di­nettes, avec nos calottes et nos petits sabots, nous filions sur le che­min d’Arles, le cœur tres­saillant de joie, les yeux rem­plis de visions. Et nous por­tions à la main, comme on nous l’a­vait recom­man­dé, des fouaces pour les Rois, des figues sèches pour les pages et du foin pour les chameaux.

Jours crois­sants,
Jours cui­sants.

C’é­tait au com­men­ce­ment de jan­vier et la bise souf­flait : c’est vous dire qu’il fai­sait froid. Le soleil des­cen­dait, tout pâle, vers le Rhône. Les ruis­seaux étaient gla­cés, l’herbe était flé­trie. Des saules dépouillés, les branches rou­geoyaient. Le rouge-gorge et le roi­te­let sau­taient, fré­tillants, de branche en branche, et l’on ne voyait per­sonne aux champs, à part quelque pauvre veuve qui met­tait sur sa tête son tablier rem­pli de souches, ou quelque vieillard en haillons qui cher­chait des escar­gots au pied d’une haie.

– Où allez-vous si tard, petits ?

– Nous allons au-devant des Rois !

Et la tête en arrière, fiers comme Arta­ban, en riant, en chan­tant, en cou­rant à cloche-pied, ou en fai­sant des glis­sades, nous che­mi­nions sur la route crayeuse, balayée par le vent.

Puis le jour bais­sait. Le clo­cher de Maillane dis­pa­rais­sait der­rière les arbres, der­rière les grands cyprès noirs ; et la cam­pagne s’é­ten­dait tout là-bas, vaste et nue. Nous por­tions nos regards aus­si loin que pos­sible, à perte de vue, mais en vain ! Rien ne parais­sait, si ce n’est quelques fagots d’é­pines empor­tés par le vent dans les chaumes. Comme cela a lieu dans les soi­rées d’hi­ver, tout était triste et muet.

Auteur : Bastin, R., O.M.I | Ouvrage : La simple histoire de la Vierge Marie .

Temps de lec­ture : 20 minutes

Récit de l'annonciation pour les jeunes du Caté

Catéchèse mariale pour les jeunesPRÈS ses fian­çailles, Marie quit­ta Jéru­sa­lem pour pré­pa­rer à Naza­reth la mai­son qu’elle occu­pe­rait avec Joseph, lors­qu’elle serait mariée.

Ne vous ima­gi­nez pas une belle mai­son ! En Orient, les demeures ne sont pas très jolies. Gros blocs car­rés, per­cés de petites fenêtres afin que le soleil ne pénètre pas (le soleil est très chaud dans ce pays), elles res­semblent à un jeu de cubes qu’on aurait dis­per­sés dans le jardin.

L’in­té­rieur en est fort pauvre aus­si. On y trouve juste le strict néces­saire pour faire la cui­sine et pour le sommeil.

Comme Marie avait beau­coup de goût, elle avait dis­po­sé ses humbles objets avec tant d’art que sa mai­son était vrai­ment très avenante.

Un soir de mars, près du feu de bois allu­mé pour cou­per l’hu­mi­di­té, Marie, ayant fini son ménage, s’é­tait assise pour lire la Bible. Les langues rouges et jaunes des flammes léchaient les bûches noires et grises, et Marie, le livre ouvert sur les genoux, son­geait dou­ce­ment à ce Mes­sie pro­mis à tra­vers toute l’His­toire Sainte et atten­du avec quelle impatience !

Il y a bien long­temps, le Bon Dieu avait annon­cé qu’Il revien­drait sur la terre pour par­don­ner et répa­rer le péché d’A­dam et d’Ève, lorsque les hommes seraient prêts à Le rece­voir. Jusque-là, Il n’a­vait pas encore trou­vé une âme assez pure pour deve­nir sa maman, assez fidèle pour n’ai­mer que Lui, assez forte pour accep­ter sa souf­france. Marie aurait tant aimé être choi­sie comme maman du Bon Dieu, mais elle se trou­vait si humble, si petite, si pauvre qu’elle n’o­sait espé­rer un pareil hon­neur. Alors, elle pria de tout son cœur pour que les hommes, ces­sant d’of­fen­ser le Bon Dieu, Lui per­missent de réa­li­ser son grand dessein.

Marie prie dans son coeur à Nazareth

Le feu de bois s’é­tei­gnait dou­ce­ment. Les grandes flammes n’é­taient plus dans l’âtre sombre qu’une poi­gnée d’é­toiles pal­pi­tantes. Et Marie se deman­dait ce qu’elle pour­rait bien faire pour hâter la venue du Messie.

Sou­dain le feu sif­fla — on eût dit une corde de vio­lon­celle qui, seule, eût chan­té — et voi­ci que les braises endor­mies, dou­ce­ment, se réveillent. L’une après l’autre, les flammes se dressent de leur lit de pourpre, elles s’é­tirent, se courbent, se balancent ; elles retombent mol­le­ment encore sur leur couche. La chan­son se fait plus impé­rieuse ; alors, sou­dain dres­sées, elles montent à l’as­saut de l’âtre en une flam­bée magni­fique, chas­sant l’ombre dans les coins les plus recu­lés de la pièce et inon­dant de lumière et de cha­leur Marie éton­née d’un tel réveil.

Une arai­gnée, qui au bout de son fil fai­sait une petite sieste avant la chasse de la nuit, crut le matin déjà arri­vé et remon­ta bien vite se cacher au pla­fond, mau­dis­sant sa paresse et ce long somme qui la met­tait à la diète. Le cana­ri s’é­broua dans sa cage entr’ou­verte et, comme un oiseau d’or, vint se poser sur la che­mi­née, près d’un gros bou­quet d’an­co­lies dont les corolles, mor­dues par la lumière, posaient à chaque feuille une petite auréole tremblante.

Marie, de ses yeux lim­pides, regar­da l’oi­seau, les fleurs, la lumière et, tout à coup, eut l’im­pres­sion qu’il y avait quel­qu’un der­rière elle.

Brus­que­ment, elle se retour­na sur son bas tabou­ret et décou­vrit un ange si beau, si majes­tueux qu’elle tom­ba à genoux, lâchant son livre pour mieux joindre les mains. À ses pieds, son ombre se recro­que­villa et, le plus dou­ce­ment qu’il put, le cana­ri rega­gna sa cage, sans faire le moindre bruit.

| Ouvrage : Autres textes .

Temps de lec­ture : 6 minutes

Peu à peu, la rumeur d’un Enfant avec une auréole se répan­dit et péné­tra les coins les plus isolés.

Là-bas, vivaient trois rois qui étaient voi­sins et qui s’ap­pe­laient Gas­pard, Mel­chior et Bal­tha­zar. Ils res­sem­blaient à des men­diants et pour­tant ils étaient des vrais rois et –plus bizarre encore– des sages. Selon l’É­cri­ture, ils savaient s’o­rien­ter d’a­près la constel­la­tion des étoiles et c’est un art dif­fi­cile comme le savent tous ceux qui ont déjà essayé de suivre une étoile.

rois mages - creche baroqueCha­cun des trois rois pré­pa­ra un cadeau pour le divin Enfant. Gas­pard était un roi très puis­sant ; aus­si il pen­sa qu’il fal­lait de l’or pour le Roi des rois. Le pieux Mel­chior vou­lu hono­rer le Dieu des­cen­du sur terre et pour cela il prit de l’encens. Et pour­quoi Bal­tha­zar prit-il de la myrrhe ? Avait-il pres­sen­ti que cette Enfant allait souf­frir, et souf­frir jusqu’à la mort, pour nous ?

En tout cas, c’est ain­si que les trois rois char­gés de leur pré­sent, l’or, l’encens et la myrrhe, se réunirent, équi­pèrent un mer­veilleux cor­tège et par­tirent le soir en hâte avec leurs cha­meaux et les élé­phants. Dans la jour­née, les hommes et les ani­maux se repo­saient sous les rochers du désert de pierres et l’é­toile qui leur indi­quait la direc­tion, les atten­dait patiem­ment dans le ciel, caché par la lumière et la cha­leur du soleil. Mais la nuit, elle gui­dait à nou­veau le cortège.

* * *

Ain­si, ils avan­cèrent durant de nom­breux jours. Enfin, en arri­vant à Jéru­sa­lem, l’é­toile sui­vit la direc­tion de Bethléem.