— Je suis content, dit Jean ; maintenant, il n’y a plus que les Apôtres qui n’ont pas encore vu le Bon Dieu.
— Cela ne va pas tarder : la matinée est achevée, les Apôtres ont entendu les récits des Saintes Femmes, mais les scènes de la Passion leur ont laissé de si affreux souvenirs qu’ils ne parviennent pas à vaincre leur tristesse : Jean seulement, est convaincu : n’oublie pas, mon petit ami, qu’au pied de la croix, il était seul avec les femmes : en récompense, Dieu a voulu que l’un des premiers, il soit rassuré : Pierre, Jacques, André, Thomas et les autres pleurent encore.
C’est à Pierre, l’apôtre que Jésus a choisi pour être à la tête de son Église, c’est à Pierre que le divin Maître apparaît d’abord. Quand Jésus avait été arrêté, tu t’en souviens, on avait demandé par trois fois à Pierre s’il Le connaissait, et, trois fois, Pierre avait dit : « Je ne connais pas cet homme. »
— Je m’en souviens, c’était très vilain, dit Jean.
— Si vilain que, depuis, Pierre n’avait pas cessé de pleurer sa faute. Il avait constamment, devant les yeux, le doux visage du Maître, et il lui semblait qu’il n’y aurait pas de repos, pour lui, tant qu’il n’aurait pas obtenu son pardon. Jésus est si bon qu’en apparaissant à Pierre l’un des premiers, Il a voulu lui montrer qu’Il lui avait pardonné sa faiblesse. Désormais, mon petit Jean, Pierre ne reniera plus son Maître : il se laissera charger de chaînes, emprisonner, frapper à coups de pierres et enfin crucifier, comme son Dieu, et ne cessera de répéter « Le Christ est ressuscité ».
Cette grande nouvelle, Pierre l’annonce aux autres apôtres, auxquels Jésus n’est pas encore apparu. Le Maître tient à consoler d’abord, deux voyageurs qui marchent tristement sur le chemin d’un village nommé Emmaüs. En marchant, ils parlent de la mort de Jésus : Ils croyaient en Lui, mais, depuis trois jours qu’Il est dans le tombeau, Il n’a pas fait les miracles qu’on attendait ; alors ses amis ont peur des Juifs et fuient Jérusalem. Soudain, un compagnon de route survient :
— De quoi parlez-vous, dit-il, et d’où vient votre tristesse ?
L’un d’eux, Cléophas, lui dit qu’ils pleurent leur Maître qu’on a mis à mort.
— Hommes sans intelligence, leur dit le voyageur, cœurs lents à croire tout ce que les prophéties ont annoncé, ne fallait-il pas que le Christ souffrît toutes ces choses et qu’ainsi Il entrât dans la Gloire ?
Et Il leur expliqua tout ce qui avait été dit du Christ, bien avant qu’Il vînt sur la terre. Cependant, l’on arrivait à Emmaüs et le voyageur s’apprêtait à quitter ses compagnons :
— Demeurez avec nous, dirent-ils, car il se fait tard, et déjà le jour baisse.
Le voyageur demeura et se mit à table avec les disciples. Et voici qu’ayant pris du pain, Il le rompit et le présenta à ses compagnons. Alors, les yeux des pèlerins d’Emmaüs s’ouvrirent : Celui qui rompait ainsi le pain, c’était Jésus, c’était leur Maître. Ils le reconnaissaient, mais déjà Il avait disparu, et, demeurés seuls, ils se disaient l’un à l’autre :
— N’est-il pas vrai que notre cœur était tout brûlant, en nous-mêmes, lorsqu’Il nous parlait en chemin ?

— Moi, je l’aurais reconnu, tout de suite, dit Jean.
— Aucun de nous, peut-être, ne l’aurait reconnu, mon enfant, mais tous, à notre tour, nous sommes comme les pèlerins d’Emmaüs, attristés, découragés. Les petits enfants comme toi, ont, parfois, peur de la nuit : les grands ont peur de la vieillesse et de la mort. Tous alors, nous devons répéter avec confiance :
« Seigneur, demeurez avec nous, car il se fait tard, et déjà le jour baisse. »
— Je le dirai, Madame, mais quand Il a été parti, le Bon Jésus, qu’est-ce qu’ils ont fait, les pauvres voyageurs ?
— Ils retournèrent à Jérusalem et allèrent trouver les Apôtres qui étaient réunis dans une grande salle, dont toutes les portes étaient fermées, par peur des Juifs.
— Mais on leur ouvrit, aux pèlerins ?
— Oui, on leur ouvrit, et bien vite, on leur annonça la grande nouvelle :
« Le Seigneur est ressuscité, et Il est apparu à Pierre. »
— Mais ils le savaient bien, eux ?
— Aussi se hâtèrent-ils de raconter aux apôtres ce qu’ils avaient vu et entendu.
— Les autres ont dû être jaloux, n’est-ce pas, Madame ?
— Peut-être, mais certains se refusaient encore à croire à la Résurrection, quand, tout à coup, sans qu’aucune porte s’ouvrît, Jésus parut au milieu d’eux, en disant : « La paix soit avec vous. »

Et comme les disciples avaient l’air de prendre leur Maître pour un fantôme, Il leur dit en souriant :
— Avez-vous quelque chose à manger ? et Il mangea un peu de miel et de poisson grillé. L’on vit bien alors qu’Il était réellement vivant.
— Alors, maintenant, tous les Apôtres l’avaient vu ?
— Non, l’un d’entre eux, Thomas, venait de sortir quand Jésus vint, et il déclara qu’il ne croirait à la Résurrection que lorsqu’il aurait vu la trace des clous et posé sa main dans la plaie du côté du Christ…
— Oh ! dit Jean indigné, alors il pensait que tout le monde disait des mensonges.
— Il le pensait, mon enfant, mais Jésus lui apparut, à lui aussi, et lui dit de regarder et de toucher les traces des clous et de la lance.
— Est-ce qu’il l’a fait ? dit Jean, curieusement.
— Oh ! non, à peine Jésus lui était-il apparu que, tombant à genoux, il s’était écrié : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »
— Et le Bon Dieu ne l’a pas grondé ?
— Un peu, mais si doucement, « Thomas, lui a‑t-Il dit, parce que tu as vu, tu as cru ; bien-heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru ».
Depuis lors, mon petit, nous sommes tous obligés de faire ce que n’a pas su faire le pauvre Thomas. Le Bon Dieu se cache à nous, et pourtant, nous croyons, et demain, dans le monde entier, les chrétiens chanteront, tous, d’une seule voix :
« Le Seigneur est véritablement ressuscité : Alleluia. »
— J’ai hâte d’être à demain, dit Jean.
Il se leva, enfin, ce jour béni. Dès les premières lueurs du jour, les cloches annoncèrent à tous les échos que, vainqueur de la mort, le Christ était sorti du tombeau.
Il n’est pas de fête qui apporte avec elle autant de joie que Pâques : Noël, c’est la naissance du petit Enfant qui doit sauver le monde, mais à l’heure où on Le fête Il n’est encore qu’un bébé vagissant qui grelotte sur la paille. Que de souffrances et de peines Le séparent du jour glorieux, où, brisant les chaînes de la mort, Il s’élancera dans l’éternelle vie. C’est au jour de Pâques que le Fils de Dieu fait vraiment éclater sa puissance.
Quand les rois de la terre ont rempli le monde du bruit de leurs exploits, l’heure vient, toujours, où le silence se fait, autour de leur tombeau.
Leurs ennemis-mêmes sont désarmés, car tout cède devant la mort. Pour Jésus, notre Dieu, c’est lorsque tout semble fini que tout commence, car la résurrection apprend au monde étonné que l’œuvre divine est accomplie.
Pour sauver le genre humain condamné à l’enfer, le Fils de Dieu est descendu sur la terre, a vécu parmi les hommes, est mort pour eux, mais en sortant du tombeau, Il montre qu’Il était Dieu. Aussi quelle joie emplit l’univers ! Désormais, les pauvres hommes peuvent espérer qu’après leur vie misérable, s’ouvriront, pour eux, les portes du Ciel. « Alleluia, le Christ est ressuscité », nos souffrances n’auront qu’un temps et, nous aussi, nous vaincrons la mort, puisque, tandis que notre corps sera couché dans le tombeau, notre âme s’envolera vers Dieu…
Pendant les quarante jours du Carême, les chrétiens, en souvenir des souffrances du Maître, s’imposent des privations. Autrefois, pendant cette longue période, on ne faisait qu’un repas par jour, et ce repas ne devait comporter ni viande, ni œufs, ni laitage. C’est pourquoi au matin de Pâques, le prêtre bénissait, solennellement, l’agneau pascal et les œufs, pour montrer que l’on pouvait recommencer à s’en nourrir. Depuis lors, bien que les rigueurs du Carême soient très adoucies, la coutume est demeurée de donner aux enfants des œufs de Pâques.
Dans bien des régions de France, en particulier en Champagne et en Lorraine, lorsque les cloches se taisent, du Jeudi au Samedi Saint, les enfants de chœur parcourent les rues, armés de crécelles et annoncent les heures des offices. Dès qu’au Gloria in excelsis du Samedi Saint, les cloches recommencent à tinter, les enfants se répandent à nouveau à travers les rues et demandent à être payés de leurs peines :
Alleluia, chantent-ils,
Alleluia, du fond du cœur,
Ayez pitié des enfants de chœur,
Et le Bon Dieu vous le rendra,
Alleluia !
En Normandie, les gamins sont plus audacieux et chantent, sur l’air de « O filii et filiae » :
Bonne femme, bonne femme, tâtez au nid,
Ne nous donnez pas d’œufs pourris,
Car le Bon Dieu vous f'rait mouri,
Alleluia !
Le lendemain, jour de Pâques, les quêteurs font bombance avec les œufs qu’ils ont recueillis et que leurs mères transforment en omelettes, galettes et friandises variées.
Dans beaucoup de nos vieilles provinces, les œufs durs, teints de couleurs vives, servent aux jeux des enfants. Ils les font rouler le long d’une planchette inclinée et les œufs heurtés appartiennent au gagnant.
Il n’est pas rare de voir des gamins gagner, par ce procédé, une douzaine d’œufs qu’ils absorbent, dans leur journée. Naturellement, on a pensé aux estomacs délicats des petits enfants des villes qui ne considèrent pas les œufs durs comme une friandise. Pour eux, les confiseurs étalent dans leurs vitrines des œufs de sucre et de chocolat, des œufs enrubannés, contenant des surprises, et, dans la plupart des souvenirs d’enfance, la fête de Pâques demeure liée aux beaux œufs multicolores reçus avec tant de joie.
Œufs véritables ou artificiels, ils ont tous le même sens en rappelant que les privations du Carême ont pris fin.
Chaque région célèbre à sa manière la joie de Pâques. À Épinal, les enfants, au soir du Samedi Saint, se dirigent vers les rives de la Moselle, porteurs de petits bateaux chargés de bougies. Ils lancent leur flotte en miniature, et pendant que les esquifs illuminés descendent le fleuve, garçons ou fillettes chantent à tue-tête :
Les champs golots (les champs coulent),
La lour relot (les veillées s'en vont),
Pâques revient,
C'est un grand bien.
Ils veulent dire par là que l’hiver est passé… L’hiver de l’âme aussi est passé et l’on dit qu’au matin de Pâques, si le ciel se colore de bleus si tendres et de roses si délicats, c’est parce qu’on y voit flotter des ailes d’anges…
Ces ailes d’anges, Madame Lagarde les vit planer ce matin-là sur le lit de l’enfant endormi, qui naissait à peine à la vie de l’âme. Jusqu’alors, en effet, le petit Jean avait vécu d’une vie toute matérielle, sans autre souci que de manger à sa faim, et de boire à sa soif. Il savait, désormais, qu’il avait, au Ciel, un Père qui revêt les lys des champs et nourrit les oiseaux des bois mais qui veut que les enfants L’aiment, Le prient, et deviennent, pour Lui, bons et sages.
Justement, en s’éveillant, Jean avait dit en soupirant, que, s’il avait vécu au temps de Jésus, il aurait toujours voulu être près de Lui.

— Même à présent, mon petit, tu peux ne jamais Le quitter, mais, ne veux-tu pas voir ce que t’ont apporté les cloches de Pâques ?
Et devant les yeux éblouis de l’enfant, Madame Lagarde ouvrit un paquet : elle en tira d’abord une soutane rouge, ornée d’innombrables petits boutons, une aube de dentelles, une minuscule calotte, enfin des bas et des pantoufles rouges, sur lesquels Jean se jeta, avec des transports de joie.
— Des souliers rouges, comme quand j’étais petit, bégayait l’enfant, qui ne savait s’il devait rire ou pleurer… C’est pour moi, tout cela ; je vais le mettre pour sortir ?
— Non, dit Madame Lagarde en souriant, nous allons refaire le paquet et aller ensemble à l’église, c’est là qu’on t’habillera.
Ils sortirent : dehors, c’était la joie de Pâques, et l’allégresse du printemps. Dans l’air léger, les cloches sonnaient, à toute volée, et tous les passants que l’on croisait avaient des vêtements neufs et des visages contents. Dans le ciel d’un bleu éclatant, les hirondelles se pourchassaient avec des cris de joie.
— On dirait, dit Jean, qu’elles crient aussi « Alleluia ».
— Peut-être, dit Madame Lagarde, ne sais-tu pas qu’on raconte, que, le jour de la mort du Christ, les petits oiseaux, réunis autour de la Croix, essayèrent de soulager les souffrances du Bon Maître. Le rouge-gorge enleva avec son bec les épines du front divin, et c’est une goutte du sang de Jésus qui teignit sa gorge, alors grise. L’hirondelle enleva les clous, et c’est pour cela qu’elle porte bonheur à nos maisons. La cigogne pria : « Seigneur, donnez-Lui de la force » et, depuis lors, on aime la voir, en Alsace, construire son nid, sur les cheminées. Enfin, si la tourterelle est toujours si plaintive, c’est, dit-on, parce que, perchée sur un bras de la Croix, elle assista aux dernières souffrances du Fils de Dieu. Alors, elle s’écria « Seigneur, Seigneur », et, depuis, elle vole à travers la campagne, en répétant ces tristes mots.
— Oh ! dit Jean, je suis content de savoir cela, parce que, quand je verrai de méchants garçons avec des frondes, je les empêcherai de tirer sur les oiseaux.
Ce n’était pas à Sainte-Perpétue que Madame Lagarde conduisait Jean, mais dans la vieille cathédrale, où, sous la minuscule croix d’or de la mosaïque, dort le grand Fléchier.
Tenant par la main l’enfant, toujours chargé de son paquet, la pieuse dame se dirigea à droite du grand autel, vers un escalier conduisant à la salle de la maîtrise.
Les premières marches à peine montées, on entendait un joyeux bavardage, mêlé à des rires étouffés et à des voix graves imposant silence.
Un peu intimidé, Jean fut poussé par sa protectrice dans une grande salle, où une cinquantaine de petits garçons de sept à douze ans étaient occupés à enfiler leurs soutanes rouges. Un jeune prêtre, se frayant un passage au milieu des rangs joyeux, s’avança en souriant à la rencontre de Madame Lagarde et dit en tapant sur l’épaule de l’enfant :
— Voilà donc Jean Varnaud.
Jean pensa à part lui qu’il était plus connu qu’il ne le croyait, mais se contenta de répondre :
— Oui, Monsieur le Curé.
— Curé, pas encore ; dis, Monsieur l’Abbé, cela suffira…
Puis, prenant congé de Madame Lagarde, avec laquelle il s’était entendu à l’avance, il emmena l’enfant dans un coin du vestiaire. Un des plus grands garçons fut chargé d’habiller Jean qui ne put s’empêcher de se mirer dans une porte vitrée et se trouva superbe. Le « rang de taille » le fit placer à côté d’un petit blondin que l’Abbé appela Étienne et qui fut chargé d’empêcher Jean de commettre trop de maladresses.
Deux par deux, les mains placées l’une contre l’autre, et les pouces croisés, les petits de la Maîtrise firent leur entrée dans le sanctuaire illuminé. Un coup de claquoir, ils s’agenouillent deux par deux… un autre coup, ils se relèvent, un coup encore, ils se séparent en deux files et vont se ranger à droite et à gauche de l’autel. Ils sont à peine à leurs places que Monseigneur fait son entrée : crosse en main et mitre en tête, il va prendre place sous un dais de soie rouge, frangée d’or. Jean ne le quitte pas des yeux et son voisin doit le pousser pour le faire suivre la maîtrise qui va se masser derrière l’autel, pour chanter la messe de Pâques. Jean ne chante pas encore, mais il entrevoit le jour prochain où sa voix se mêlera à celles de ses camarades et où il lui semblera faire partie du Chœur des Anges. …Car les enfants qui l’entourent ont des voix d’anges. Quand les grands séminaristes, en soutanes noires et en surplis blancs, ont lancé d’une voix tonnante l’interrogation :
Dic nobis Maria
Quid vidisti in via ?
(Qu'avez-vous vu, en allant au tombeau, Marie, dites-nous ?)

Les voix des enfants de chœur se sont élevées si fraîches qu’il a semblé à Jean que des gouttes d’eau limpide tombaient, dans un bassin d’argent :
Sepulcrum Christi viventis
(J'ai vu le tombeau du Christ qui est vivant).
Puis, le chœur s’est renforcé : aux voix des plus petits se mêlent maintenant les voix des plus grands, souples et chaudes, comme des voix de femmes :
Et gloriam vidi resurgentis
(J'ai vu la gloire du Christ ressuscité),
clament ces voix, et le chant des violons se mêle au grondement des orgues, pour affirmer avec la foule en prière :
« Nous savons que le Christ est véritablement ressuscité. »
Trop ignorant pour savoir que jadis, en ce jour de Pâques, les fidèles se donnaient les uns aux autres, un baiser fraternel en s’annonçant la joyeuse nouvelle : « Le Christ est ressuscité », Jean est si heureux qu’il voudrait embrasser tout le monde, et ses yeux vont sans cesse de l’autel illuminé, au trône tendu de rouge et à la foule en fête.
Est-ce bien lui, le pauvre Jean, qui, dimanche dernier, se faufilait timidement, dans une église, un brin d’olivier à la main ? Est-ce lui, l’enfant en haillons auquel nul ne pensait et qui ne pensait à personne ?
À présent, les mains jointes et les yeux clos, il entend la clochette argentine qui annonce que le miracle va s’accomplir. Dimanche dernier, il s’était agenouillé et avait baissé la tête en même temps que les autres, mais sans savoir pourquoi. Il savait, maintenant, que, s’il fallait demeurer incliné, immobile et retenant son souffle, c’est qu’à la voix du prêtre, Jésus Lui-même allait venir sur l’autel fleuri.
L’Hostie blanche que Jean avait vainement cherchée sur le reposoir du Jeudi Saint, il la voyait maintenant entre les mains de l’officiant et il savait qu’au jour de sa Première Communion, Jésus descendrait dans son cœur d’enfant. Il ne regrettait plus, maintenant, le petit Jean, de n’avoir pas vécu au temps du Maître. Près du tabernacle où Dieu habite, le petit garçon pas-serait les plus belles années de son enfance et ce Bon Jésus, qu’il aurait voulu suivre, il Le porterait en lui. C’était presque trop de bonheur pour un petit garçon, qui, pendant si longtemps, n’avait connu ni fêtes, ni dimanches et qui vivrait maintenant, à l’ombre des autels, c’est-à-dire dans une fête perpétuelle…
On m’a dit — et je l’ai cru — qu’après avoir longtemps chanté pour la gloire de Dieu, et souvent servi la messe, le petit Jean, devenu grand, avait voulu la dire, la messe, et qu’il était, maintenant, un saint prêtre. Je ne me suis pas du tout étonnée de cette transformation, car Celui qui, mort depuis trois jours, est sorti du tombeau, a bien pu faire un serviteur de Dieu, d’un pauvre petit garçon pur et bon.

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