L’expansion de l’Islam et Charles Martel

Auteur : Par un groupe de pères et de mères de familles | Ouvrage : Petite Histoire de l'Église illustrée .

Temps de lec­ture : 7 minutes

∼∼ XIII ∼∼

Cepen­dant, le sou­ve­nir du petit scout, son voi­sin d’Os­tie, occupe depuis plu­sieurs jours la pen­sée de Bernard.

Il en a par­lé à sa mère et, sur son conseil, il est allé trou­ver le Père X.

Il en revient tout son­geur, ayant appris de tristes choses.

Aus­si, à peine la famille est-elle réunie après déjeu­ner, que Ber­nard fait part de sa découverte.

La pluie com­mence à tom­ber en larges gouttes. Bonne occa­sion pour cau­ser tranquillement.

— Que pour­rions-nous faire pour ce petit ? Figu­rez-vous qu’il est tota­le­ment orphe­lin. Il a per­du son père dans un acci­dent de tra­vail, deux petits frères sont morts, et la mère les a sui­vis, il y a trois mois, lais­sant l’aî­né, André, seul dans une détresse navrante.

Il a été déni­ché par la troupe du Père X. Le chef s’y est atta­ché et a payé sa part pour l’emmener avec lui ; mais ce qu’il faut à ce petit, c’est une affec­tion mater­nelle qui apaise son iso­le­ment. C’est épou­van­table d’être seul au monde à douze ans !

— Mais tu n’as qu’à l’a­me­ner ici : maman et tante Jeanne s’en occu­pe­ront, et nous aus­si, pour­quoi pas ?

— J’y ai bien pen­sé, Colette. Mais ce n’est pas ici qu’il est mal­heu­reux. C’est quand il va ren­trer à Paris. Où le pla­cer ? Qu’en faire ? Le Père trou­ve­ra, bien sûr, mais quoi ? Sera-t-il jamais heu­reux ce pauvre gosse ?

Ici, papa intervient :

— Et voi­là, mes enfants, qui vous fait tou­cher du doigt à quel point vous êtes pri­vi­lé­giés, quelle recon­nais­sance vous devez à Dieu, mais aus­si toute la res­pon­sa­bi­li­té qui vous incom­be­ra à tra­vers la vie.

— Oui, mon oncle. Je me suis dit tout cela déjà, et si vous vou­lez réflé­chir au sujet de l’a­ve­nir de ce petit, si maman le per­met, je suis prêt à faire pour lui tout ce que je pourrai.

Ceci dit, Ber­nard se penche au bal­con, puis se retournant :

— Écou­tez tom­ber cette pluie, on dirait que les pom­piers ont mis toutes leurs pompes en branle sur le toit. Ce sont des cascades.

— Vous savez le dic­ton à Rome : Il n’y a que les chiens et les Fran­çais à sor­tir par la pluie !

— Ça prouve, mon oncle, que les Fran­çais n’ont pas plus peur de l’eau que du reste. Quant aux chiens, ici, ils sont dehors par tous les temps.

— A pro­pos de chiens et de dic­ton, mes enfants, ma pen­sée fait un drôle de rap­pro­che­ment. Vous savez que, chez les musul­mans, ces pauvres bêtes sont très dédai­gnées, si bien que, pour don­ner aux catho­liques une marque de sou­ve­rain mépris, les maho­mé­tans disent : Ces chiens de chrétiens !

— Hé bien, ils sont polis ! décrète Colette offen­sée. Je vou­drais bien savoir qui sont ces gens si méprisants ?

— Com­ment, dit Jean dédai­gneux, tu en es là ? Nous en avons pour­tant assez ren­con­tré en Syrie : des Arabes, des Bédouins, des Turcs, tous mahométans.

— Oui, mais je ne sais rien de leur histoire.

— Es-tu sûr, Jean­not, d’être beau­coup plus fer­ré que ta sœur, ques­tionne papa un peu moqueur. Qui fut le fon­da­teur de leurs étranges croyances ? Où vivait-il ? Va donc cher­cher les cartes, étale-les sur la table et fais-nous juger de ta science.

Ber­nard s’écrie :

— Mer­veilleux, mon oncle, on va voya­ger gra­tis, et sans avoir le mal de mer !

Un quart d’heure plus tard, têtes brunes et blondes sont éga­le­ment pen­chées sur une immense carte. Jean indique vic­to­rieu­se­ment du doigt :

— Ici, la Mecque, ville où naquit et demeure enter­ré Mahomet.

Colette réclame :

— Enfin dis-nous qui est ce bonhomme-là ?

— Pas un bon homme, cor­rige Jean, mais un mau­vais homme.

— Racon­tez, papa. Jean ne cesse de se moquer de moi, il est insupportable !

— Tu crois ? Ça se pour­rait bien. Alors je prends sa place.

A l’é­poque où les moines et les évêques conver­tis­saient l’Eu­rope, dans une puis­sante tri­bu arabe, un enfant nais­sait à la Mecque en 571. Deve­nu homme, il voya­geait pour ses affaires, ren­con­trant un peu par­tout, dans l’A­frique du Nord, des Juifs et des chré­tiens. Très intel­li­gent, très ambi­tieux, il eut l’i­dée de don­ner à ses com­pa­gnons une reli­gion. Il leur appren­drait l’exis­tence d’un seul Dieu, ce qui satis­fe­rait leur besoin ins­tinc­tif de foi, il pro­met­trait un para­dis de bon­heur maté­riel à tous ceux qui mour­raient dans les com­bats pour cette nou­velle croyance, ce qui sti­mu­le­rait leurs goûts de conquêtes ; et enfin, pour­vu qu’ils se sou­missent à cer­taines pra­tiques reli­gieuses exté­rieures, il leur per­met­trait de suivre libre­ment les pas­sions aux­quelles leur race est plus for­te­ment portée.

Vous pen­sez si un pareil pro­gramme était facile à faire accep­ter. Maho­met fut sur­nom­mé le pro­phète et des mil­liers d’A­rabes se ral­lièrent à lui.

Cepen­dant des chefs païens en furent jaloux et on cher­cha à l’as­sas­si­ner. Il s’en­fuit. Sui­vez-le sur la carte. On l’ac­cueille d’en­thou­siasme à Médine (ville du pro­phète) et la guerre sainte est déclarée.

En fait de guerre sainte, Maho­met fait ense­ve­lir vivants dans une fosse 700 mal­heu­reux Juifs qu’il a vain­cus. Il fana­tise ses troupes, écrit les lois de son étrange reli­gion dans un livre appe­lé le , et, de son vivant, sou­met à l’is­la­misme l’A­ra­bie tout entière. Un peu plus tard la Perse, les Indes sont gagnées petit à petit, à l’ouest, l’A­frique est conquise, et l’Es­pagne, mal­gré son héroïque défense, tombe aux mains des Musul­mans après leur vic­toire de Xérès.

— Mais, dit Colette, effrayée, c’est pire que les Bar­bares ! Rien n’ar­rête ces affreuses gens.

— Attends, répond Ber­nard. Ils ne se sont pas encore heur­tés aux Francs. Tu vas voir ça !

— Ah ! que je suis bête ; j’ou­bliais, c’est qui va les mettre dehors.

Papa sou­rit.

— Prends la carte d’Eu­rope, Colette. Là, tra­verse les Pyré­nées, passe par Nar­bonne, Nîmes, Car­cas­sonne, tout cela est pris par les Musul­mans que l’on appelle aus­si les Sar­ra­zins. Un ins­tant arrê­tés devant Tou­louse, ils s’emparent de Bor­deaux, ils montent ; voi­ci  ; ils approchent même de Tours !

— Halte ! crie Colette triom­phante. C’est là que Charles Mar­tel les a « rossés ! »

Charles Martel repousse les Sarrazins à Poitiers en 732
Charles Mar­tel à Poitiers.

— Quel terme, Colette, pro­teste papa, riant mal­gré lui. De fait, les Musul­mans, écra­sés par l’é­lan indomp­table des Francs chré­tiens, aban­donnent l’A­qui­taine ; mais, quelques années plus tard, ils se res­sai­sissent. Suis bien, les voi­là à Arles, à Avi­gnon, ils remontent le Rhône, ils vont à Lyon.

— Nen­ni ! fait Ber­nard iro­nique. Charles Mar­tel les y attend, et il leur reprend une à une toutes les villes conquises.

— Hour­rah ! crie Colette.

— Mais Charles Mar­tel meurt. Qui lui suc­cède, Jean ?

— Son fils, Pépin le Bref. Il arrache aux Sar­ra­zins Nîmes, Béziers et Nar­bonne, et les rejette der­rière les Pyrénées.

— C’est cela même. La Foi de la Gaule chré­tienne et de l’Eu­rope occi­den­tale était sau­vée, et par les Francs !

— Chic alors ! déclare Jean dans une pirouette, en manière de conclusion.


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