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Auteur : Maldan, Juliette | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

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Jean Bosco apprend le catéchisme sur les genoux de Maman Marguerite

DON BOSCO

Maman Marguerite

C’est au petit hameau de « Bec­chi Â», près de Turin, que naquit, le 16 aoĂ»t 1815, Jean Bos­co qui devait ĂŞtre le grand bien­fai­teur des enfants aban­don­nĂ©s. Il fut bap­ti­sĂ© dès le len­de­main de sa nais­sance. Ses parents, pauvres ouvriers, Ă©taient d’ex­cel­lents chré­tiens. Le père, Fran­çois Bos­co, tra­vaillait de toute la force de ses bras pour nour­rir sa famille. Il pos­sé­dait une mai­son­nette et quelques bouts de champs. C’é­tait assez pour vivre heu­reux avec sa femme, Mar­gue­rite, pieuse et labo­rieuse comme lui, et ses trois petits garçons. 

Ce bon­heur ne dura guère. Jean attei­gnait Ă  peine ses deux ans quand son père mou­rut brus­que­ment. La dou­leur de Mar­gue­rite Bos­co fut extrĂŞme. Char­gĂ©e de sa belle-mère infirme et de ses trois petits, elle par­vint Ă  force de tra­vail, de cou­rage, de peine, Ă  assu­rer le pain de la famille. 

Cette simple pay­sanne s’oc­cu­pait admi­ra­ble­ment de ses enfants ; non seule­ment de leur corps, mais sur­tout de leur âme. Son plus grand dĂ©sir Ă©tait de faire de ses fils de bons chré­tiens. Elle les Ă©le­vait dans la pen­sĂ©e de Dieu et ne man­quait pas une occa­sion de leur rap­pe­ler sa sainte pré­sence. « Dieu nous voit, Mes petits Â», disait-elle. « Dieu nous voit. Moi, je puis ĂŞtre absente, lui est tou­jours lĂ . Â» 

Chaque matin, age­nouillĂ©e avec ses enfants devant le Cru­ci­fix, elle deman­dait Ă  Dieu le pain quotidien. 

Au soir des rudes jour­nĂ©es d’é­tĂ©, en se repo­sant au seuil de la mai­son, elle mon­trait Ă  ses fils les mon­tagnes loin­taines, illu­mi­nĂ©es par le soleil cou­chant. « Que de mer­veilles Dieu a faites pour nous, mes enfants ! » Et quand les Ă©toiles s’al­lu­maient dans le ciel assom­bri : « Tous ces astres mer­veilleux, c’est Dieu qui les a mis lĂ . Si le fir­ma­ment est si beau, que sera-ce du Paradis ? Â» 

La grĂŞle venait-elle rava­ger l’humble vigne des Bos­co : « Cour­bons la tĂŞte, mes enfants. Le bon Dieu nous les avait don­nĂ©es, ces belles grappes, le bon Dieu nous les reprend. Il est le MaĂ®tre. Pour nous, c’est une Ă©preuve ; pour les mĂ©chants, c’est une punition Â». 

L’hi­ver, quand la pluie gla­cĂ©e bat­tait les vitres et que la famille se ser­rait autour de la che­mi­nĂ©e oĂą flam­bait une grosse bĂ»che : « Mes petits, comme nous devons aimer le bon Dieu qui nous four­nit le nĂ©ces­saire ! Il est vrai­ment notre Père, notre Père qui est aux cieux Â». 

Elle ne ces­sait de recom­man­der Ă  ses enfants la dĂ©vo­tion Ă  Marie, en qui elle met­tait une confiance sans bornes. 

Mar­gue­rite Bos­co pou­vait rĂ©ci­ter par cĹ“ur son caté­chisme, l’His­toire sainte, la vie de Notre-Sei­gneur, et, tout en s’oc­cu­pant Ă  son mĂ©nage, elle cher­chait Ă  ensei­gner ce qu’elle savait Ă  ses fils. 

Pour eux, ce qu’elle crai­gnait comme la peste, c’é­taient les mau­vais compagnons. 

Jamais ses enfants ne s’é­loi­gnaient de la mai­son sans sa permission. 

« Maman, maman, pou­vons-nous aller jouer avec un tel qui nous appelle ? 

— Oui, mes petits. Â» 

Ils cou­raient alors tout joyeux. Si c’é­tait « non Â», l’i­dĂ©e ne leur venait mĂŞme pas de dĂ©sobĂ©ir. 

Mar­gue­rite ne gâtait pas ses enfants, ne pas­sait aucun caprice, et quand elle don­nait un ordre, elle vou­lait ĂŞtre obĂ©ie. Jean aimait si ten­dre­ment sa chère maman que la crainte de la pei­ner suf­fi­sait Ă  le rendre sage. 

Elle tenait aus­si Ă  faire de ses fils des tra­vailleurs. Il fal­lait se lever de bonne heure et s’oc­cu­per selon ses forces. Très jeune, Jean sut cou­per du bois, pui­ser de l’eau, Ă©plu­cher les lĂ©gumes, balayer la chambre. 

Le jeu­di, avant de por­ter au mar­chĂ© son beurre et ses Ĺ“ufs, la maman dis­tri­buait une tâche Ă  ses gar­çons. Au retour, si elle jugeait le tra­vail bien fait, elle tirait de son panier un mor­ceau de brioche pour chacun. 

On Ă©tait pauvre chez les Bos­co, et pour­tant les mal­heu­reux qui frap­paient Ă  la porte trou­vaient tou­jours un bon accueil et une assiette de soupe chaude. Jean apprit ain­si la cha­ri­tĂ©. Son cĹ“ur, du reste, Ă©tait excellent et très sensible. 

Ce petit gar­çon à la démarche vive, à la tête ronde et fri­sée, par­lait peu et obser­vait beau­coup. Son ima­gi­na­tion ne res­tait jamais en repos. Intel­li­gent et sérieux, ardent et volon­taire, on pou­vait se deman­der pour quelle tâche Dieu le douait si remarquablement.

Songe de Don Bosco : Les loups changés en agneaux
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Saint Gorde
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Gorde naĂ®t et gran­dit Ă  CĂ©sa­rĂ©e de Cap­pa­doce. Il entre dans l’ar­mĂ©e oĂą il fait rapi­de­ment son che­min. De haute taille, de non moins haute valeur mili­taire, il acquiert une grande rĂ©pu­ta­tion par­mi les troupes. 

Le voi­ci donc bien par­ti pour la gloire, quand Dio­clé­tien ouvre sa per­sé­cu­tion contre les chré­tiens. Leurs mai­sons sont pillĂ©es, les fidèles cherchent refuge dans les dĂ©serts et les forĂŞts. Ceux qui sont pris sont jetĂ©s en prison. 

Pour Gorde, il ne peut ĂŞtre ques­tion de se cacher : il est Ă  son poste. Mais com­ment res­ter sous les ordres de celui qui per­sé­cute ses frères ? Mal­grĂ© son goĂ»t pour la vie mili­taire, mal­grĂ© le brillant ave­nir qui s’ouvre devant lui, il dĂ©mis­sionne : « Je pré­fère, dit-il, vivre au dĂ©sert avec les bĂŞtes fauves, qu’a­vec ces ido­lâtres. »

Sa dĂ©mis­sion accep­tĂ©e, il quitte l’ar­mĂ©e, non sans regret et, comme tant d’autres, s’en­fonce dans le dĂ©sert. Son inten­tion est de s’y for­ti­fier dans la prière et la pĂ©ni­tence puis de reve­nir ensuite dĂ©fendre les chré­tiens et mou­rir avec eux s’il le faut.

Saint Gorde Soldat et martyr
« Je viens te repro­cher ta cruau­tĂ© envers les chrĂ©tiens… Â»

Quand il se sent assez « fort de la force de Dieu Â», il sort de sa cachette et revient Ă  la ville. Il a choi­si pour cela un jour oĂą la popu­la­tion se rue vers le cirque pour une course de chars. 

Très calme, Gorde s’a­vance au milieu de l’arène. « Je m’ap­pelle Gor­dius, dĂ©clare-t-il très haut. J’ai quit­tĂ© l’ar­mĂ©e depuis que l’Em­pe­reur est deve­nu per­sé­cu­teur et enne­mi du vrai Dieu. Â» Et, s’a­dres­sant au Gou­ver­neur : « Je viens te repro­cher ta cruau­tĂ© envers les chré­tiens. J’ai choi­si le moment de ces fĂŞtes pour pro­tes­ter Ă  la face du monde contre l’in­jus­tice et la barbarie. Â» 

Stu­peur, puis tol­lĂ© gĂ©né­ral. Fureur du Gou­ver­neur : « Bour­reaux ! des fouets, des che­va­lets, des haches, des croix, des fauves ! Un homme aus­si exé­crable mĂ©rite plu­sieurs fois la mort !

— Oui, rĂ©plique Gorde ; on me fera tort si on ne me donne pas plu­sieurs fois la mort. Â» Et il entonne un psaume.

Les bour­reaux s’ap­prĂŞtent et comme ils tardent : « Qu’at­ten­dez-vous ? leur demande le sol­dat. N’en­viez-vous pas mon bon­heur et ma rĂ©compense ? 

— Voyons, quelle folie ! coupe le Gou­ver­neur, volon­tai­re­ment radou­ci. Plus sĂ»res que les rĂ©com­penses que tu espères, tu as sous la main les hon­neurs des CĂ©sars. Rentre dans l’ar­mĂ©e, adore nos dieux ; c’est pour toi la gloire immĂ©diate. 

— Quoi ! pro­teste Gorde, tu penses que ces misé­rables gran­deurs d’i­ci bas : grades, cita­tions, dĂ©co­ra­tions, peuvent me dĂ©ta­cher du ciel ? Voi­lĂ  ce qui serait folie ! Rien sur la terre, rien, entends-tu ? ne pour­rait me dĂ©dom­ma­ger de la perte de Dieu. Â» 

Fou de colère, le juge tire son Ă©pĂ©e et ordonne de pas­ser Ă  l’exĂ©cution. 

Gorde est aus­si­tĂ´t conduit au sup­plice, au milieu d’une foule dĂ©li­rante. Les paĂŻens voci­fèrent ; les membres de sa famille, encore paĂŻens, le sup­plient d’a­voir pitiĂ© d’eux et de lui. Qu’il ne renonce pas au chris­tia­nisme puis­qu’il y tient, mais qu’il fasse sem­blant.

« Jamais ! ce serait dĂ©loyal. Je tiens ma langue de la bon­tĂ© de Dieu et je l’emploierais Ă  men­tir, Ă  le renier devant les hommes ? J’aime mieux mou­rir mille fois ! Mon dra­peau, c’est la croix. Un sol­dat tra­hi­rait son dra­peau par crainte de la mort ? Allons-donc ! Â»

Ce disant, Gorde trace sur sa poi­trine le signe de la croix et, d’un pas alerte, suit les bour­reaux. Il rayonne de joie, il est gai comme au matin d’une pro­mo­tion. Ne va-t-il pas ĂŞtre pro­mu au rang de tĂ©moin du Christ ? Ne va-t-il pas prendre place dans la glo­rieuse armĂ©e des martyrs ?

Saint Gorde, obte­nez-nous des cĹ“urs vaillants, des âmes vaillantes ! Ne sommes-nous pas aus­si, par notre confir­ma­tion, sol­dats du Christ ?

Romain
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Pour un romain, voi­ci un sol­dat bien nom­mĂ©. Il assiste Ă  l’in­ter­ro­ga­toire du diacre Laurent et les rĂ©ponses de celui-ci lui font une très grande impres­sion. C’est bien autre chose quand il constate le cou­rage du diacre au milieu des sup­plices ; et c’est enfin le comble, lorsque Laurent se trou­vant demi-mort sous les coups de fouets — fouets armĂ©s de pointes de fer — Romain voit un ange essuyer le visage du mar­tyr, Ă©tan­cher le sang de ses plaies. Le sol­dat paĂŻen en est tout inter­dit. La grâce passe, la lumière se fait ; Romain y cor­res­pond. Il s’ap­proche de Laurent, lui dit ce qu’il voit, lui demande ses prières.

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Le 30 avril 1651, tout Ă©tait Ă  la joie dans l’une des plus belles demeures de Reims : l’hô­tel de la Cloche. On fĂŞtait la nais­sance du pre­mier enfant de Louis de La Salle, magis­trat fort riche et consi­dé­rĂ©, et de sa femme, Nicole MoĂ«t de Brouillet. 

Le mĂŞme jour, l’en­fant por­tĂ© Ă  l’é­glise y rece­vait, avec le saint bap­tĂŞme, le nom de Jean-Baptiste. 

Tan­dis que M. de La Salle remer­ciait Dieu de lui don­ner un fils, Mme de La Salle consa­crait l’en­fant Ă  la Sainte Vierge et la sup­pliait de l’ai­der Ă  l’é­le­ver saintement. 

Le petit Jean-Bap­tiste gran­dit donc, enve­lop­pĂ© de ten­dresse, de soins extrĂŞmes et de bons exemples. Sa mère lui apprit ses prières, le condui­sait très sou­vent Ă  l’é­glise oĂą il se tenait sage et atten­tif aux cĂ©rĂ©monies. 

La mai­son de famille s’emplissait de vie ; Ă  la suite de Jean-Bap­tiste, de nom­breux frères et sĹ“urs vinrent la peu­pler, car le bon Dieu accor­da 10 enfants Ă  Mme de La Salle. 

Jean-Bap­tiste pre­nait volon­tiers sa part du mou­ve­ment et de lĂ  gaie­tĂ© du logis. C’é­tait un enfant char­mant, intel­li­gent, doux, aimable et aimĂ© de tous.

La grand-mère de Jean-Baptiste de La Salle lisant des vies de saints à l'enfant.
« Bonne Maman, lisez-moi-la Vie des Saints ! Â»

Mais dĂ©jĂ  on sen­tait que les choses du bon Dieu l’at­ti­raient plus que tout le reste. 

Sou­vent, on don­nait des fĂŞtes Ă  l’hô­tel de la Cloche. La paren­tĂ© se rĂ©unis­sait autour d’une longue table bien gar­nie et bien ser­vie. Un soir oĂą il y avait grande rĂ©cep­tion, le petit Jean-Bap­tiste sem­blait triste au milieu de la brillante socié­tĂ©. Sans bruit, comme une sou­ris, il se glis­sa hors des salons, grim­pa jus­qu’à la chambre de sa grand-mère : « S’il vous plaĂ®t, bonne maman, sup­plia-t-il, lisez-moi la Vie des Saints ! » La grand-mère prit un gros livre qu’elle posa sur ses genoux, et, len­te­ment, com­men­ça les belles his­toires que son petit-fils Ă©cou­tait avi­de­ment. Les rĂ©cits l’in­té­res­saient beau­coup plus que la musique et les gâteaux du salon ! 

Ce que Jean-Bap­tiste sou­hai­tait aus­si ardem­ment, c’é­tait de deve­nir enfant de chĹ“ur. Quelle joie, le jour oĂą sa mère le condui­sit chez le curĂ© de la paroisse, le priant d’accepter son petit gar­çon comme ser­vant de messe ! Dès lors, Jean-Bap­tiste mit le plus grand empres­se­ment Ă  se rendre Ă  l’é­glise chaque matin. Ceux qui le voyaient prier, grave et recueilli au pied de l’au­tel, pen­saient : « Cet enfant doit voir le bon Dieu, il n’est pas comme les autres ! Â» 

En effet, Dieu regar­dait Jean-Bap­tiste avec amour et lui fai­sait com­prendre au fond du cĹ“ur qu’il l’ap­pe­lait Ă  son ser­vice… Vers l’âge de 12 ans, après avoir bien priĂ© la Très Sainte Vierge de l’ai­der, timi­de­ment, res­pec­tueu­se­ment, il fit part Ă  ses parents de son grand dĂ©sir d’être prĂŞtre, et leur deman­da la per­mis­sion de suivre sa vocation. 

Sa mère si pieuse joi­gnit les mains en disant : « Mer­ci mon Dieu. Â» Pour M. de La Salle, qui comp­tait sur son fils aĂ®nĂ© pour lui suc­cé­der dans sa charge, le sacri­fice fut plus grand, mais il s’in­cli­na : « Mon enfant, dit-il, vous ĂŞtes Ă  Dieu avant d’être Ă  moi, deve­nez un bon prĂŞtre ! Â» 

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La famille

Celui qui devait ĂŞtre le grand Pape Pie X naquit dans la pau­vre­tĂ©, le 2 juin 1835, au vil­lage de Riese, en Ita­lie. Joseph, « Bep­pi Â», comme on le nom­mait fami­liè­re­ment, Ă©tait l’aî­nĂ© de neuf enfants. 

Son père, Jean-Bap­tiste Sar­to, pos­sé­dait une humble mai­son et deux petits champs. Agent com­mu­nal, il balayait la mai­rie, fai­sait les courses, ce pour quoi il rece­vait chaque jour, 0 fr. 50. Maigre salaire pour nour­rir tant de monde ! La mère de famille, Mar­gue­rite Sar­to, essayait de son cĂ´tĂ© de gagner quelque chose. Avant son mariage, elle Ă©tait cou­tu­rière. Une fois le mĂ©nage ran­gĂ©, les petits habillĂ©s, la soupe au feu, elle repre­nait son aiguille et cou­sait pour les voisines. 

Tous ceux qui connais­saient Mar­gue­rite admi­raient ses ver­tus, son cou­rage, sa foi. C’é­tait un foyer modèle que celui des Sar­to. Chaque soir, après la jour­nĂ©e de tra­vail, le père expli­quait le caté­chisme Ă  ses enfants et rĂ©ci­tait tout haut la prière. 

Éle­vĂ© par des parents si chré­tiens, le petit Joseph ne pou­vait man­quer d’ai­mer le bon Dieu, l’é­glise, les offices, Tout petit avec une grande joie, il enfi­la une sou­tane d’en­fant de chĹ“ur et com­men­ça de balan­cer l’en­cen­soir ou de ser­vir la messe. Son recueille­ment frap­pait l’as­sis­tance. Dès 11 ans, il fut char­gĂ©, durant les cĂ©ré­mo­nies, de gui­der ses com­pa­gnons qui l’ad­mi­raient et lui obĂ©is­saient comme Ă  un chef. Ă€ l’é­cole, Joseph Sar­to rem­por­tait tous les prix. Pen­dant les rĂ©crĂ©a­tions, ses cama­rades le sui­vaient volon­tiers, car gai, dĂ©ci­dĂ©, il avait tou­jours des jeux amu­sants Ă  proposer. 

Ă€ quelque dis­tance du vil­lage, au milieu des champs de maĂŻs, des vignes et des mĂ»riers, s’é­le­vait une Ă©glise dĂ©diĂ©e Ă  la Vierge de l’As­somp­tion. Bien sou­vent, au temps oĂą Joseph Ă©tait enfant de chĹ“ur, cou­rant et chan­tant, il entraî­nait la troupe des gar­çons vers ce pèle­ri­nage. Devant le sanc­tuaire, les enfants rĂ©ci­taient pieu­se­ment une prière Ă  Marie, puis ren­traient en jouant Ă  tra­vers la campagne. 

Joseph Sar­to fit à 11 ans, une pre­mière Com­mu­nion très fer­vente. Ce jour-là au fond de son cœur, il se don­na tout entier à Dieu et lui pro­mit de ne vivre que pour le ser­vir. Il ne dit rien à sa mère de cette réso­lu­tion. Mais elle, qui connais­sait l’âme de son enfant, le devi­na et l’in­ter­ro­gea dou­ce­ment. Joseph avoua qu’il vou­lait être prêtre.

Mar­gue­rite, fière et heu­reuse, remer­cia Dieu de cette grande grâce. Le père, en appre­nant la voca­tion de Joseph, son­gea tris­te­ment que, ses forces dimi­nuant, le tra­vail de son aĂ®nĂ© eĂ»t Ă©tĂ© bien nĂ©ces­saire Ă  la famille… Mais, imi­tant la foi de sa femme, il don­na gĂ©né­reu­se­ment son consentement. 

Le bon CurĂ© de Riese se rĂ©jouit et dĂ©ci­da que son petit parois­sien irait suivre les cours au col­lège de Cas­tel­fran­co. Sept kilo­mètres sĂ©pa­raient Riese de Cas­tel­fran­co. Joseph devait fran­chir che­min Ă  pieds, deux fois par jour. Tra­jet dur en hiver, et plus encore l’é­tĂ©, sous le soleil qui brĂ»le la campagne. 

Joseph Sarto, enfant, va à l'école pour devenir Prêtre
Il enle­vait ses souliers…

De plus, le brave enfant savait ce qu’il en coû­tait Ă  ses parents pour le chaus­ser. Afin de leur Ă©par­gner une dĂ©pense, Ă  peine sor­ti de Riese, il enle­vait ses sou­liers et les por­tait sur son dos avec le petit sac oĂą la maman pla­çait le pain du dĂ©jeuner. 

Plus tard, son frère Ange­lo l’ac­com­pa­gnait Ă  Cas­tel­fran­co. Le père ayant rĂ©us­si Ă  faire l’a­chat d’un pauvre petit âne et d’une vieille char­rette, les deux enfants rou­laient fiè­re­ment dans cet Ă©quipage. 

Joseph tra­vaillait avec une grande ardeur. Vif, prompt Ă  s’emporter, il devait lut­ter contre sa nature pour acqué­rir la dou­ceur, par la suite si remar­quable en lui. 

Ses notes le clas­saient tou­jours le pre­mier. Mais ce, n’é­tait lĂ  qu’une pré­pa­ra­tion. Il fal­lait pou­voir entrer au SĂ©mi­naire. Grosse dif­fi­cul­tĂ© ! La famille Sar­to Ă©tait sans res­sources. Le CurĂ© de Riese en man­quait Ă©ga­le­ment, mais il mul­ti­pliait les dĂ©marches pour obte­nir une bourse gra­tuite Ă  son cher Joseph. Celui-ci atten­dait, le cĹ“ur ser­rĂ© par l’an­goisse. Si ardent Ă©tait son dĂ©sir d’être prĂŞtre ! 

Enfin, la rĂ©ponse vint. « Ă€ genoux, Bep­pi Â», s’é­crie le CurĂ©, « remer­cie Dieu qui a sĂ»re­ment quelque des­sein sur toi : bien­tĂ´t, tu entre­ras au SĂ©mi­naire, et comme moi, toi aus­si tu seras prĂŞtre ! Â» 

Les gens de Riese qui savaient la gĂŞne des Sar­to, quê­tèrent dis­crè­te­ment entre amis pour ache­ter les livres et les vĂŞte­ments nĂ©ces­saires au futur abbĂ©.

Le séminaire

Au mois de novembre 1850, Joseph Sar­to par­tit donc pour le grand SĂ©mi­naire de Padoue. 

Ă€ la fin de l’an­nĂ©e, il Ă©tait Ă  la tĂŞte de son cours et ses pro­fes­seurs pla­çaient en lui de grands espoirs. 

Peu après son entrĂ©e au SĂ©mi­naire, Joseph eut le grand cha­grin de perdre son père. 

Mar­gue­rite Sar­to, res­tĂ©e veuve avec sept enfants encore Ă  sa charge, reprit cou­ra­geu­se­ment son mĂ©tier de cou­tu­rière. AidĂ©e de ses filles, elle rĂ©us­sit Ă  gagner le pain de la famille. 

Durant les vacances, Joseph reve­nait Ă  la mai­son. Depuis qu’il avait revê­tu la sou­tane, sa mère, par res­pect, dĂ©fen­dait Ă  ses autres enfants de tutoyer leur aĂ®nĂ©. Le SĂ©mi­na­riste Ă©di­fiait tout le vil­lage. LevĂ© Ă  cinq heures, il priait lon­gue­ment Ă  l’é­glise. Tout le jour il Ă©tu­diait. Après le repas du soir, on allait en com­mun dire Ă  l’é­glise le cha­pe­let. Puis, avant le repos de la nuit, la famille s’a­ge­nouillait une fois encore devant le cru­ci­fix du foyer. Dans cette mai­son bĂ©nie, l’exa­men de conscience sui­vait la prière, cha­cun avouait ses torts et deman­dait par­don Ă  celui qu’il avait pu offenser. 

Aus­si, mal­grĂ© la pau­vre­tĂ©, les pri­va­tions, la paix rĂ©gnait-elle dans les cĹ“urs. 

Un soir oĂą Mar­gue­rite Sar­to, Ă©pui­sĂ©e, avouait tout bas Ă  son aĂ®nĂ© : « Bep­pi, que la vie est difficile Â» 

— « Elle est faite pour cela Â», rĂ©pon­dit dou­ce­ment le jeune abbĂ© Â», si elle Ă©tait facile, maman, oĂą serait notre mĂ©rite ? Â» 

Ă€ mesure que Joseph appro­chait du sacer­doce, sa mère priait avec une plus ardente fer­veur deman­dant Ă  Dieu que son fils soit un saint prĂŞtre ! 

Le 18 sep­tembre 1858, Mar­gue­rite Sar­to, trem­blante de bon­heur, assis­tait Ă  l’or­di­na­tion de son fils, et le len­de­main, elle le voyait mon­ter Ă  l’au­tel, pour la pre­mière fois et cĂ©lé­brer la sainte messe. 

Des larmes de joie et de recon­nais­sance cou­laient de ses yeux. Son enfant, entou­rĂ© de tant d’a­mour, de sacri­fices et de prières, enfin, il Ă©tait prĂŞtre pour toujours !

Au service des Ă˘mes

Ă€ peine ordon­nĂ© prĂŞtre, Joseph Sar­to fut nom­mĂ© vicaire au bourg de Tom­bo­lo. Il se fit vite aimer des âmes qu’il vou­lait rame­ner Ă  Dieu par ses ensei­gne­ments et son dĂ©voue­ment. Il prê­chait avec un zèle infa­ti­gable et cher­chait sans cesse Ă  pla­cer un conseil, une bonne parole. Pour cela il se mĂŞlait fami­liè­re­ment aux hommes et aux jeunes gens, rĂ©us­sis­sant Ă  mettre la paix dans leurs que­relles et sur­tout Ă  les cor­ri­ger de leur vilaine habi­tude de jurer. 

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Enfance de Benoîte

11 y a bien long­temps, dans un petit vil­lage des Hautes-Alpes nom­mĂ© Saint-Etienne d’A­van­çon, vivait une famille d’humbles cultivateurs. 

Guillaume Ren­cu­rel et sa femme Cathe­rine habi­taient une chau­mière très pauvre et très petite : une chambre basse au-des­sus d’une Ă©cu­rie voû­tĂ©e, une cave, et c’é­tait tout. Une vigne et quelques petits champs sur les pentes raides des mon­tagnes, com­plé­taient leur domaine. Ă€ force de tra­vail et de peine, ces terres four­nis­saient la nour­ri­ture nĂ©ces­saire pour eux et leurs enfants. 

Ces ouvriers si pauvres des biens de ce monde, pos­sé­daient pour­tant un tré­sor que beau­coup de mal­heu­reux ont per­du de nos jours une foi vive qui leur fai­sait espé­rer, après leur dure exis­tence, le royaume du ciel que JĂ©sus leur ache­ta de son sang. 

Guillaume et Cathe­rine Ă©le­vaient dĂ©jĂ  une petite fille quand Dieu leur en envoya une seconde qui naquit en l’an­nĂ©e 1647, le 29 sep­tembre, fĂŞte de l’ar­change saint Michel. 

Très vite, on por­ta cette petite Ă  l’é­glise pour le saint bap­tĂŞme, et on lui don­na le nom de BenoĂ®te qui veut dire bĂ©nie. C’é­tait un nom bien trou­vĂ© pour l’en­fant que la sainte Vierge devait tant aimer. 

BenoĂ®te s’é­le­vait faci­le­ment et se mon­trait douce et gentille. 

Son Ă©du­ca­tion se fai­sait sur les genoux de sa maman et elle Ă©tait simple : « Sois bien sage, ma petite, rĂ©pé­tait Cathe­rine, prie bien le bon Dieu ! Â»

Elle lui apprit le Pater, l’Ave, le Cre­do. C’é­tait tout ce qu’elle savait elle-mĂŞme. Avec cela l’en­fant pou­vait rĂ©ci­ter le chapelet. 

BenoĂ®te n’a­vait que 7 ans quand son père mou­rut. Cathe­rine res­tait veuve avec trois enfants, dans une pau­vre­tĂ© proche de la misère. BenoĂ®te com­pre­nait ses peines et essayait de les conso­ler tout comme si elle avait Ă©tĂ© plus grande. Voyait-elle sa maman trop triste, elle s’ap­pro­chait dou­ce­ment : « Ne vous dĂ©so­lez pas, disait-elle, Dieu et sa sainte Mère nous assisteront. Â» 

La dĂ©tresse de la famille ne per­mit pas d’en­voyer BenoĂ®te Ă  l’é­cole. Elle ne sut jamais ni lire, ni Ă©crire. Mais elle sui­vait très rĂ©gu­liè­re­ment les caté­chismes, Ă©cou­tait avec grande atten­tion ce que disait M. le CurĂ©. Son inté­rĂŞt redou­blait quand on par­lait de la sainte Vierge. Elle Ă©cou­tait avi­de­ment ce qu’on expli­quait de sa beau­tĂ© cĂ©leste, de sa ten­dresse mater­nelle. Il lui sem­blait qu’elle aurait Ă©tĂ© si heu­reuse de la voir ! — « Mais, ajou­tait-elle hum­ble­ment, com­ment la Mère de Dieu se mon­tre­rait-elle Ă  une pauvre pĂ©cheresse ? Â»

Ă€ 7 ans, BenoĂ®te devait dĂ©jĂ  se rendre utile et tra­vailler. Elle gar­dait le petit trou­peau de la famille par­mi les hautes mon­tagnes qui entourent son vil­lage. Tout le jour, expo­sĂ©e au soleil, au vent, Ă  la pluie, elle cou­rait après ses mou­tons et veillait sur eux. Au moins, le soir, avait-elle la joie de se retrou­ver près de sa mère et de ses sĹ“urs. Ensemble elles se chauf­faient tout en cau­sant autour de l’âtre oĂą cui­sait la soupe, et BenoĂ®te se dĂ©dom­ma­geait de sa longue soli­tude du jour. 

Mais la misère se fai­sait de plus en plus sen­tir dans la chau­mière de Cathe­rine. Plu­sieurs annĂ©es de mau­vaises rĂ©coltes ame­nèrent la disette dans le pays. Il fal­lut se rĂ©si­gner Ă  mettre BenoĂ®te en ser­vice. Ce fut un gros sacri­fice pour la pauvre petite qui n’a­vait que 12 ans. ObĂ©is­sante et rĂ©si­gnĂ©e, elle ne mur­mu­ra pas contre cette dure dĂ©ci­sion. Elle ne deman­da qu’une chose Ă  sa mère : c’é­tait de lui ache­ter un cha­pe­let. Avec cet unique tré­sor dans sa poche, BenoĂ®te quit­ta cou­ra­geu­se­ment sa mai­son, sa chère maman, ses sĹ“urs, pour aller gar­der le trou­peau d’un Ă©tran­ger. Son pre­mier maĂ®tre Ă©tait bon et appré­ciait les qua­li­tĂ©s de sa petite ber­gère. Mais elle n’é­tait pas depuis un an Ă  son ser­vice, qu’il mou­rut. Sa veuve res­tĂ©e avec six enfants et peu de res­sources, ne pou­vait qu’a­vec peine leur pro­cu­rer le pain nĂ©ces­saire. Elle aimait mieux se pri­ver et pri­ver ses enfants que de dimi­nuer le mor­ceau de BenoĂ®te. Celle-ci rece­vait sans mot dire sa part de la miche, mais son cĹ“ur dĂ©li­cat ne pou­vait voir souf­frir les enfants de la mai­son. Dès que sa maî­tresse s’é­loi­gnait, elle dis­tri­buait son pain aux petits qui l’en­tou­raient. Puis, elle par­tait avec son trou­peau, et si la faim deve­nait trop criante, elle tirait son cha­pe­let de sa poche et le rĂ©ci­tait pour reprendre courage. 

Benoîte par­tage son pain avec des enfants.

BenoĂ®te ne se conten­tait pas de se pri­ver de pain pour les enfants de sa maî­tresse, elle en don­nait encore aux pauvres affa­mĂ©s qu’elle ren­con­trait dans la montagne. 

Ce n’é­tait pas seule­ment son pain qu’elle don­nait, mais aus­si sa com­pas­sion et sa prière Ă  toutes les misères qu’elle trou­vait sur son che­min et qu’elle n’a­vait pas d’autre moyen de soulager. 

Un jour, elle apprend qu’une femme gra­ve­ment malade a per­du la parole avant l’ar­ri­vĂ©e du prĂŞtre. DĂ©so­lĂ©e de ce mal­heur, BenoĂ®te appelle ses com­pagnes : « Venez, dit-elle, allons dire le rosaire pour cette malade. Â» Et voi­lĂ  tous les enfants rĂ©ci­tant le cha­pe­let avec un entrain qu’a­nime la fer­veur de BenoĂ®te. La prière n’est pas ter­mi­nĂ©e que la malade retrouve la parole. Ses pre­miers mots sont pour remer­cier la troupe des enfants qui l’en­tourent. BenoĂ®te par­lait du bon Dieu, du para­dis, de l’en­fer, avec une foi qui tou­chait ceux qui l’écoutaient. 

Un de ses maĂ®tres, Jean Rol­land, Ă©tait un homme violent et empor­tĂ©. La petite ber­gère lui repro­cha dou­ce­ment ses colères, lui rap­pe­la ses devoirs de telle façon que cet homme n’o­sa jamais se fâcher contre cette petite fille. Bien plus, Ă©mu par ses paroles, il finit par ren­trer en lui-mĂŞme et se convertir. 

BenoĂ®te, au milieu des champs, Ă©tait expo­sĂ©e Ă  bien des dan­gers. Mais elle avait le mal en hor­reur et veillait sans cesse sur la pure­tĂ© de son âme qu’elle vou­lait lim­pide comme l’eau des sources. Elle vivait sous le regard de Dieu et sous sa protection. 

Aus­si, chas­sait-elle les moindres ten­ta­tions de mal faire. Un Ă©tĂ©, un petit ber­ger qui marau­dait dans les ver­gers, vou­lut par­ta­ger avec BenoĂ®te les fruits qu’il avait cueillis. Mais elle refu­sa Ă©ner­gi­que­ment et ne gar­da plus ses mou­tons avec ce petit garçon. 

Plu­sieurs fois la sainte Vierge la dĂ©fen­dit d’une façon mer­veilleuse contre de graves pĂ©rils. 

La grande force de Benoîte, c’é­tait la prière, le recours à la sainte Vierge, sur­tout. Elle priait très sou­vent, soit dans l’é­glise de son vil­lage, soit au pied des croix qui se dressent dans les champs.

« BenoĂ®te aime bien Ă  prier Â», disaient ses maĂ®tres. Sa prière favo­rite Ă©tait le cha­pe­let. Nous allons voir com­ment la sainte Vierge rĂ©pon­dit Ă  l’a­mour si fidèle de sa petite bergère.

La Sainte Vierge et Benoîte

BenoĂ®te atteint 17 ans. Au prin­temps de 1664, par un clair matin de mai, elle conduit gaî­ment ses mou­tons Ă  tra­vers la fraĂ®che ver­dure des mon­tagnes, si belles en cette sai­son. Les mou­tons se hâtent comme pous­sĂ©s par une invi­sible main. Au fond du val­lon vers lequel ils courent, une roche se dresse au bord d’un tor­rent. Une grotte se creuse dans la roche. BenoĂ®te a l’ha­bi­tude de venir y rĂ©ci­ter son chapelet. 

Ă€ peine arri­vĂ©e en face de la grotte, la ber­gère toute sai­sie aper­çoit une Dame d’une beau­tĂ© mer­veilleuse, tenant par la main un ravis­sant petit enfant. Une grâce cĂ©leste enve­loppe cette Dame, de ses yeux sortent comme des rayons de lumière. Ses vĂŞte­ments exhalent un par­fum si suave que l’on croi­rait le val­lon tout entier rem­plir de fleurs. 

Benoîte, émer­veillée, contemple la belle Dame… Pour­tant il ne lui vient pas à l’i­dée qu’elle puisse être la sainte Vierge.

Elle essaie de lui par­ler, l’in­ter­roge naï­ve­ment, mais l’ap­pa­ri­tion sou­rit sans mot dire.