Catégorie : <span>À la découverte de la liturgie avec Bernard et Colette</span>

Auteur : Par un groupe de pères et de mères de familles | Ouvrage : À la découverte de la liturgie avec Bernard et Colette .

Temps de lec­ture : 7 minutes

Chapitre XVII

Ain­si va la vie !

Bri­gitte est par­tie. Sa mort, si pai­sible, si douce, a lais­sé une empreinte qui ne s’ef­fa­ce­ra plus, ni dans l’âme de Ber­nard, ni dans celle d’An­dré. Le pauvre petit, sur­tout, ne peut oublier qu’il a cau­sé, indi­rec­te­ment et bien invo­lon­tai­re­ment, cette mort, et, désor­mais, il entre dans la voie droite, avec l’in­ten­tion très nette de ne plus en sor­tir. M. le curé et Yvon reçoivent à ce sujet des confi­dences qui doivent réjouir Bri­gitte au Ciel.

Puis le temps passe, et sur la tris­tesse des sou­ve­nirs, la joie filtre de nou­veau, comme un rayon de soleil, au prin­temps, court sur les neiges d’hi­ver. L’ approche.

Les gar­çons et leur bataillon lavent, frottent, astiquent les dalles, les bancs, les stalles de l’é­glise ; on fait un trône pour Mon­sei­gneur l’é­vêque. Les ainés pré­parent une caval­cade. Tous les che­vaux seront réqui­si­tion­nés, les vélos aus­si. On se pré­pare à tres­ser les cri­nières, à orner les selles ; on fait des flots de rubans pour les brides, et des fleurs de papier pour les guidons.

Jean-Louis orga­nise un groupe de gardes-chasse et de piqueurs, qui pren­dront la tête du mou­ve­ment et feront un concert de fanfares.

Colette, Annie, toutes les petites filles ajoutent des mètres et des mètres aux guir­landes de buis et même de houx, sans sou­ci des piqûres. Légères, les guir­landes devront cou­rir d’un toit à l’autre, car toute la paroisse est en émoi, et les gros pots de géra­nium ou d’a­ma­ryl­lis s’ornent de magni­fiques cache-pots dorés, qui feront res­sor­tir leurs touffes écar­lates, au bord des fenêtres des plus humbles demeures.

Sacrement de l'ordre - Fillettes préparant des guirlandes de fleurs pour l'ordination d'Yvon

Un peu avant de com­men­cer la retraite qui le sépare des fêtes du Sacer­doce, Yvon, un soir, a appe­lé les enfants.

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Temps de lec­ture : 15 minutes

Chapitre XVI

Ces cau­se­ries en plein air font le bon­heur de tous.

Les gar­çons raf­folent de leurs pro­fes­seurs, qui, entre les leçons, orga­nisent des courses et des par­ties de bal­lon à en perdre la res­pi­ra­tion, comme dit un petit homme de huit ans.

De plus, depuis quelques jours, le bourg est fort agi­té par une fête foraine qui bat son plein. Ber­nard a conduit « ses élèves » aux che­vaux de bois, non sans fier­té, car la dis­ci­pline obte­nue a été irré­pro­chable. Et le grand gar­çon s’en­thou­siasme lui-même de son suc­cès. Il se sent une irré­sis­tible voca­tion d’en­trai­neur, et voit évo­luer en ima­gi­na­tion les équipes qu’il for­me­ra un jour. Qui donc pour­rait entra­ver ses projets !

Sur les entre­faites, sa mère l’ap­pelle un beau matin.

— Veux-tu aller à L…, Ber­nard, nous ache­ter un tas de choses ? Nous n’a­vons plus de soie, plus de fil d’or, plus de papier doré, plus de colle pour les déco­ra­tions de l’é­glise ; nous sommes à sec.
Et puis, ton oncle vou­drait que tu passes chez le libraire prendre deux ou trois nou­veau­tés de valeur dont il va te don­ner la liste.

Ber­nard jette un coup d’œil sur sa vareuse, qui, comme le pour­point d’Hen­ri IV, est un peu « trouée par le coude » :

— Le temps de m’ha­biller cor­rec­te­ment, maman, et à vos ordres.

Au moment de par­tir, Ber­nard réclame la liste des com­mis­sions. Lui remet­tant celle du libraire, son oncle dit :

— Ne te laisse pas prendre par la bande allé­chante du der­nier volume de X. Il est bon tout au plus à mettre au feu au bout des pincettes…

— Bien, mon oncle, enten­du ! crie Ber­nard dont la bicy­clette démarre sur la route de la gare.

Une demi-heure de che­min de fer, dix minutes d’un pas allon­gé, et le voya­geur atteint les grands maga­sins. Au moment d’en­trer à la libraire, il se heurte à un ancien cama­rade de col­lège, forte tête qu’il avait fal­lu jadis et plu­sieurs fois « chan­ger d’air ».

Mais l’an­cienne cama­ra­de­rie n’en sub­siste pas moins. On se serre joyeu­se­ment la main. Ber­nard dit :

— Qu’as-tu ache­té, vieux ?

Le jeune homme bran­dit le volume, et Ber­nard recon­naît le fameux livre signa­lé par son oncle.

— Non ! Cette sale­té ? Pas possible ?

— Tu l’as lu ?

— Bien sûr que non.

— Alors, qu’en sais-tu ? Ce n’est pas une sale­té de tout. Il y a là une puis­sance d’a­na­lyse, une évo­ca­tion des­crip­tive, je ne te dis que ça ! C’est épa­tant ! Achète-le et tu verras.

— Non, dit encore Ber­nard nettement.

— Ah ! mon pauvre vieux, ce qu’on voit bien que tu as été éle­vé à l’ombre des cotillons !

Ber­nard est trop intel­li­gent, trop loyal pour ne pas appré­cier jus­qu’au culte l’é­du­ca­tion virile que lui a don­née sa mère. Il sent, selon sa manière de par­ler, la mou­tarde lui mon­ter au nez et, pour ne pas se fâcher, tourne les talons en haus­sant les épaules, non sans ajouter :

— Bon­soir, tu me dégoûtes.

Mais l’in­ci­dent l’a trou­blé. Il fait ses com­mis­sions tout de tra­vers, retourne deux fois dans le même maga­sin inuti­le­ment, et vient s’as­seoir sur le quai de la gare un bon quart d’heure avant l’heure du train. Lui, que rien ne fatigue jamais, pour une fois se sent très las.

Garçon tenté par un mauvais camarade : livre mauvaise lecture
C’est épa­tant ! Achète-le et tu verras.

Il regarde machi­na­le­ment autour de lui. À deux pas, la biblio­thèque étale ses nou­veau­tés tapa­geuses. Au milieu des rayons trône le volume en ques­tion. Le titre reluit, en gros carac­tères modernes, épais, brillants.

Ber­nard n’est plus un enfant. Il a conscience de sa propre liber­té et sent par­fai­te­ment qu’il a seul, devant Dieu, la res­pon­sa­bi­li­té de ses actes.

S’il veut ache­ter ce livre, c’est affaire entre sa conscience et lui.

Mais le veut-il ? C’est humi­liant de n’en pas pou­voir de science cer­taine. Quelques pages de lec­ture ne lui feront aucun mal ; il le détrui­ra ensuite, bien entendu.

Le train vient d’en­trer en gare. Ber­nard s’ap­proche de la biblio­thèque, tend quinze francs, prend l’ou­vrage et saute dans son wagon.

Il a la désa­gréable sur­prise d’y trou­ver un tout jeune voi­sin, grand ami de Jean, et auquel, pour rien au monde, il n’eût fait voir le livre, qu’il enfouis­sait de son mieux dans la poche inté­rieure de son veston.

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Chapitre XV

À quelques jours de là, Ber­nard aborde son frère.
 — Dis donc, Yvon, je n’ad­mets pas que Colette soit seule ici à avoir des idées géniales. Sais-tu que son « école de litur­gie » fait mer­veille ? Les petites filles sont enchan­tées, racontent le soir chez elles ce qu’elles ont appris ; toutes les familles s’in­té­ressent à la céré­mo­nie pro­chaine de l’. Alors, pour­quoi ne pas réunir les garçons ?

Yvon répond :

— Au fond, tu sais, le mérite des filles est modeste. Elles savent d’a­vance, parce qu’à l’é­cole chré­tienne elles ont toute l’an­née des leçons d’ins­truc­tion religieuse.

— Jus­te­ment ! Alors nos petits gars, qui, à leur école laïque, n’en entendent jamais par­ler ? Je vais de ce pas offrir à M. le Curé de les prendre ici, les jours où Colette ne réunit pas ses « demoiselles ».

Le soir même, arrive, en chan­tant à tue-tête, mar­chant au pas et sur deux rangs, toute une file de joyeux enfants, Ber­nard et Jean en tête, bien enten­du. Les heures qui suivent sont indes­crip­tibles. Ber­nard et Jean mettent un tel entrain dans leurs expli­ca­tions, et les gar­çons une si belle ardeur à essayer de répondre, que de la mai­son on entend des cris sau­vages, à ameu­ter la population.

Petit à petit pour­tant, à mesure que les jours se suc­cèdent, le bruit s’a­paise, mais en revanche l’in­té­rêt redouble, car Yvon s’en mêle, et la bande des gar­çons entend dépas­ser en savoir, celles des filles.

Les garçons apprennent la liturgie : le sacrement de l'ordre - l'ordination

Un soir, Ber­nard déclare :

— Nous allons abor­der un fameux sujet. Je pro­pose d’es­sayer de com­prendre la céré­mo­nie de l’ordi­na­tion à laquelle nous assis­te­rons tous ; plu­sieurs seront enfants de chœur ; il s’a­git de pou­voir suivre,

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Chapitre XIV :

Cha­cun sait que Colette est réa­li­sa­trice. Dans cette attende de l’ d’Y­von, elle forme cin­quante pro­jets d’a­pos­to­lats. Un beau jour, elle entre­prend d’y asso­cier les petites filles de l’é­cole chré­tienne, libres de leur temps, puisque, pour elles aus­si, la période du grand congé est commencée.

Munie de toutes les per­mis­sions vou­lues, Colette, aidée d’An­nie, orga­nise sous les mar­ron­niers une salle d’é­tude cham­pêtre. Les gar­çons ont appor­té les bancs de l’é­cole et fabri­qué, avec des planches et des tré­teaux, une table sur laquelle s’é­talent, en minia­ture, les objets néces­saires à la .

Yvon, tout enfant, rêvait déjà d’être . Il pos­sé­dait un petit autel et tout l’en­semble des objets litur­giques. Ces tré­sors ont pas­sé entre les mains de Colette, si bien que, fai­sant miroi­ter un minus­cule, mais très joli doré, elle demande aux petites éco­lières grou­pées autour d’elle :
 — Qui me dira ce que c’est que ceci ?

Les réponses sont una­nimes : Un ciboire, un ciboire !

— Bon ! Mais quelle dif­fé­rence y a‑t-il avec cet autre objet ?

— Ça, c’est un autre ciboire.

— Non, inter­rompt une petite bru­nette dont les yeux brillent comme du jais ; pas du tout, c’est un .

— Qui m’ex­plique la dif­fé­rence ? conti­nue le pro­fes­seur improvisé.

— Moi ! moi !

— Ne criez pas toutes à la fois. Allons, Anna, toute ta fri­mousse parle d’a­vance : dis-nous ce que tu sais.

Vases sacrés et ornements liturgiques - Le ciboire est un vase précieux
Le ciboire est un vase précieux

Anna perd un ins­tant conte­nance ; être inter­pel­lé, c’est tou­jours une émo­tion. Puis, bravement :
 — Le ciboire est un vase pré­cieux, dont l’in­té­rieur doit être doré pour rece­voir les saintes Espèces, c’est-à-dire les Hos­ties consacrées.

— Par­fais. Et le calice ?

— Le calice, c’est tout dif­fé­rent. Il ne sert qu’à la Messe. Le prêtre verse dedans le vin qui, à la Consé­cra­tion, devien­dra le Sang de Notre-Sei­gneur. Pour com­mu­nier, le prêtre boit dans le calice, et, à la fin de la Messe, il le puri­fie et l’es­suie soi­gneu­se­ment avec le purificatoire.

— Bra­vo, petite Anna ! tu parles comme un livre.

Anna se ras­sied rou­gis­sante, et 

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Chapitre XIII

Joies et épreuves se suivent vite dans la vie.

Les col­lé­giens étaient à peine ren­trés, la pen­sée encore toute occu­pée du mariage de Jean­nette, qu’une nou­velle très inquié­tante leur parvenait.

A quelques semaines de son , au sémi­naire de Rome, Yvon était gra­ve­ment malade. Tout fai­sait craindre une fièvre typhoïde extrê­me­ment violente.

Colette est consternée.

— Si Yvon allait mou­rir avant d’être  ? dit-elle à M. le curé, qu’on est allé trou­ver bien vite, avec maman, pour lui deman­der des prières.

— Allons, allons ! ne met­tons pas tout au pire ! Une fièvre typhoïde, ça se soigne, voyons ! La grosse peine de cet enfant, c’est de voir retar­der son ordi­na­tion. Mais aus­si, l’heure venue, il sera d’au­tant plus heu­reux qu’il l’au­ra payée plus cher,… le Bon Dieu a ses vues, voyez-vous ! Fai­sons-lui confiance, et tout ira bien. Je dirai ma demain pour notre pauvre malade. Et puis, je vais mettre les enfants de l’é­cole en prière. Vous ver­rez que nous serons exau­cés. Tenez-moi bien au cou­rant, surtout !

En ren­trant à la mai­son, Colette confie à sa mère :
 — M. le curé est un vrai saint. Je crois qu’il va obte­nir du Bon Dieu tout ce qu’il voudra.

Colette ne croyait pas si bien dire, car, après de véri­tables angoisses, Yvon ayant été mou­rant, on apprit enfin par tante Jeanne, qui l’a­vait immé­dia­te­ment rejoint à Rome, que la conva­les­cence com­men­çait. Le doc­teur ordon­nait de trans­por­ter le malade à la cam­pagne, dès qu’il pour­rait sup­por­ter le voyage, et, bien enten­du, c’est dans l’hos­pi­ta­lière mai­son fami­liale qu’on l’attend.

On devine le branle-bas. Pier­rot déniche au gre­nier une antique chaise-longue ; Colette crève de vieux oreillers pour les trans­for­mer en cous­sins. La plume vole un peu par­tout, et Maria­nick pousse des sou­pirs à gon­fler une voile de bateau ; mais, après tout, c’est pour Yvon !

Pauvre Yvon ! Quand il débarque, dia­phane et maigre comme un écha­las, ses cou­sins ont bien de la peine à cacher leur sur­prise. Et puis, on le sent si triste. Cette ordi­na­tion remise, et à quand ?

Mais Yvon comp­tait sans son bon curé.

Un beau matin, le vieux prêtre paraît à la grille du jar­din. Il a mar­ché si vite qu’il doit s’é­pon­ger le front avec l’im­mense mou­choir à car­reaux qui fait le bon­heur des enfants. Ses yeux gris, demeu­rés si clairs mal­gré les années, pétillent der­rière les lunettes et cherchent du regard la fameuse chaise-longue sur laquelle Yvon demeure éten­du dehors, tou­jours exces­si­ve­ment faible, silen­cieux et dépri­mé, car il lui semble qu’il ne se remet pas assez vite.

L’ayant décou­vert, le bon curé se hâte, un sou­rire heu­reux épa­nouis­sant sa physionomie.

Yvon le salue d’un geste las.

— C’est comme ça que tu m’ac­cueilles ? Tu res­sembles à un saule pleu­reur cou­ché par la tempête.

— Je ne reprends aucune force, mon­sieur le Curé, et puis, croyez-vous que je sois bien gai ?

— Fichtre non ! tu n’es pas gai. Ça se voit à cent mètres de dis­tance, et c’est jus­te­ment ça que je te reproche. Com­ment prê­che­ras-tu aux autres le cou­rage et l’a­ban­don, quand tu seras prêtre, si c’est tout ce que tu en pos­sèdes ? On ne donne que ce qu’on a, je ne te l’ap­prends pas, pourtant.

— Quand je serai prêtre… Mais c’est cette ordi­na­tion man­quée qui me tour­mente, … vous le savez aus­si bien que moi, mon­sieur le Curé.

— Homme de peu de foi ! Si tu n’a­vais pas été si gra­ve­ment malade, je te semon­ce­rais d’im­por­tance. Écoute-moi donc un peu et prends une autre tête. J’é­tais hier à l’é­vê­ché. Il n’y a pas qu’à toi qu’il arrive de gros sou­cis. Mon­sei­gneur a deux sémi­na­ristes dans ton cas, l’un dans une cli­nique, l’autre avec un grave acci­dent à la jambe. Ils man­que­ront tous les deux l’or­di­na­tion de la Saint-Pierre, et alors…