C’était le plus beau rameau, celui de la petite Vivette, un rameau chargé de jouets et de bonbons, suivant la coutume du pays. Et Vivette, bien qu’elle le trouvât lourd à porter, en était très fière, Elle faisait « sa glorieuse », comme disait son père, et se réjouissait fort à l’idée de l’effet qu’elle produirait tout à l’heure à l’église…
…lors de la bénédiction des rameaux. Mais voilà que le bon ange gardien de Vivette, qui se tenait tout près d’elle, fut très peiné par ce sentiment d’orgueil. Il essaya bien de souffler à la petite fille que ce n’était vraiment pas joli d’aller voir le Bon Dieu en pensant seulement à éclabousser ses compagnes de sa richesse.
Mais Vivette ne voulait rien entendre. Elle mettait tous ses soins à protéger son beau rameau, et juchée sur Cadou, le petit âne qui l’emporte à la messe, elle contemple cette merveille, Tiens, Cadou s’arrête. Qu’y a‑t-il ? Un pauvre petit garçon tout déguenillé et l’air bien misérable est là, sur le bord de la route. Tous deux, le bon ange et Vivette le regardent.
Vivette interroge. Le petit raconte ses malheurs. Et voici, spontané, le geste magnifique qui fait joindre les mains de l’ange : « Tiens, dit Vivette, prends mon rameau, et viens le faire bénir. » Mais quoi ! le petit garçon refuse. « Il est trop beau, dit-il. Ce n’est pas pour moi. Qu’en ferais-je ? Un peu d’argent pour soigner ma maman ferait mieux mon affaire. »
Vivette est perplexe, le bon ange anxieux. Cadou, résigné, attend. Le petit garçon aussi. Mais voilà qu’une petite voiture traînée par un poney shetland arrive à grande allure, portant Jean et Claude, « les petits messieurs du château », ainsi qu’on les nomme. « Oh ! Vivette ! ton rameau, comme il est beau ! Plus beau que le nôtre. Tu as bien de la chance. »
Vivette saisit l’occasion : « Le voulez-vous ? Il est à vendre — À vendre ? — Oui, il n’est pas encore béni. — Oui, oui, achetons-le ! » crie Claude. Le prix fait, voilà que Vivette reçoit de belles pièces qu’elle donne au petit pauvre.
Et Vivette, qui ne présente à la bénédiction qu’un simple rameau de buis cueilli en traversant le bois, en fut encore plus « glorieuse » que du premier. L’ange gardien était tout heureux de la bonne action de Vivette.
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