En l’année 1917, le Portugal traversait une triste période. Dirigé par un gouvernement qui persécutait la religion, ce pays, divisé, ruiné, envahi par le communisme, semblait aller à sa perte.
En même temps, les armées portugaises participaient à la grande guerre, et, dans plus d’un foyer, on pleurait les soldats tombés bien loin, là-bas, sur une terre étrangère.
Un éclair, brusquement, frappe leurs yeux.
À cette époque, le village de Fatima restait encore à peu près inconnu. Situé à une centaine de kilomètres de Lisbonne, ses modestes maisons se dressaient sur les pentes de la montagne d’Aire, dans une contrée particulièrement aride et rocailleuse. Pourtant, cette région gardait le souvenir d’une éclatante victoire, remportée en 1385, par le roi Jean 1er de Portugal, avec une poignée de braves. Le roi, en reconnaissance, fit construire à cet endroit un beau couvent en l’honneur de Notre-Dame de la Victoire. Il en confia la garde aux Dominicains. Ceux-ci répandirent autour d’eux la dévotion du saint rosaire. L’usage s’en était si bien conservé à travers les siècles que, dans cette partie du pays, beaucoup de familles récitaient encore fidèlement le chapelet. Les petits enfants eux-mêmes, élevés dans cette habitude, aimaient à le dire.
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Par une belle journée du printemps de 1917, trois bergers de Fatima gardaient leurs moutons dans un champ nommé la Cova da Iria, qui appartenait aux parents de l’un d’eux.
Jeanne, la « Sainte de la patrie », naquit en la fête de l’Épiphanie de l’année 1412, au petit village de Domremy, en Lorraine.
Son père, Jacques d’Arc, sa mère Isabelle Romée, étaient de simples paysans, laborieux et bons chrétiens.
« J’ai appris de ma mère, mon Pater, mon Ave Maria, et mon Credo », disait Jeanne plus tard. « Tout ce que je crois, je l’ai appris de ma mère. »
Jeannette, comme on l’appelait au village, semblait attirée vers le bon Dieu. Elle assistait avec bonheur aux catéchismes de M. le Curé, aux instructions et aux cérémonies.
La petite maison où Jeanne vint au monde et grandit, existe encore, toute proche de l’église.
L’enfant profitait de ce voisinage pour courir à l’église dès que la besogne lui laissait un instant.
Sa foi vive lui montrait Nôtre-Seigneur toujours présent dans le tabernacle. Agenouillée sur le pavé, devant l’autel, elle priait avec une ferveur extrême.
Que de fois les habitants de Domremy la surprirent ainsi, les mains jointes, tout absorbée par sa conversation avec le bon Dieu !
Elle assistait avec un profond recueillement aux messes célébrées par le curé de la paroisse.
A la tombée du jour, la cloche appelait les paroissiens pour la prière. Jeannette s’empressait de courir à l’église. Parfois cependant, son travail la retenait au loin. Dès que le vent lui apportait le son de l’Angélus, elle s’agenouillait dans les champs pour prier. Elle aimait entendre les cloches qui sont la voix de l’église. Or, il paraît qu’au moment de la première Communion de Jeannette, le sonneur oubliait parfois son office. L’enfant le suppliait d’être plus exact, et elle lui promettait en récompense les écheveaux de laine blanche qui venaient de ses brebis.
Dès l’âge de raison, Jeannette se confessait souvent, tant elle désirait purifier son âme des moindres taches.
Après sa première communion, elle se confessa plus fréquemment encore pour se préparer au grand bonheur de recevoir Jésus dans son cœur.
Tous ceux qui connaissaient Jeannette remarquaient combien tendrement elle aimait la Sainte Vierge.
Dans l’église du village, on la trouvait souvent agenouillée devant la statue de Marie. Elle y allumait des « chandelles » comme elle disait, ou bien elle arrangeait en bouquets les plus jolies fleurs de son jardin.
Quand venait le mois de mai, chaque samedi, Jeannette toute joyeuse s’en allait en pèlerinage avec ses amies vers les chapelles des environs dédiées à la sainte Vierge : Notre-Dame de Bermont, ou l’ermitage Sainte-Marie, situé sur une colline qui domine la vallée de la Meuse.
En cheminant à travers l’herbe fraîche des prés, les enfants cueillaient des fleurs qu’elles déposaient aux pieds de la Vierge et de l’Enfant Jésus.
Simple, franche, douce, joyeuse, Jeanne se faisait aimer de tout le monde. « Elle n’avait pas sa pareille dans la paroisse, disait le curé, jamais je n’en vis une meilleure. »
Les habitants convenaient que c’était la vérité. Ils admiraient le courage de la jeune fille au travail. Tout le long du jour, elle aidait sa mère dans les soins du ménage, accompagnait son père et ses frères aux champs, gardant le troupeau dans les prairies qui entouraient le village.
Le soir, à la veillée, Jeannette se mettait à filer et à coudre. Elle le faisait avec tant d’adresse que plus tard, elle put dire fièrement : « Pour coudre et filer, je ne crains pas femme de Rouen ! »