Conte russe
Il était une fois une vieille femme nommée Babouchka qui habitait, seule, une toute petite maison au cœur de la forêt. Sans cesse, elle s’affairait, cousait, cuisinait, nettoyait et, tout en travaillant, elle chantait. Pour se tenir compagnie, elle chantait des chansons, vieilles et nouvelles, et en inventait ; elle était de nature joyeuse. La grand-route passait loin de la maisonnette si bien que les visiteurs étaient rares.
Babouchka fut donc bien étonnée, un après-midi d’hiver, d’entendre un grand vacarme dans la forêt.
« C’est peut-être un ours » se dit-elle et elle se mit à trembler. Mais non, un ours ne fait pas crisser la neige sous ses pas de la sorte.
Elle tendit à nouveau l’oreille et entendit résonner des bruits de pas. Cette fois, c’était sûr, elle allait avoir de la visite ! Elle s’empressa d’ajouter quelques bûches et de mettre la grosse bouilloire noire sur le feu. Quelques instants plus tard, on frappa fort à la porte. Babouchka sursauta :
— Qui est là ? demanda-t-elle d’une petite voix craintive.
— Des voyageurs égarés et épuisés. Pouvez-vous nous aider ?
— Mais bien sûr ! Entrez donc ! cria Babouchka et elle ouvrit grand la porte. Soyez les bienvenus ! Venez vous réchauffer au coin de mon feu ! Il fait si froid dehors !
Un jeune homme entra, en souriant d’un air reconnaissant. Un second, plus âgé, le suivit, puis un troisième qui secoua de son manteau une épaisse couche de neige. Tous trois étaient superbement vêtus et le troisième portait aux oreilles des anneaux d’or étincelants.
Pendant que Babouchka faisait réchauffer une bonne soupe et coupait du pain, les voyageurs lui racontèrent qu’ils étaient à la recherche d’un roi nouveau-né.
— Son étoile nous guidait, expliquèrent-ils, mais le ciel est si chargé de neige que nous ne la voyons plus.




Sur les pas du sacristain, la clef grinça et le pêne lourd fit dans la cathédrale un grondement de tonnerre. Le bruit porté de voûte en voûte, d’ogive en ogive par tous ces gestes croisés des arcs, emplit la nef et s’évanouit dans les bas-côtés en un murmure de voix confuses. La lampe d’autel, balancée lentement sur son fil, tremblait sa flamme rouge et pailletait de clartés fugitives, le cuivre des candélabres et le bois poli des stalles.
Rien de plus curieux que la physionomie de ces cafés pendant la nuit du réveillon. Dans la salle étroite, dont une table de marbre occupe le centre, monte un brouillard chargé de la fumée des pipes. Des habitués entourent le poêle de fonte vernissée. Plus loin, des consommateurs sont assis devant une tasse de café « aux trois couleurs » qui attend le quatrième petit verre. Mais le gros du public est debout, frémissant, les yeux dilatés, les narines ouvertes, autour du carré central où gisent, dans un absolu désordre, poulets, dindons, oies, canards et lapins destinés à l’heureux gagnant de chaque partie.
Malgré les gros flocons de neige qui voltigeaient dans les airs et tombaient sur le sol, qu’ils recouvraient d’un blanc et froid tapis toujours grossissant, les rues étaient pleines de passants affairés qui allaient et venaient dans tous les sens en se croisant et se bousculant.