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IV
Ce fut au tour de Nicole d’être éveillée, quelques jours plus tard, par un drôle de bruit.
Elle s’assied sur son lit, écoute et crie à Bruno qui doit dormir encore dans la chambre à côté :
— Entends-tu ?
Une petite voix calme répond :
— C’est Tate qui s’envole.
— Qui s’envole ! En moins d’une seconde, Nicole est à la fenêtre, juste à temps pour apercevoir l’avion, qui disparaît derrière un léger nuage, dans la lumière du matin.
Mais pourquoi Colette serait-elle partie ? Qu’est-ce que Bruno peut en savoir ? Nicole s’habille en trois minutes, quitte à se laver un autre jour, et se précipite aux nouvelles chez maman.
Maman confirme sa déception, tandis que Pierre arrive, triomphant, donner tous les détails du départ. Son père, rentré depuis deux jours, avait mis l’appareil tout à fait au point. Rien n’empêchait donc Colette de faire une première excursion. Elle ne serait d’ailleurs pas longue. Tout le monde rentrerait pour midi et Geneviève, Jacques et les enfants étaient invités à déjeuner, pour écouter le récit de ce voyage aérien.
Quand l’oiseau se posa au terrain d’atterrissage, les deux petits avaient le torticolis à force d’avoir guetté son apparition dans le ciel bleu.
À table, on ne s’entendait pas, tout le monde parlant à la fois, y compris les enfants, tellement excités, que les parents souriants renonçaient à les faire taire.
— Alors, c’était beau ?
— Dis, Tate, de si haut, tu voyais rien ?
— Pas grand’chose. En descendant pour atterrir, mon pauvre Bruno, tu me paraissais gros comme une mouche.
— Et tu y es allée, poursuit Nicole, au pays d’Adam et Ève ?
— Pas encore cette fois-ci. C’eût été trop loin. Sais-tu qu’il y a à peu près mille kilomètres entre Beyrouth et le mont Ararat.
— Le mont Ararat ? Qu’est-ce que c’est que ça ?
— Je te l’expliquerai ; mais, pour l’amour du ciel, laisse-nous déjeuner.
La dernière bouchée n’était pas avalée, que Nicole et Bruno se pendaient au bras de leur tante, pour l’entraîner sur la terrasse, afin d’obtenir tous renseignements utiles sur cette montagne inconnue.
— Vous êtes terribles, dit Colette en riant. Je ne pensais pas avoir des élèves si désireux d’apprendre leurs leçons.
— Ce ne sont pas des leçons, Tate, ce sont des explications !
— Bon, soit. Cependant, mon petit Bruno, le mont Ararat n’a aucun intérêt actuellement. Il rappelle simplement un des grands événements de l’Histoire Sainte.
— Lequel ?
— Tu n’étais pas là l’autre jour, quand je racontais à ta sœur comment les hommes descendants de Caïn et de Seth étaient devenus mauvais. Pourtant, pour les gouverner, Dieu leur avait donné de grands chefs de famille, qu’on nommait les patriarches. Ils remplissaient les fonctions de prêtres, de juges. Dieu ne dédaignait pas de leur parler et de les instruire, afin qu’ils con-servent les vérités révélées et qu’ils les transmettent fidèlement à leurs descendants.
Bruno, les yeux ronds : Des vérités ré-vé-lées ?