Étiquette : <span>Pierre</span>

Auteur : Marie-France | Ouvrage : À l'ombre du clocher - 1. Les sacrements .

Temps de lec­ture : 7 minutes

dut appuyer sur la manette du star­ter pour don­ner les gaz. L’air, en ce beau matin du jeune été, sur­pre­nait par son carac­tère gla­cial ; le vélo-moteur par­tait mal.

Pour­tant, comme Pierre déva­lait la côte de Mou­­lin-Blanc, l’en­gin se lan­ça et ce fut, pour le gar­çon épris de vitesse, la gri­se­rie de la course.

Mobylette, cadeau pour récompenser la réussite à l'examenUne joie forte et pro­fonde péné­trait dans le cœur de l’a­do­les­cent, comme appor­tée par la pure­té extra­or­di­naire de l’air mati­nal. Mais cette joie avait de plus solides bases et Pierre ne put se défendre de son­ger à ce suc­cès, brillant et tout neuf, qu’il avait rem­por­té l’a­vant-veille à son examen.

— Reçu ! Je suis reçu ! Main­te­nant, à moi les vacances, les ran­don­nées sur deux roues moto­ri­sées (le magni­fique cadeau reçu la veille), l’es­pace, la liber­té. Quelle pêche je vais faire !

Natu­rel­le­ment, grand-père n’a­vait pas eu d’objec­tion à ce pro­jet du col­lé­gien, arri­vé en vacances chez lui avec toute cette gloire que lui méri­tait son suc­cès. Grand-père avait été lui-même pas­sion­né par ce « sport » du temps où il n’é­tait pas per­clus de rhumatismes.

— Prends tout mon atti­rail, fis­ton, avait-il dit. Et tâche de nous rame­ner un saumon.

Un sau­mon ! Grand-père le trou­vant digne d’es­sayer de tirer un de ces fabu­leux pois­sons, quelle consécration !

— Tu as vu, quelle est ma tech­nique quand tu m’ac­com­pa­gnais les autres années ; tu te sou­viens d’Oscar.

S’il se sou­ve­nait ! Oscar ! la plus belle prise que le vieillard eut jamais faîte ; un sau­mon de près de deux mètres de long…

— J’i­rai au bon endroit, avait déci­dé le gar­çon. Pour­quoi ne réus­si­rais-je pas à prendre aus­si un Oscar ?

Main­te­nant il était au bord de la tor­ren­tueuse petite rivière, se glis­sant à tra­vers les rochers pour joindre le « saut du géant », une fosse que