Quelques saints soldats n°2

Auteur : Goldie, Agnès | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 12 minutes

Les Quarante Martyrs

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Il fal­lait un fameux cou­rage et une grande grâce de Dieu pour attendre de pied ferme l’ours qui doit vous étouf­fer, la lionne prête à vous dévo­rer. Il fal­lut non moins de cou­rage pour subir le mar­tyre si dif­fé­rent, qui consis­tait à res­ter cou­ché sur la glace jus­qu’à la mort. 

Tan­dis que Constan­tin le païen conver­ti par la croix et deve­nu empe­reur — tra­vaillait en Occi­dent au triomphe de l’Église, Luci­nus, qu’il s’é­tait asso­cié, la per­sé­cu­tait en Orient. 

Ce prince ordonne que toutes les légions fassent aux dieux des sacri­fices publics, cela, sous peine de mort.

À Sébaste, en Armé­nie, qua­rante offi­ciers et sol­dats refusent d’o­béir. « Nous sommes chré­tiens »

— On ver­ra si vous le serez encore quand vous cla­que­rez des dents ! Qu’on les couche sur l’é­tang gla­cé, aux portes de la ville !

Les Quarante Martyrs de Sébaste morts sur la glace
« …Len­te­ment il se traîne sur la glace…

Pour les ten­ter, un bain chaud est entre­te­nu sur la berge. La seule vapeur qui s’en dégage, donne envie de cou­rir s’y jeter… 

La prière sou­tient leur cou­rage. L’un d’eux aurait-il ces­sé de prier ?… Voi­ci que son cou­rage fai­blit… len­te­ment il se traîne sur la glace. Les païens qui entre­tiennent l’eau chaude l’aident à se his­ser dans la bai­gnoire. La dif­fé­rence de tem­pé­ra­ture le sai­sit et il expire presque aussitôt. 

Tan­dis que ceci se passe, une des sen­ti­nelles a vu le ciel se peu­pler d’anges qui tiennent des cou­ronnes au-des­sus des trente-neuf sol­dats res­tés fidèles. L’ange du trans­fuge n’a plus per­sonne à cou­ron­ner. Alors, ne fai­sant ni une ni deux, le sol­dat laisse tom­ber sa chaude cape et, gre­lot­tant, mais brave, va se cou­cher à la place vide : « Je crois en Dieu. Je suis chré­tien ! » dit-il.

Au petit jour, les qua­rante corps sont entas­sés sur un char­riot et jetés au feu… Et, grâce à la sen­ti­nelle, c’est bien au nombre de qua­rante qu’ils furent cou­ron­nés dans la gloire…

Saint Sébastien

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Sébas­tien naquit à Nar­bonne, d’une famille chré­tienne ori­gi­naire de Milan. Par­ve­nu à l’âge de choi­sir une car­rière, il s’en­ga­gea dans l’ar­mée de César. L’ar­mée romaine était fort nom­breuse et fort répu­tée et, pour tout sujet de l’Em­pire, c’é­tait une gloire d’y ser­vir et de por­ter les aigles romains de l’O­rient à l’Oc­ci­dent, du Finis­tère à la Pales­tine, sans oublier l’A­frique du Nord.

Sébas­tien se dis­tingue par son cou­rage, sa dis­ci­pline et se voit nom­mé chef de cohorte pré­to­rienne. L’Em­pe­reur Dio­clé­tien l’ap­pré­cie, et s’en fait accom­pa­gner à Rome, ce qui donne au jeune offi­cier l’oc­ca­sion de secou­rir ses amis les chré­tiens : il les visite, les ravi­taille, les affermit. 

Saint Sébastien encourage Marc et Marcellin à tout sacrifier pour Jésus
Saint Sébas­tien encou­rage Marc et Mar­cel­lin à tout sacri­fier pour Jésus

C’est ain­si qu’il ren­contre deux jeunes hommes, deux frères : Marc et Mar­cel­lin arrê­tés pour leur foi. Issus d’une des pre­mières familles de Rome, venus au chris­tia­nisme dès leur jeu­nesse, ils ont encore leur père et leur mère, tous deux païens. Ces pauvres gens ne peuvent se faire à l’i­dée de perdre leurs fils, de les voir sup­pli­ciés et enle­vés à leurs femmes et enfants, car tous deux sont mariés. Alors, ce sont de véri­tables assauts, des pleurs, sup­pli­ca­tions… des scènes pitoyables, sans cesse renou­ve­lées. Les jeunes femmes, les enfants, loin d’en­cou­ra­ger Marc et Mar­cel­lin, les affai­blissent par leur pré­sence, tant il leur semble dur de les quit­ter. Bref, le cou­rage des deux jeunes gens s’é­miette et ils sont près d’a­po­sta­sier, quand Sébas­tien vient à leur aide. Il les encou­rage à tout sacri­fier pour Jésus-Christ, qui sau­ra bien veiller sur ceux qu’ils laissent. Sa parole est si chaude, son appel au don total si moti­vé, que tous ceux qui l’en­tendent : parents, épouses, gref­fier de la Pré­fec­ture, sont retour­nés. Les parents demandent à s’ins­truire des véri­tés de la foi et à rece­voir le bap­tême ; de même, le gref­fier Nicos­trate et le Pré­fet Cro­mace, celui-là même qui a condam­né les deux frères au der­nier sup­plice, leur don­nant un délai de trente jours pour qu’ils aient le temps d’ab­ju­rer leur foi. 

De l’af­faire, Cro­mace les relâche et ils rentrent chez eux, quittes à être tra­his plus tard par un lâche apos­tat et mar­ty­ri­sés par ordre du pré­fet Fabien. 

Sébas­tien a donc don­né à Dieu toute cette famille, plus les fonc­tion­naires impé­riaux Cro­mace et Nicos­trate, plus Tibuce, fils de l’un et Zoé, fille de l’autre. Quel coup de filet !

Dio­clé­tien finit par apprendre l’ac­tive pro­pa­gande chré­tienne que fait à Rome un de ses offi­ciers. Com­ment ose-t-il, alors que, depuis bien­tôt trois siècles qu’elle existe, la reli­gion chré­tienne est à peine tolé­rée et sou­vent pros­crite par l’Empereur ? 

Dio­clé­tien fait appe­ler Sébas­tien, le dégrade, le livre à la jus­tice. Le mal­heu­reux, ou plu­tôt le bien­heu­reux mar­tyr est atta­ché à un poteau et cri­blé de flèches. 

Saint Sébastien est attaché d un poteau et criblé de flèches
Saint Sébas­tien est atta­ché d un poteau et cri­blé de flèches

La nuit sui­vante, Irène, veuve d’un mar­tyr, vient pour l’en­se­ve­lir et s’a­per­çoit qu’il res­pire encore. Elle le fait trans­por­ter chez elle et le soigne si bien qu’il guérit. 

Au lieu de se cacher, comme on le lui conseille, Sébas­tien se met sur le pas­sage de l’Em­pe­reur et lui reproche son injus­tice envers les chré­tiens, ses meilleurs sujets. Il paya cette audace. Bat­tu de verges, il mou­rut sous les coups, le 20 jan­vier 284. Son corps fut ensuite jeté dans un cloaque dont on le reti­ra en secret pour le por­ter aux Cata­combes. Au siècle sui­vant, le pape saint Damase éri­gea au-des­sus de son tom­beau une église en son hon­neur. Cette église est une des sept basi­liques prin­ci­pales de Rome. On y voit une des flèches dont Sébas­tien fut per­cé et la colonne à laquelle il fut attaché. 

Saint Sébas­tien, vous qui avez été un modèle de sol­dat chré­tien par votre foi, votre zèle et votre cha­ri­té, priez pour nos soldats !

Saint Maurice

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Une grande concen­tra­tion de troupes se fait en Suisse. Plu­sieurs corps d’ar­mée viennent d’ar­ri­ver d’O­rient ; bien­tôt, ce sera la, guerre : Dio­clé­tien a réso­lu de répri­mer l’in­sur­rec­tion des pay­sans gau­lois, dits Bagaudes. Une forte armée, com­man­dée par le futur empe­reur Maxi­mi­lien va être lan­cée contre les dissidents. 

Trans­por­tons-nous au vil­lage d’Oc­to­do­rum, aujourd’­hui Mar­ti­gny-en-Valais, là où a lieu le rassemblement. 

Les troupes arrivent, arrivent tou­jours. Lais­sons pas­ser ces hommes haras­sés, mais mer­veilleu­se­ment dis­ci­pli­nés. Atten­dons la vingt-deuxième légion et suivons-là. 

Sans s’ar­rê­ter, elle tra­verse Octo­do­rum, fran­chit les gorges d’A­gonne, et, dans la plaine, éta­blit son campement. 

Pour­quoi la vingt-deuxième légion n’est-elle pas res­tée avec les autres ? 

— Parce que les offi­ciers et les sol­dats qui la com­posent sont tous chré­tiens. Ils savent qu’au camp se pré­pare une grande solen­ni­té païenne pour rendre les dieux favo­rables à la cam­pagne qui va s’ouvrir. 

— Mais com­ment la vingt-deuxième légion est-elle deve­nue chré­tienne alors que toutes les autres ne le sont pas ? 

— La légion, dont Mau­rice est le chef, a tenu ses quar­tiers d’hi­ver à Thèbes, en Haute-Égypte, d’où son nom de Légion Thé­baine ; elle a séjour­né aus­si à Jéru­sa­lem, où elle a été gagnée à la foi par l’é­vêque Hymé­née. Le pri­mi­cier Mau­rice, l’ins­truc­teur Exu­père et un troi­sième offi­cier chré­tien exercent une énorme influence sur leurs hommes. Les actes des mar­tyrs, racontent que, pas­sant par Rome en se ren­dant en Gaule, la Légion Thé­baine s’en­ga­gea par ser­ment, entre les mains du Sou­ve­rain Pon­tife à refu­ser obéis­sance à César, s’il vou­lait faire agir les chré­tiens contre leur conscience. C’é­tait le cas.

Cepen­dant, les pré­pa­ra­tifs de la fête se poursuivent. 

Au milieu du camp, est une tente plus grande que les autres : celle de Maxime. Un homme « for­mi­dable » que ce chef d’ar­mée : rien ne lui échappe et, certes, une légion ne dis­pa­raît pas comme une aiguille dans un tas de foin. « Où est-elle ? 

— À Agonne. 

— Qu’elle vienne, comme les autres, sacri­fier à nos dieux ! 

Refus caté­go­rique.

Mau­rice fait remar­quer à Maxime que, le sou­mettre ain­si que ses hommes, à une céré­mo­nie ido­lâ­trique est une insulte à leur conscience. Bles­sé de rece­voir pareil affront, l’Em­pe­reur pro­nonce contre la légion la peine de déci­ma­tion, la plus rigou­reuse des péna­li­tés mili­taires. Elle consiste à dégra­der publi­que­ment, puis à mettre à mort un sol­dat sur dix, celui-ci dési­gné par le sort. 

Plu­sieurs corps de troupes, com­po­sés uni­que­ment d’i­do­lâtres, sont char­gés de l’exé­cu­tion. Tout se passe sans aucune résis­tance de la part des chré­tiens. À l’ap­pel de son nom, cha­cun s’é­lance hors du rang. Dès que le der­nier a été appe­lé, Mau­rice remet au lieu­te­nant une lettre dans laquelle il dit leur réso­lu­tion à tous de res­ter inébran­la­ble­ment chrétiens : 

« César, écri­vait-il, nous sommes tes sol­dats, mais aus­si les ser­vi­teurs de Dieu. « Tu nous donnes la solde. « Il nous donne la vie. « Le sang de nos cama­rades a rejailli sur nous et nous ne les ven­geons pas, bien que nous ayons des armes. Main­te­nant, fais comme il te plai­ra, mais sache que, s’il faut pour­suivre et tuer des chré­tiens, nous ne le ferons jamais. » 

Ordre est alors don­né de pro­cé­der à une seconde déci­ma­tion, puis à une troi­sième. Cette fois, les sol­dats demandent tous à y être com­pris. L’un d’eux s’é­crie : « C’est le Christ qui com­mande ! » Et, jetant bas leur casque et leur cui­rasse, tous se livrent au mar­tyre. Le mas­sacre dure jus­qu’à la nuit. C’est le 22 sep­tembre 286. Le bourg d’A­gonne a pris depuis le nom de Saint-Mau­rice. Au XVIe siècle, un Ordre mili­taire a été fon­dé en l’hon­neur du chef de la Légion Thébaine.

L'un des soldats de la légion Thébaine s'écrie : « C'est le Christ qui commande ! » - Vie de Saint Maurice pour les enfants
L’un d’eux s’é­crie : « C’est le Christ qui commande ! »

La légion Thé­baine avait encore été sur­nom­mée la légion heu­reuse, à cause de ses suc­cès. Au ciel, elle est « la légion heu­reuse » pour l’Éternité.

Saint Julien de Brioude

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Julien est d’une des meilleures familles de Vienne, en Dau­phi­né. Il a un grade dans une légion romaine. Il sait com­bien il est dan­ge­reux pour un mili­taire d’être chré­tien. Mais bah ! quand il a ame­né au vrai Dieu Féréol, tri­bun de l’ar­mée impé­riale (son colo­nel), Fer­réol n’a pas trem­blé. Julien s’en­cou­rage par cette pen­sée et par celle sur­tout que, s’il est mar­ty­ri­sé, Dieu le sou­tien­dra de sa force, Il l’a pro­mis. Julien ne « s’en fait donc pas ». Quand, sous Dio­clé­tien, la per­sé­cu­tion com­mence dans la pro­vince où le gou­ver­neur Cris­pin fait exé­cu­ter rigou­reu­se­ment les décrets impé­riaux, Julien, sans être aucu­ne­ment un lâche, se croit auto­ri­sé à se cacher à Brioude chez une veuve. Dès qu’il sait qu’on le cherche, plu­tôt que de mettre cette femme en péril, il se livre. « Pre­nez-moi ! le monde ne vaut pas la peine qu’on y reste long­temps. Réunis­sez-moi à mon Dieu. »

On conduisit le soldat saint Julien de Brioude dans la campagne et on lui trancha la tête
On le condui­sit dans la cam­pagne et on lui tran­cha la tête

On le conduit dans la cam­pagne et on lui tranche la tête. Cet offi­cier-apôtre, qui a don­né Fer­réol à l’Église (Fer­réol aus­si fut mar­tyr), ce jeune homme qui aimait la vie et la sacri­fia sans hési­ter pour la foi et pour sau­ver une veuve, était très cher à Dieu. Dieu le prou­va en exau­çant les prières qui lui étaient faites. Les sol­dats Francs l’ai­maient, le véné­raient, comme un des patrons de l’ar­mée : n’é­tait-il pas de chez eux ? leur patron à eux ? On éle­va en son hon­neur plu­sieurs églises, à Brioude, à Brives, à Cler­mont, à Paris. Si vous entrez un jour à St-Julien-le-Pauvre à Paris, pen­sez à y faire une bonne prière pour les sol­dats Français !

Agnès GOLDIE.

Récits de martyrs pour les enfants du catéchisme

Per­mis d’imprimer : 

Ver­dun, le 6 avril 1952.

Max. HUARD, Vic. gén.


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