Étiquette : <span>Vaillance</span>

Auteur : Dulac, O. | Ouvrage : Et maintenant une histoire I .

Temps de lec­ture : 14 minutes

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Récit de bravoure par un jeune - La ville de Tizi-OuzouNiché au creux de la mon­tagne, Tizi-Ouzou som­meille. C’est l’heure de la sieste.

A l’ex­tré­mi­té de la bour­gade, tout près de la grande forêt, une ferme se dresse, habi­tée depuis plus de cent ans par la famille Ber­theau qui, à force de tra­vail, a réus­si à trans­for­mer la cabane de bran­chages du pre­mier de ses ancêtres en un domaine pros­père. Aus­si cette année, la famille a‑t-elle déci­dé de s’ac­cor­der quelques vacances. M. Ber­theau, sa femme, ses filles et ses trois jeunes gar­çons se sont embar­qués à Phi­lip­pe­ville pour la France où ils comptent res­ter un mois. Jean, le fils aîné, a deman­dé à res­ter pour gar­der le domaine. Éten­du sur une sorte de divan arabe, il som­meille ; mais un bruit sin­gu­lier tout à coup éveille son atten­tion ! Qu’est-ce ? On dirait le galop d’un che­val. Quel impru­dent peut oser voya­ger sous l’im­pla­cable soleil ? Jean court à la fenêtre. Lan­cé à toute allure, un che­val galope là-bas sur la piste. Un bur­nous rouge flotte au vent de la course : un spa­hi. Mais qu’arrive-t-il ?

Lorsque l’a­ni­mal par­vient à la hau­teur de la fenêtre où Jean se tient hale­tant, le cava­lier soli­taire perd l’é­qui­libre et roule à terre. Sa mon­ture s’ar­rête d’elle-même quelques pas plus loin et revient flai­rer son maître éten­du en tra­vers du chemin.

Jean a bon­di ; il se penche sur le sol­dat, le sou­lève, essaie de le rani­mer. Sa veste est rouge de sang. Une balle, entrée par le dos, a tra­ver­sé l’homme de part en part. Le bles­sé entr’ouvre les yeux :

Fidelité à la Mission - exemple pour la jeunesse« Por­ter pli Fort-Flat­ters, ordre du général… »

La fin est inin­tel­li­gible. Aidé d’un arabe, Jean le trans­porte à l’in­té­rieur de l’ha­bi­ta­tion. Est-il mort ? Non, un souffle imper­cep­tible passe encore entre ses dents ser­rées. Ses lèvres s’a­gitent et voi­ci que, sans ouvrir les yeux, il murmure :

  1. [1] Que nous ordonne le hui­tième commandement ?
    Le hui­tième com­man­de­ment nous ordonne de dire quand il le faut la véri­té, et d’interpréter en bien, autant que nous le pou­vons, les actions de notre pro­chain.
Auteur : Christiane | Ouvrage : Et maintenant une histoire I .

Temps de lec­ture : 6 minutes

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Faire son devoir d'état, comme Sainte Jeanne d'Arc - Enluminure Quenouille et FilageGene­viève, sa que­nouille tenue non­cha­lam­ment, lais­sait errer son regard par delà la grande plaine de Cham­pagne qui s’é­ten­dait au pied du châ­teau. Dieu, que c’é­tait donc ennuyeux de filer ain­si tout le jour tan­dis que les armées livraient bataille à l’en­ne­mi ! Un gros sou­pir, lourd de tous ses dési­rs, s’ex­ha­la des lèvres de Geneviève.

« Ah ! si je connais­sais Jeanne, j’i­rais la trou­ver et lui deman­de­rais de me prendre avec elle. »

Cette réflexion, pro­non­cée à voix haute, atti­ra sur la fillette, presque une jeune fille déjà, les regards de dame Eloïse, sa mère, qui, en face d’elle, était occu­pée à une bro­de­rie d’autel.

« Que feriez-vous à guer­royer avec les gens d’armes ? Vous ne savez pas mon­ter à che­val et le pre­mier bou­let vous ferait pous­ser de tels cris d’ef­froi que vous ne sau­riez res­ter dans la bataille. »

D’un geste orgueilleux, Gene­viève a rele­vé la tête :

« Pour­quoi alors Jeanne y reste-t-elle ?

— Jeanne, mon enfant, fut man­dée par Dieu pour déli­vrer le royaume.

— Eh bien ! pour­quoi ne le serais-je pas aussi ? »

Pour­quoi pas moi ? Voi­là ce qui reve­nait sans cesse à l’es­prit de Gene­viève ; et s’obs­ti­nant dans son rêve orgueilleux, elle for­mait des pro­jets insen­sés, n’é­cou­tant pas les sages conseils que dame Eloïse, ali­gnant ses points de bro­de­rie, lui prodiguait.

* * *

Histoire de Jeanne d'Arc - Jeanne d'Arc et le roi Charles VII à Reims

Dans la ville pavoi­sée, il y a grande ani­ma­tion : d’im­menses tapis recouvrent les dalles de la cathé­drale, les portes sont ten­dues de velours écar­late, cha­cun s’af­faire, pavoi­sant sa demeure pour faire digne accueil au Roi et à Jeanne, car

Auteur : Mariemy, Eli­sa­beth | Ouvrage : Et maintenant une histoire I .

Temps de lec­ture : 5 minutes

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Histoire de la maison en feu et du sauvetage du capitaine blesséNe pour­rais-tu pas me racon­ter encore com­ment tu es retour­né dans la mai­son en flammes, pour sau­ver ton chef qui allait mourir ? »

Rémy, sup­pliant, s’ac­croche à la manche de son aîné et insiste :

« Raconte encore ! Il était fort bles­sé à la tête le capi­taine, hein ? »

Le brouillard enve­loppe dou­ce­ment les deux frères, le jeune homme aux larges épaules et le petit gars à peine plus haut que les blés avant la moisson.

La terre mouillée colle à leurs semelles.

Ils vont, côte à côte, à pas lents, au bord d’un champ à demi labouré.

« Ça va, répond le grand Charles, sans quit­ter des yeux sa char­rue qui creuse un long sillon régu­lier der­rière Faraud, le che­val. Laisse-moi ! Dirait-on pas que j’ai fait une action extraordinaire ?

N’im­porte qui aurait ris­qué sa peau de bon cœur pour le capi­taine. Suf­fi­sait de le connaître…

Je l’ai rele­vé ; je l’ai empor­té avec un copain. Ben ! ça se devait. Puis, dans les coups durs — com­ment t’ex­pli­quer ? — y a je n’sais quoi qui vous tient… Enfin, je com­prends. Et la belle affaire d’être à moi­tié chic, pen­dant juste un quart d’heure, une fois ! Vois-tu, mon p’tit, du , c’est pas les grands jours qu’il en faut ; c’est du lun­di matin au same­di soir, et encore le dimanche avec ! A l’oc­ca­sion, même, on en a besoin pour des choses de rien du tout.

Je m’rap­pelle une his­toire qu’est arri­vée y a long­temps, je m’pré­pa­rais à ma Com­mu­nion solennelle…

Tu ne t’en sou­viens pas, de Angé­lique ? T’es trop jeune. T’a­vais trois ans quand elle a pas­sé, la pauv’femme.

Elle pre­nait déjà de l’âge, c’é­tait la sœur du grand-père.

| Ouvrage : Et maintenant une histoire I .

Temps de lec­ture : 6 minutes

Vaillance, devoir d’état.

Histoire pour illustrer Vaillance et Devoir d'état - Fjord en Norvège par Louis GurlittActive la navette, ma fille, et noue le chanvre et tire chaque maille, car il me faut un filet neuf. Vois mon grand bateau de pêche, il est prêt à labou­rer de sa carène d’or le pro­fond et pois­son­neux. J’ai dure­ment manié la hache pour abattre les grands sapins dans le champ gla­cé où des trou­peaux de rennes viennent brou­ter le lichen et l’é­corce tendre. Ah c’est un rude ouvrage, crois-moi, ma fille, de trans­for­mer le sapin blond, ce bois qui pleure à chaque coup, en un bateau dur à la vague, docile au vent et que ne mord pas la saumure.

Active la navette, ma fille, et noue le chanvre et tire et serre chaque maille, car il me faut un filet neuf. Mais je vou­drais un grand filet car, après Noël, je m’en vais pêcher avec ton frère Axel. Hâte-toi, ma fille, mets‑y tes dix doigts menus et déliés, tes yeux brillants comme givre, car j’ai besoin d’un filet fin. Mets‑y sur­tout ton cœur, ma Het­ta, c’est en effet un filet sans faille qu’il me faut. »

Récit pour les jeunes - Hetta faisant le filet de pêcheHet­ta fit donc un filet neuf. Elle y mit ses dix doigts… mais ses deux yeux pas bien sou­vent, car ils sui­virent, dis­traits, le vol argen­té des lents oiseaux émi­grants vers les îles.

Et son cœur, elle l’y mit moins encore. Il s’en­vo­lait, léger, au milieu des rêves qui fuyaient loin vers l’in­con­nu. Ain­si Het­ta glis­sa dans son ouvrage ce qui, jamais, n’y doit entrer. Elle y glis­sa, l’un par-des­sus l’autre, le Doute puis la Fraude.

« Pour­quoi tendre si fort le chanvre rêche ? Pour­quoi m’y écor­cher les mains ? Mon père veut-il du sang sur chaque nœud ? Sur mille et mille points de ma résille, qu’im­porte un petit fil qui baille ? Ce n’est pas pour un phoque ni pour une baleine, ni pour de bien gros pois­sons. Mon père ne pêche que le hareng ou le sprat ! Quel menu butin pour de tels efforts ! »

* * *

Un soir d’hiver,

Auteur : Dulac, O. | Ouvrage : Et maintenant une histoire I .

Temps de lec­ture : 11 minutes

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Dans l’a­te­lier de maître Guillot, le tailleur d’i­mages, règne une grande animation.

Echoppe du Moyen-Age à RouenC’est que ce jour-là, le pre­mier mai de l’an de grâce mil six cent trente, va avoir lieu, dans la demeure du brave ima­gier, l’é­lec­tion du maître de la ville de Rouen.

Une véri­table fièvre anime les concur­rents qui se hâtent, dans le secret de leur chambre, d’ap­por­ter à leur tra­vail le der­nier coup de ciseau ou de gouge.

A pré­sent, les sta­tues sont trans­por­tées dans la grande salle où, tout à l’heure, les notables vont s’assembler.

Maître Guillot compte les sta­tues dépo­sées sur les socles de bois blanc ran­gés autour de la chambre.

« Dix-neuf, vingt, vingt et un, vingt-deux, vingt-trois… Il en manque deux. Que font les retar­da­taires ? Il est vrai qu’ils ont jus­qu’à midi pour ter­mi­ner, mais ils devraient avoir fini. »

Cepen­dant, les deux jeunes artistes atten­dus ne perdent pas le temps qui leur reste. Cha­cun dans sa cel­lule se dépêche. Dans la pre­mière, à droite de l’es­ca­lier, se trouve un gar­çon d’une quin­zaine d’an­nées : Nico­las. Grand, bien décou­plé, gai com­pa­gnon, il a beau­coup de suc­cès dans les assem­blées où l’on rit et où l’on danse. Mais sa bonne humeur ne l’empêche pas d’être un franc paresseux.

Trop sou­vent, il délaisse l’é­choppe et le burin pour les courses au soleil et les assem­blées joyeuses. Le concours pour le titre de « Maître » l’a rame­né à l’a­te­lier. Au reste, son père lui a décla­ré tout net :

« Tu gagne­ras le titre ou je te ferai bûcheron. »

Et son père tient tou­jours parole.

Nico­las s’est donc mis bra­ve­ment à la tâche. Mais, hélas ! le dic­ton est bien vrai. Rien ne sert de cou­rir… Pen­dant ses longues périodes de paresse et d’i­nac­tion, il a per­du le tour de main ; le ciseau n’o­béit pas à sa volon­té et il en pleure de dépit.

Il avait rêvé d’exé­cu­ter (selon le sujet impo­sé) une Madone tenant dans ses bras l’En­fant nouvelet.

Quel beau sujet ! Il la voit, cette Madone. Mais com­bien est déce­vante la