Alors ? Votre voisin, l’pé Joseph, comment va-t-il, Madame Grincette ?
— Il baisse… il baisse… A mon avis, il baisse de plus en plus, ma pauvre amie… Je ne crois pas qu’il reprenne jamais son rabot, à moins que ce ne soit pour faire son propre cercueil !
— Le failli homme… Il ne laissera point de regrets… un mécréant… un mal commode…
— Jamais les pieds à l’église…
— Ah ! si… pardon, le jour de la saint Joseph… il allait mettre un bouquet de fleurs à la statue.
— Et vous croyez que le bon Dieu en était flatté ?… Qu’il ne Le priait seulement pas ! »
Tandis que, sur la place, les deux commères faisaient son procès, le père Joseph, seul, dans son fauteuil, soupirait. Une seule pièce lui servait à la fois de chambre, de cuisine et d’atelier… Le bois brut et les outils voisinaient avec les meubles, et cela faisait un bizarre décor.
Mais en vain le chêne et le sapin dégageaient-ils leur âcre parfum, le vieux menuisier n’avait plus la force de saisir son rabot pour les travailler.
Derrière la porte, invisible, le diable montait la garde. Pendant soixante ans, il avait réussi à tenir le bonhomme éloigné de l’Église ; il eût été cruel pour l’esprit malin que le père Joseph lui échappât à l’heure dernière.
***
Soudain, on frappa : toc… toc…
« Qui est la ? ›› s’inquiéta Satan.






Bernard a huit ans. C’est un robuste petit campagnard. Il a le teint hâlé, les joues rouges comme les pommes d’api, de grands yeux lumineux. Bien planté, l’air décidé, il se pose là. Comme tout le monde il a ses défauts et ses qualités. Heureusement, son petit cœur généreux sait trouver d’ingénieuses ressources pour réparer les déboires causés par son caractère entier et entêté, comme l’est celui de tout paysan qui se respecte.
