Catégorie : <span>Dardennes, Rose</span>

Auteur : Dardennes, Rose | Ouvrage : À l'ombre du clocher - 1. Les sacrements .

Temps de lec­ture : 4 minutes

Histoire d'une dispute entre deux amis ; le pardon et le sacrement de communionReine et Colette sont en brouille.

C’est arri­vé pour une bêtise : Reine vou­lait un livre ; Colette le dési­rait aus­si ; elles se sont cha­maillées. Reine a trai­té Colette de tri­cheuse ; Colette a giflé Reine ; puis elles se sont tour­né le dos en pro­cla­mant très haut que « jamais elles ne se recauseraient ».

Jac­que­line-la-douce a bien essayer d’ar­ran­ger l’af­faire. Mais elle s’est heur­tée à de sombres visages fer­més, aux regards fuyants et aux lèvres pincées.

– Elle m’a appe­lée « tri­cheuse » ! explo­sa Reine aux yeux fulgurants.

– Elle m’a giflée ! gro­gna Colette, renfrognée.

– Met­tons que vous êtes quitte, et faites la  !

Hélas ! Colette ne répon­dit rien et Reine déclara :

– Jamais !

Puis elle sor­tit en cla­quant la porte.

***

Cela dure depuis des semaines.

Au fond, elles sont très ennuyées, l’une et l’autre ; avant cette his­toire, elles étaient les meilleures amies du monde ; voi­sines, tou­jours ensemble. Main­te­nant, elles vont à l’é­cole à la queue leu leu ; le soir, Reine s’en va toute seule faire les com­mis­sions, et Colette s’en va toute seule cher­cher l’herbe pour les lapins…

Ce n’est pas gai !…

Non !

Mais Colette a dit qu’elle « ne 

Auteur : Dardennes, Rose | Ouvrage : Et maintenant une histoire II .

Temps de lec­ture : 8 minutes

récit d'enfants généreux - crecheQu’en penses-tu, Michel ?

– Qu’en dis-tu, Nicolas ?

– Parle aus­si, toi, Luc… »

Par­ler ?… Sou­vent, la chose est aisée aux trois gar­çons. Aujourd’­hui, elle leur semble ter­ri­ble­ment dif­fi­cile : ils vou­draient expri­mer des choses… des choses qui ne sont pas faciles à dire. Alors, ils se taisent ; ils réflé­chissent et concluent seulement :

« Il faut que ça finisse ! »

***

De mémoire d’homme, il y eût des frot­te­ments durs entre les Têtem­bois-de-la-ville et les Têtem­bois-de-la-terre. Ceux de la ville écla­bous­saient les cou­sins pay­sans de leurs toi­lettes et de leur argent, de leur fin par­ler, de leur confort et de leur mépris pour cette allure de rus­tauds endi­man­chés qu’ils pro­me­naient sur les trot­toirs de la ville, les jours de mar­ché. Ceux de la terre se moquaient un brin des cou­sins cita­dins qui ne dis­tin­guaient pas une poule d’un coq, et pour un peu de boue pous­saient des cris de pin­tade effa­rou­chée ; sur­tout, ils ne leur par­don­naient pas de comp­ter pour abê­tis­sant leur rude labeur, et de les tenir pour rustres, parce qu’ils n’a­vaient point appris à débi­ter joli­ment des inuti­li­tés et des men­te­ries. À chaque ren­contre, cela fai­sait des étin­celles ; aus­si, les ren­contres s’es­pa­cèrent de plus en plus : hier, on en était à l’é­change d’une carte au jour de l’an…

Mais le chô­mage sur­vint, et se com­pli­qua de la mala­die, chez les Têtem­bois-de-la-ville, qui se firent « tout miel » avec les Têtem­bois-de-la-terre : « Cou­sin par-ci… Cou­sine par-là… Com­ment allez-vous ?… Quelle joie de vous revoir !… Dites donc ?… le petit a besoin de grand air et de bonne nour­ri­ture ; nous avions pen­sé que, peut-être… »

Les Têtem­bois-de-la-terre sui­vaient le manège d’un œil amu­sé. Tiens ! tiens ! Ça sert donc à quelque chose, ces pay­sans ? On échan­gea des mots acides ; et cela finit très mal.

Mais Luc, Michel et Nico­las Têtem­bois-de-la-terre se demandent par quel bout cet esprit « revan­chard » peut bien s’ac­cor­der avec la Loi de Jésus qui dit de s’ai­mer tous comme des frères. Et, ne trou­vant vrai­ment pas, ils concluent :

« Il faut que ça finisse ! »

Mais com­ment faire finir « ça » ?

***

« Où donc sont les gamins ?

– Dans la chambre, à démé­na­ger la .

– Démé­na­ger la crèche ? C’est pas