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Auteur : Par un groupe de pères et de mères de familles | Ouvrage : Histoire Sainte illustrée .

Temps de lec­ture : 12 minutes

XVI

C’est le soir. De grands lis blancs montent jus­qu’à la baie lar­ge­ment ouverte près de laquelle Colette est encore éten­due. Leur par­fum péné­trant enva­hit l’at­mo­sphère et Colette songe, les yeux au loin vers l’ho­ri­zon. Elle a posé son livre sur ses genoux et contemple ravie le pay­sage, qu’une lueur rose, bleue, grise, enve­loppe lentement.

Dans cette paix silen­cieuse, la voix déso­lée de Maria­nick arrache Colette à sa pen­sée. Sûre­ment, les enfants font encore quelque bêtise !

Récit biblique pour les petits

La voix se rap­proche, Maria­nick appa­raît, main­te­nant d’un côté un Yamil qui cherche à lui glis­ser dans la main, et de l’autre une Nicole à figure fri­ponne, mi-colère, mi-regret.

— Beau gibier que je t’a­mène, Colette ! Nicole mange toutes les confi­tures. Il est grand temps qu’elle aille à l’é­cole trou­ver des maî­tresses qui lui en feront pas­ser le goût.

Quant à celui-là, vous pré­ten­dez qu’il sait sa reli­gion. Fau­drait qu’y nous dise laquelle. Pas la mienne, pour sûr. Ah ! ma Doué ! si c’est au caté­chisme qu’il apprend à faire « endê­ver » les gens !

Tiens, je m’en vais, j’ai trop envie de cogner des­sus. D’or­di­naire, ça n’est pas mon goût, pourtant !

Et Maria­nick tourne les talons, lais­sant les deux enfants penauds, devant Colette, qui les regarde sans l’ombre d’un sourire.

— Enfin, mes petits, com­ment se fait-il que vous ne ces­siez pas de faire des sottises ?

— Je vais te le dire, déclare impé­tueu­se­ment Nicole. C’est pas dif­fi­cile à com­prendre. Ici, la mai­son est très, très grande et maman est tout le temps occu­pée à mettre de l’ordre, et à tout espèce de choses. Alors, quand on a fini la classe, maman range dans les armoires et Bru­no et moi on est seuls, et Yamil appelle ; c’est amu­sant, tu sais. Pour­quoi que c’est tou­jours défen­du, quand c’est amusant ?

— Non, pas tou­jours… Je t’en repar­le­rai un de ces quatre matins. Pour l’ins­tant, j’ai une autre idée.

Dis-moi, Yamil, pen­dant com­bien de temps es-tu allé au catéchisme ?

— Un an.

— Tu as appris ton His­toire Sainte ?

— Un piti peu.

— Et tu serais content d’en apprendre davan­tage, avec la « petite dami­selle », comme tu dis ?

— Yamil très content.

— Alors, entends-moi bien, c’est sérieux. Chaque fois que Maria­nick me dira que tu l’as méri­té, tu vien­dras assis­ter à la leçon.

Yamil fait une gri­mace affreuse :

— Li Maria­nick jamais dire bien.

— Maria­nick dira la véri­té, Yamil, le reste te regarde.

Assieds-toi là sans bou­ger et écoute. Cela te don­ne­ra peut-être envie de reve­nir les autres jours et donc de le mériter.

— Mais, dit Nicole, on est trop loin dans l’His­toire Sainte. Il ne sau­ra pas le commencement.

— S’il est sage, je le lui appren­drai aus­si. Il peut tou­jours assis­ter à vos leçons. Tu vas voir comme celle d’au­jourd’­hui sera inté­res­sante. Seule­ment, je veux aus­si Bru­no. Appelle-le…

Les enfants ins­tal­lés, Yamil accrou­pi sur la natte, Colette commence :

— Ber­nard vous a racon­té l’His­toire des Juges, sauf celle des deux derniers.

Nicole, le nez au vent :

— Com­ment s’appelaient-ils ?

et . Héli était bon, mais très faible. Il n’o­sait pas châ­tier les pécheurs et per­met­tait à ses deux fils de mener une vie scandaleuse.

Il veillait cepen­dant avec soin sur un enfant que ses parents lui avaient confié, après l’a­voir voué au ser­vice du Seigneur.

Ce petit s’ap­pe­lait Samuel.

Bru­no ne com­prend pas.

— Qu’est-ce que ça veut dire : être voué au ser­vice du Seigneur ?

Auteur : Par un groupe de pères et de mères de familles | Ouvrage : Histoire Sainte illustrée .

Temps de lec­ture : 12 minutes

XV

La cha­leur devient intense, et Colette en souffre beaucoup.

Elle mai­grit, s’é­tiole. Autour d’elle on se pré­oc­cupe sans trop oser se le dire.

Un beau jour, le doc­teur arrive à l’im­pro­viste. Bour­ru, mais excellent ami, il entre comme chez lui et va direc­te­ment chez la malade.

— Ma petite dami­selle, comme dit votre Yamil, je vou­drais voir votre mère.

Colette, un peu éton­née, hèle Bru­no, qui, comme par hasard, déam­bule dans le ves­ti­bule, et l’en­voie à la recherche de maman.

Pauvre maman, elle accourt, déjà inquiète. Pour­quoi cette visite du docteur ?

Lui, l’ac­cueille en sou­riant avec malice, car il sait tout ce que pensent les mamans.

— Je n’ai pas l’air d’un por­teur de mau­vaises nou­velles, voyons, chère madame. Je crois, au contraire, vous en trans­mettre une bonne. Il est grand temps de me trans­por­ter cette petite fille hors de la zone de cha­leur qui com­mence à nous étouf­fer. Or j’ai un ami qui part avec toute sa famille pour la France et l’An­gle­terre. Six mois d’ab­sence, une grande mai­son à louer dans le Liban. Vos deux ménages peuvent y tenir. Les hommes ne seront pas loin de leurs affaires. Prix rai­son­nables et à débattre, parce qu’a­vant tout, nous vou­lons mettre là-dedans des gens sûrs.

Pré­ve­nez votre mari. Je l’at­tends ce soir pour conclure. Ça va ?

— Com­ment vou­lez-vous que ça n’aille pas, doc­teur, répond maman, dont le regard ému va du visage joyeux du méde­cin à la petite figure mince et pâlie de sa fille.

— C’est bon ! entendu !

Il fau­dra trans­por­ter le « colis » avec soin, pas de mou­ve­ments inutiles, et puis, j’i­rai vous voir là-bas.

Et le doc­teur dis­pa­raît comme il était venu. Quinze jours après, avec armes et bagages, toute la famille s’ins­talle en montagne.

Bru­no et Pierre pré­tendent imi­ter les dépla­ce­ments des Hébreux ; ils regrettent de ne pas avoir de tentes pour y cou­cher la nuit et ils essaient en vain de per­sua­der Maria­nick qu’elle doit faire la route à pied, en pous­sant ses trou­peaux devant elle, aidée de Yamil…

Les trou­peaux se com­posent d’un chat, de six poules et de cinq lapins, les­quels, bien mis en cage, par­viennent à la mai­son… hor­reur ! en automobile !

Dès le dimanche sui­vant, Ber­nard fait son appa­ri­tion, pour la jour­née. Il est enthou­sias­mé. Quel air léger,… quelle vue !

— Et tu as déjà moins pauvre figure, Colette. Attends un peu qu’on t’ins­talle bien, là, à l’ombre, avec tout cet hori­zon devant toi. Ça va jus­qu’en Pales­tine, ma parole !

— Jus­qu’en Pales­tine !… C’est un peu loin, mais tout de même c’est vaste et beau. D’i­ci, ce sera joli­ment plus facile de conti­nuer nos leçons aux petits.

— Mais cette fois, c’est moi qui racon­te­rai. Songe un peu, j’ar­rive de .

— Pas possible !

— Très pos­sible, au contraire, et j’en ai vu des sou­ve­nirs ! Nous étions un groupe d’a­via­teurs invi­tés aux manœuvres anglaises.

— Alors appelle les petits. Tu sais, ou plu­tôt tu ne sais pas, que nous avons tout dit, jus­qu’aux Juges.

— Jus­qu’à  ?

— Exac­te­ment.

— Alors ça va barder !

Ce bel entrain met de la lumière dans les yeux de Colette et sub­jugue les enfants accou­rus à l’appel.

— Regar­dez un peu, de ce côté, loin, très loin dans la direc­tion du sud. Là-bas, par der­rière la ligne d’ho­ri­zon, c’est la Terre pro­mise aux Hébreux.

Nicole et Bru­no font un effort magni­fique pour réa­li­ser cette chose éton­nante. Ils ouvrent des yeux énormes et croient voir les tentes du camp.

Josué et les israélites traversent le Jourdain avec l'Arche d'Alliance