Saint Gatien

| Ouvrage : La revue des saints .

Temps de lec­ture : 16 minutes

Premier évêque de Tours (Ier ou IIIe s.).

Fête le 18 décembre.

L’ANCIENNE tra­di­tion de l’É­glise de Tours pla­çait au temps des Apôtres l’ar­ri­vée sur les bords du Liger, la Loire d’au­jourd’­hui, du saint évêque Gatien, pré­sen­té comme l’un des ber­gers de Beth­léem qui reçurent des anges la bonne nou­velle de la nais­sance du Sau­veur. Au contraire, cer­tains auteurs font vivre le saint mis­sion­naire au Ie siècle, de 250 à 301 ; ils lui donnent pour suc­ces­seurs, en 337 ou 340, saint Lidoire (+371), puis en 371 l’illustre saint Mar­tin, à par­tir de qui l’his­toire apporte des pré­ci­sions incon­tes­tées. Telle semble être, au XXe siècle, l’o­pi­nion d’un his­to­rio­graphe du dio­cèse de Tours qui a pré­fé­ré ne remon­ter qu’au pon­ti­fi­cat de saint Mar­tin ; c’est du moins ain­si que nous inter­pré­tons la décla­ra­tion suivante :

La chré­tien­té de notre région avait été assez forte pour se main­te­nir pen­dant trente-trois ans envi­ron sous la per­sé­cu­tion et mal­gré la vacance du siège épis­co­pal ; cela prouve que saint Gatien avait lais­sé à sa mort un cler­gé rela­ti­ve­ment consi­dé­rable qu’il avait formé.

Prédication de saint Gatien.

Maté­riel­le­ment flo­ris­sant sous le gou­ver­ne­ment des Romains, le pays des Turo­nenses, la Tou­raine actuelle, dont la capi­tale, Tours, s’ap­pe­lait alors Cae­sa­ro­du­num Turo­nen­sium, était plon­gé dans les ténèbres de l’i­do­lâ­trie, joi­gnant à la pra­tique des super­sti­tions les plus abo­mi­nables des habi­tudes féroces d’une sau­vage bar­ba­rie. Les regards du nou­vel apôtre ren­con­traient par­tout les images des faux dieux, qui peu­plaient la ville, les cam­pagnes, les col­lines, les mai­sons par­ti­cu­lières et les édi­fices publics.

Gatien se mit à l’œuvre. Dans des ins­truc­tions fami­lières, il com­men­ça par mon­trer l’i­na­ni­té des idoles, leur fai­blesse et leur impuissance.

Quand il eut dis­si­pé les erreurs les plus gros­sières, amoin­dri l’es­time des vaines céré­mo­nies dans l’es­prit des Turones, il leur pré­sen­ta les véri­tés de l’É­van­gile ; il leur par­la d’un seul Dieu, créa­teur du ciel et de la terre, il leur décou­vrit le mys­tère de la Sainte Tri­ni­té, il leur fit com­prendre la néces­si­té de l’In­car­na­tion du Verbe. Il célé­bra les gran­deurs de la Vierge Marie, et la leur pré­sen­ta comme une Mère pleine de bon­té et de miséricorde.

La parole de l’a­pôtre ne tar­da pas à faire des conquêtes. Mais les pas­sions ont l’o­reille dure et le démon est furieux quand on veut lui arra­cher ses vic­times. Aus­si le mes­sa­ger de l’É­van­gile recueille-t-il sou­vent les mépris des riches et des grands et la haine de la popu­lace ignorante.

L’espoir du martyre.

Gatien, ferme et cou­ra­geux au milieu de l’o­rage, se voit trai­té comme un espion, comme un vio­la­teur public des lois du pays. On le sai­sit alors, et on l’en­traîne pour le faire mou­rir ou du moins le chas­ser de la contrée, après l’a­voir rude­ment fla­gel­lé. Mais les infi­dèles ne purent exé­cu­ter leur inique des­sein. Les dis­ciples du Christ étaient déjà nom­breux, et ils sau­vèrent le pon­tife. « Cet homme, dirent-ils à leurs com­pa­triotes, rend ser­vice à la ville par les gué­ri­sons qu’il y opère sur toutes sortes de mala­dies, et ses mœurs sont excellentes. »

Ces obser­va­tions pro­dui­sirent le meilleur effet : le peuple s’a­pai­sa et lais­sa l’é­vêque en repos. Gatien pour­sui­vit son œuvre avec ardeur. Sa vie, plus angé­lique qu’­hu­maine, lui atti­rait un grand nombre de dis­ciples ; et ceux qui ne vou­laient pas se rendre à sa parole se lais­saient sou­vent tou­cher par ses miracles.

Dans la solitude.

Mais la paix n’é­tait jamais que pas­sa­gère. Les païens s’ir­ri­taient sou­vent des conver­sions qu’o­pé­rait le pon­tife, et sou­le­vaient de vio­lentes per­sé­cu­tions contre les dis­ciples de Jésus-Christ.

Gatien se reti­rait alors dans la soli­tude pour se sous­traire aux outrages dont les hommes puis­sants du pays vou­laient l’ac­ca­bler. Ses enfants spi­ri­tuels le sui­vaient, et le Bien­heu­reux célé­brait en secret les saints mys­tères dans les grottes et les cryptes.

D’a­près un auteur du XIIIe siècle, l’o­ra­toire du pre­mier évêque de Tours se trou­vait au lieu où l’on éle­va plus tard la célèbre abbaye de Mar­mou­tier. Aux pre­miers siècles de l’ère chré­tienne, cet asile n’é­tait pas d’un abord facile. Les ronces et les épines en obs­truaient l’u­nique che­min. Le pon­tife creu­sa dans le roc, de ses propres mains, une grotte, dont il fit un sanc­tuaire qu’il dédia à la glo­rieuse Vierge Marie. C’é­tait là qu’il venait pas­ser de longues heures en prière, après ses courses apos­to­liques, et qu’il se réfu­giait au temps des persécutions.

Quelques chré­tiens venaient par­ta­ger sa soli­tude et ses entre­tiens ; et, pour ne plus se mêler aux souillures des rites pro­fanes des infi­dèles, ils se creu­sèrent à proxi­mi­té des retraites cachées. Ils se réunis­saient dans le sanc­tuaire de Marie, à l’heure de la prière ; ils y assis­taient au saint sacri­fice de la messe, puis cha­cun d’eux rega­gnait sa grotte pour vaquer à la lec­ture, à la médi­ta­tion ; et, pour rendre leur corps obéis­sant à l’âme, ils l’as­su­jet­tis­saient par la péni­tence et la mortification.

Au XVIIe siècle, le prieu­ré de la Bien­heu­reuse Marie des Sept Dor­mants, ren­fer­mé dans l’en­clos du monas­tère de Mar­mou­tier, pas­sait pour être le sanc­tuaire dédié par Gatien à la Mère de Dieu. 

Un cimetière chrétien.

Quand la per­sé­cu­tion se ralen­tis­sait, le pon­tife quit­tait sa soli­tude et opé­rait de nou­velles conver­sions, de sorte que le nombre des fidèles crois­sait de jour en jour.

Gatien acqué­rait en même temps par ses miracles et ses ver­tus une grande auto­ri­té et obte­nait l’es­time de tous les habi­tants du pays. Grâce à son influence, on voyait dimi­nuer peu à peu les images des divi­ni­tés païennes. Les temples des idoles étaient ren­ver­sés çà et là ; et le saint apôtre pou­vait éle­ver des autels au vrai Dieu. Les édits impé­riaux défen­daient aux chré­tiens d’en­ter­rer leurs morts dans les villes. Gatien ache­ta, dans un des fau­bourgs de la cité de Tours, un ter­rain pour en faire un cime­tière et y dépo­ser les restes de ses enfants.

C’est auprès de ces tombes que le pon­tife aimait à ras­sem­bler son peuple. C’est là que, le dimanche, il célé­brait les saints mys­tères, trans­met­tait ses ins­truc­tions aux fidèles, et for­ti­fiait leur cœur par sa parole et ses exemples. C’est là qu’il leur dis­tri­buait le pain de vie, ini­tiait les caté­chu­mènes aux véri­tés sublimes de la foi, leur ensei­gnait les pra­tiques de la vie chré­tienne, les fami­lia­ri­sait avec les céré­mo­nies du culte, et leur appre­nait à chan­ter les louanges de Dieu par des can­tiques sacrés.

On affirme que sur ce cime­tière chré­tien Gatien éle­va même une sorte de Sémi­naire, et que de jeunes clercs se for­maient à son école, à qui il ensei­gnait les devoirs de leur état, et qu’il pré­pa­rait soi­gneu­se­ment au sacer­doce pour les ordon­ner ensuite. Nous devons dire tou­te­fois que, en 1911, l’ar­che­vêque de Tours écri­vait de saint Mar­tin qu’à ce der­nier sont dus « la pre­mière école et le pre­mier Sémi­naire qu’ait sans doute vus la Gaule ».

For­ti­fié par le secours du ciel et entou­ré d’une foule de croyants, le pon­tife éle­va jus­qu’à huit églises sur le ter­ri­toire de la Tou­raine. La sep­tième fut, dit-on, nom­mée Sep­ti­mia ou Sepmes, et la hui­tième Oximæ ou Huisme toutes les deux sub­sistent encore aujourd’hui.

Apparition de Notre-Seigneur. — Bienheureuse mort.

Les tra­vaux apos­to­liques du mis­sion­naire ne l’empêchaient pas de se livrer à de grandes aus­té­ri­tés. Il exté­nuait son corps par les jeûnes et par les veilles. Mar­tyr par la volon­té, il se pré­pa­rait par ses œuvres à la gloire pro­mise aux martyrs.

Gatien, comme tous les vrais dis­ciples de Jésus-Christ, ché­ris­sait les pauvres et sa cha­ri­té se plai­sait à sou­la­ger leurs misères. On rap­porte qu’il fit bâtir, dans le fau­bourg de la cité des Turones, un hôpi­tal pour y rece­voir les indi­gents. C’est dans cet asile de la cha­ri­té que Notre-Sei­gneur Jésus-Christ réser­vait à son fidèle ser­vi­teur une grâce extra­or­di­naire. L’a­pôtre tra­vaillait depuis près de cin­quante ans dans la vigne du Maître et culti­vait avec soin le sol de la Tou­raine. Ses sueurs, en arro­sant la terre, l’a­vaient ren­due féconde, et Gatien était deve­nu le père d’un peuple nombreux.

Un jour, acca­blé de fatigue et de vieillesse, il s’é­tait reti­ré dans l’hô­pi­tal des pauvres, et il pre­nait un peu de repos sur sa couche, lorsque, sou­dain, un léger som­meil se répand dans ses membres et Notre-Sei­gneur lui apparaît :

« Ne crains rien, mon bien-aimé, lui dit Jésus, tu seras bien­tôt cou­ron­né dans la gloire avec tes cohé­ri­tiers et les habi­tants du para­dis. La patrie céleste te réclame, en effet, et l’a­gréable socié­té des Saints attend ton arrivée. »

Le divin Maître réveilla alors son dis­ciple. Il lui admi­nis­tra lui-même la sainte Com­mu­nion en viatique.

La mala­die ne se fit pas attendre ; Gatien en res­sen­tit bien­tôt les pre­mières atteintes ; et après sept jours de souf­frances, il ren­dit son âme bien­heu­reuse qui s’en­vo­la au sein du paradis.

Dévotion de saint Martin envers saint Gatien.

Les restes du pon­tife furent dépo­sés dans le cime­tière com­mun des pauvres, où s’é­le­vait l’é­glise de Sainte-Marie la Pau­vrette, que les fidèles appe­lèrent plus tard Notre-Dame la Riche, à cause du tré­sor qu’elle possédait.

Après la mort de saint Gatien, l’É­glise de Tours res­ta assez long­temps pri­vée d’un pas­teur, et sans doute les mau­vaises herbes avaient enva­hi assez rapi­de­ment le champ culti­vé par le zélé mis­sion­naire, car, dit l’é­cri­vain Sul­pice Sévère, « avant Mar­tin, très peu ou plu­tôt, pour ain­si dire, aucun des habi­tants de ces régions n’a­vaient enten­du le nom du Christ ; aus­si le saint évêque déplo­rait-il avec gémis­se­ment l’é­tat de cette mul­ti­tude qui n’a­vait aucune connais­sance de son Maître et Sau­veur ». De fait, les païens, rele­vant la tête, avaient recom­men­cé leurs per­sé­cu­tions contre les chré­tiens, ils les obli­geaient à célé­brer les saints mys­tères dans les retraites les plus cachées, et quand ils les décou­vraient, ils les acca­blaient de coups ou leur tran­chaient la tête.

C’est grâce à une révé­la­tion que saint Mar­tin connut l’en­droit pré­cis où se trou­vaient les reliques du véné­rable pon­tife. Aus­si, toutes les fois que le grand apôtre des Gaules ren­trait de ses courses apos­to­liques, s’empressait-il d’al­ler se pros­ter­ner sur la tombe de son pré­dé­ces­seur et de récla­mer son inter­ces­sion. Or, l’an­cienne litur­gie de l’É­glise de Tours raconte qu’un jour où saint Mar­tin deman­dait, selon son usage, la béné­dic­tion de son patron, une voix mys­té­rieuse, sor­tie du tom­beau, lui don­na, sous forme de béné­dic­tion, l’ordre de trans­por­ter le corps à la grande église. Mar­tin obéit et trans­fé­ra les reliques dans la basi­lique de Saint-Lidoire, rem­pla­cée aujourd’­hui par Notre-Dame la Riche. 

À par­tir de ce moment, la dévo­tion du peuple de Tou­raine pour son pre­mier évêque aug­men­ta de jour en jour ; et saint Gré­goire de Tours, au VIe siècle, parle de saint Gatien, en plu­sieurs endroits de ses ouvrages, avec une grande vénération.

Pérégrinations des reliques de saint Gatien.

Lorsque les Bar­bares du Nord enva­hirent la Gaule et semèrent par­tout le meurtre, le pillage et l’in­cen­die, les fidèles de Tours enle­vèrent de son tom­beau les reliques de saint Gatien, Pour les sous­traire aux injures des Nor­mands, ils les envoyèrent en Poi­tou, à Maillé ou Mal­lia­cum. Mais ce ne fut que momen­ta­né ; on les retrouve ensuite dans le monas­tère de Saint-Prix, à Béthune, dans la Gaule-Bel­gique, et enfin à l’ab­baye de Saint-Waast, à Arras ; elles y res­tèrent jus­qu’à l’é­poque de la conver­sion des Normands.

L’É­glise de Tours vit alors reve­nir son plus cher tré­sor. On lais­sa cepen­dant à Arras et dans les autres lieux où le corps de saint Gatien avait été dépo­sé pen­dant les inva­sions une par­tie de ses reliques, de sorte que plu­sieurs sanc­tuaires, en sou­ve­nir de cette faveur, furent pla­cés sous son vocable.

Vers le milieu du XIIIe siècle, le corps fut dépo­sé dans la cathé­drale de Tours. Il était ren­fer­mé dans une châsse d’argent doré, ornée de pierres pré­cieuses, qui fut d’a­bord pla­cée der­rière le grand autel. Plus tard, elle fut mise à côté du même autel, au milieu des reliques des saints Lidoire, Bénigne, Béat, Can­dide et Arnoul. 

Un arche­vêque de Tours, Juhel de Man­te­flon, éta­blit la fête de la trans­la­tion solen­nelle de saint Gatien le 2 mai, et ordon­na de dis­tri­buer aux confrères qui la célé­bre­raient des cor­beilles pleines de viande et de fruits, à por­tions égales.

Il s’é­tait donc for­mé une confré­rie en l’hon­neur du saint évêque. Elle fut éri­gée à la cathé­drale avec messe quo­ti­dienne. Le concours empres­sé du peuple à venir assis­ter à cette messe, célé­brée en pré­sence du corps de saint Gatien, fit don­ner à l’é­glise métro­po­li­taine le nom du Saint à la place de celui de Saint-Mau­rice, qu’elle por­tait autrefois.

Miracles.

C’é­tait en 1368, sous le règne de Charles V. Des bri­gands venus d’An­gle­terre et de Gas­cogne se jetèrent sur la Tou­raine et pillèrent le châ­teau de Gou­le­ry, où ils enfer­mèrent un pauvre Tou­ran­geau dans une cave pro­fonde. Le mal­heu­reux y res­ta onze semaines. Or, la veille de la fête de saint Gatien, il se sou­vint des nom­breux bien­faits que le patron de son pays accor­dait à ceux qui l’in­vo­quaient. Il implore à son tour l’as­sis­tance du saint évêque et incon­ti­nent retrouve tant de force qu’il fran­chit sans dif­fi­cul­té le mur, repousse une cuve qui couvre la fosse, par­court les rues de la ville, et par­vient à Tours, où il s’empresse de rendre ses actions de grâces au Saint.

Saint Mar­tin, par révé­la­tion, inven­ta le corps de saint Gatien
Cha­pelle Saint-Michel. Robert Mal­nou­ry. Couvent des Ursu­lines
Notre-Dame-de‑l’Assomption. Tours. XVIIe.

Ces mêmes bri­gands s’emparèrent du fils d’un pauvre homme de Bour­gueil, qui condui­sait au mar­ché six pièces de drap char­gées sur une bête de somme. Le mal­heu­reux père, infor­mé de cette perte cruelle, se recom­man­da à saint Gatien, et il eut bien­tôt la joie de retrou­ver mira­cu­leu­se­ment son fils, sa bête et ses pièces de drap. Les Anglais avaient péné­tré de force dans la mai­son d’un labou­reur pour prendre ses bœufs et ses autres ani­maux. Le pay­san, effrayé, se cache, implore la pro­tec­tion du bien­heu­reux Gatien, et les enva­his­seurs ne peuvent rien emme­ner. En sor­tant de la mai­son, ils pour­suivent le frère du labou­reur. Celui-ci se voue au saint évêque, passe au milieu des sol­dats enne­mis, échappe à tout dan­ger, et raconte le miracle à son frère. Tous deux se rendent à la cathé­drale de Tours pour remer­cier le Saint de sa pro­tec­tion toute-puissante.

Pen­dant la cap­ti­vi­té du roi Jean le Bon, la reine-mère s’é­tait ren­due à Tours pour offrir ses vœux à saint Gatien, et elle recon­nut plus tard qu’elle devait au bien­heu­reux évêque la déli­vrance du roi,

Sous Charles VI, les Anglais étant venus assié­ger la ville de Tours, les habi­tants, effrayés, recourent à saint Gatien, pro­met­tant de lui offrir, selon une cou­tume que nous retrou­vons ailleurs, à Arras par exemple, une quan­ti­té de cire suf­fi­sante pour faire une « chan­delle » ou un cierge capable d’en­tou­rer les murs de la ville. À peine ont-ils accom­pli ce vœu que la paix est conclue entre la France et l’Angleterre.

Il existe encore aujourd’­hui, près de l’é­glise de Notre-Dame la Riche, une petite cha­pelle appe­lée « Caveau de saint Gatien ». Ce serait, selon les uns, la crypte où le pon­tife célé­brait les saints mys­tères ; selon d’autres, sa tombe même. En effet, la dévo­tion des fidèles y fit éle­ver une pyra­mide qui porte, à l’une de ses faces, cette ins­crip­tion : Icy — ont été les reliques — et le tom­beau — du glo­rieux saint Gatien — apôtre de Touraine.

Au XVIe siècle, l’hé­ré­sie des ico­no­clastes sem­bla renaître avec les par­ti­sans de Cal­vin, qui bri­saient les images des Saints, brû­laient leurs reliques et en jetaient les cendres au vent. La capi­tale de la Tou­raine ne fut pas épar­gnée. Les cal­vi­nistes, maîtres de la ville, en 1562, pro­fa­nèrent la cathé­drale et brû­lèrent le corps de saint Gatien dans des four­neaux, où ils firent fondre en même temps les objets d’or et d’argent qu’ils avaient enle­vés aux dif­fé­rentes églises de la ville.

On sau­va cepen­dant quelques par­celles des restes véné­rés du pon­tife, grâce au cou­rage et à la pieuse dévo­tion des fidèles de la paroisse Notre-Dame la Riche.

De nou­veaux miracles atti­rèrent les foules autour des reliques du Saint ; et, vers la fin du XVIIIe siècle, de riches orne­ments sur­mon­taient le tom­beau de saint Gatien. Aus­si le Conseil géné­ral du nou­veau dépar­te­ment d’Indre-et-Loire vou­lant, disait-il, faire triom­pher la cause de la phi­lo­so­phie, de la rai­son et de la liber­té, ordon­na-t-il de dépouiller les églises de tous les objets de valeur. Les orne­ments qui déco­raient le tom­beau de saint Gatien étaient éva­lués à plus de 200 000 livres.

Les révo­lu­tion­naires s’é­taient flat­tés de mettre la main sur de riches tré­sors ; ils furent devan­cés par d’autres bri­gands, qui s’emparèrent, pen­dant la nuit, des plus belles pièces de la déco­ra­tion, dont une dou­zaine de sta­tuettes en argent ou en or massif.

Après la Révolution.

Les fureurs et les impié­tés de la Révo­lu­tion ne purent effa­cer de la mémoire des Tou­ran­geaux le sou­ve­nir des bien­faits obte­nus par l’in­ter­ces­sion de saint Gatien. Aus­si les arche­vêques de Tours cher­chèrent-ils de bonne heure à ravi­ver le culte de leur saint prédécesseur.

En 1827, Mgr de Mont­blanc deman­da à l’é­glise Saint-Waast, d’Ar­ras, une por­tion des reliques de saint Gatien. Sa demande fut accueillie, et l’on trans­fé­ra solen­nel­le­ment ces restes pré­cieux dans l’é­glise métro­po­li­taine de la Tou­raine, où ils sont expo­sés publi­que­ment à la véné­ra­tion des fidèles.

Saint Gatien est spé­cia­le­ment invo­qué pour retrou­ver les choses domes­tiques per­dues ou dérobées.

A. L.

Sources consul­tées. — Cha­noine MARCAULT, His­toire du dio­cèse de Tours, t. I (Tours). — Mgr PAUL GUÉRIN, Les Petits Bol­lan­distes, t. XIV (Paris, 1897). (V. S. B. P., n° 305.)

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