Pourquoi Suzette avait-elle envie de faire une culbute ?

Auteur : Diethelm, P. Walther | Ouvrage : Le plus beau cadeau .

Temps de lec­ture : 9 minutes

La vie était tou­jours très gaie dans la famille Dumas. Cela ne peut être autre­ment dans une mai­son où habitent quatre enfants, tous en bonne san­té. Léon, qui était en cin­quième classe, aimait à sif­fler, ou à crier. Suzette, fillette de dix ans, sau­tait et chan­tait toute la jour­née. Et les deux autres, les petits, un frère de deux ans et une sœur de cinq semaines, fai­saient du bruit aus­si, à leur façon.

* * *

Histoire pour le KT : Ignacio Pinazo - Petite fille lisantUn jour tout se trou­va calme dans la mai­son, bien que, per­sonne ne man­quât. Y avait-il quel­qu’un de malade ? Pas pré­ci­sé­ment, mais depuis quelques jours déjà, Léon était de mau­vaise humeur ; il avait mal aux dents. Depuis hier, il avait une joue enflée, et son humeur allait de mal en pis. On n’au­rait su dire ce qui le tour­men­tait le plus : ses dents, ou ce que sa maman avait ordon­né : aller chez le den­tiste. Ah ! on n’aime pas y aller, chez le dentiste !

Mais Suzette, pour­quoi était-elle pen­chée sur son livre, toute silen­cieuse ? Il y avait sûre­ment quelque chose qui n’al­lait pas. Elle n’é­tait pas à son affaire. Dis­traite, elle regar­dait tou­jours la même page, sans pour­tant la lire. Était-ce com­pas­sion envers son frère ? — Avait-elle mal, elle aussi ?

Oui, Suzette avait mal ; pas aux dents. Suzette avait mal dans son cœur, qui bat­tait fort et drô­le­ment, sur­tout le soir, quand elle ne pou­vait pas dor­mir. Suzette avait peur de la .

Vous êtes éton­nés, mes enfants, n’est-ce pas ! Pour­quoi avoir peur de la confes­sion ! Ce n’est pas une chose si ter­rible ! Aus­si, Suzette n’en avait-elle pas eu peur non plus, la pre­mière fois. A l’ap­proche de Noël, elle avait comp­té les jours, non seule­ment à cause des cadeaux qu’elle rece­vrait, mais parce qu’elle pour­rait aller se confes­ser pour la pre­mière fois. Non, pour la pre­mière confes­sion elle n’a­vait pas eu peur, au contraire, elle s’é­tait réjouie !

Mais, cette deuxième confes­sion, elle la crai­gnait ! Ces jours der­niers, M. le Curé avait dit : « Mes enfants, la semaine pro­chaine vous pou­vez de nou­veau vous confes­ser. Vous le ferez aus­si bien que la pre­mière fois ». Alors, Suzette effrayée avait tenu les deux mains sur son cœur, qui parais­sait vou­loir sau­ter, tel­le­ment il bat­tait vite et fort.

Pauvre Suzette ! Qu’as-tu fait ? — L’en­fant avait é ! — En fai­sant des com­mis­sions pour maman, elle avait gar­dé quatre sous pour elle. Pen­dant quelques jours, elle les avait cachés dans un tiroir, se deman­dant si maman les décou­vri­rait. Puis elle s’en était allée ache­ter des bonbons.

Comme elle avait honte main­te­nant ! Elle avait honte d’elle-même, devant Jésus, si bon ! Elle aurait vou­lu faire n’im­porte quoi pour lui faire plai­sir, en pré­pa­ra­tion à sa pre­mière com­mu­nion. Elle avait aus­si peur de maman. Elle l’é­vi­tait. Si le grand frère n’a­vait pas eu mal aux dents, maman aurait remar­qué depuis long­temps que quelque chose n’é­tait pas en ordre chez sa petite.

Suzette enviait presque le grand frère. Lui pou­vait aller chez le den­tiste avec maman. Si elle pou­vait faire la même chose, ouvrir la bouche, que tout soit pas­sé et le péché enle­vé ! Ce serait beau ! Elle aurait bien vou­lu avoir un peu mal pour être de nou­veau heu­reuse et en paix.

Une heure à peine s’é­tait écou­lée, Léon était de retour avec sa maman. La vilaine dent avait été enle­vée ; triom­phant, Léon la mon­trait à tout venant. Il avait retrou­vé sa bonne humeur. Pen­dant le sou­per, il se van­ta un peu de sa vaillance croyant être un héros. « Je n’eus qu’à ouvrir la bouche toute grande, racon­tait-il, et d’un coup, le den­tiste m’en­le­va la dent, sans me faire trop mal. »

« Quand notre Léon aura de nou­veau mal aux dents, il ira chez le den­tiste beau­coup plus tôt », ajou­ta maman. Et Léon approuva.

* * *

Au jour si appré­hen­dé de la confes­sion, les enfants se pré­pa­raient à rece­voir le sacre­ment de péni­tence. Les uns cachaient leur visage dans les mains pour trou­ver leurs péchés sans être déran­gés, les autres lisaient dans leur livre ; Suzette, éner­vée, fai­sait tan­tôt l’un, tan­tôt l’autre. Elle était encore tour­men­tée par la peur. Une voix lui disait : « Ne le dis pas ! Toi, la pre­mière de ta classe ! Tu ne peux confes­ser une chose pareille. Que pen­se­rait de toi M. le Curé ? »

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Ce n’é­tait pas une bonne voix, ni un bon conseil. Il n’y a que le diable qui puisse par­ler ain­si. Il envie les hommes qui peuvent se confes­ser, car lui-même n’a pu le faire, il a été immé­dia­te­ment condam­né à l’en­fer à cause de sa faute. Comme il est faux quand il conseille les hommes ! Avant le péché il dit : « Fais cela ! Ce n’est pas si grave ! Ceux-ci ou ceux-là le font aus­si ! Et puis, tu peux t’en confes­ser après. Qu’est-ce que cela fait ! » Mais quand le péché est com­mis, il fait voir la faute si grave, et en fait un tel far­deau, qu’on n’ose pas l’ap­por­ter au confessionnal.

Suzette enten­dait aus­si une autre voix, celle qui lui vou­lait du bien : « Dis-le tran­quille­ment. Oui, dis-le en pre­mier, pour que le pire soit pas­sé. Ce sera comme avec Léon chez le den­tiste, et tu seras si contente après. »

C’é­tait l’ qui par­lait ain­si. Il aurait aimé veiller de nou­veau sur une bonne enfant. Cette même voix rap­pe­lait à Suzette les paroles enten­dues au ser­mon : « Si on à peur de quelque chose, if faut agir comme un petit enfant, qui, dans tous les dan­gers, court auprès de sa maman et se cram­ponne à elle jus­qu’à ce que le dan­ger soit pas­sé. C’est ain­si que nous, pauvres pécheurs, nous devrions aller à la Sainte Vierge et nous tenir for­te­ment a elle. »

Toutes ces idées trot­taient dans la tête de Suzette. Elle jeta un long regard confiant sur la sta­tue de la Sainte Vierge qui se trou­vait tout près. Elle regar­da encore uns fois la Vierge avant d’en­trer au confessionnal.

Tout se pas­sa très bien ! Suzette connais­sait depuis, long­temps la bon­té de M. le Curé, mais jamais elle ne l’a­vait sen­tie autant qu’au moment où il lui dit : « Ce vol t’a fait beau­coup de cha­grin, n’est-ce pas, mon enfant ? C’est pour­quoi tu l’as confes­sé au com­men­ce­ment. Le bon Dieu a vu ta contri­tion, il te par­donne. Il a plai­sir que tu aies confes­sé ta faute si fran­che­ment. Voler de l’argent ce n’est pas beau ; tu vas répa­rer ce vilain péché en étant très gen­tille à la mai­son. Ce n’est pas un péché grave, mais tu feras atten­tion que cela n’ar­rive plus. Le cœur pur d’un enfant doit être comme une belle église pour Jésus ».

Ces bonnes paroles de M. le Curé, Suzette ne les a plus oubliées. Plus tard, elle a tout racon­té à sa maman.

* * *

Suzette courantComme elle était gaie, Suzette en ren­trant à la mai­son ! Le soleil riait, Suzette riait et Fre­di, le voi­sin, riait aus­si. Car lui aus­si s’é­tait confes­sé, et il avait l’air d’en être heu­reux. Au milieu de che­min, il fît une grande culbute qui amu­sa beau­coup Suzette. Elle eut envie d’en faire autant Mais, les fillettes ne peuvent pas tou­jours faire ce que font les gar­çons ! Pour la pre­mière fois, Suzette regret­ta de ne pas être un garçon.

Le soir, en allant se cou­cher, Suzette était encore toute radieuse. Quand sa maman se pen­cha sur elle pour lui dire bonne nuit, elle l’en­tou­ra bien fort de ses deux bras, l’at­ti­ra vers elle, et, tout émue, lui avoua son vol. Les quatre sous appar­te­naient à maman, et Suzette n’a­vait pas d’argent pour les restituer.

L’en­fant savait que c’é­tait bien de se don­ner soi-même encore une péni­tence après la confes­sion ; voi­là pour­quoi elle s’é­tait impo­sée d’a­vouer son vol à sa maman,

A cet aveu, la maman parut d’a­bord contra­riée ; sa fillette serait une voleuse ? … Elle aurait pris de l’argent ? … Non, ce n’est pas pos­sible ! Mais quand elle vit le repen­tir de son enfant, elle ne put s’empêcher de la regar­der avec amour et de lui par­don­ner. Elle savait que son enfant ne com­met­trait plus jamais cette vilaine action.

Comme sa maman la ser­rait sur son cœur, Suzette com­prit qu’elle lui par­don­nait, comme Jésus l’a­vait fait dans la confession.

Mère et fillette - CARO-DELVAILLE Henri

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