La rumeur s’est répandue aux quatre coins du monde. Et là, je suis intrigué par mon maître que je trouve de plus en plus agité. En fait, il n’y tient plus depuis qu’il a repéré cette étoile nouvelle, plus grande et plus brillante que les autres. Et le voilà tout impatient de prendre la route pour, d’abord, rejoindre Melchior et Gaspard. Les mages !
Oui mon maître est mage. Je pourrais dire aussi que c’est un grand sage même si dans l’immédiat, je le trouve bizarre. Il me parle d’un nouveau-né qui est fils de Dieu, qu’il va le rejoindre, guidé par l’étoile du berger et qu’il lui offrira ce qu’il a de plus précieux : de la myrrhe.
Un nom du pays breton
C’est très confus pour moi tout cela. Là, je l’entends projeter d’aller jusqu’à l’enfant né… mais sans moi ! Pourtant, Balthazar, je ne le lâche jamais, je le suis partout, je l’écoute et compatis quand il faut. Je le distrais de mes sauts, je suis toujours prêt à être caressé, à jouer dès qu’il en a l’humeur, je hoche la tête lorsqu’il me parle, me colle à lui si je le sens attristé.Oui, je peux être aussi un peu sans gêne et n’en fais parfois qu’à ma tête, mais je reste d’une fidélité absolue depuis qu’il m’a adopté lors d’un voyage dans le grand Ouest… J’accours dès que mon maître dit mon nom « Degemer, Degemer ![1] » (encore un nom ramené de mon pays breton).
De l’or, de l’encens et de la myrrhe
Balthazar renonce à m’emmener sous prétexte que la route est trop longue pour le chien que je suis ! Mais je veux le voir ce Divin Enfant ! Et puis la nature m’a doté de bien longues et solides pattes, ce n’est pas pour rester bêtement dans mon panier.Un matin, Balthazar part pour la grande traversée du désert jusqu’au pays de Judée. Il ignore alors que je le suis de loin en loin. Je trotte, je n’arrête pas de trotter. Les jours passant, la chaleur, la dureté des pierres et les sables des dunes rendent le trajet difficile. Je souffre à en user mes pattes sur ces chemins rocailleux. Les semaines succèdent aux journées interminables et enfin, me voilà devant la crèche.
Rien à offrir…
Je vois Marie, Joseph et le Petit. Encore un pas et je m’écroule devant le berceau. Je distingue les cadeaux somptueux des rois mages : l’or, l’encens ou la myrrhe. Mais pauvre de moi, je suis non seulement crasseux, cassé, mais n’ai rien à offrir. Je voudrais disparaître, trop tard la Vierge m’interpelle :« Oh le chien ! Bienvenue petit chien ».Oui, la route m’a tellement râpé que je suis devenu tout court sur pattes.J’ose répondre sous les yeux ébahis de mon maître qui me reconnaît enfin. J’ose :« Bonjour, je n’ai rien à t’offrir si ce n’est tout mon amour et tout ce que la route a usé de mes pattes. »
Et là, l’Enfant Jésus de répondre :« C’est toi le chien qui me fait le plus beau des cadeaux, l’amour ! Tu auras une nombreuse descendance ressemblant à ce que tu es devenu par amour pour moi, et on les appellera les bassets. Que les hommes connaissent le cœur des bêtes et sachent combien Jésus les aime.
Joyeux Noël à tous et à nos chers compagnons.
Florence Édouard de Massol
Source : https://actu.fr/bretagne/quimper_29232/conte-noel-degemer-chien-mage-balthazar_14549090.html
Vous aimerez aussi :
- [1] bienvenue en breton.↩
Soyez le premier à commenter