Étiquette : <span>Fleur</span>

Auteur : Piacentini, René | Ouvrage : Le panier de cerises .

Temps de lec­ture : 16 minutes

Sur ma table de tra­vail s’é­pa­nouit une rose : une superbe White paper, comme bleu­tée dans ses plis et de neige au som­met des pétales. Mon ami reste en extase devant cette merveille : 

— Tiens, lui dis-je, prends ce fau­teuil, tire tes gants, mets-toi à l’aise, je vais te racon­ter son histoire. 

— L’his­toire d’une rose ? 

— Jus­te­ment. Connais-tu les coiffes de Kernascleden ? 

— Oui, sans doute, fit mon ami. Je sais ma par cœur, mais je ne vois pas… et je m’at­ten­dais à ce que tu me dises : Aimes-tu les roses ? 

— Alors, aimes-tu les roses ? 

— Sans doute, et qui ne les aime­rait ? C’est le sou­rire du printemps ? 

— Oui, et aus­si celui de l’é­té, quel­que­fois même celui de l’au­tomne, comme celle-ci que tu admires, the last rose in sum­mer… Disons mieux, veux-tu, c’est le sou­rire de Dieu, car selon le mot du poète, « Dieu pour délas­ser les hommes des tristes choses de la vie leur fit don du bleu dans le ciel, des roses et du sou­rire de l’enfant »… 

— Mais, les coiffes de Ker­nas­cle­den ? pour­quoi m’en as-tu par­lé tout à l’heure et que viennent-elles faire dans ton histoire ? 

Et mon ami, par manière de plai­san­te­rie, prit un dic­tion­naire et cher­cha : Ker­nas­cle­den… Ker­nas­cle­den… Il n’est même pas dans le dictionnaire. 

— Oh ! c’est mieux comme cela. Ils y auraient mis comme pour Guis­criff, 4.970 habi­tants. Ch. de F. Beurre !… Les sauvages ! 

— Pour­quoi les sau­vages ? parce qu’ils font du beurre ? 

— Non, mais parce que les auteurs de cette hor­reur de dic­tion­naire parlent du beurre et non pas des coiffes de Guis­criff et de Ker­nas­cle­den. Or ces coiffes comptent par­mi les choses les plus gra­cieuses du monde !

— Je com­prends ton cour­roux et je le partage ! 

— Ne plai­sante pas ! Qui n’a pas vu ces coiffes ne se rend pas compte de ce que peut être la grâce et l’é­lé­gance d’une coiffure !

Mon ami écla­ta de rire. « Ma parole, tu parles comme un gar­çon coif­feur : indé­fri­sable, garan­ti six mois, 125 francs ! » 

— Plai­sante, si le cœur t’en dit, mais je t’as­sure que j’ai été ravi de trou­ver dans ce coin de Bre­tagne des modes et des cos­tumes que depuis long­temps je croyais dis­pa­rus. Ce sont tout sim­ple­ment les col­le­rettes des époques de Hen­ri IV et de Louis XIII, imi­tées jadis dans presque toute la France et qui se sont sta­bi­li­sées, ici, dans un vête­ment régio­nal. Et ce ne sont pas des col­le­rettes tom­bantes et plates telles qu’A­bra­ham Bosse les repré­sente dans ses gra­vures mais la grande col­le­rette roide, à la Médi­cis, déployée comme une large blanche. Et sur cette col­le­rette, la coiffe toute gréée de den­telles et de rubans… 

— Un papillon sur une fleur, fit mon ami avec un petit air de se moquer. 

— Tu ne pou­vais pas mieux dire ! 

Mais il chan­gea de ton et, avec une légère pointe d’humeur : 

— Tu pro­fites de la situa­tion et je ne vois pas où tu veux me mener avec tes coiffes et tes roses. Parle-moi sans détour ou je n’é­coute plus, fit-il, tragique. 

— Écoute, alors. Il y avait, vivant à l’ombre du clo­cher à jour de Ker­nas­cle­den — encore une mer­veille d’é­glise dont j’ai­me­rais à te par­ler, — une Bre­tonne qui s’ap­pe­lait Jeanne Le Hénaff et tenait un petit com­merce de mer­ce­rie, depuis quelques années déjà, et qui en avait assez de vendre des rubans et de la den­telle. Elle en avait assez et son­geait qu’elle pour­rait faire quelque chose de mieux dans sa vie. 

— Elle a mal tourné ? 

— Oui, elle se fit Car­mé­lite. Et pour être plus sûre de suivre les traces de la chère petite Sainte Thé­rèse de l’En­fant-Jésus, pour laquelle elle nour­ris­sait une tendre et très fra­ter­nelle affec­tion, elle sol­li­ci­ta et obtint son admis­sion au Car­mel de Lisieux. Elle y fit son pos­tu­lat, son novi­ciat… elle n’y fit pas ses vœux parce juste au temps où elle allait les faire elle fut malade à mou­rir. Bien triste, elle reprit le che­min de sa Bre­tagne, revit la fine pointe de son clo­cher, son comp­toir de mer­cière, der­rière lequel elle lan­guit, regret­tant tou­jours son cloître où l’on fait si bien péni­tence pour les autres autant que pour soi. 

L’air natal, un régime plus sub­stan­tiel que celui du Car­mel, eurent tôt fait de lui rendre des forces, et, avec elles, le désir de les dépen­ser au ser­vice de Dieu. Après un nou­vel essai dans un Ordre moins sévère, Jeanne Le Hénaff dut défi­ni­ti­ve­ment renon­cer à toute idée de vie cloî­trée. Et ce fut pour une exis­tence très modeste dans la petite bour­gade bretonne. 

La rose de Sainte Thérèse
Elle regarde une rose de près

Tout en tra­vaillant, elle racon­tait sa peine à celle qui jadis l’a­vait atti­rée au Car­mel et à qui elle avait l’ha­bi­tude de par­ler comme à une per­sonne pré­sente et très aimée. 

« Mais, ma chère petite Thé­rèse, il faut que vous nous tiriez du pétrin. Je ne vous demande pas de me faire une vie bour­geoise, sotte et facile, mais que vous me don­niez de pour­voir à toutes mes obli­ga­tions. Il faut que j’aide ma sœur et mon petit orphe­lin de neveu, vous le savez bien. Et j’au­rais tant le désir de faire un peu de bien. Ils sont heu­reux les riches qui le peuvent ! »

Et elle par­lait d’un bel autel à Sainte Thé­rèse dans l’é­glise parois­siale, et des œuvres de la paroisse qu’elle sou­tien­drait, et des écoles et des mis­sion­naires. Son rêve aurait été d’en­tre­te­nir un missionnaire. 

« Tu folles, ma pauvre fille ! lui disait sa sœur Annie. 

Auteur : Filloux, H. | Ouvrage : Au Cœur des Grandes Alpes. Dauphiné et Savoie .

Temps de lec­ture : 5 minutesDans les pages d’un vieux livre

Hen­ri. — Comme c’est amu­sant, toutes ces petites mai­sons, per­chées sur la pente de la  !

— Cette mon­tagne, c’est la mon­tagne amie de Gre­noble, celle qu’on voit au bout de chaque rue : le Saint-Eynard. Je sais à son sujet une bien jolie légende, cueillie dans un vieux livre qui garde encore le par­fum des œillets roses conser­vés entre ses pages jaunies.

Légende de Savoie racontée aux petits : Saint Pierre, La Sainte Vierge et Jésus

« Sachez [1] d’a­bord que jadis, Dieu, la Vierge et les saints fai­saient sur la voûte céleste de longues pro­me­nades. Quand ils arri­vaient au-des­sus de cette val­lée, c’é­tait pour leurs yeux un émerveillement.

« Ils aper­ce­vaient les Sept-Laux, les crêtes du Bel­le­donne toutes blanches de neige… Au soleil levant, le mas­sif de la Char­treuse et le gla­cier lilial du Mont-Blanc.

« A leurs pieds, l’Isère cou­lait avec ses flots argen­tés à tra­vers des clai­rières bor­dées de chênes, de châ­tai­gniers et de peu­pliers… Saint Pierre s’as­seyait pour mieux voir ; la Vierge joi­gnait les mains d’ad­mi­ra­tion… Dieu souriait…

« Mon Dieu ! dit un jour la , pour­quoi les bords de cette rivière, ces forêts et ces pâtu­rages sont-ils inha­bi­tés ! Les hommes y seraient si heureux !

— Il n’y a pas de mai­sons, dit saint Pierre, un peu bour­ru. Et com­ment diable ! vou­lez-vous que les pauvres humains trans­portent des maté­riaux dans ces montagnes ?…

— Eh bien ! saint Pierre, dit le Père Éter­nel, tu vas tout de suite en apporter.

— Oh ! dit saint Pierre, des chan­tiers du Para­dis à cette val­lée, le tra­jet est long. Des mai­sons, c’est lourd. Je ne suis plus jeune… Que saint Eynard s’en charge !…

  1. [1] Cette légende est tirée de Sous le signe des Dau­phins (de Paul Ber­ret), édi­tions Didier et Richard, à Gre­noble.
Auteur : Carême, Maurice .

Temps de lec­ture : 2 minutes Il me fau­drait, dit la Vierge Qui fuyait avec Jésus, Il me fau­drait, dit la Vierge, Des sabots pour mes pieds nus. Passe ton che­min, pau­vresse, Lui cria-t-on d’une auberge ; Passe ton che­min, pau­vresse, Et que le diable t’héberge ! Mes pieds sont las, dit la Vierge Qui tra­ver­sait un hameau ; Mes pieds…