Étiquette : <span>Ermite</span>

| Ouvrage : Le Croisé .

Temps de lec­ture : 15 minutes

Jus­tus ut pal­ma flo­re­bit, sicut cedrus Liba­ni mul­ti­pli­ca­bi­tur.
Le juste fleu­ri­ra comme le pal­mier : comme le cèdre du Liban, il se mul­ti­plie­ra.
(Psaume 92 : 13)

Saint Char­bel Makh­louf doit sa renom­mée aux pro­diges et miracles qui entourent sa dépouille mor­telle. Nul, sans doute, n’au­rait pen­sé à faire un saint de ce pieux ermite liba­nais qui, par humi­li­té, s’é­tait soi­gneu­se­ment effa­cé du monde, si, après sa mort, la Pro­vi­dence n’a­vait obs­ti­né­ment atti­ré la fer­veur popu­laire sur sa tombe.

À cent qua­rante kilo­mètres au nord de Bey­routh, se trouve Bekaa Kafra, le plus haut vil­lage du Liban habi­té toute l’an­née, à 1650 mètres d’al­ti­tude. Il offre une vue pano­ra­mique sur la val­lée de la Qadi­sha, sur­nom­mée la Val­lée sainte, de nom­breux ermites y ayant vécu depuis le IVe siècle. C’est dans ce vil­lage que naît, le 8 mai 1828, le cin­quième enfant d’An­toun Makh­louf et de Bri­git­ta Chou­diac qui ont déjà deux fils, Jean et Becha­ra, et deux filles, Kaoun et War­da. Huit jours après sa nais­sance, il reçoit au bap­tême le nom de Yous­sef Antoun (Joseph Antoine).

La pié­té de la famille est simple, grande et forte. Bri­git­ta Makh­louf assiste à la Messe et récite son cha­pe­let quo­ti­dien­ne­ment. Deux de ses frères sont moines dans l’Ordre maro­nite liba­nais et vivent à l’er­mi­tage de Saint-Antoine de Qoz­haya, à cinq kilo­mètres de Bekaa Kafra. Antoun est un pauvre pay­san qui ne pos­sède qu’un modeste coin de terre, un âne et un petit éle­vage de chèvres et de moutons.

Bekaa Kafra, maison de la famille Makhlouf
Bekaa Kafra, mai­son de la famille Makhlouf

Un soir, Yous­sef Antoun est alors âgé de trois ans, un groupe de sol­dats vient réqui­si­tion­ner Antoun Makh­louf avec son âne pour trans­por­ter du maté­riel de l’ar­mée ; impos­sible de refu­ser. Sa mis­sion accom­plie, il tombe gra­ve­ment malade et meurt. Ce n’est qu’a­près des mois d’in­con­so­lable attente que Bri­git­ta com­prend qu’elle est veuve. Deux ans plus tard, en octobre 1833, crai­gnant de ne pou­voir sub­ve­nir aux besoins des siens, elle se rema­rie avec un homme très pieux du vil­lage. Peu après, celui-ci, avec l’ac­cord de Bri­git­ta et confor­mé­ment à la dis­ci­pline par­ti­cu­lière des Églises orien­tales, est ordon­né prêtre. Yous­sef lui sert la Messe et l’as­siste dans toutes les céré­mo­nies ; à la sor­tie de l’é­glise, l’en­fant se rend à l’é­cole où il apprend à lire, à écrire et à prier en syriaque, langue que par­lait Jésus. Il s’i­ni­tie éga­le­ment aux tra­vaux cham­pêtres et mène paître sa vache et ses bre­bis au flanc des col­lines. Un ami témoigne : Lorsque la vache avait bien brou­té l’herbe, il la lais­sait à son repos en lui disant : « Repose-toi main­te­nant, « Zah­ra », c’est mon tour et non plus le tien. Je veux prier ». Ain­si priait-il, et si sa vache se rele­vait pour pâtu­rer, il lui disait : « Ne recom­mence pas main­te­nant, attends que je finisse ma prière parce que je ne peux pas par­ler avec toi et avec Dieu ; Dieu est de prio­ri­té ». Il pas­sait des longues périodes, absor­bé par la prière.

Yous­sef va vers ses qua­torze ans et ses cama­rades le taquinent sur sa pié­té en l’ap­pe­lant « le saint ». Tous les jours il emmène paître son petit trou­peau et se rend dans une grotte où, à genoux devant une image de la Sainte Vierge, il prie. La grotte devient ain­si son lieu de prière et son pre­mier ermi­tage et, par la suite, un sanc­tuaire et un lieu de pèlerinage. 

Auteur : Carrouges, Michel | Ouvrage : Charles de Foucauld .

Temps de lec­ture : 11 minutes

La blouse et la cabane

Charles de Foucauld quitte la Trappe et devient frère CharlesAprès six ans à la Trappe, Frère Albé­ric obtient la per­mis­sion de partir.

Que faire ? Où aller ? Com­ment réa­li­ser son rêve ? Il est tout seul comme étaient tout seuls saint Fran­çois d’As­sise et saint Ignace, au début de leurs grandes aven­tures. Il fait comme eux, il prend un habit de pauvre et il se met en route à la grâce de Dieu.

Puis­qu’il n’est plus trap­piste, il renonce à son nom de Frère Albé­ric et se fait appe­ler Frère Charles.

De même, il quitte le grand habit monas­tique en laine blanche, et s’ha­bille comme un ouvrier du temps avec une longue blouse rayée de bleu et de blanc et un pan­ta­lon de coton­nade bleue ; il enfile des san­dales et coiffe un incroyable bon­net blanc qu’il a taillé lui-même et cou­su avec de la ficelle.

Il part à pied sur les routes de la Terre Sainte en direc­tion de Naza­reth. Rien ne lui paraît plus déli­cieux que d’al­ler vivre dans ce vil­lage où Jésus a vécu lui-même, auprès de Marie et de Joseph le charpentier.

O bon­heur, c’est à Naza­reth que Frère Charles, jadis connu comme vicomte de Fou­cauld, trouve une place d’homme de peine, c’est-à-dire de domes­tique de der­nière caté­go­rie, auprès d’un couvent de clarisses.

Il habite, au bout du jar­din, dans une minus­cule cabane en planches, pareille à celles où on range les outils.

Charles de Foucauld jardinier à Nazareth

Il fait des petits tra­vaux de maçon et de menui­sier, mais comme il est vrai­ment mal­ha­bile pour ces ouvrages, c’est plus sou­vent qu’il bêche le jar­din, épluche des légumes ou les trie et sert à table l’au­mô­nier. Son grand plai­sir est de faire office de sacris­tain et d’en­fant de chœur. Dans les inter­valles du tra­vail, et tard dans la nuit, il passe de longues heures à prier et à médi­ter. Mais tout son tra­vail est prière, car il est évident qu’il serait inca­pable de mener une pareille vie, s’il n’of­frait sans cesse tout ce qu’il fait à l’a­mour de Dieu.