L’horloge a sonné… un — deux — trois — quatre — cinq — six — sept — huit — neuf – dix — onze — douze… — Minuit !
À chaque coup un ange se détachait de la cloche et s’envolait au ciel : Noël ! Noël ! L’enfant Jésus est né !… Noël !
Voici que de la tour de l’église monte un bourdonnement comme si des ruches s’éveillaient. — Ce sont en effet les cloches, grosses abeilles du clocher, qui commencent à voltiger. Dig ! ding ! dong ! Noël ! Noël ! Dig ! ding ! dong !
De très loin on entend leur carillon. — Les corbeaux qui logent à côté, dans la charpente, s’envolent par les ouvertures en criant, et ils tournoient comme une couronne noire autour de la flèche pointue.
Dig ! ding ! dong ! Noël ! Noël ! Dig ! ding ! dong ! Les branches nues des arbres se balancent. les portes des maisons s’ouvrent. les sabots passent dans la rue.
Aux fenêtres les lampes s’allument, et par les cheminées s’échappent des fumées bleues, comme des filets de gaze à prendre les papillons d’hiver. — Le feu pétille clair et joyeux sur la pierre du foyer.
Le vent roule la neige contre les portails des cours, et secoue au bord du toit le chéneau de fer-blanc.
Dans le grenier quel vacarme ! Noël ! Noël ! Dig ! ding ! dong !
Écoutez au jour de l’étable. Les bœufs meuglent… les agneaux bêlent… les coqs chantent… les poules caquettent… — Les voilà éveillés !
Ils ont tous pressenti l’anniversaire de la nuit où l’enfant Jésus est venu au monde. On avait garni de paille fraîche les râteliers, de feuilles mortes les mangeoires et de grains nouveaux les poulaillers.
Ayant entendu tinter minuit, lentement, pieusement, ils se sont agenouillés.
— C’est la seule nuit de l’année et l’heure bénie où ils fléchissent ainsi le genou dans la litière.
Demandez au vieux paysan de la plaine ; au montagnard fervent qui vit sur les montagnes, près du ciel.
Le maître de l’étable ne l’ignore pas ; aussi va-t-il le long des crèches, son bonnet à la main, distribuer aux animaux des poignées de sel.
— Eh bien ! les grands bœufs !… L’enfant Jésus est né… qu’il vous donne belle force et bon courage au travail. La terre gelée devient dure. Il faut creuser profond les sillons ; et le champ est vaste. À vous, la bouchée de sel de l’enfant Jésus.
Les grands bœufs, toujours accroupis dans la paille, ont remué leur grosse tête et soufflé avec bruit leur haleine de vapeur ; puis, sérieusement, ils se sont mis à ruminer le sel, en remuant les oreilles.