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L’Espagne missionnaire : Les jésuites, saint Ignace, saint François Xavier. — Les dominicains : saint Louis Bertrand. — Les franciscains : saint François de Solano.
Dans une tourelle du collège Sainte-Barbe de Paris, tourelle qui existait encore au milieu du XIXe siècle, logeaient, en 1525, un jeune Savoyard nommé Pierre Le Fèvre et un jeune Basque de bonne noblesse nommé François Xavier, venus à Paris pour chercher des diplômes universitaires. Ils avaient l’un et l’autre dix-neuf ans. En octobre 1529, un nouvel hôte venait partager leur logis, gentilhomme comme Xavier, mais mal vêtu, — l’air d’un pauvre, à demi estropié par surcroît : il s’appelait Ignace de Loyola, et il était leur aîné de dix à quinze ans. Sa prime jeunesse avait rêvé de la gloire militaire : en défendant Pampelune assiégée, il avait acheté cette gloire par une grave blessure ; ses pensées, à l’hôpital, s’étaient tournées vers le Christ. Adieu dès lors ses beaux rêves de chevalerie ! Ignace s’était fait mendiant, puis il s’était séquestré dans la grotte de Manrèse, pour y chercher une méthode de bien servir le Christ, et il en avait tracé les grandes lignes dans ses Exercices spirituels, que longtemps il garda manuscrits.
Il lui paraissait, pourtant, que pour lutter en faveur de son Dieu, il manquait de formation ; et celui qu’à Sainte-Barbe on commençait à appeler le pèlerin, venait s’instruire et prendre ses diplômes à Paris. Mais ce vieil écolier, avec ses Exercices dans sa sacoche, avait hâte de suggérer à ses camarades cette méthode pour faire leur salut, et de les guider. Le Fèvre fut conquis ; Xavier résista longtemps, et l’un des témoins de ses conversations avec Ignace comparait Ignace au grand Alexandre, qui finit par dompter son coursier Bucéphale. Après Xavier, Ignace s’attacha trois Espagnols, Lainez, Salmeron, Bobadilla, et un Portugais, Rodriguez. Au jour de l’Assomption de 1534, tous ces jeunes universitaires, devenus disciples des Exercices spirituels, descendirent de la montagne Sainte-Geneviève pour gravir, de l’autre côté de la Seine, la colline de Montmartre ; Ignace aussi fit le pèlerinage. Une église s’y élevait, — elle existe toujours, — à l’endroit, disait-on, où saint Denis avait été martyr ; nos sept pèlerins s’enfoncèrent dans la crypte, et Le Fèvre dit la messe. Au moment de la communion, il se tournait vers eux, leur montrait l’hostie ; chacun d’eux promettait à Dieu qu’il demeurerait pauvre, et qu’il demeurerait chaste, et qu’il serait, si possible, pèlerin de Jérusalem, et qu’ensuite il se vouerait au salut des âmes. Et ces vœux une fois prêtés, tous communiaient. Lorsque leur petit groupement se sera élargi, lorsque les assises s’en seront affermies, ces sept étudiants auxquels Jésus venait de se donner ne voudront aucun autre nom, pour une telle société, que celui de Compagnie de Jésus.