DEUXIÈME ACTE
Le rideau se relève sur le même décor, le même bureau à Paray-le-Monial. Il y a beaucoup de monde sur la scène, un évêque (c’est Marcel qui a un peu changé de costume, mais a gardé toute sa dignité), des prêtres, des Sœurs, des hommes, des femmes.
M. LE CURÉ
Cette foule que vous voyez, arrive de Rome. Elle a assisté le 31 décembre 1925 à la première fête du Christ-Roi célébrée par S. S. Pie XI. M. et Mme de Noaillat sont restés à Rome. Maintenant écoutez.
L’ÉVÊQUE
Quelle journée ! quelle fête !
UN PRÊTRE
Je crois que Rome n’en a jamais vu de pareille. Pourtant j’ai assisté à la canonisation du Curé d’Ars, et à celle de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. C’était splendide, mais ce n’était pas la même chose.
UNE DAME
Non, parce que c’est plus beau de penser au Christ qu’à ses Saints.
L’ÉVÊQUE
Non, ce n’était pas la même chose. Cette fête-là, c’est le merci de la terre au ciel.
UNE DAME DE PARAY-LE-MONIAL
Dans le défilé que de beaux costumes ! Ces Chevaliers du Saint Sépulcre et de Malte, tout en blanc et or étaient magnifiques.
UNE AUTRE
Et la Garde Palatine ! et la Garde Suisse ! et la Garde noble ! ces habits jaunes, rouges, blancs, dorés. J’ai vu un officier en culotte blanche, habit rouge et or et casque doré. On aurait dit un Ange. Ah ! qu’il était beau !
UNE SŒUR
Avez-vous remarqué la figure du Pape ? Il jubilait. Il paraît qu’il a été très ému en voyant les milliers de signatures.
LE PRÊTRE
Les chants étaient parfaits, forts, puissants.
UNE DAME
J’aurais voulu comprendre les paroles, suivre la Messe de la nouvelle fête. On ne nous a point donné de livres.
UNE SŒUR
Monseigneur, voulez-vous nous dire un peu ces paroles ?
L’ÉVÊQUE
Oh ! oui. L’introït est tiré de l’Apocalypse de saint Jean : « Il est digne, l’Agneau qui a été immolé, de recevoir la Vertu, la Divinité, la Sagesse, la Force et l’Honneur. À lui soient la Gloire et l’Empire dans les siècles des siècles. »
LE PRÊTRE
Et la Collecte : « O Dieu Tout-Puissant et éternel, qui dans ton Fils bien-aimé, Roi de tous les êtres, as voulu renouveler toutes choses, accorde-nous que toutes les nations, désagrégées par la plaie du péché, se soumettent désormais à ton très suave empire. »
L’ÉVÊQUE
Et l’Offertoire : « Demande-moi et je te donnerai toutes les nations en héritage et tu posséderas les confins de la terre[1]. »
UN HOMME
Moi je suis chantre dans ma paroisse et j’ai compris l’Évangile : « Le Christ répondant à Pilate : « Tu l’as dit. Je suis Roi. »
LE PRÊTRE
Et dans l’Épître que de force ! « Mes frères, grâces à Dieu le Père, qui nous a rendus dignes d’avoir part à l’héritage des Saints dans la lumière, qui nous a arrachés à la puissance des ténèbres et nous a fait passer dans le Royaume de son Fils bien-aimé, en qui nous avons la rédemption, par son sang et la rémission des péchés. C’est Lui qui est l’image du Dieu invisible, le premier-né de toute créature ; car en Lui toutes choses ont été créées dans le ciel et sur la terre, les visibles et les invisibles… tout a été créé par Lui et pour Lui, et Il est avant tout, et toutes choses subsistent en Lui…[2] »
UN HOMME
La Préface était une splendeur.