Archevêque de Sens († 623).
Fête le 1ᵉʳ septembre.
L’ÉTUDE des calendriers paroissiaux de chacun des diocèses de France nous donnerait la liste glorieuse et édifiante des églises et des localités dont saint Loup, archevêque de Sens, est le titulaire ou le patron. Il est, en effet, l’un des Saints dont le culte s’est étendu bien au-delà des limites de son lieu d’origine et de l’Église qu’il a gouvernée. La notoriété qu’il a acquise rappelle, toutes proportions gardées, celle de saint Martin de Tours ou de saint Germain d’Auxerre.
Quelle peut être la cause de cette popularité assez extraordinaire ? Assurément les vertus éminentes du pontife sénonais justifient le renom de sainteté dont il jouit dans sa ville épiscopale. Mais il en est de ces vertus comme des semences que disperse la tempête, elles portent au loin leurs fruits parce que le vent les a arrachées à leur sol d’origine pour les transplanter sur une terre étrangère. C’est le souffle de la persécution qui, en exilant saint Loup de son Église de Sens, a fait bénéficier de ses vertus et de ses miracles plusieurs autres régions. Ces pays lui ont témoigné leur reconnaissance en se plaçant sous sa céleste protection.
Naissance et premières années de saint Loup.
L’antique liturgie, dont l’Église de Sens a repris en 1920 les offices traditionnels, nous donne dans ses textes des notions précises sur les origines de son saint archevêque. « Il était par son père et sa mère de sang royal, et son lieu de naissance était situé sur les bords de la Loire, dans l’Orléanais. »
L’auteur anonyme du VIIIe siècle, que suivent les Bollandistes, nomme son père Betton et sa mère Austregilde ou Agia (la Sainte).
Sur la colline de la Braye, aux environs d’Orléans, s’élevait le château seigneurial où naquit, vers l’an 573, l’enfant prédestiné qui reçut le nom franc de Wolf, dont le latin a fait Lupus et le français Loup, nom sous lequel il est connu dans le pays sénonais. À Paris et dans le nord de la France on le désigne sous le nom de Leu.
Sa mère, comtesse de Tonnerre, était la fille d’un de ces leudes auxquels Clovis avait donné en partage le territoire orléanais. La tradition veut que la naissance de son enfant lui ait été annoncée par un ange, qui lui prédit en même temps que ce fils serait évêque. Elle se fit un devoir de le nourrir elle-même et, presque aussitôt, de l’initier à la piété.
Lorsque plus tard il fut en âge de profiter d’autres leçons et de recevoir une éducation plus développée, que son intelligence allait rendre facile, il fut confié aux soins de ses oncles maternels, tous deux évêques, Austrène d’Orléans et Aunaire d’Auxerre. Sous cette forte direction, Loup fit de rapides progrès. En même temps qu’il avançait dans l’étude de la littérature et des sciences humaines, sa piété se fortifiait, et un attrait marqué pour le service des autels, les cérémonies religieuses et le chant liturgique, démontrait en toute évidence une irrésistible vocation ecclésiastique. Mieux placés que personne pour reconnaitre ces signes, ses oncles n’hésitèrent point à lui donner entrée dans la cléricature en l’admettant à la tonsure, et enfin à lui conférer, après quelques années, l’ordination sacerdotale.
Saint Loup prêtre. — Ses vertus sacerdotales.
La ferveur du nouveau prêtre ne connut bientôt plus de bornes : il s’appliqua plus que jamais à la pratique des plus hautes vertus. L’esprit de religion qui se manifeste par l’amour du culte divin ; la dévotion envers les églises et l’honneur rendu aux tombeaux des Saints ; le zèle des âmes et la charité envers le prochain ; l’exercice de la mortification et de la pénitence ; en un mot, tout ce qui constitue l’idéal du sacerdoce, fut l’objet de ses efforts les plus constants. À son tour, Loup était mûr pour l’épiscopat. Aussi, à la mort de l’archevêque de Sens, saint Arthème († 609), la voix du clergé et du peuple fut-elle unanime pour le désigner, comme successeur de l’évêque défunt, à la présentation royale.
L’archevêque de Sens.
Lorsque le nouvel archevêque eut pris possession de son siège, toutes les vertus dont il avait donné l’exemple jusque-là brillèrent d’un éclat d’autant plus vif qu’il était plus élevé en dignité. C’était toujours le même souci de perfection, mais s’affirmant, se déployant sur un champ plus vaste et s’amplifiant dans les fonctions de son nouveau ministère. L’éloquence de ses prédications et les qualités exquises de son cœur lui concilièrent l’estime et l’affection de son clergé et de ses diocésains qui le considéraient comme un ange envoyé du ciel.
Ses occupations pastorales ne ralentissaient en rien son zèle pour la visite des églises. La nuit, il sonnait lui-même la cloche pour appeler les ecclésiastiques chargés de chanter les Matines.
Dans l’un de ses voyages au domaine de ses pères, à Orléans, il voulut, fidèle à sa coutume, se rendre la nuit à l’église Saint-Aignan, pour prier au tombeau du saint évêque de cette ville. Trouvant les portes fermées, il s’agenouille sur le seuil. Mais voilà que par une intervention céleste, les portes s’ouvrent d’elles-mêmes, lui permettant ainsi de satisfaire sa dévotion.

La visite aux tombeaux des Saints était, nous l’avons dit, une de ses pratiques favorites. Il eut, dans sa ville épiscopale si riche en tombes glorieuses, maintes occasions de s’acquitter de cet acte de piété. Il avait voué un culte spécial à la Vierge martyre sénonaise sainte Colombe, et il tint à le manifester jusqu’au bout en demandant qu’après sa mort son corps fût transporté à l’abbaye de Sainte-Colombe pour y être inhumé sous la gouttière de l’église. Une pieuse habitude de l’archevêque de Sens, que nous allons relater d’après les historiens, est une nouvelle preuve de sa dévotion aux tombeaux des Saints.
Les parents de Loup possédaient à Tonnerre un château qui reçut bien des fois sa visite. Près de cette demeure familiale se trouvait une chapelle qui renfermait les reliques de saint Micomer, disciple de saint Germain d’Auxerre. Ce pieux personnage était venu d’Irlande et avait suivi saint Germain lors de son voyage en Angleterre ; retiré à Tonnerre, il y était mort et l’on avait érigé un oratoire sur son tombeau. Or, c’est dans cette chapelle, voisine du château, que le fils de la princesse Austregilde aimait à célébrer la messe, lorsqu’il venait à Tonnerre.
Sa vertu ne se bornait pas à des actes de religion. En disciple fidèle du Christ, il faisait consister la charité dans l’accomplissement du double précepte de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain : « La maison d’un évêque, disait-il, doit être comme une hôtellerie où les pauvres sont reçus par miséricorde et les riches par courtoisie. »