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Annie et Colette réclament énergiquement :
— Si les garçons vont toujours avec les scouts, nous ne verrons rien et n’apprendrons rien !
Tante Jeanne, qui termine une lettre, lève la tête et dit en riant :
— Au lieu de grogner, allez donc mettre vos chapeaux. Je cachète cette lettre, j’appelle Jean et Bernadette, et je vous emmène tous les cinq au Janicule. Nous y retrouverons ton papa, Colette ; je lui ai donné là un rendez-vous précis.
En route, Colette demande ce que c’est que ce « Janicule » où on va.
— L’une des collines qui dominent Rome. Vous ne vous doutez pas de la vue qui nous y attend.
De fait, à l’arrivée, la jeunesse pousse de vrais cris d’admiration. Appuyé contre un arbre magnifique, papa, qui est déjà là depuis un moment, fait signe :
— Venez jusqu’ici, et regardez. Toute la ville est sous nos yeux. La lumière est d’une telle transparence, que nous pouvons tout distinguer : Les sept collines de Rome, les monuments, que l’on dirait très près de nous.
— Et ces plans de montagnes tout au fond, qui se profilent par delà la plaine… C’est ravissant ! crie Jean enthousiasmé.
— Oui, mon petit, c’est admirable, et comme ce que nous avons là devant nous, nous rappelle facilement la puissance de l’ancienne Rome ! Elle était devenue comme un observatoire, d’où la vue s’étendait sur le monde, qu’elle tenait encore sous ses lois.
Pourtant il y avait, au Nord et à l’Est, des peuples sauvages qui grandissaient en nombre. Rome suivait leurs mouvements avec inquiétude, comme le capitaine d’un navire s’inquiète des gros nuages qui précèdent la tempête.
Dès le Ier siècle de notre ère, la menace était grave, mais, au IIIe et au IVe siècle, l’avalanche se déclencha. La Baltique avait débordé, repoussant les habitants des forêts voisines vers le Sud. Ces hommes absolument sauvages, terribles par leur force brutale et leur férocité, descendent vers les frontières romaines, absolument comme une marée immense et irrésistible. Rien ne les arrête ; ils sont tellement nombreux que, vaincus presque toujours par les armées romaines, ils se reforment sans cesse et reprennent leur marche en avant, brûlant, dévastant, ruinant, semant la terreur et la mort.
Rome avait d’abord espéré transformer ces barbares en soldats, elle en enrôle un grand nombre dans ses légions, leur offre des avantages matériels qu’ils ignoraient jusqu’alors, et pense qu’elle va réussir à en faire des auxiliaires disciplinés. Mais l’empire romain, vous le savez, s’affaiblissait tous les jours. Quand les Huns et les Goths vont jeter contre lui leurs masses effroyables, il s’écroulera. Qui me dira lequel de ces deux peuples barbares laisse une trace séculaire et fonde un empire ?
— Les Goths, mon oncle.
— Pourquoi, Bernard ?
— Parce que les Huns, après la défaite définitive d’Attila et sa mort, n’étaient plus de force pour rien fonder.
Les Goths, au contraire, ont indéfiniment renouvelé leurs poussées.
Rome a transigé d’abord, puis Théodose les a maintenus dans l’obéissance ; mais un de leurs jeunes rois, Alaric, finit par envahir l’Italie et prendre Rome (en 410, si je ne me trompe).
Refoulés, après avoir tout ruiné, les Goths se sont installés en Aquitaine, sous le nom de Visigoths.
De même origine ont été les Burgondes, qui ont occupé le bassin du Rhône et de la Saône ; les Hérules, dont le chef Odoacre renverse le dernier empereur romain et règne en Italie ; les Ostrogoths, qui détruisent à leur tour, avec Théodoric, le royaume d’Odoacre. Enfin les Vandales descendent du Rhin, passent sur le tout, à travers Gaule et Espagne, pour s’arrêter seulement dans l’Afrique du Nord.
Tante Jeanne sourit à son benjamin.
— J’aime, Bernard, t’entendre préciser ainsi.
— Pourtant, dit Bernadette avec malice, tu as oublié un peuple barbare et un fameux.
— Pas du tout, ma chère cousine,… et Bernard s’incline révérencieusement. Tu veux parler des Francs ? C’est une tribu barbare, c’est vrai, qui s’installe au Nord de la Gaule et s’étend petit à petit, mais elle ne ravage pas tout, ses chefs sont courageux et droits.
— Enfin, dis-le tout de suite, conclut Bernadette en riant, il ne faut pas qu’ils aient de défauts, puisque nous en descendons !
— Sans rien exagérer, reprend son père, il est exact que leur race était autre, et qu’aucun peuple barbare ne fut plus apte à se laisser gagner par la Foi chrétienne. Car jusqu’ici, mes enfants, nous avons regardé les Barbares en face de Rome ; contemplons maintenant l’attitude de l’Église envers eux.
L’Église, elle, ne tremble pas. Ces hommes féroces ont des âmes, elle le sait. Pour conquérir ces âmes, elle a pour elle la toute-puissance de Dieu, et, paisible, sereine, l’Église va entreprendre la conversion des Barbares.
Le temps nous manque pour suivre l’ensemble de cette lente conquête, mais vous savez déjà comment c’est le pape saint Léon qui arrête les Goths à la Porte de Rome. Saint Loup fait reculer les Huns à Troyes et sainte Geneviève, à Lutèce, notre cher vieux Paris.
Toutes les gravures représentent la vierge gauloise debout sur les remparts, suppliant Dieu d’obtenir l’arrêt des hordes d’Attila. Mais on nous dit beaucoup moins souvent comment elle faillit être lapidée par le peuple épouvanté, qui voulait fuir, malgré ses ordres. De vieilles traditions racontent de sainte Geneviève des choses exquises. C’est elle qui fit construire une église à saint Denis, martyr. Un dimanche matin, elle s’y rend, suivie de ses compagnes qui portaient des flambeaux allumés. Il pleut, le vent et la pluie ont tôt fait d’éteindre les flambeaux, mais Geneviève, d’un souffle, les ranime, et la procession lumineuse passe à travers la rafale.
Plus tard, ce sont les Francs qui assiègent Paris. Geneviève les tiendra cinq ans sous les murs, et s’en ira, au milieu des périls, chercher du froment à Arcis-sur-Aube pour ses compatriotes affamés. On croit rêver, quand on pense que cette femme rentra dans Lutèce avec onze bateaux de froment. Enfin, quand, plus vieille, elle fut mêlée à la vie des Francs convertis et vainqueurs, elle garda son influence et son pouvoir surnaturel. Childéric, un jour, fit conduire hors la ville des condamnés à mort, qu’elle voulait sauver. On ferma derrière eux les portes de Paris. Mais Geneviève priait. D’elles-mêmes, les portes de la ville s’entr’ouvrirent. Légère, la sainte passa et délivra les prisonniers.
Ici, mes enfants, il faut encore nous arrêter pour un nouveau coup d’œil d’ensemble sur l’histoire.
L’empire romain agonise. La Gaule, qui lui était soumise, tremble devant l’envahisseur. Seuls les évêques regardent le monde en face et cherchent d’où, avec l’aide de Dieu, doit venir le salut. C’est désormais inutile de le demander à Rome, et moins encore à ces Goths de toutes sortes qui, à mesure qu’ils se civilisent, passent, non pas à la vraie Foi, mais à l’hérésie.
Mais voici qu’un jeune chef des Francs, Clovis, vient d’épouser Clotilde, princesse catholique, fille du roi des Burgondes.
L’espoir serait-il là ? Encore quelques mois, et Clovis, à Tolbiac, invoque, contre l’Alaman envahisseur, le Dieu de Clotilde, promettant de se faire baptiser s’il est vainqueur.
Saint Rémy l’instruit et le baptise en effet à Reims, avec ses 3000 guerriers, en ce Noël de l’an 496, qui va faire de la France de demain la Fille aînée de l’Église.
On raconte qu’un jour saint Rémy expliquait à Clovis la Passion ; le jeune guerrier, serrant les poings, l’interrompait, disant : « Que n’étais-je là avec mes Francs ! »
Parole déjà si française ! De fait, à partir de cette date, malgré des faiblesses et des erreurs, la France va devenir, à travers le monde, comme un chevalier séculaire, incessamment debout pour la défense des droits de Dieu.
Bonjour Messieurs et merci pour vos si touchants récits : pour celui d’aujourd’hui, on peut faire un parallèle avec notre époque où nous subissons une invasion tout aussi redoutable et barbare que celles d’autrefois. MAIS ! car il y a un « mais » et il est de taille : dans votre récit, vous écrivez :« L’Église, elle ne tremble pas ! » alors qu’aujourd’hui, elle a « le trouillomêtre à 0 » et se garde bien de dénoncer l’invasion et les nuisances concomitantes, surtout celles de l’Islam !!! hélas ! Et pourtant, la solution est aujourd’hui la même qu’à l’époque : CONVERSION DES ENVAHISSEURS !!! les musulmans n’auraient-ils pas, eux aussi, une âme à sauver ? que fait l’Église pour la conversion des musulmans ? RIEN ! elle palabre (dialogue islamo-Chrétien !!! comme si on pouvait dialoguer avec l’enfer !!! car Allah n’est rien d’autre que Satan en personne) ! Des musulmans – plus nombreux qu’on ne le croit – se convertissent en effet (à leur risques et périls !) mais si l’Église montrait le chemin dans ce domaine, ça irait beaucoup plus vite et les Français reprendraient, eux aussi, confiance dans leurs prélats !
Amitiés à tous
Ah ! Avec le texte d’aujourd’hui (Charles Martel), on voit que, face à l’islam, nos ancêtres ont aussi utilisé des manières fortes avec succès. Dans les biographies du bienheureux Charles de Foucauld qui sont sur ce site, on voit aussi que l’Église doit les évangéliser avec patience.