L’apparition de la Sainte Face sur le Voile de Sainte Véronique

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Temps de lec­ture : 8 minutes

Le same­di 6 jan­vier 1849, se pro­dui­sit dans la Basi­lique Saint-Pierre au Vati­can un pro­dige qui a été rela­té par le jour­nal de la Basi­lique et fut confir­mé par le Pape Léon XIII dans un bref daté du 1er octobre 1885.

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Pour bien com­prendre ce qui se pas­sa il importe d’a­bord de se remettre dans le contexte historique.

À cette date, le Bien­heu­reux Pape Pie IX se trou­vait en exil à Gaëte, dans le Royaume de Naples. L’an­née 1848, en effet, avait vu se suc­cé­der des révo­lu­tions dans toute l’Eu­rope. Rome – capi­tale des États de l’É­glise – n’a­vait pas été épar­gnée par le ferment révo­lu­tion­naire et par les troubles. L’exil du pape dura 17 mois. Pen­dant ce temps, de manière assez fré­quente, le cler­gé et les fidèles de Rome orga­ni­saient dans les diverses églises de la Ville Éter­nelle des céré­mo­nies fer­ventes pour deman­der à Dieu la fin des troubles et le retour du Pape.

Il faut savoir (ceux qui sont allés à Rome et ont eu une visite gui­dée de la Basi­lique Saint-Pierre s’en sou­viennent peut-être) que la Basi­lique Saint-Pierre ne ren­ferme pas seule­ment la tombe du Prince des Apôtres, mais qu’au cours des siècles son « tré­sor » a été enri­chi d’im­por­tantes et pré­cieuses reliques au nombre des­quelles on compte une part impor­tante du Bois de la Sainte Croix (ame­né de Jéru­sa­lem par l’im­pé­ra­trice Sainte Hélène), le fer de la lance avec lequel le cen­tu­rion a ouvert le côté du Christ mort (décou­vert grâce à un miracle, en 1099, par Adhé­mar de Mon­teil dans une église d’An­tioche de Syrie où le reli­quaire avait été emmu­ré par crainte des pro­fa­na­tions sar­ra­sines, puis oublié), et le voile de la pieuse femme qui, sur le che­min du Cal­vaire, avait essuyé le visage ensan­glan­té du Christ.

La sainte Face du Christ durant la Passion
L’i­mage de la de Notre-Sei­gneur dif­fu­sée à la suite du miracle du 6 jan­vier 1849 et telle qu’elle est expo­sée dans l”« Ora­toire de la Sainte Face », à

Ce voile avait reçu le nom de « vero­ni­ca », contrac­tion et lati­ni­sa­tion de veron‘ikon, que l’on peut tra­duire par « image véritable ».

La tra­di­tion les dis­tingue bien en effet :
– d’une part, le lin­ceul – actuel­le­ment conser­vé à Turin mais fut véné­ré à Constan­ti­nople jus­qu’au moment de l’o­dieuse mise à sac de la ville par les croi­sés (en avril 1204) – sur lequel se trouve une image en trois dimen­sions, « pro­je­tée » sur le linge, et qui reste tota­le­ment inex­pli­quée dans l’é­tat actuel des sciences ;
– et d’autre part le linge avec lequel cette cou­ra­geuse hié­ro­so­ly­mite, prise de com­pas­sion, essuya la sueur, le sang et les cra­chats mêlés à la pous­sière qui souillaient le visage du Sau­veur. Sur ce voile, il s’a­gis­sait pro­ba­ble­ment d’une empreinte lais­sée par les matières épon­gées lors du contact direct (et non d’une pro­jec­tion). Il s’a­gis­sait de ce fait d’une image « défor­mée ». Vous obtien­drez quelque chose de sem­blable si vous vous bar­bouillez la figure avec de la suie et que vous vous essuyez ensuite avec un linge : en l’ap­pli­quant sur toute la sur­face du visage, vous obtien­drez ensuite votre propre por­trait, mais vos traits seront défor­més par une espèce d’am­pli­fi­ca­tion, puisque tous les contours de ce qui est en relief se retrou­ve­ront déve­lop­pés à plat.

De très anciennes tra­di­tions, dont on ne veut plus tenir compte aujourd’­hui, nous rap­portent que l’empereur Tibère avait enten­du rap­por­ter cer­taines choses sur ce Jésus qui, même au-delà de la mort, recru­tait des dis­ciples et opé­rait des miracles. Alors qu’il se trou­vait très malade et que ses méde­cins étaient impuis­sants à lui rendre la san­té, il avait appris qu’une image répu­tée mira­cu­leuse du Christ était en pos­ses­sion d’une femme, par­mi ses dis­ciples. Il la fit donc recher­cher et venir à son che­vet ; il enten­dit de sa bouche le récit de la du Sau­veur et recou­vra la san­té en contem­plant son image, cette veron‘ikon, dont le nom finit par être don­né à la femme qui avait béné­fi­cié du miracle.

Le voile mira­cu­leux res­ta donc à Rome où il est répu­té demeu­rer aujourd’­hui encore. Il n’est plus guère expo­sé à la véné­ra­tion des foules de nos jours, mais j’ai eu l’oc­ca­sion de ren­con­trer un vieux cor­de­lier qui l’a­vait vu de près sous le règne de Pie XII et m’a expli­qué que l’i­mage figu­rant sur le voile était tel­le­ment estom­pée qu’elle était deve­nue presque imper­cep­tible à l’œil.

* * *

Le same­di 6 jan­vier 1849 donc, les cha­noines de la Basi­lique Vati­cane, ain­si qu’une foule de fidèles, étaient à genoux en pré­sence des Reliques Majeures solen­nel­le­ment expo­sées. Tous purent sou­dain obser­ver que sur la « véro­nique », l’i­mage estom­pée deve­nait de plus en plus nette et refor­mait le visage vivant de Notre-Sei­gneur Jésus-Christ : les défor­ma­tions en avaient dis­pa­ru, parce que les ampli­fi­ca­tions dues à l’a­pla­tis­se­ment des traits avaient retrou­vé leur relief ! C’é­tait bien le visage de l’Homme des dou­leurs décrit par Isaïe, non pas dans l’a­pai­se­ment de la mort comme il appa­raît sur le lin­ceul, mais sai­si comme par un ins­tan­ta­né dans le cours du che­min de la Croix.

Dévotion pour les enfants : La passion du Christ, le vendredi saint
Mon­sieur Léon Papin-Dupont, « le saint homme de Tours ».

En 1849, les pèle­rins pré­sents dans la Basi­lique Saint-Pierre n’a­vaient bien évi­dem­ment pas avec eux d’ap­pa­reils pho­to­gra­phiques pour immor­ta­li­ser cette mani­fes­ta­tion mira­cu­leuse (j’emploie à des­sein ce mot de mani­fes­ta­tion, puisque le 6 jan­vier est la fête de l’É­pi­pha­nie, mot déri­vé du grec et qui signi­fie jus­te­ment mani­fes­ta­tion – au sens d’ap­pa­ri­tion -, et que nos frères chré­tiens d’O­rient nomment encore plus expli­ci­te­ment ce jour « Théo­pha­nie », c’est à dire mani­fes­ta­tion de Dieu). Le seul moyen dont on dis­po­sait pour gar­der le sou­ve­nir et pro­pa­ger l’i­mage de ce miracle fut donc la gra­vure : selon les décla­ra­tions des témoins, un gra­veur ten­ta de rendre les traits de l’ap­pa­ri­tion et l’on pro­cé­da à des impres­sions (non seule­ment sur papier mais aus­si sur tis­su) de l’i­mage ain­si obte­nue. Ces repro­duc­tions furent don­nées par les cha­noines de la Basi­lique Vati­cane avec un cer­ti­fi­cat d’au­then­ti­ci­té por­tant le sceau de cire rouge du Chapitre.

En France, Mon­sieur Léon Papin-Dupont, sur­nom­mé le saint homme de Tours, reçut une de ces repro­duc­tions et l’ins­tal­la à la place d’hon­neur dans son salon, bien­tôt conver­ti en ora­toire. En effet les grâces, phy­siques et spi­ri­tuelles, obte­nues en priant devant cette image et en invo­quant la Sainte Face de Notre-Sei­gneur Jésus-Christ, se mul­ti­plièrent rapi­de­ment, confor­mé­ment aux révé­la­tions qu’a­vaient reçues, quelques années aupa­ra­vant, dans cette même ville de Tours, une car­mé­lite du nom de Sœur Marie de Saint-Pierre. Une confré­rie de prière fut éta­blie dans l’o­ra­toire de Mon­sieur Dupont et il est inté­res­sant de noter que la famille Mar­tin se fit ins­crire sur les registres de cette confré­rie. La petite der­nière, Thé­rèse, fut pro­fon­dé­ment mar­quée par cette dévo­tion, très implan­tée au Car­mel de Lisieux, et choi­sit en consé­quence de por­ter en reli­gion le nom de Sœur Thé­rèse de l’En­fant Jésus de la Sainte Face…

Vendredi saint pour les enfants. Prière à la sainte Face
Albrecht Dürer : la Sainte Face por­tée par deux anges (1513 – musée du Louvre)

Nous ter­mi­ne­rons donc l’é­vo­ca­tion de ce miracle en publiant l’une des prières à la Sainte Face écrite par celle qu’un Pape a dési­gnée comme « la plus grande sainte des temps modernes » :

Ô Jésus, qui dans votre cruelle Pas­sion êtes devenu
« l’op­probre des hommes et l’homme de douleurs »,
je vénère votre divin visage,
sur lequel brillaient la beau­té et la dou­ceur de la divinité,
main­te­nant deve­nu pour moi
comme le visage d’un « lépreux » !

Mais sous ses traits défigurés,
je recon­nais votre amour infini
et je me consume du désir de vous aimer
et de vous faire aimer de tous les hommes.
Les larmes qui cou­lèrent si abon­dam­ment de vos yeux
m’ap­pa­raissent comme des perles précieuses
que j’aime à recueillir,
afin d’a­che­ter avec leur valeur infinie
les âmes des pauvres pêcheurs.

Ô Jésus, dont le visage est la seule beauté
qui ravit mon cœur,
j’ac­cepte de ne pas voir ici-bas,
la dou­ceur de votre regard,
de ne pas sen­tir l’i­nex­pri­mable baiser
de votre bouche sainte ;
mais je vous sup­plie d’im­pri­mer en moi
votre divine ressemblance,
de m’embraser de votre amour,
afin qu’il me consume rapidement
et que j’ar­rive bien­tôt à voir
votre glo­rieux visage dans le Ciel.
Ain­si soit-il.

Source : http://leblogdumesnil.unblog.fr/2015/02/17/2015 – 29-de-la-devotion-a-la-sainte-face-de-notre-seigneur/

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