Et maintenant une histoire ! Posts

Auteur : Clarence | Ouvrage : La semaine de Suzette .

Temps de lec­ture : 9 minutes

MALGRÉ le froid d’une mati­née de mars, un groupe de gamins jouait à la balle devant les grilles des jar­dins du Louvre. Ils étaient vêtus de façon insuf­fi­sante mais ne sem­blaient pas s’en sou­cier, ni sen­tir le vent qui balayait la place avec de brusques rafales. D’ailleurs, à regar­der leurs visages hâlés, leurs membres agiles, on devi­nait que ce n’é­tait point des enfants habi­tués à être dor­lo­tés et à craindre les écarts de température. 

Tout autre parais­sait un gar­çon d’une dizaine d’an­nées, assis­tant au jeu en spec­ta­teur, der­rière les grilles du Louvre. Sa petite figure pâle s’en­ca­drait de boucles blondes, ses jambes étaient minces et ses mains fines comme celles d’une fille. Il était vêtu à la mode de cette année 1612 : pour­point de velours bleu, col de den­telle et bas de soie blanche. Cer­tai­ne­ment, il fai­sait par­tie de la cour royale habi­tant le vaste et sévère palais. 

enfants pauvres jouant au ballon devant les grilles du Louvre

Il sui­vait atten­ti­ve­ment le jeu des autres, mais ne sou­riait pas et gar­dait un air de pro­fonde mélan­co­lie. À un moment, la balle lan­cée avec vio­lence, dépas­sa son but et, pas­sant entre deux bar­reaux, frô­la la tête du petit sei­gneur avant de retom­ber à ses pieds. Dépi­tés, les joueurs se ruèrent vers les grilles. 

— Elle est là ! cria l’un d’eux, la dési­gnant du doigt. 

— Oui, mais elle est per­due pour nous, ripos­ta le second. 

— Pas si sûr, voi­ci quel­qu’un qui va nous la rendre. Eh ! petit, lance-nous notre balle ! 

L’in­ter­pel­lé ne bron­cha point. 

— Es-tu sourd, marmouset ? 

— C’est à moi que vous par­lez ? lais­sa tom­ber dédai­gneu­se­ment l’en­fant blond. 

— Évi­dem­ment, puisque tu es seul. Dépêche-toi de nous rendre notre balle. 

Pour toute réponse, le jeune sei­gneur tour­na les talons et s’é­loi­gnait déjà lorsque Benoît, le chef de la bande, furieux, tré­pi­gnant, s’ac­cro­cha aux barreaux : 

Auteur : Finn, Francis | Ouvrage : Percy Wynn .

Temps de lec­ture : 6 minutes

Le Père Midd­le­lon, au , avait par­lé avec dou­ceur et insis­tance de la misé­ri­corde de Dieu. 1l avait tout d’a­bord dit quelques mots sur la néces­si­té de la puis il avait posé des ques­tions aux élèves afin de s’as­sure qu’ils avaient bien com­pris sa pensée. 

« Har­ry Quip, com­men­ça-t-il, répon­dez-moi. Sup­po­sez mon ami, que vous êtes un grand pécheur : depuis que vous avez l’âge de rai­son, vous avez com­mis péché mor­tel sur péché mor­tel. Toutes vos fautes souillent encore votre âme, toutes vos confes­sions ont été mau­vaises, et vous appre­nez subi­te­ment que vous allez mou­rir, ici même, dans cette classe. Faut-il désespérer ? 

— Non, Père, répon­dit Har­ry. Je deman­de­rais à la Saint Vierge, notre Mère bénie, de m’ob­te­nir la grâce de faire un bon acte de contri­tion, et je me confes­se­rais, m’a­ban­don­nant dans les bras de la misé­ri­corde de Dieu. 

Le jugement dernier, Michael Ange, Chapelle Sixtine

— Mais voi­ci, Car­mo­dy, conti­nua le pro­fes­seur, vous n’a­vez jamais fait une seule bonne action, et d’un autre côté, vous avez sur la conscience tous les péchés que tous les enfants du monde ont com­mis. Que feriez-vous dans ce cas, si l’on vous disait qu’il faut mou­rir de suite ? 

— Je me confie­rais dans les mérites infi­nis du Pré­cieux Sang. 

— Joseph, voi­ci un cas plus grave : votre conscience est salie de tous les péchés dont j’ai par­lé, et vous êtes seul, sans com­pa­gnons, livré à vos faibles forces, au milieu de, l’o­céan ; aucun prêtre près de vous pour vous absoudre, aucun ami pour prier pour vous. Que faire ? 

Joseph répon­dit avec une élé­va­tion sug­gé­rée sans le vou­loir par les paroles mêmes de son professeur : 

— J’es­saie­rais avec la grâce de Dieu de faire un acte de  ; alors, je m’en­fon­ce­rais dans les vagues comme dans les bras de Dieu : Dieu est partout ! 

— Voi­là une belle réponse. Mais, Rey­nolds, sup­po­sez que Dieu, en puni­tion de tous vos péchés, vous afflige d’une hideuse mala­die. Sup­po­sez alors que vos amis s’é­loignent de vous avec hor­reur, que vos rela­tions vous rejettent par­mi les bêtes ; sup­po­sez que vous êtes mou­rant de dénue­ment et de faim, et, au moment de votre mort, vous deman­dez un prêtre pour entendre votre , mais celui-ci, épou­van­té par votre état repous­sant, s’en­fuit au loin, criant que Dieu vous a déjà dam­né ! Seriez-vous désespéré 

Auteur : Goldie, Agnès | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 17 minutes

La neige ! La neige !

Tout joyeux, vous cou­rez à la fenêtre ou au jardin. 

Autre chose est de vivre dans les neiges du Grand Nord, comme le mis­sion­naire qui s’en va si loin évan­gé­li­ser l’.

Le P. Le Roux, un Bre­ton aux yeux bleus et le P. Rou­vière, Lozé­rien aux yeux noirs, tous les deux Oblats de Marie, partent à la recherche des Esqui­maux cam­pés sur la .

La ban­quise… Ima­gi­nez-vous cela ? une mer sans bateaux, sans vagues, immo­bi­li­sée sous la neige. Au loin, du côté de la terre, la falaise aux cavernes habi­tées par les ours blancs ; au large, un chaos de blocs de glace qui se détachent avec un bruit de ton­nerre et s’en vont à la dérive… Quelle idée d’al­ler vivre là ! C’est que, sous la neige, il y a la glace, et sous la glace, l’eau, et dans l’eau, le pois­son et le mam­mi­fère dont l’homme se nour­ri­ra puis­qu’il ne peut culti­ver la terre ni récol­ter les fruits d’arbres inexistants.

Venant de la Notre-Dame d’Es­pé­rance, après plu­sieurs jours de voyage, les deux mis­sion­naires aper­çoivent enfin les cou­poles des mai­sons de neige. Il est temps ! Pères et chiens sont à bout de forces et quel froid ! 52 degrés au-des­sous de zéro ! « Tiens, remarque un des Pères, nous avons été signa­lés ; voi­ci qu’ils sortent de leurs iglous. » 

Un Esqui­mau vient en effet à leur ren­contre et les salue à la mode de son peuple, bras levés, non en signe de red­di­tion, mais de bien­ve­nue. Suivent des incli­nai­sons de tête à droite, à gauche, une incli­na­tion jus­qu’au sol,… et cela recom­mence. On ne peut être plus poli ! Les deux Fran­çais imitent de leur mieux. Une vraie pantomime. 

L’homme se retourne alors vers le groupe qui le suit : « Kra-bou­ma ! clame-t-il, ce sont des Blancs ! » Et il court vers eux, mains ten­dues. Hommes, femmes, vieillards, enfants imitent le geste ; c’est à qui ten­dra ses deux mains gar­nies d’é­paisses moufles de four­rure et tous rient de conten­te­ment. Les Blancs, ils les connaissent un peu pour les ren­con­trer à Fort-Nor­man quand ils vont y échan­ger four­rures et ivoires contre thé, sucre et tabac. 

Le P. Rou­vière n’est point un agent de com­merce et il tient à leur dire, tout clair, le but de sa visite : « Nous sommes venus de très loin (de la France, par delà la mis­sion) pour vous par­ler de Dieu qui a créé les pois­sons, les phoques et les hommes. Son fils Jésus, des­cen­du du ciel sur la terre est mort pour ouvrir le ciel à ceux qui l’au­ront aimé ! » 

Les deux missionnaires aperçoivent enfin les igloos des Esquimaux
Les deux mis­sion­naires aper­çoivent enfin les cou­poles des mai­sons de neige…

Peut-être avez-vous enten­du racon­ter l’his­toire de ces Esqui­maux ou de ces Indiens qui, à sem­blables paroles, ne s’é­ton­nèrent pas : le Créa­teur, ils l’a­vaient devi­né, décou­vert, par la beau­té de sa créa­tion et ils l’a­vaient nom­mé le Grand Esprit. Ceux-ci ne com­prennent pas ; ils se regardent sur­pris, puis, ne sachant que répondre, ils éclatent de rire.

Auteur : Mistral, Frédéric | Ouvrage : L'Étoile noëliste .

Temps de lec­ture : 8 minutes

Conte

Maître Archim­baud avait au moins cent ans. Il avait été en son temps un rude homme de guerre, et avait fait par­ler de lui. Mais main­te­nant, affai­bli, épui­sé de fai­blesse, il gar­dait le lit depuis long­temps et ne pou­vait plus bouger. 

Le vieil Archim­baud avait trois fils. Un matin, il appe­la l’aî­né et lui dit :

— Viens ça, mon fils : en tour­nant et en rêvant dans mon lit — car, cloué sur un lit, on a le temps de comp­ter — je me suis rap­pe­lé que, dans une bataille, me trou­vant un jour en dan­ger de mort, je pro­mis à Dieu de faire le de … Hélas ! je suis vieux comme les pierres, et je ne puis aller en guerre !… Je vou­drais bien que tu ailles à ma place faire ce pèle­ri­nage, car je ne vou­drais pas mou­rir sans accom­plir mon vœu. 

L’aî­né répondit : 

— Diantre ! allez-vous vous mettre en tête un pèle­ri­nage à Rome !… Père, man­gez, buvez, et tour­nez dans votre lit tant que vous vou­drez… Nous avons bien d’autres affaires. 

Le len­de­main matin, maître Archim­baud appelle son fils cadet : 

— Cadet, lui dit-il, écoute : en rêvas­sant et en comp­tant — car cloué sur un lit, on a le temps de rêver — je me suis sou­ve­nu que, dans une bataille, me trou­vant en dan­ger de mort, je m’en­ga­geai envers Dieu à faire le grand pèle­ri­nage de Rome… Hélas ! je suis vieux comme les pierres, et je ne puis aller en guerre ! Je vou­drais bien que tu ailles à ma place accom­plir ce pèlerinage. 

Le cadet répondit : 

— Père, dans une quin­zaine va venir le beau temps : il fau­dra sar­cler, tailler les vignes, pio­cher. Notre aîné doit conduire le bétail en mon­tagne ; le plus jeune est un enfant… Qui com­man­de­ra les ouvriers, si je m’en vais à Rome traî­ner la jambe sur les che­mins ?… Père, man­gez, dor­mez et lais­sez-nous un peu tranquilles. 

Le len­de­main matin, le bon maître Archim­baud appe­la le plus jeune : 

— Esprit, mon enfant, approche, dit-il. J’ai pro­mis au bon Dieu de faire un pèle­ri­nage à Rome… Mais je suis vieux comme les pierres, et je ne puis aller en guerre !… Je t’en­ver­rais bien à ma place, cher enfant, mais tu es un peu jeune, tu ne sais pas le che­min, c’est bien loin, mon Dieu ! et, si tu venais à t’égarer…

Auteur : Maldan, Juliette | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 16 minutes
Jean Bosco apprend le catéchisme sur les genoux de Maman Marguerite

DON BOSCO

C’est au petit hameau de « Bec­chi », près de , que naquit, le 16 août 1815, Jean Bos­co qui devait être le grand bien­fai­teur des enfants aban­don­nés. Il fut bap­ti­sé dès le len­de­main de sa nais­sance. Ses parents, pauvres ouvriers, étaient d’ex­cel­lents chré­tiens. Le père, Fran­çois Bos­co, tra­vaillait de toute la force de ses bras pour nour­rir sa famille. Il pos­sé­dait une mai­son­nette et quelques bouts de champs. C’é­tait assez pour vivre heu­reux avec sa femme, Mar­gue­rite, pieuse et labo­rieuse comme lui, et ses trois petits garçons. 

Ce bon­heur ne dura guère. Jean attei­gnait à peine ses deux ans quand son père mou­rut brus­que­ment. La dou­leur de Mar­gue­rite Bos­co fut extrême. Char­gée de sa belle-mère infirme et de ses trois petits, elle par­vint à force de tra­vail, de , de peine, à assu­rer le pain de la famille. 

Cette simple pay­sanne s’oc­cu­pait admi­ra­ble­ment de ses enfants ; non seule­ment de leur corps, mais sur­tout de leur âme. Son plus grand désir était de faire de ses fils de bons chré­tiens. Elle les éle­vait dans la pen­sée de Dieu et ne man­quait pas une occa­sion de leur rap­pe­ler sa sainte pré­sence. « Dieu nous voit, Mes petits », disait-elle. « Dieu nous voit. Moi, je puis être absente, lui est tou­jours là. » 

Chaque matin, age­nouillée avec ses enfants devant le Cru­ci­fix, elle deman­dait à Dieu le pain quotidien. 

Au soir des rudes jour­nées d’é­té, en se repo­sant au seuil de la mai­son, elle mon­trait à ses fils les mon­tagnes loin­taines, illu­mi­nées par le soleil cou­chant. « Que de mer­veilles Dieu a faites pour nous, mes enfants ! » Et quand les étoiles s’al­lu­maient dans le ciel assom­bri : « Tous ces astres mer­veilleux, c’est Dieu qui les a mis là. Si le fir­ma­ment est si beau, que sera-ce du Paradis ? » 

La grêle venait-elle rava­ger l’humble vigne des Bos­co : « Cour­bons la tête, mes enfants. Le bon Dieu nous les avait don­nées, ces belles grappes, le bon Dieu nous les reprend. Il est le Maître. Pour nous, c’est une épreuve ; pour les méchants, c’est une punition ». 

L’hi­ver, quand la pluie gla­cée bat­tait les vitres et que la famille se ser­rait autour de la che­mi­née où flam­bait une grosse bûche : « Mes petits, comme nous devons aimer le bon Dieu qui nous four­nit le néces­saire ! Il est vrai­ment notre Père, notre Père qui est aux cieux ». 

Elle ne ces­sait de recom­man­der à ses enfants la dévo­tion à Marie, en qui elle met­tait une confiance sans bornes. 

Mar­gue­rite Bos­co pou­vait réci­ter par cœur son , l’His­toire sainte, la vie de Notre-Sei­gneur, et, tout en s’oc­cu­pant à son ménage, elle cher­chait à ensei­gner ce qu’elle savait à ses fils. 

Pour eux, ce qu’elle crai­gnait comme la peste, c’é­taient les mau­vais compagnons. 

Jamais ses enfants ne s’é­loi­gnaient de la mai­son sans sa permission. 

« Maman, maman, pou­vons-nous aller jouer avec un tel qui nous appelle ? 

— Oui, mes petits. » 

Ils cou­raient alors tout joyeux. Si c’é­tait « non », l’i­dée ne leur venait même pas de désobéir. 

Mar­gue­rite ne gâtait pas ses enfants, ne pas­sait aucun caprice, et quand elle don­nait un ordre, elle vou­lait être obéie. Jean aimait si ten­dre­ment sa chère maman que la crainte de la pei­ner suf­fi­sait à le rendre sage. 

Elle tenait aus­si à faire de ses fils des tra­vailleurs. Il fal­lait se lever de bonne heure et s’oc­cu­per selon ses forces. Très jeune, Jean sut cou­per du bois, pui­ser de l’eau, éplu­cher les légumes, balayer la chambre. 

Le jeu­di, avant de por­ter au mar­ché son beurre et ses œufs, la maman dis­tri­buait une tâche à ses gar­çons. Au retour, si elle jugeait le tra­vail bien fait, elle tirait de son panier un mor­ceau de brioche pour chacun. 

On était pauvre chez les Bos­co, et pour­tant les mal­heu­reux qui frap­paient à la porte trou­vaient tou­jours un bon accueil et une assiette de soupe chaude. Jean apprit ain­si la . Son cœur, du reste, était excellent et très sensible. 

Ce petit gar­çon à la démarche vive, à la tête ronde et fri­sée, par­lait peu et obser­vait beau­coup. Son ima­gi­na­tion ne res­tait jamais en repos. Intel­li­gent et sérieux, ardent et volon­taire, on pou­vait se deman­der pour quelle tâche Dieu le douait si remarquablement.

Songe de Don Bosco : Les loups changés en agneaux