Pénitence
Fred jeta un coup d’œil à la pendulette du tableau de bord. La grande aiguille allait passer sur la petite, à la verticale.
— Minuit, dans un instant ! Je ne suis pas en avance !
Le jeune homme appuya sur l’accélérateur, la voiture fit un bond en avant, cependant que les aiguilles dansaient follement sur le cadran du compteur.
140 kilomètres/heure, 142… 145…
Il n’y eut pas de 146… Seulement une embardée terrible, un choc, une masse inerte sur la route.
Les freins avaient à peine fini de crisser que, de nouveau, Fred écrasait du pied la pédale qui à nouveau le propulsait à toute vitesse.
Un instant, il avait senti avec force qu’il lui fallait s’arrêter ; que rien d’autre n’était à faire ; que celui qu’il avait renversé — un vieillard autant qu’il avait pu en juger — n’était peut-être que blessé ; qu’un secours immédiat pourrait en ce cas le sauver…
Mais Fred, en même temps que la silhouette du passant accidenté, avait maintenant devant l’esprit cet autre drame qui l’attendait, lui :
— J’ai eu tort d’emprunter la voiture de grand-mère sans son autorisation. Elle devait renouveler son assurance ces jours-ci. L’avait-elle fait ? Ou bien, ne sortait-elle plus parce qu’elle n’était pas en règle ? S’il en est ainsi, je suis perdu.
140… 145… 146…
Fred n’ira jamais assez vite, pense-t-il, pour fuir cette terrible responsabilité qu’il laisse derrière lui, sur la Nationale où gît un homme blessé, ensanglanté.
149 kilomètres/heure !…
Non,