Étiquette : <span>Conversion</span>

Auteur : Cocagne, Jehan de | Ouvrage : Lectures Catholiques .

Temps de lec­ture : 5 minutes

Yvonne… c’est ma filleule, une ado­rable enfant de huit ans, quelque chose de déli­cat, de fluet, de doux, de gra­cieux comme une fleur… Et avec ça, de grands yeux pro­fonds et bleus comme un ciel d’é­té, et une che­ve­lure d’or soyeuse et souple… Tout le por­trait de sa mère, sa pauvre mère qui dort de son der­nier som­meil depuis deux ans, là-bas, clans le grand tom­beau de famille. C’est pour cela que sou­vent, très sou­vent, le regard de la famille se mouille et s’at­triste, au sou­ve­nir de celle qui n’est plus. Elle a bien un autre sujet de tris­tesse, ma filleule, c’est que son papa, qui est un méde­cin très riche et très expé­ri­men­té, ne fait jamais sa prière et jamais ne va à la messe…


La chambre d’Y­vonne, une veille de  : un vrai nid blanc et rose, œuvre der­nière de « pauvre maman. »

Ma filleule est en train de se désha­biller, avec l’aide de Miette, sa nourrice. 

— Alors, dis, Nou­nou ? tu crois qu’il pour­ra lire mon écri­ture, le petit Jésus ? 

— Cer­tai­ne­ment, mon ange. Le petit Jésus est très savant. 

— Plus savant que sœur Bri­gitte ? dis, Nounou ? 

— Oui, ma petite, plus savant que sœur Bri­gitte : le petit Jésus sait tout … tout. 

— Il sait donc que papa ne fait pas sa prière… ne va pas à la messe ? 

— Hélas ! oui, mignonne, et cela lui fait beau­coup de la peine. 

— Et tu crois qu’il m’ac­cor­de­ra ce que je lui demande ? 

Auteur : Winowska, Maria | Ouvrage : La belle aventure de Catherine - La médaille miraculeuse .

Temps de lec­ture : 12 minutes

Au milieu de ses rudes besognes, sœur Cathe­rine, exulte de joie. Que lui importe-t-il de demeu­rer incon­nue si Notre Dame est glo­ri­fiée, si la médaille se pro­page, por­teuse de grâces ? Si des pécheurs se conver­tissent, si des malades gué­rissent, si des mal­heu­reux sont conso­lés ? Elle presse sur son cœur le pré­cieux insigne comme un sceau ardent. Sa cha­ri­té déborde les clô­tures, avec ses « car­touches » elle pénètre jus­qu’aux confins du monde. 

Pour ceux qui ne croient pas — elle croit.
Pour ceux qui n’es­pèrent pas — elle espère.
Pour ceux qui n’aiment pas — elle aime.
Pour ceux qui ne prient pas — elle prie. 

L’es­sor de la médaille ne serait pas tel­le­ment écla­tant si une humble Fille de Cha­ri­té ne pas­sait ses jours et par­fois ses nuits à l’en­ve­lop­per de sacri­fices et de prières ! Le sou­ve­nir des rayons éteints s’est gra­vé dans sa mémoire : puis­qu’ils signi­fient des grâces « que per­sonne ne demande », c’est à elle de les récla­mer, le ciel appar­tient aux violents. 

À Enghien comme à la rue du Bac, les exploits de la « Médaille qui gué­rit » défraient toutes les récréations. 

Auteur : LeMay, Léon Pamphile | Ouvrage : Autres textes .

Temps de lec­ture : 19 minutes

Conte de Noël

Il fai­sait froid. La neige des che­mins criait sous l’a­cier des traî­neaux. Les prés et les col­lines res­plen­dis­saient dans leurs blanches dra­pe­ries, et les sapins sombres, char­gés de brillants flo­cons, incli­naient vers le sol leurs rameaux pesants.

C’é­tait la veille de . La terre allait tres­saillir et les anges allaient chan­ter, comme il y a dix-neuf siècles.

« Glo­ria in excel­sis Deo. »

Mais seuls les petits et les humbles, comme alors peut-être, pour­raient entendre le céleste cantique.

Il semble qu’à cette heure solen­nelle un doux effluve d’a­mour se répand dans les airs. Les fronts se relèvent, les cou­rages se raf­fer­missent, l’es­pé­rance rafraî­chit, comme une ondée bien­fai­sante, les cœurs meur­tris. Et pour­tant il se trouve encore des âmes qui souffrent et des lits de dou­leur où la vie agonise.

Là-bas, dans la mai­son de madame Ver­champ, une veuve très esti­mée, dor­mait, sur un lit tout blanc, une jeune fille . Elle dor­mait, et un songe agréable la visi­tait sans doute en ce moment, car mal­gré sa souf­france, elle sou­riait. Elle revi­vait peut-être un beau jour per­du, comme cela arrive par­fois dans le som­meil. Elle était amai­grie, et la pâleur de ses joues fai­sait res­sor­tir son grand œil noir plein de tris­tesse. Près d’elle, sa mère pleurait.

Sa mère pleu­rait, et en essuyant ses larmes du coin de son tablier, elle pensait :

Pour­quoi l’a-t-elle tant aimée ?…

Sou­dain la porte s’ou­vrit. Elle vit entrer deux hommes. Elle ne les recon­nut pas d’a­bord, à cause des grandes capotes qui les enve­lop­paient, et des col­lets de four­rure qui leur mon­taient jus­qu’aux yeux. Elle tres­saillit cepen­dant, et s’a­van­ça au devant d’eux.

* * *

Trois ans aupa­ra­vant, un soir de la fenai­son, Mariette, la jeune malade d’au­jourd’­hui, reve­nait au fenil sur un char­riot de foin. Enfon­cée dans le trèfle et le mil comme dans un nid, elle se lais­sait ber­cer au caho­tage des roues, et chan­tait, de sa voix douce et quelque peu plain­tive, une chan­son­nette gra­cieuse dans sa forme et sage dans son enseignement :

La fleur de la charmille,
La fleur de la famille,
Ont un des­tin commun,
Lorsque les mains les cueillent,
L’une et l’autre s’effeuillent
Et perdent leur parfum…

Petite rose blanche,
Reste donc à la branche
Dont la sève nourrit,
Petite fille chère,
Reste donc à ta mère
Dont l’a­mour te sourit.

Octave Des­ruis­seaux qui tra­ver­sait le clos voi­sin, la faux sur l’é­paule, l’en­ten­dit et fut char­mé. Il ne la connais­sait point. Il devi­na qu’elle était belle et se prit à l’ai­mer, sans se deman­der s’il ne cou­rait pas au désen­chan­te­ment. Il était jeune, d’hu­meur agréable, bien décou­plé, labo­rieux, avec cela il serait bien mal­adroit s’il ne réus­sis­sait pas à décro­cher un bon petit cœur. Cela ne tient pas tant après tout.

Il était de Sainte-Croix. Vic­tor Pou­drier l’a­vait fait venir pour les foins et les récoltes, car il pas­sait pour vaillant. Sa faux allon­geait de fiers andains, et son « jave­lier » cou­chait d’é­paisses javelles, depuis les heures fraîches du matin jus­qu’aux ombres de la soirée.

Un dimanche, la jeu­nesse se réunit, après le repas du soir, chez Mar­ce­lin Thi­bou­tot, le for­ge­ron, pas loin de la côte de sable. Octave et Mariette se virent et s’ai­mèrent. Ils gar­dèrent leur secret cependant.

Le len­de­main, Mariette alla au champ pour faner le foin nou­veau. Le soleil rayon­nait et don­nait aux clô­tures grises une appa­rence de cadre lumi­neux. Un large cha­peau de paille pro­té­geait contre les rayons trop chauds, sa jolie figure. Car elle était jolie, Mariette. Un mince fichu de mous­se­line se tor­dait négli­gem­ment sur sa gorge un peu bru­nie. Elle tenait une fourche de saule et jetait dans l’air pur les bribes per­lées de la der­nière chan­son du vil­lage. De temps à autre, ses regards curieux se pro­me­naient sur le pré voi­sin. Une pen­sée douce l’ob­sé­dait. Elle éprou­vait les délices du réveil de l’a­mour, et trou­vait à aimer un bon­heur inexprimable.

Mariette rencontre son fiancéTout à coup elle aper­çut un jeune fau­cheur cour­bé sur la prai­rie, et elle sen­tit son cœur se ser­rer et sa joue rou­gir. C’é­tait lui. Quand elle fut plus près, elle vit, comme un ser­pent de feu, la faux lui­sante s’en­fon­cer dans l’herbe, et elle enten­dit, comme un chant d’a­mour, le cris­se­ment de l’a­cier qui mon­tait du clos, par inter­valles courts et mesurés.

Le fau­cheur ne la devi­na point.

Un peu plus tard, il sus­pen­dit son tra­vail et mar­cha vers l’en­droit où il avait dépo­sé sa pierre à aigui­ser. Plu­sieurs jeunes filles fanaient dans les alen­tours, en criant des choses gaies, et en jetant des éclats de rire. Il cher­cha à les recon­naître, mais il n’y par­vint guère, à cause des larges bords de leurs cha­peaux. Il se tour­na vers le clos de la veuve Ver­champ. Mariette parais­sait absor­bée dans sa tâche. Il aurait bien vou­lu qu’elle regar­dât de son côte. Il prit la pierre qui trem­pait dans un vase plein d’eau, et leva sa faux devant lui. La lame décri­vait une courbe étin­ce­lante comme un nimbe vis-à-vis son front trem­pé de sueurs. La pierre mor­dit l’a­cier. D’autres fau­cheurs aus­si affi­lèrent leurs outils, et ce fut comme un clair reten­tis­se­ment de cym­bales dans l’air sonore. Les jeunes filles levèrent la tête, et les fourches res­tèrent piquées dans le foin par­fu­mé. Les cigales, cachées dans le feuillage des grands arbres, jetèrent comme des fusées leurs trilles vibrants. Des oiseaux, entraî­nés par le plai­sir, se mirent à vol­ti­ger d’une aile folle, en épar­pillant de joyeuses notes… Et des rires s’é­gre­naient de toute part. Jamais fête plus belle n’a­vait fait tres­saillir ces champs tant de fois moissonnés.

| Ouvrage : Autres textes .

Temps de lec­ture : 8 minutes

Conte de Noël

Dans son corps dou­lou­reux, l’âme était triste et meurtrie.

Plus que du froid de la nuit, plus que des dou­leurs dans les jambes d’a­voir tant mar­ché à tra­vers la ville, elle souf­frait d’un mal sourd et profond.

En cette veille de , l’âme en peine avan­çait par les rues, cher­chant à igno­rer la cause de sa souffrance.

Confession de Noël

Il y avait si long­temps qu’elle s’é­tait éta­blie dans l’in­dif­fé­rence ! Quand était-elle donc allée s’a­ge­nouiller la der­nière fois dans un confes­sion­nal pour rece­voir le par­don de ses fautes ? Elle ne s’en sou­ve­nait plus, ni de la der­nière fois qu’elle avait prié…

Ne croyez pas que c’é­tait l’âme d’un grand cri­mi­nel, non, c’é­tait une per­sonne ordi­naire, qui menait sa petite vie, juste oublieuse de la loi de Dieu qu’elle avait sub­sti­tuée par son bon plai­sir, par son égoïsme et par toutes sortes de bas­sesses qui fai­saient comme un bruit de feuilles mortes pous­sées par les tour­billons d’un vent mauvais.

— Était-ce un homme, était-ce une femme, me deman­de­rez-vous. Peu importe.

C’é­tait une âme plon­gée dans la tris­tesse, fruit inévi­table et amer que pro­duit la conscience en voyant, sans même vou­loir se l’a­vouer, tout ce qu’elle a per­du en reje­tant l’a­mi­tié de Dieu.

Il y en a tant de ces âmes, endur­cies par l’ha­bi­tude du scep­ti­cisme, dans les villes de notre pauvre France qui rede­vient païenne.

Toute la jour­née, elle s’é­tait agi­tée pour réunir les der­niers pré­pa­ra­tifs de Noël. Car l’âme, mal­gré l’a­ban­don de sa vie spi­ri­tuelle, se sou­ve­nait encore de la joie et de l’in­no­cence de ses pre­miers Noëls.

Elle avait soif d’un bon­heur qui sem­blait lui échap­per de plus en plus et, dans la mesure du pos­sible, elle essayait de recréer autour d’elle l’am­biance des Noëls de son enfance.

Elle était assez douée pour cela et réus­sis­sait mal­gré tout à ras­sem­bler encore quelques amis et quelques fami­liers autour d’un sapin bien déco­ré, d’une petite crèche et d’un repas de fête qui n’é­tait pas trop mélancolique.

Mal­gré les années écou­lées, l’âme immor­telle gar­dait l’empreinte de l’en­fant qu’elle avait été.

D’ailleurs, si vous prê­tez un peu d’at­ten­tion aux âmes des adultes, vous ver­rez qu’en elles l’en­fant n’est jamais très loin, même si les péchés les ont obscurcies.

Cet enfant fini­ra-t-il un jour par se réveiller ?

Auteur : Schnebelin, Marguerite | Ouvrage : 90 Histoires pour les catéchistes II .

Temps de lec­ture : 6 minutesSor­tant de l’u­sine où elle a tra­vaillé tout le jour, une femme aux traits amai­gris s’en­gage dans l’é­troit che­min qui mène hors de la ville jus­qu’à une « grotte de  ». Voi­là huit jours qu’elle fait ce tra­jet. L’in­quié­tude et la peine courbent ses épaules lasses. Au logis, son mari est cou­ché depuis six mois, souf­frant cruel­le­ment. De son tra­vail à elle dépend l’exis­tence de tous. Mais la mal­heu­reuse, épui­sée de sur­me­nage et de pri­va­tions, voit venir l’heure où la misère fera suite à la gêne au foyer désolé.

À peu de dis­tance se dresse le rocher où rayonne la blanche sta­tue de la . Celle qui monte vers ce but s’ar­rête dans le sen­tier, indé­cise, l’âme angoissée.

— Qu’est-ce que je fais !… Moi, pro­tes­tante, venir la prier ! Qu’est-ce que j’es­père ! De quel droit récla­mer sa pitié ?…

Mais une voix s’é­lève au fond de l’âme trou­blée, une voix qui ras­sure et invite à l’es­poir « Ton mari et tes enfants sont catho­liques et c’est pour eux que tu viens. » « Et puis, mur­mure la pauvre femme, j’ai fait ce que je devais : j’ai res­pec­té les croyances du père, j’ai veillé à ce que les petits connaissent et pra­tiquent leurs devoirs… »