Étiquette : <span>9 août</span>

Auteur : Maldan, Juliette | Ouvrage : Petites Vies Illustrées pour enfants .

Temps de lec­ture : 13 minutes


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Gorde naît et gran­dit à Césa­rée de Cap­pa­doce. Il entre dans l’ar­mée où il fait rapi­de­ment son che­min. De haute taille, de non moins haute valeur mili­taire, il acquiert une grande répu­ta­tion par­mi les troupes. 

Le voi­ci donc bien par­ti pour la gloire, quand Dio­clé­tien ouvre sa per­sé­cu­tion contre les chré­tiens. Leurs mai­sons sont pillées, les fidèles cherchent refuge dans les déserts et les forêts. Ceux qui sont pris sont jetés en prison. 

Pour Gorde, il ne peut être ques­tion de se cacher : il est à son poste. Mais com­ment res­ter sous les ordres de celui qui per­sé­cute ses frères ? Mal­gré son goût pour la vie mili­taire, mal­gré le brillant ave­nir qui s’ouvre devant lui, il démis­sionne : « Je pré­fère, dit-il, vivre au désert avec les bêtes fauves, qu’a­vec ces ido­lâtres. »

Sa démis­sion accep­tée, il quitte l’ar­mée, non sans regret et, comme tant d’autres, s’en­fonce dans le désert. Son inten­tion est de s’y for­ti­fier dans la prière et la péni­tence puis de reve­nir ensuite défendre les chré­tiens et mou­rir avec eux s’il le faut.

Saint Gorde Soldat et martyr
« Je viens te repro­cher ta cruau­té envers les chrétiens… »

Quand il se sent assez « fort de la force de Dieu », il sort de sa cachette et revient à la ville. Il a choi­si pour cela un jour où la popu­la­tion se rue vers le cirque pour une course de chars. 

Très calme, Gorde s’a­vance au milieu de l’a­rène. « Je m’ap­pelle Gor­dius, déclare-t-il très haut. J’ai quit­té l’ar­mée depuis que l’Em­pe­reur est deve­nu per­sé­cu­teur et enne­mi du vrai Dieu. » Et, s’a­dres­sant au Gou­ver­neur : « Je viens te repro­cher ta cruau­té envers les chré­tiens. J’ai choi­si le moment de ces fêtes pour pro­tes­ter à la face du monde contre l’in­jus­tice et la barbarie. » 

Stu­peur, puis tol­lé géné­ral. Fureur du Gou­ver­neur : « Bour­reaux ! des fouets, des che­va­lets, des haches, des croix, des fauves ! Un homme aus­si exé­crable mérite plu­sieurs fois la mort !

— Oui, réplique Gorde ; on me fera tort si on ne me donne pas plu­sieurs fois la mort. » Et il entonne un psaume.

Les bour­reaux s’ap­prêtent et comme ils tardent : « Qu’at­ten­dez-vous ? leur demande le . N’en­viez-vous pas mon bon­heur et ma récompense ? 

— Voyons, quelle folie ! coupe le Gou­ver­neur, volon­tai­re­ment radou­ci. Plus sûres que les récom­penses que tu espères, tu as sous la main les hon­neurs des Césars. Rentre dans l’ar­mée, adore nos dieux ; c’est pour toi la gloire immédiate. 

— Quoi ! pro­teste Gorde, tu penses que ces misé­rables gran­deurs d’i­ci bas : grades, cita­tions, déco­ra­tions, peuvent me déta­cher du ciel ? Voi­là ce qui serait folie ! Rien sur la terre, rien, entends-tu ? ne pour­rait me dédom­ma­ger de la perte de Dieu. » 

Fou de colère, le juge tire son épée et ordonne de pas­ser à l’exécution. 

Gorde est aus­si­tôt conduit au sup­plice, au milieu d’une foule déli­rante. Les païens voci­fèrent ; les membres de sa famille, encore païens, le sup­plient d’a­voir pitié d’eux et de lui. Qu’il ne renonce pas au chris­tia­nisme puis­qu’il y tient, mais qu’il fasse sem­blant.

« Jamais ! ce serait déloyal. Je tiens ma langue de la bon­té de Dieu et je l’emploierais à men­tir, à le renier devant les hommes ? J’aime mieux mou­rir mille fois ! Mon dra­peau, c’est la croix. Un sol­dat tra­hi­rait son dra­peau par crainte de la mort ? Allons-donc ! »

Ce disant, Gorde trace sur sa poi­trine le signe de la croix et, d’un pas alerte, suit les bour­reaux. Il rayonne de joie, il est gai comme au matin d’une pro­mo­tion. Ne va-t-il pas être pro­mu au rang de témoin du Christ ? Ne va-t-il pas prendre place dans la glo­rieuse armée des martyrs ?

Saint Gorde, obte­nez-nous des cœurs vaillants, des âmes vaillantes ! Ne sommes-nous pas aus­si, par notre confir­ma­tion, sol­dats du Christ ?

Romain
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Pour un romain, voi­ci un sol­dat bien nom­mé. Il assiste à l’in­ter­ro­ga­toire du diacre Laurent et les réponses de celui-ci lui font une très grande impres­sion. C’est bien autre chose quand il constate le cou­rage du diacre au milieu des sup­plices ; et c’est enfin le comble, lorsque Laurent se trou­vant demi-mort sous les coups de fouets — fouets armés de pointes de fer — Romain voit un ange essuyer le visage du , étan­cher le sang de ses plaies. Le sol­dat païen en est tout inter­dit. La grâce passe, la lumière se fait ; Romain y cor­res­pond. Il s’ap­proche de Laurent, lui dit ce qu’il voit, lui demande ses prières.