Étiquette : <span>8 décembre</span>

Auteur : Bastin, R., O.M.I | Ouvrage : La simple histoire de la Vierge Marie .

Temps de lec­ture : 19 minutes

Histoire pour les petits

La Vierge Marie racontée aux Jeannettes et LouveteauxL était une fois, dans la capi­tale de la Pales­tine, deux vieux époux, cas­sés par l’âge et le travail.

Ils habi­taient une petite mai­son blanche et pro­prette, au bout de la grand’­rue de Jéru­sa­lem, juste devant le Temple. Le soir, lors­qu’il fai­sait beau, ils aimaient s’as­seoir sur le pas de leur porte et regar­der, sans rien dire, le soleil tout rouge entrer dans son lit de nuages der­rière les tours et les cou­poles du monument.

Mais ils n’é­taient pas heu­reux, car ils n’a­vaient pas d’en­fant et se trou­vaient bien seuls.

Un soir, comme ils se sen­taient plus tristes que jamais, Joa­chim prit la main d’Anne, la ser­ra très fort et lui dit :

« Puisque c’est ain­si et que nous deve­nons vrai­ment très âgés, nous allons faire encore un immense sacrifice…

— Quel sacri­fice encore ? dit Anne, sen­tant un petit pin­ce­ment du côté de son cœur.

— Eh bien ! dit Joa­chim, tout bas et tout len­te­ment, nous allons nous séparer !

— Quoi ! pleu­ra la pauvre Anne.

— Oui, nous allons vivre pen­dant quelque temps cha­cun très loin l’un de l’autre. Nous offri­rons ain­si au Bon Dieu ce qui nous coûte le plus parce que c’est cer­tai­ne­ment cela qui sera le plus dur ».

Ils s’ai­maient tel­le­ment, ces deux bons vieux, que la pen­sée de n’être plus ensemble leur fen­dait le cœur.

Joa­chim, qui savait très bien ce qu’il vou­lait, ne se lais­sa pas atten­drir par les larmes d’Anne ; il pré­pa­ra son petit balu­chon (en Orient, il faut bien moins de bagages que par ici pour voya­ger) et, le len­de­main matin, après avoir embras­sé sa femme très fort, s’en alla seul sur la grand’­route blanche. Anne pleu­rait tel­le­ment qu’elle ne put regar­der long­temps ; et qua­si toute la jour­née, elle demeu­ra, la tête dans le coude, à san­glo­ter silencieusement.

Saint Anne et Saint Joachim les parents de Marie

En ce temps-là, la Pales­tine pos­sé­dait de vastes régions cou­vertes d’une herbe drue et sèche, dont se nour­ris­saient d’in­nom­brables trou­peaux de mou­tons. Comme il eût été dan­ge­reux de les lais­ser ain­si se pro­me­ner seuls, des ber­gers les accom­pa­gnaient. Vêtus d’une houp­pe­lande brune ou ver­dâtre, appuyés sur un long bâton ter­mi­né par une petite bêche et qu’on nomme une hou­lette, ils res­taient de longs mois loin de chez eux, pas­sant la jour­née en plein air à sur­veiller leurs trou­peaux. Le soir, assis en cercle autour d’un feu, ils se racon­taient des his­toires sous le beau ciel clair d’O­rient. C’est eux que Joa­chim alla rejoindre lors­qu’il eut quit­té sa femme et sa blanche petite mai­son. Les ber­gers étaient de braves gens, pas curieux. Ils le reçurent sans rien lui deman­der. Alors, en gar­dant les mou­tons, Joa­chim pen­sait au Bon Dieu, à Anne, sa femme, au petit enfant qu’ils vou­draient tant avoir ; et ses jour­nées et par­fois même ses nuits n’é­taient qu’une longue prière.

Saint Joachim priant Dieu et gardant son troupeauQuand on prie le Bon Dieu avec per­sé­vé­rance, on finit tou­jours par être exau­cé. Il faut conti­nuer pen­dant long­temps. Puis, ne pas avoir peur d’un sacri­fice pour accom­pa­gner cette prière. Anne et Joa­chim en avaient déjà fait beau­coup : jamais de plus grand que de se quit­ter. Parce qu’ils furent vrai­ment géné­reux, le Bon Dieu se mon­tra, à son tour, par­fai­te­ment bon.

Un soir que Joa­chim, assis sur un rocher, regar­dait ses mou­tons se perdre dou­ce­ment dans la brume, il aper­çut une lumière flot­tant à l’ho­ri­zon. Intri­gué, il scru­ta ce point lumi­neux, ten­dant en avant son visage ridé. La lumière parais­sait appro­cher, briller davan­tage. Joa­chim se mit debout pour mieux obser­ver ; mais alors qu’il se rele­vait péni­ble­ment, tant ses membres étaient gourds et tor­dus par les rhu­ma­tismes, il dut quit­ter des yeux, un ins­tant, l’é­trange clar­té. Lors­qu’il se fut dres­sé, il fut stu­pé­fait de voir un ange : un bel ange dont les ailes fris­son­naient encore avec un bruit si doux, si léger et si frais que Joa­chim crut le prin­temps devant lui. Ahu­ri, il s’ap­puya de tout son poids sur sa hou­lette et ouvrit bien grande sa vieille bouche éden­tée, mais il n’eut pas le temps de poser des ques­tions. L’ange par­lait, et sa voix était déli­cieuse comme une musique de fête :

Histoire pour veillée scout : la naissance de Marie« Joa­chim, tu vas être exau­cé ! — (Ce n’est jamais pos­sible ! se dit Joa­chim). — Le Bon Dieu a été tou­ché de tes prières, de tes sacri­fices. Il a été content de voir que tu ne déses­pé­rais pas, qu’au contraire tu conti­nuais de Le ser­vir de ton mieux. Tu auras bien­tôt une petite fille : une char­mante petite fille que tu appel­le­ras . Elle sera si exquise que, dès qu’elle pour­ra mar­cher, tu la confie­ras aux prêtres du Temple afin qu’ils l’offrent au Bon Dieu.

« Tu avais long­temps espé­ré. Tu avais long­temps atten­du. Ta récom­pense est magni­fique, car tu vas pos­sé­der le plus beau cadeau que jamais Dieu ait fait aux hommes.

« Rentre chez toi. La vieille Anne s’in­quiète de ta longue absence et part à ta rencontre.

« Pour te prou­ver la véra­ci­té de ma pro­messe, je t’an­nonce que tu retrou­ve­ras ta femme auprès de la fon­taine, à l’en­trée de la ville ».

Joa­chim n’en croyait ni ses yeux, ni ses oreilles. Ses vieilles mains trem­blantes agi­taient son bâton, et l’ange avait dis­pa­ru depuis long­temps déjà qu’il demeu­rait encore sur place, abasourdi.

Lors­qu’il revint à lui, il vou­lut immé­dia­te­ment se mettre en route ; il ramas­sait son sac et ses pro­vi­sions éparses, quand il se sou­vint des mou­tons. La nuit était venue. On dis­tin­guait à peine, sur le pacage, la masse grise de tous ces dos, ser­rés les uns contre les autres, d’où mon­taient de tristes bêlements.

Auteur : Lemaître, Jules | Ouvrage : Autres textes .

Temps de lec­ture : 19 minutes

L'imagier - Titre et Christ

C’é­tait un beau couvent bâti sur un haut pla­teau. Au-des­sus la mon­tagne cou­verte de sapins. Les toits poin­tus et les tou­relles de la sainte mai­son se décou­paient sur ce fond sombre. Au-des­sous une large val­lée, des vignes, des champs de blé, des prai­ries bor­dées de peu­pliers, et un vil­lage le long d’une molle rivière.

Les moines de ce couvent étaient à la fois de bons ser­vi­teurs de Dieu, de grands savants et d’ex­cel­lents labou­reurs. Le jour, leurs robes blanches appa­rais­saient çà et là dans la cam­pagne, pen­chées sur les tra­vaux de la terre ; et, le soir, on les voyait pas­ser de pilier en pilier, sous les arceaux du large cloître, avec un mur­mure de conver­sa­tions ou de prières.

Il y avait par­mi eux un jeune reli­gieux, du nom de frère Nor­bert, qui était un très bon ima­gier. Dans le bois ou dans la pierre, ou bien avec l’ar­gile qu’il pei­gnait de vives cou­leurs, il savait façon­ner de si belles sta­tues de Jésus, de et des saints, que les prêtres et les per­sonnes pieuses venaient les voir de très loin et les ache­taient très cher, pour en faire l’or­ne­ment de leurs églises ou de leurs oratoires.

Frère Nor­bert était fort pieux. Il avait sur­tout pour la sainte Vierge une dévo­tion extra­or­di­naire ; et sou­vent il res­tait des heures devant l’au­tel de l’Im­ma­cu­lée, immo­bile et pros­ter­né sous son capu­chon, les plis de sa robe épan­dus der­rière lui sur les dalles.

Frère Nor­bert était par­fois rêveur. Le soir sur­tout, en regar­dant, du haut de la ter­rasse, le soleil s’é­teindre à l’ho­ri­zon, il deve­nait inquiet et triste. Il aurait vou­lu s’en aller loin, voir d’autres coins du monde que celui où il vivait.

Le prieur lui disait alors :

– Que pou­vez-vous voir ailleurs que vous ne voyiez où vous êtes ! Voi­là le ciel, la terre, les élé­ments : or, c’est d’eux que tout est fait… Quand vous ver­riez toutes les choses à la fois, que serait-ce qu’une