∼∼ II ∼∼
Huit jours durant, le branlebas est à son comble.
Enfin, un beau matin, par un soleil splendide, la famille s’installe au complet sur le navire. Le port offre le tableau le plus pittoresque qui soit, les groupes de pèlerins étant aussi divers que vivants.
Ici, la tache claire des bérets blancs, portés par un groupe de jeunes filles ; là, un ensemble de scouts, dont on devine les gais visages sous les chapeaux kaki. Ce sont des Routiers ; au milieu d’eux, les enfants ont vite repéré la silhouette connue d’un de leurs plus sympathiques aumôniers.
Jean chuchote : Le Père X…
— Va lui dire bonjour.
Cette première rencontre devait donner au voyage un imprévu et un intérêt que nul hier n’eût soupçonnés.
Tout de suite on s’installe non loin les uns des autres et, pour apprendre cette Histoire de l’Église que l’on devinait difficile, rien de plus simple pour le moment. Il n’y a qu’à écouter, car le Père, entouré de sa troupe, déclare :
— Allons, Henri, prenez la carte. Ici, à droite de la côte, Damas ; qu’est-ce que cela nous rappelle ?
L’interpellé, un jeune aux yeux clairs, à la physionomie intelligente, répond : Quel dommage de n’avoir pu aller jusque-là, Père. Il paraît que c’est tellement joli, Damas, avec ses maisons silencieuses et closes, toute blanche au milieu d’un immense cercle de verdure. La ville délicieuse, que l’on appelle ici : la perle de l’Orient ! Oui, c’eût été bon de la visiter, meilleur encore de parcourir cette route sur laquelle Saul fut terrassé.
— Allons ! au lieu d’aviver nos regrets, redites-nous donc un peu, pour ces petits qui nous écoutent, les souvenirs qui s’attachent à Damas.
— Il nous faut remonter pour cela, Père, au martyre de saint Étienne, ce premier diacre que les Apôtres s’étaient adjoints à Jérusalem, pour les aider dans leur mission ; car les conversions se multipliaient et ils ne suffisaient plus à la tâche. Le courage d’Étienne, son ardeur à prêcher l’Évangile, lui avaient mérité l’honneur d’être lapidé. Pendant son martyre, Étienne, les yeux fixés sur le Ciel ouvert à son regard ravi, priait pour ses bourreaux et pour un jeune homme qui gardait les vêtements des exécuteurs. Ce jeune homme s’appelait Saul.
Il était petit, d’une rare intelligence et d’une rare énergie. Citoyen romain, Juif de naissance, instruit, lettré, généreux, jouissant d’une vraie réputation, il mettait tous ses dons au service des persécuteurs et s’acharnait à détruire l’Église naissante. Si bien qu’il fut chargé d’aller à Damas pour y découvrir et faire arrêter les chrétiens.