Vaillance, devoir d’état
Geneviève, sa quenouille tenue nonchalamment, laissait errer son regard par delà la grande plaine de Champagne qui s’étendait au pied du château. Dieu, que c’était donc ennuyeux de filer ainsi tout le jour tandis que les armées livraient bataille à l’ennemi ! Un gros soupir, lourd de tous ses désirs, s’exhala des lèvres de Geneviève.
« Ah ! si je connaissais Jeanne, j’irais la trouver et lui demanderais de me prendre avec elle. »
Cette réflexion, prononcée à voix haute, attira sur la fillette, presque une jeune fille déjà, les regards de dame Eloïse, sa mère, qui, en face d’elle, était occupée à une broderie d’autel.
« Que feriez-vous à guerroyer avec les gens d’armes ? Vous ne savez pas monter à cheval et le premier boulet vous ferait pousser de tels cris d’effroi que vous ne sauriez rester dans la bataille. »
D’un geste orgueilleux, Geneviève a relevé la tête :
« Pourquoi alors Jeanne y reste-t-elle ?
— Jeanne, mon enfant, fut mandée par Dieu pour délivrer le royaume.
— Eh bien ! pourquoi ne le serais-je pas aussi ? »
Pourquoi pas moi ? Voilà ce qui revenait sans cesse à l’esprit de Geneviève ; et s’obstinant dans son rêve orgueilleux, elle formait des projets insensés, n’écoutant pas les sages conseils que dame Eloïse, alignant ses points de broderie, lui prodiguait.
* * *
Dans la ville pavoisée, il y a grande animation : d’immenses tapis recouvrent les dalles de la cathédrale, les portes sont tendues de velours écarlate, chacun s’affaire, pavoisant sa demeure pour faire digne accueil au Roi et à Jeanne, car