Rédemption et Grâce
Vous avez remarqué parfois, en vous promenant dans la campagne, de grands calvaires placés au carrefour des chemins. Près d’un petit village de l’Ouest de la France on pouvait voir, avant la guerre de 1939 un de ces vieux Christ plusieurs fois centenaire. Il était là, invitant les gens à prier… Mais hélas les passants ne s’en souciaient pas beaucoup ! Il n’y avait plus de prêtre dans la paroisse et c’est à peine si l’église s’ouvrait pour les baptêmes, les mariages et les enterrements. Autrefois cependant les habitants étaient pieux. C’étaient les ancêtres qui jadis avaient placé au bord de la route, comme une sentinelle, ce grand Christ de chêne.
Au moment de la Libération des soldats impies osèrent prendre pour cible ce calvaire. Le Christ, criblé de balles, était tombé au milieu des ronces. Chaque jour cependant un pieux vieillard passait devant ces débris et, navré, s’arrêtait pour faire une courte prière. Un soir, comme il revenait de la ville en compagnie de sa petite-fille, il s’approcha du buisson qui envahissait le socle. C’était pitié de voir ce Christ gisant à terre, la poitrine transpercée, les bras et les jambes brisées, la tête trouée de balles ! Alors le vieillard et l’enfant se regardèrent et, sans rien dire, se comprirent. Lui prit les bras et les jambes, elle la tête et ce qui restait de la poitrine puis, sans se faire voir des paysans travaillant à l’entour, ils allèrent déposer leur précieux fardeau au milieu des fougères, sous un gros chêne. À la tombée de la nuit ils revinrent pour transporter ces pieuses reliques chez eux. Là, personne ne les profanerait plus !